HomeRencontreAMINA BILLA/ BAMBARA MINISTRE CHARGEE DU BUDGET : « Pour le financement des élections, nous avons un plan B»

AMINA BILLA/ BAMBARA MINISTRE CHARGEE DU BUDGET : « Pour le financement des élections, nous avons un plan B»


« La situation économique du Burkina n’est pas reluisante mais elle n’est pas désespérante », tels sont les propos de la ministre en charge du Budget, pour décrire la santé financière du Burkina Faso. Cet état sanitaire de l’économie burkinabè, Amina Billa/ Bambara, l’a décrit à travers les dépenses auxquelles fait face l’Etat, en comparaison avec sa capacité de mobilisation des ressources propres et extérieures. Les dépenses sont énormes et les ressources faibles. Ce déphasage, s’il persiste, pourra conduire le pays dans une situation critique. Alors que faire ? Dans cet entretien qu’elle nous a accordé, le 1er mai 2015, la ministre en charge du Budget n’est pas allé du dos de la cuillère pour faire le diagnostic de l’économie burkinabè, situer les responsabilités et par la même occasion, donner les pistes de solutions aux difficultés économiques que connaît le pays.

 

« Le Pays » Quel est l’état actuel de l’exécution du budget 2015 ?

 

Amina Billa/Bambara : Le budget 2015 a été adopté le 29 décembre 2014. Il est de coutume qu’après l’adoption, l’Etat fasse périodiquement une revue pour connaître la situation de ce budget afin de s’assurer qu’il est dans la bonne tendance. Dans le cas contraire, il prend un certain nombre de mesures afin que l’exécution du budget puisse se faire aussi bien en termes de mobilisation de ressources à l’intérieur et à l’extérieur du pays qu’en termes d’exécution de la dépense. C’est dans ce cadre que s’inscrit le rapport sur l’exécution du budget qui a été présenté dernièrement en Conseil des ministres en sa séance du 21 avril 2015. Quant au contenu de ce rapport, il faut dire qu’à la date du 3 mars 2015, les ressources mobilisées se chiffrent à environ 286 790 000 000 F CFA sur une prévision d’environ 1 516 milliards de F CFA. C’est dire que nous avons un taux d’exécution au premier trimestre d’environ 18,91%. Hormis les appuis projets, les mobilisations de ressources se chiffrent à 260,08 milliards de F CFA, soit un taux d’exécution de 22,65% contre un taux repère linéaire de 25,00%, ce qui donne d’ailleurs un manque à gagner. Du côté des dépenses, au 31 mars 2015, le budget de l’Etat a enregistré un volume de dépenses engagées visées de 265,41 milliards de F CFA sur une prévision totale de 1 804,11 milliards de F CFA, soit un taux d’exécution global de 14,61 %. Mais la précision mérite d’être donnée car ce sont des dépenses engagées et visées vu qu’il y a des dépenses qui sont parvenues à l’engagement mais qui n’ont pas pu être visées. En termes d’exécution de la dépense, nous pouvons dire que les objectifs ont été atteints mais, pour ce qui concerne les recettes, les ambitions n’ont pas été atteintes.

« A la date du 20 mars 2015, la dette intérieure se chiffrait à 508 730 000 000 de F CFA »

Mais qu’en est-il de la gestion de la trésorerie ?

