HomeA la uneACCUEIL CHALEUREUX D’UNE MISSION GOUVERNEMENTALE A KIDAL : Volonté réelle de décrispation ou opportunisme politique ?

ACCUEIL CHALEUREUX D’UNE MISSION GOUVERNEMENTALE A KIDAL : Volonté réelle de décrispation ou opportunisme politique ?


 

Pour la 1re fois depuis que Kidal est tombée aux mains du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), une délégation gouvernementale vient d’y mettre  pied. Objectif de la mission : évaluer les besoins des populations en matière de services sociaux de base.  La délégation a été chaleureusement accueillie par les délégués de la rébellion de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) et l’ambiance de travail était bon enfant. L’évènement dans un Etat à fonctionnement normal, serait des plus banals, tant le propre d’un gouvernement est d’exercer sa souveraineté sur l’intégralité du territoire de son ressort. Mais au Nord- Mali en rupture de ban avec Bamako et par ces temps de surenchère politique, il est empreint d’un fort symbolisme. Il peut en effet être perçu comme un signe de dégel des relations entre frères ennemis qui ne se rencontrent le plus souvent que dans les fora de médiation pour un dialogue de sourds, obligeant les partenaires internationaux à user de menaces pour ramener les uns et les autres à la raison. On est certes encore loin du retour à la normalisation, mais l’évènement nourrit les rêves quant à un retour de la paix et de la souveraineté de l’Etat au Nord-Mali. Le souhait est que de tels actes s’enchaînent et débouchent sur la normalisation. Vivement que cet élan de fraternité ne soit pas une opération de communication de plus, comme les Maliens en usent très souvent pour berner la communauté internationale pour ensuite la réveiller par des bruits de canons.

Le tableau peu reluisant de la situation sociale au Nord-Mali traduit l’échec de la CMA

Bamako est ici dans le beau rôle en ce sens que la mission traduit sa volonté et sa détermination à œuvrer pour le bien-être des populations, même dans les conditions extrêmes. Mais elle réaffirme sa volonté première de ne pas renoncer à sa souveraineté sur tout le Mali.   Quant à la CMA, on imagine aisément que l’euphorie affichée n’est en réalité qu’un  sourire jaune et qu’elle a été contrainte par les besoins de la population. En effet, la situation sociale au Nord-Mali est des plus préoccupantes. Depuis 2012, les portes des écoles restent hermétiquement closes tandis que seuls quelques centres de santé restent fonctionnels, faisant de la mortalité surtout infantile, l’une des plus élevée. En matière d’énergie, Kidal, le bastion de la rébellion touarègue, reste  plongée depuis plus d’un mois dans le noir, du fait de la panne du groupe électrogène qui alimente la ville. Ayant donc sacrifié le bien-être des populations sur l’autel de la guerre, la CMA se voit contrainte, dans ses propres intérêts, d’accepter les offres de l’Etat malien qui s’est imposé comme agenda de rouvrir les classes pour la fin octobre et préparer la riposte à la saison épidémiologique. Ce tableau peu reluisant traduit l’échec de la CMA en matière de politique sociale et on peut légitimement  douter de sa capacité à gérer l’indépendance réclamée à coups de canons. Bamako peut bien se gargariser du fait que la marginalisation dont le Nord-Mali l’accuse et qui a servi à alimenter l’idéologie indépendantiste, n’a pas trouvé de remède miracle sous administration de la CMA. La leçon qu’il faut tirer de ce compromis entre Bamako et Kidal est que les besoins de la population peuvent pousser acteurs et décideurs politiques au réalisme politique et par-delà, à la paix. L’enthousiasme affiché des populations sous la chape de plomb de la rébellion, démontre qu’elles sont lassées de cette guerre sans fin et qu’elles ont bien compris que cette guerre larvée au Nord-Mali sert beaucoup plus les intérêt des djihadistes.

SAHO


Comments
  • Moi je préfère qu’on reporte aussi loin que possible – mais de façon raisonnable – les élections afin de faire la lumière sur un certain nombre de crimes (économiques et de sang) d’abord, dès lors que l’on détient la supposée boîte noire de Blaise. Autrement, les politiciens peuvent s’entendre pour ne jamais juger les dossiers que l’on sait. Beaucoup de civils sont mouillés à l’instar des militaires et ne souhaitent pas qu’il y ait justice. Si l’on n’y prend garde, on va organiser des élections et nos problèmes resteront en l’état, puis le prochain homme fort décrétera une réconciliation bidon et hop!

    9 octobre 2015

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