HomeA la uneAFFAIRE DE CACHE D’ARMES DECOUVERTE A BOUAKE : Un moustique sur les bijoux de ADO  

AFFAIRE DE CACHE D’ARMES DECOUVERTE A BOUAKE : Un moustique sur les bijoux de ADO  


 

L’affaire qui défraie la chronique sur les bords de la lagune Ebrié et qui fait grand bruit depuis la semaine dernière, est sans nul doute la découverte d’une cache d’armes au domicile d’un des proches du président de l’Assemblée nationale (PAN), Guillaume Soro, à Bouaké. Et pour cause, le mis en cause qui devait à nouveau être entendu à la gendarmerie ce 29 mai, après une première audition en fin de semaine dernière, n’est personne d’autre que le chef de protocole du PAN, en la personne de Souleymane Kamagaté dit Soul to Soul. Mais avant le deuxième interrogatoire de celui que beaucoup considèrent comme l’homme lige du chef du parlement ivoirien, ce dernier est sorti de son mutisme pendant le week-end, pour endosser la responsabilité de la situation. « Je suis le seul responsable », a-t-il twitté, en dénonçant « une toile inondée de polémiques inutiles » et invitant ses compatriotes à « ne pas polluer l’environnement des enquêtes ». Voilà qui est clair.

L’occupant du perchoir ivoirien veut prendre les choses en main

Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’en prenant les devants, Guillaume Soro donne le sentiment d’avoir pris toute la mesure du danger qui le guette dans cette affaire, et de vouloir prendre les choses en main. Dans le même ordre d’idée, l’ancien chef rebelle voudrait couper l’herbe sous les pieds de tous ceux-là qui étaient déjà convaincus de sa responsabilité en se disant que Soul to Soul n’est que la partie visible de l’iceberg, qu’il ne s’y prendrait pas autrement. Et en s’assumant de la sorte, cela pourrait aussi vouloir dire qu’il voudrait éviter à un proche, des emmerdes inutiles.  La question que l’on pourrait alors se poser, est de savoir la tournure que va à présent prendre l’enquête. L’interrogatoire de Soul to Soul va-t-il se poursuivre normalement ou bien va-t-on dorénavant s’intéresser directement au PAN, en lui demandant des explications ? Peut-être est-ce l’objectif recherché par ce dernier, à travers cette sortie pour le moins inattendue, quand on sait que dès le départ, il avait déjà enjoint son collaborateur de se mettre entièrement à la disposition des enquêteurs. Pourquoi ne pas alors laisser le processus suivre normalement son cours et aller à son terme ? En tout cas, avec cette sortie, tout porte à croire que l’occupant du perchoir ivoirien veut prendre les choses en main, pour éviter toute surprise désagréable.  Car, même si dans son camp l’on semble jouer la transparence, il y a fort à parier que la sérénité n’est pas au beau fixe. Car, il n’est pas exclu qu’un interrogatoire prolongé et trop poussé de Soul to Soul n’amène ce dernier à enfoncer involontairement son mentor plus qu’il ne faut, dans une affaire qui embarrasse visiblement  jusqu’au sommet de l’Etat. Toutefois, en redirigeant les enquêtes sur sa personne, Soro se donnerait les moyens de se défendre avec ses seuls arguments, sans risquer de se compromettre outre mesure dans une affaire hautement sensible, dans laquelle il sait pertinemment qu’il est attendu au tournant. D’autant plus que le fameux rapport de l’ONU qui l’accuse d’avoir fait entrer en Côte d’Ivoire une importante quantité d’armes par des circuits douteux lors de la crise post-électorale de 2010-2011, continue de planer sur sa tête comme une épée de Damoclès. Sans oublier l’affaire de son implication présumée dans le coup d’Etat de septembre 2015 contre la Transition burkinabè, qui n’a pas encore livré tous ses secrets. Et que dire de ces armes qui circuleraient entre les mains de terroristes qui écument la sous-région et dont certaines traces se perdraient dans les méandres de la forêt ivoirienne ? Dans le cas d’espèce, l’on pourrait aisément se laisser convaincre que le rapport onusien était tout sauf des allégations mensongères à l’encontre de l’ex-chef rebelle. En cela, l’on serait alors fondé à demander si c’était la seule cache d’armes ou s’il en existe encore d’autres ailleurs, dont seul Soro et ses hommes auraient connaissance.

Guillaume Soro aura du mal à effacer l’image de rebelle et chef de guerre qui lui colle à la peau

Il faut souhaiter que l’enquête puisse permettre de tirer la situation au clair. Mais en attendant, Soro a certainement compris qu’il doit éviter de laisser le doute s’installer dans l’esprit des Ivoiriens, à commencer par le chef de l’Etat, Alassane Dramane Ouattara (ADO), qui est justement en délicatesse avec ses anciens hommes qui l’ont aidé à accéder au pouvoir. En tout cas, pour le chef de l’Etat, cette affaire de découverte de cache d’armes qui implique visiblement son allié d’hier, ressemble à un moustique sur ses bijoux. Comment le frapper sans se faire mal, surtout s’il n’était pas au courant de l’existence de ces armes ? Dans ces conditions, peut-il encore continuer à faire entièrement confiance au président de l’Assemblée nationale, s’il ne connaît pas l’étendue de ce qui pourrait s’apparenter à une  trahison dont il ignorerait les tenants et les aboutissants ? En tout cas, l’on ne comprend pas pourquoi Guillaume Soro a depuis tout ce temps gardé au secret ces armes, alors qu’il  aurait peut-être pu s’en ouvrir au chef de l’Etat si ce dernier en ignorait l’existence, pour chercher à s’en débarrasser, à travers le DDR par exemple ou à les rendre à l’armée ivoirienne, puisqu’ils étaient devenus les nouveaux maîtres du pays. A moins qu’il n’y ait eu des craintes que leur traçabilité, dans le cadre d’une enquête par exemple, ne révèle des choses encore plus inavouables sur la provenance de ces armes.

En tout état de cause, Guillaume Soro aura du mal à effacer l’image de rebelle et chef de guerre qui lui colle à la peau, depuis qu’il est sorti du bois un matin de 2002 pour revendiquer la paternité du Mouvement patriotique de Côte d’Ivoire (MPCI), la rébellion partie de Bouaké contre le régime de Laurent Gbagbo et qui a donné la suite que l’on connaît. Et c’est peu dire qu’avec cette affaire, il risque d’y avoir une crise de confiance entre lui et le président Ouattara, si ce n’est déjà fait. Car, comme le dit l’adage, « qui a bu, boira ». Et l’ex-chef rebelle ne montre pas pour le moment des signes de satiété.

« Le Pays »


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