Au premier trimestre de 2015, nous avons eu véritablement d’énormes problèmes quant à la gestion de la trésorerie. Mais, il faut dire qu’un grand effort a été fait exceptionnellement en 2015 afin de synchroniser davantage la gestion de la trésorerie et la gestion budgétaire. Ce qui n’a pas toujours été le cas de par le passé et c’est cela qui a conduit à la situation d’endettement surtout en ce qui concerne la dette intérieure. A la date du 20 mars 2015, la dette intérieure se chiffrait à 508 730 000 000 de F CFA. Mais cela est lié à la situation des finances publiques que nous avons trouvée lorsque nous sommes arrivées en octobre 2014. En effet, à notre arrivée au sein du gouvernement, nous avions une trésorerie qui était déficitaire de 205 milliards de F CFA. Mais des efforts ont été fournis pour payer la dette intérieure car nous avons constaté que le secteur privé était presqu’en arrêt d’activité. Et dans ce cas, l’Etat ne pouvait pas être en mesure de mobiliser les recettes fiscales, notamment le bénéfice industriel et commercial. A la date d’aujourd’hui, je peux vous garantir que l’Etat ne doit aucun centime à un fournisseur en règle qui a présenté une facture de moins de 100 millions de F CFA. Nous voulons procéder par étape et toutes les entreprises qui ont présenté une facture de 100 millions de F CFA depuis novembre 2014 jusqu’à fin mars, ont été payées. Maintenant, nous sommes en train d’examiner et d’essayer de payer les factures qui sont supérieures à 100 millions de F CFA. Le bruit court pourtant que le secteur privé reste toujours en attente de payement. Il faut faire très attention à ce niveau car il ressort qu’il y a des exécutions de marchés ou des prestations de services qui ont été faites sans contrats. Si c’est verbalement que le DAF a demandé à un fournisseur de livrer des fournitures et que cela n’a pas été matérialisé par un contrat c’est un acte qui, à ce moment, n’engage que l’agent en tant que personne privée et le fournisseur. L’Etat ne prendra pas cela en compte et généralement, ce sont ces individus qui continuent de se plaindre alors que très souvent, ils ne disposent pas de factures en bonne et due forme. Si nous n’avons pas la preuve du service fait, malgré notre bonne volonté et notre sensibilité aux problèmes du secteur privé, nous ne saurions passer outre la règlementation et les textes en vigueur pour mobiliser les paiements. En plus, il faut noter qu’on ne saurait parler de dette intérieure que si le délai règlementaire de paiement de la facture dépasse 90 jours calendaires, traduisant ainsi la constitution d’arriérés au sens de l’UEMOA.

Et concernant les créanciers de l’Etat ?

Lorsque vous devez à l’Etat, sachez que celui-ci prendra toutes les dispositions pour entrer dans ses fonds. Si vous devez donc à l’Etat, vous devez obligatoirement honorer vos engagements. La transition est dans cette dynamique afin de recouvrer les créances. Je fais allusion à ceux qui, à un moment donné, sont allés à une évasion fiscale. Supposons qu’un opérateur économique a mobilisé la TVA alors qu’il ne lui appartient pas de mobiliser cette taxe. S’il la collecte, il doit la reverser à l’Etat. Si toutefois il a procédé à la collecte sans la reverser à l’Etat, il est du devoir de l’Etat de faire un redressement pour exiger le paiement de la TVA par ce dernier. Nous sommes dans cette dynamique et il n’est pas exclu qu’à l’avenir, nous ne soyons pas bien compris par certaines personnes. En effet, lorsqu’un opérateur économique s’adonne à cette pratique, à un moment donné, il risque de ne plus pouvoir s’en sortir car le redressement se fait au minimum sur trois ans. Si des

gens ont collecté la TVA et qu’ils refusent de la reverser intentionnellement, cela voudrait dire qu’ils l’ont déjà consommée. Et s’ils l’ont déjà consommée et que l’on vient 3 ans après pour faire le redressement, ce n’est pas exclu que certaines personnes ne puissent pas comprendre. C’est pour cela que je dis que nous risquons d’être victimes de menaces.

Vous disiez tantôt que les objectifs en matière de mobilisation des ressources n’ont pas été atteints. Qu’est- ce qui peut expliquer cela ?

