HomeA la uneECHEC DU DIALOGUE UE/BURUNDI : Ce que doit faire Bruxelles maintenant

ECHEC DU DIALOGUE UE/BURUNDI : Ce que doit faire Bruxelles maintenant


 

Depuis plusieurs mois, l’Union européenne menace Bujumbura de sanctions,  suite à la dégradation de la situation sociopolitique consécutive au coup de force constitutionnel opéré par le président Pierre Nkurunziza pour se maintenir à la tête de l’Etat, en violation des accords d’Arusha et de la loi fondamentale du Burundi. Mais avant de prononcer sa fatwa, Bruxelles a invité Bujumbura à son siège, pour l’écouter. C’est sous ces auspices que se sont ouvertes, mardi dernier, dans la capitale de l’Union, des consultations avec les autorités burundaises pour évaluer leurs propositions visant à remédier aux multiples violations des droits de l’Homme et des principes démocratiques dont elles sont accusées. Mais après une journée de huis clos, le mémoire en défense du pouvoir burundais n’a vraisemblablement  pas convaincu son partenaire à renoncer à mettre ses menaces  à exécution. Pire, Bruxelles ne perçoit dans ses propositions, aucune volonté de s’engager le plus vite possible sur la voie d’un dialogue « sincère et inclusif » réclamé par la communauté internationale, notamment l’Organisation des nations unies (ONU) et l’Union africaine (UA). De toute évidence, Bujumbura veut rouler son partenaire dans la farine, en feignant de donner des gages  ou en peignant une situation idyllique pour continuer à bénéficier de la confiance et de l’appui de ce partenaire stratégique, comme si de rien n’était. Mais l’UE n’est pas dupe. Outre les échos que se fait la presse des nombreuses tueries, déplacements de populations et autres atteintes aux libertés individuelles et collectives dont se rend coupable le pouvoir burundais, elle dispose de moyens de vérification suffisamment crédibles sur le terrain pour battre en brèche l’argumentaire de Bujumbura qui, malgré les apparences, cherche vraisemblablement  à éviter ces sanctions européennes dont elle seule est à même de mesurer l’impact.

Nkurunziza a pris son peuple en otage et il faut délivrer ce peuple

Cette vigilance et cette perspicacité de Bruxelles devraient donc l’amener à durcir le ton avec Nkurunziza en envisageant d’aller même au-delà des sanctions prévues. Et cette fermeté doit être à la hauteur de l’intransigeance du pasteur-président à ne pas lâcher du lest. En plus de lui fermer le robinet, pourquoi  ne pas lever le pont diplomatique en vue d’un isolement total du satrape ? Dans une telle perspective,  l’UA aussi devrait adopter une position allant dans le même sens,  pour que l’étau se resserre davantage autour du pasteur-président, pour renforcer l’impact de l’épée de Damoclès de l’Oncle Sam qui plane déjà sur la tête de Nkurunziza. Dans tous les cas de figure, pour se donner plus de chances d’être entendus, il est impérieux pour tous ceux qui brandissent des sanctions contre Bujumbura, de passer de la parole à l’acte car Nkurunziza a suffisamment montré qu’il n’a pas peur des menaces, surtout qu’il se convainc de plus en plus qu’elles n’iront pas loin et ne seront jamais mises à exécution. C’est pourquoi il n’est pas étonnant de voir le gouvernement burundais pérorer, sans vergogne, qu’il est « satisfait de la réunion » parce qu’« il est à noter qu’aucune sanction n’a été prononcée ». Bien entendu, l’on peut être inquiet sur le sort des populations qui risquent, les premières, de pâtir de ces sanctions dirigées contre le pouvoir. Mais, à y penser, à quoi sert-il pour ces populations d’avoir une aide dont elles ne sauraient bénéficier si, du jour au lendemain, elles peuvent passer sous les fourches caudines des soudards du système ? Rien ne dit d’ailleurs que dans les circonstances actuelles, ces aides parviendront aux populations  et que les tenants du pouvoir actuel ne feront pas main basse sur celles qui passent entre leurs mains, pour servir leur propre cause. Nkurunziza a donc pris son peuple en otage et il faut délivrer ce peuple.  Toute attitude contraire serait vue comme un fléchissement qui aurait le don de renforcer le dictateur qui ne doit pourtant pas s’en sortir aussi facilement. Dans tous les cas, Nkurunziza a suffisamment montré qu’il n’a rien à cirer avec le sort de ses compatriotes dont la vie compte pour du beurre à ses yeux. Mais il ne peut pas, impunément, continuer à tuer sauvagement. Il faut que ça cesse ! Et ceux, comme l’UE, qui ont le pouvoir d’infléchir le cours de l’histoire pour mettre fin aux souffrances du peuple burundais, ont le devoir historique d’utiliser tous les moyens dont ils disposent pour arrêter le massacre. Il y va aussi de leur propre crédibilité.

Outélé KEITA


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