HomeA la uneA PROPOS DU RETRAIT DU GATIA D’ANEFIS : Bamako entre le marteau et l’enclume

A PROPOS DU RETRAIT DU GATIA D’ANEFIS : Bamako entre le marteau et l’enclume


La consigne de Ibrahim Boubacar Kéita enjoignant la Plateforme de quitter Anéfis, n’a pas été respectée.  En tout cas, au moment où nous tracions ces lignes, les combattants du Gatia campaient toujours sur leur position. Mieux, la population s’est érigée contre tout départ des milices pro-Bamako, craignant pour sa sécurité. Comme nous l’écrivions dans nos colonnes, la Coordination des Mouvements de l’Azawad  (CMA)  pourrait réoccuper l’espace que le Gatia viendrait à évacuer si des dispositions sécuritaires ne sont pas prises par la Médiation. Et c’est justement sur la base de l’absence de toute garantie sécuritaire que la population s’oppose au départ des troupes de la Plateforme. En effet, la CMA risque de procéder à des purges si l’on lui tend la perche pour réoccuper les lieux. Non seulement elle pourrait se livrer à des représailles contre la population, mais aussi elle pourrait relancer de plus belle ses trafics de tous genres.

Ce refus de la population de voir les milices gouvernementales délogées, n’est, en réalité, qu’une autre preuve de la mauvaise foi et de la duplicité des protagonistes de la crise malienne. Car, d’un côté, le pouvoir de Bamako est le grand bénéficiaire de la présence du Gatia à Anéfis. Cette présence militaire permet de contrôler la zone et d’étouffer militairement la CMA. Bamako pourrait donc être à la manœuvre pour que la population continue d’exiger le maintien du Gatia, si la Minusma n’apporte pas de garantie sécuritaire suffisante. De l’autre côté, et à la décharge de Bamako et de la population, la CMA a maintes fois démontré qu’elle n’est pas digne de confiance et qu’elle est capable du pire. Si fait que la vraie motivation de la CMA dans ses exigences de départ des troupes du Gatia, pourrait être rien moins qu’une stratégie de reconquête d’un terrain perdu.

IBK doit savoir manœuvrer

Dans tous les cas, le président IBK est face à un dilemme. L’accord de paix d’Alger pose comme condition, entre autres, le maintien de chaque camp dans ses positions initiales. C’est dire que dans cette affaire de Anéfis, les milices pro-gouvernementales pourraient être  celles qui auraient violé l’accord en attaquant la CMA et en reconquérant un « territoire ». Il se trouve que cette violation du cessez-le-feu arrange le pouvoir malien. Comment IKB qui se délecte secrètement du refus de décamper de ses partisans, peut-il exiger leur retrait sans garantie préalable ? Et un Etat ne saurait céder une portion de son territoire tant qu’il dispose de moyens d’y imposer sa souveraineté. Il reste qu’en fermant les yeux sur les agissements du Gatia, le pouvoir de Bamako risque de porter entièrement la responsabilité d’une éventuelle déflagration dans la zone.

Conscient de la situation, IBK a-t-il choisi de jouer la carte du diplomatiquement correct, en ordonnant le repli  sans condition des troupes du Gatia ? En tout cas, Bamako se met dans une position inconfortable. Elle est entre le marteau d’une médiation internationale qui exige de lui le respect des engagements, et l’enclume d’une population dont la préoccupation sécuritaire est amplement justifiée. En clair, IBK doit savoir manœuvrer pour trouver une ligne médiane tout en mettant la médiation internationale face à ses propres responsabilités.

Pourquoi la Minusma ne créerait-elle pas une zone tampon à Anéfis pour rassurer la population et permettre à la CMA de réoccuper sa place dans le cadre de la mise en œuvre de l’accord de paix d’Alger ? Cette alternative devrait priver chaque camp de toute tentative aventuriste. Devant l’impatience des uns et des autres, la solution doit être vite trouvée. Dans ce sens, les regards sont tournés vers Alger où IBK était en visite dans le cadre des concertations permanentes de haut niveau, entre le Mali et l’Algérie.  Etant la tête de proue de la médiation, l’Algérie de Bouteflika n’a sûrement pas manqué de trouver les mots qui conviennent face à cette situation kafkaïenne.

Michel NANA


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