S’agissant de la mobilisation des ressources, il faut situer deux niveaux. La mobilisation des ressources internes et la mobilisation des ressources externes. Quand on parle de ressources externes, on fait allusion aux dons et aux appuis budgétaires. A ce niveau, si la mobilisation est faible, cela est en partie amputable à l’Etat lui-même. Il y a des dispositions qui sont prévues pour que les bailleurs de fonds accompagnent l’Etat dans son développement. Les PTF sont prêts à financer l’Etat et en contrepartie, celui-ci doit remplir un certain nombre de conditions qui ne sont pas toujours de la mer à boire. A titre d’exemple, je citerais une exigence qui a été faite au gouvernement, celle d’adopter la loi portant prévention et répression de la corruption. Pourquoi cette loi n’a-t-elle pas été adoptée depuis 2014 ? Cela a fait que nous avons perdu des ressources. Heureusement que les bailleurs de fonds ont reconduit la mesure en 2015. Et son adoption a été un déclencheur de décaissement. Il en est de même pour le code minier qui lui aussi est une mesure déclencheur de décaissements. Là aussi, son adoption aurait pu être faite depuis 2014. Et la Banque mondiale a décidé de reconduire la mesure cette année.

« Nous avions pensé donc qu’il y aurait une relance forte à partir de 2015 mais malheureusement, avec les remous sociaux, avec l’incivisme des populations, plus particulièrement au niveau des sites aurifères, nous assistons encore à un attentisme »

Vu que le code est en voie d’adoption, nous avons déjà des propositions et des engagements en matière de financement. Quant à la mobilisation des ressources propres de l’Etat, elle se fait par la douane, les impôts et le Trésor. A ce niveau, il faut reconnaître que le potentiel de mobilisation existe. Au niveau de la douane, il y a une petite marge de manœuvre car les performances ne leur sont pas forcément imputables. Leurs performances dépendent plus de la quantité des importations et de la valeur des produits importés. On ne peut pas obliger les opérateurs économiques ou les investisseurs à importer d’autant plus que la crise de 2014 a conduit à un attentisme de ces investisseurs. Nous avions pensé donc qu’il y aurait une relance forte à partir de 2015 mais malheureusement, avec les remous sociaux, avec l’incivisme des populations, plus particulièrement au niveau des sites aurifères, nous assistons encore à un attentisme des investissements. Lorsqu’il n’y a pas d’investissement, il n’y a ni production, ni consommation et on ne saurait parler de création d’emplois encore moins de mobilisation de la fiscalité. C’est dire que les crises et les remous sociaux peuvent conduire à une baisse drastique de la mobilisation des ressources propres et plus particulièrement la mobilisation des ressources minières dans notre contexte. En 2013, au titre des recettes minières mobilisées, nous étions à 191 500 000 000 de F CFA. En 2014, nous avons eu seulement 168 milliards de F CFA. La chute est nette et cela risque de se poursuivre et d’être qualifié de descente aux enfers si l’ensemble de la population ne travaille pas à adopter des comportements plus citoyens. Nous disons toujours que c’est légitime de revendiquer et de grever mais on peut revendiquer sans casser et sans brûler. Sinon, nous sommes en train de couper la branche sur laquelle nous sommes assis. Au regard de ce qui se passe, en tant que ministre en charge du Budget, je peux vous dire que les signaux sont mauvais. Il faut que les uns et les autres assument leurs responsabilités et que nous travaillions à inverser la tendance afin d’inciter les investisseurs qui sont là à continuer à investir et inciter également ceux qui sont à la porte et qui attendent de voir que les conditions sécuritaires soient réunies avant de s’engager.

La situation semble être désespérante…

 

La situation n’est pas tout à fait reluisante, mais elle n’est pas désespérante. Et ce n’est surtout pas nous qui allons plonger dans un désespoir. L’espoir est encore permis car nous avons identifié des pistes de solutions. C’est dans ce sens que nous allons mettre en vigueur la facture normalisée au plus tard dans le 1er mois du troisième trimestre. Il y a de nouvelles mesures de dédouanement des véhicules d’occasions que nous allons mettre en vigueur. C’est une niche fiscale que nous pouvons véritablement exploiter. Nous allons aussi renforcer le contrôle de la fiscalité intérieure. Et à ce propos, je vous assure que le potentiel existe pour peu que la population accompagne les agents en charge de la mobilisation des recettes au lieu de les tabasser. Les agents sont engagés et nous les félicitons au passage. Il faut seulement qu’ils soient compris et qu’ils aient de l’accompagnement. Si cela est fait, je peux vous assurer que nous pouvons surprendre agréablement la population en multipliant pourquoi pas par deux les prévisions. Il faut noter que nous allons poursuivre et renforcer le suivi satellitaire des marchandises qu’on appelle le tracking.

« Nous demandons à chaque ministre et président d’institution de vérifier l’opportunité des dépenses  »

Cette mesure qui va se dérouler en 4 phases est effective au niveau du corridor Dakola Ouaga. La 2e phase qui vient de démarrer concerne l’axe Bittou, Wessa, Niangoloko et Bobo. Les deux autres phases seront opérationnalisées au plus tard à la fin du mois de juin 2015. Tout cela réuni, nous sommes convaincus que nous allons atteindre les objectifs de performances de mobilisation des ressources. Ce qu’il faut savoir aussi, c’est que la solution ne viendra pas seulement de la mobilisation des ressources, il faut regarder aussi au niveau des dépenses. A ce niveau, il me plaît d’attirer l’attention de tous les ministères sur un certain nombre de comportements négatifs. Nous avons adopté en Conseil des ministres des mesures de réduction du train de vie de l’Etat. Ce ne sont pas seulement de simples lettres, il faut les mettre en pratique et les opérationnaliser. Beaucoup d’économies peuvent se faire et cela est de la responsabilité de chaque ministre et de chaque président d’institution. Il n’est pas question que les véhicules de l’Etat deviennent des véhicules privés. Ils doivent être utilisés dans le cadre du service et si vous voulez rentrer, vous le laisser au service et vous rentrer avec votre propre moyen de transport. Aussi, il y a les délocalisations des ateliers hors de Ouagadougou. Pratiquement, tous les ministères se vident de leurs agents et de leurs prestations pour aller à la périphérie de Ouagadougou non pas seulement pour l’atteinte de résultats, mais surtout pour les rétributions. Nous sommes en train de mener la réflexion et si on enlève les rétributions, on verra qui va sortir hors de Ouaga. C’est vrai que les sorties participent aussi au développement des régions, mais il faut trouver le moyen de ne pas exagérer. Et il revient à chaque ministre de faire une organisation interne et veiller à la surveillance de ses ateliers hors de Ouagadougou. Une structure du MEF a demandé, pour l’organisation d’une activité, la confection de sacs en cuirs estampillés du logo du ministère. J’ai opposé mon refus et j’ai encouragé l’achat des chemises à sangle et cela nous a permis d’économiser 4,5 millions de F CFA. Ce sont ces travaux de fourmis que nous demandons à chaque ministre et président d’institution de faire, c’est-à-dire, vérifier l’opportunité des dépenses car il ne revient pas au MEF de le faire.

« Donc, depuis 2011, l’Etat vivait au-dessus de ses moyens »

A vous entendre, on donnerait raison à ceux qui vous surnomme « madame budget d’austérité ».

Le décaissement des fonds ne dépend pas de ma personne. La tâche quotidienne du ministre en charge du Budget c’est d’avoir les yeux rivés sur le niveau de trésorerie de l’Etat et les engagements que l’Etat doit honorer. Et chaque matin, c’est ce que nous faisons et à la lumière de ce que nous voyons. Je dois vous dire que c’est compliqué. C’est la situation d’austérité qui impose que nous soyons très regardants en matière de décaissement. Il y a environ 4 ans de cela, l’Etat s’est inscrit dans une cavalerie budgétaire. C’est-à-dire que l’Etat mobilise les ressources d’une année n+1 pour payer les dépenses d’une année n. Donc, depuis 2011, l’Etat vivait au-dessus de ses moyens. C’est le premier constat que nous avons fait et il faudra mettre un terme à cette cavalerie budgétaire. Et pour cela, il faut être clair et dire les choses telles qu’elles sont ; c’est cela la sincérité budgétaire. C’est vrai que nous restons sensibles aux problèmes des populations, mais il faut aussi rester ferme sur cette situation. D’aucuns disent que j’ai la main lourde en matière de signature mais est-ce une mauvaise chose d’amener l’Etat à vivre par ses moyens ? Ou est-ce mauvais d’exiger que les preuves du service fait me soient fournies avant que j’approuve les contrats et autorise le règlement des factures ? Le ministre en charge de l’Economie et moi sommes catégoriques, nous préférons ne pas faire payer une dépense que de payer indument la dépense car ce serait prendre l’argent du contribuable pour le reverser indument dans les poches d’autres individus. Il en est de même pour la location des baux de l’Etat. Nous n’allons pas permettre à un cercle d’amis d’en profiter. Nous allons prendre un arrêté pour ouvrir la location à tout le monde plutôt que de continuer à favoriser des individus déjà nantis.

 

Mais qu’en est-il de ceux qui bénéficiaient des grâces du pouvoir sous l’ère Compaoré et qui ne payaient pas leurs impôts ?

Nous ne pouvons pas entrer dans les détails à ce sujet mais soyez rassurés, les agents en charge de collecter les impôts ont conscience de ce problème. Un travail de fond sera fait dans ce sens mais pour le moment, nous ne pouvons pas donner les détails.

Comment justifier le fait que certains ministères et institutions ont des besoins supplémentaires de financement alors que le budget 2015 a été déjà voté ?

C’est tout à fait normal car une prévision de budget ne se fait pas avec une efficacité à 100%. Le budget a été voté mais il n’est pas exclu qu’il y ait eu des domaines qui ont été omis. Il n’est pas exclu non plus que du fait de l’insuffisance de la méthode d’élaboration du budget en vigueur aujourd’hui, à savoir le budget objet, il y ait des insuffisances. Ces tares sont trainées depuis 1959 et c’est le budget de moyens qui veut que, sur la base du budget de l’année antérieur, l’on projette le budget de l’année suivante. Donc, si le premier budget a des insuffisances, il va de soi que cela ait des répercutions sur le budget suivant. Donc, chaque année, nous allons à un réaménagement budgétaire pour prendre en compte un certain nombre d’aspects qui n’avaient pas été inscrits dans la ligne budgétaire. C’est l’occasion aussi pour réajuster les montants de certaines activités, soit pour les augmenter soit pour les diminuer. C’est dans ce sens que les ministères, depuis l’adoption du budget, ont commencé à formuler des requêtes extra-budgétaire. C’est ainsi qu’on élabore la loi de finance rectificative. Nous avions promis aller à ce réaménagement budgétaire au plus tard en fin avril. Mais telle qu’a été la situation d’exécution du budget 2015, nous ne sommes pas en mesure de faire un collectif budgétaire maintenant. Les perspectives de mobilisation des ressources ne nous permettent pas de faire un réaménagement surtout pour augmenter les crédits de certains ministères. Lorsqu’il y a des difficultés de mobilisations des ressources, c’est au niveau des dépenses que le réajustement doit être fait. Mais vu la situation d’austérité dans laquelle nous sommes avec une compression des dépenses, si nous allons encore réduire fortement certaines dépenses, ce sera asphyxier l’administration. Notre salut viendra donc des mesures prises pour la mobilisations des ressources pour non seulement tenir le budget qui a été adopté, mais aussi prendre en compte l’ensemble des besoins exprimés qui se chiffrent actuellement à 350 milliards de F CFA.

« Nous avions prévus 20 milliards de F CFA pour l’indemnisation des victimes de l’insurrection et on nous a présenté un besoin de 42 milliards de F CFA »

Ces besoins ont-ils une chance d’être financés ?

C’est besoins ont une chance d’être financés si l’ensemble des mesures prises pour la mobilisation des ressources sont mises en pratique. Aussi il faut que la population commence à adopter des comportements citoyens, surtout au niveau des sites miniers, afin de nous permettre d’avoir des recettes minières qui pourront atteindre voire dépasser celles de 2013. Les besoins qui ont été exprimés par les ministères et institutions sont aussi pertinents. Au titre du FONER par exemple, l’enveloppe est restée figée alors que le nombre des étudiants augmente chaque année. Et pour un besoin d’environ 7 milliards de F CFA, il n’y a que 3 milliards qui sont alloués si fait qu’au cours de l’année, le gap doit être forcément comblé. La subvention au CENOU est toujours restée la même depuis que le CENOU existe alors que le nombre des étudiants va crescendo et le coût de revient du plat s’élève entre 1500 F CFA et 1 800 F CFA. Mais le plat revient à 100 F CFA. Il y a aussi la question de l’indemnisation des victimes de l’insurrection populaire. A ce niveau, nous avions prévus 20 milliards de F CFA pour l’indemnisation des victimes de l’insurrection et on nous a présenté un besoin de 42 milliards de F CFA. C’est vrai que le financement ne se fera pas seulement par espèces sonnantes, mais cette somme reste quand même élevée. La subvention coton cette année va s’élever à environ 20 milliards de F CFA. Il y a aussi la question de la SONABEL qui se pose. La SONABEL a besoin d’être accompagnée sinon, les délestages vont continuer. N’eût été l’accompagnement que l’Etat a accordé in extrémis à cette entreprise lors de la crise avec les transporteurs, on n’en serait pas là. Sur le plan sanitaire, le besoin est encore crucial avec les ruptures de gaz dans les CHU. Au regard de tous ces aspects, nous n’avons pas d’autre choix que de miser sur la mobilisation des recettes. C’est pourquoi j’insiste pour que la population accompagne les agents chargés de mobiliser les recettes dans leur travail.

L’organisation des élections, l’une des priorités du gouvernement de transition, avait aussi besoin de financement de la part des bailleurs de fonds. Est-ce que la totalité de la somme pour l’organisation de ces élections est aujourd’hui réunie ?

Lorsqu’on dépeint la situation de l’exécution du budget, on comprend parfaitement qu’il y ait des inquiétudes quant au financement des élections. Je dois dire que sur ce volet, ce n’est pas de l’argent qui est déposé quelque part qu’il faut aller prendre mais, ce sont des prévisions. Le budget total pour les élections s’élève à 54 milliards de F CFA et la contribution de l’Etat s’élève à 25 milliards de F CFA et il reste 29 milliards à mobiliser. Aujourd’hui, nous avons des annonces d’appui des PTF d’environ 14 milliards de F CFA. Dans cette somme, c’est seulement 8 milliards de F CFA qui doivent provenir du budget de la CENI et les 6 milliards reviendront aux OSC et à certains organismes internationaux. Donc, au jour d’aujourd’hui, nous sommes à la recherche d’environ 20 milliards de F CFA. Mais il faut aussi ajouter que ce ne sont que des annonces et nous n’avons pas la certitude que les décaissements seront faits dans les délais ou s’il y aura forcément décaissement. Donc il va falloir qu’en interne, on prévoie un plan B pour garantir la tenue des élections. En tant que ministre en charge du Budget, avec les orientations du ministre en charge de l’Economie et avec l’engagement ferme du président du Faso et du Premier ministre, je puis vous assurer que pour l’organisation des élections, il y a un plan B qu’on se réserve le droit de dérouler en temps opportun. Et ce plan B permettra de tenir les élections à bonne date.

Vous avez soumis en Conseil des ministres un rapport portant élaboration du budget de l’Etat 2016. Vous n’avez pas peur que ce budget ne soit pas en phase avec les aspirations du prochain gouvernement qui aura son programme politique qui lui est propre ?

La transition est venue trouver un budget déjà élaboré et nous avons fait des réajustements pour l’adapter aux besoins. Il est de notre devoir d’élaborer le budget de 2016, quitte à ce que le gouvernement qui va succéder au gouvernement de transition fasse ses réajustements. Mais je crois que nous sommes mieux placés pour connaître les attentes des populations plus qu’aucun parti politique. Je reste donc convaincu que les réajustements qu’ils auront à faire se situeront au niveau des allocations budgétaires. Car, les priorités de l’Etat burkinabè, quoi qu’on dise, ne changeront pas en fonction de la couleur d’un gouvernement. Sinon, ce serait irresponsable pour le gouvernement de la transition, de se limiter seulement à la gestion de la transition. Nous avons le devoir d’assurer la continuité de l’Etat. C’est pour cela que j’ai l’habitude de dire que nous travaillons pour la transition certes, mais encore plus pour le gouvernement à venir. A titre d’exemple, nous avons décidé d’engager des dépenses pour le MCA. En rappel, le MCA a mobilisé environ 240 milliards de F CFA pour le développement du Burkina. La négociation du 2e compact du MCA va commencer en décembre 2015 pour un montant qui sera supérieur certainement au premier montant. Mais l’une des conditions pour bénéficier de ces fonds c’est d’assurer la pérennité des acquis du premier compact. Une telle opération nous coûtera entre 8 et 9 milliards de F CFA et nous sommes engagés à le faire pour espérer un autre financement. C’est dire que la transition ne travaille pas exclusivement pour la période transitionnelle.

Propos recueillis par Adama SIGUE

 


Comments
  • Voilà ce que j’appelle un travail propre de journaliste. Merci SIGUE. Cependant, j’aurai aimé que la ministre nous dise clairement ce qu’il adviendra des intouchables du clan Compaoré. Il est évident que l’Etat vivait au dessus de ses moyens et cela ne dérangeait personne du moment où personne n’osait parler. Les rapports de l’ASCE dorment encore dans les tiroirs à Kosyam.

    Mme la ministre, quand on aime son pays e qu’on a aussi choisi de s’inscrire dans un système de capitalisme on ouvre la porte aux investisseurs privés. On baisse les impôts pour permettre à ces derniers de venir s’installer car en baissant un peu vos impôts vous attirez des investisseurs privés et comme les impôts sont bas, les compagnies et sociétés winoaga et frère ne mentiront plus grossièrement sur leurs chiffres d’affaires pour payer peu hors mieux vaut avoir plusieurs contribuables qui verseront chacun une somme nx+nY que d’avoir une poignée qui ne verse que x+Y (avec n comme nombre d’entreprises nouvelles). Et ça vous le savez déjà. Avec de nouvelles entreprises ce sont de nouveaux IUTS, de nouveaux impôts sur le bénéfice… et ça aussi vous le savez déjà.

    Je me demande donc pourquoi la transition fait semblant d’avoir levé le monopole au Burkina alors qu’il existe toujours! Aussi pourqui ne pas revenir sur le fameux texte qui voulait q’un privé vienne s’installer, produire de l’électricité et vendre à la sonabel? Pourquoi ne pas lancer un appel d’offre international pour qui veut venir s’installer au Burkina Faso pour produire et vendre son électricité à la population avec dans les cahiers des charges une obligation de commencer par Ouagadougou et Bobo-Dioulasso? Non seulement cela va créer de l’emploi mais va accroitre l’assiette fiscal et ça aussi vous le savez madame la ministre.

    Plusieurs compagnies appartiennent aux mêmes personnes avec des prêtes noms et ces compagnies ne payaient point d’impôts. Aujourd’hui, il est temps de recouvrer nos maigreurs pour faire avancer nos pays. Arrêtons de faire payer le pauvre alors que le riche se la coule douce. Suivez mes regards!!!!

    21 mai 2015
  • Bravo à cette dame, très compétente. Elle est vraiment très calée dans son domaine. Ce sont des gens comme ça qu’on veut à des places comme ça. Elle maitrise très bien son domaine. Franchement, si j’étais à la place du futur Président du Faso, elle sera reconduite pour gérer la boite. J’aimerais un jour assister à une de ses conférences sur les budgets nationaux. Cela fait beaucoup plaisir de lire ou d’entendre une personne qui maitrise ce qu’elle fait.

    21 mai 2015
  • Autre source de mobilisation des ressources pourrait etre le recouvrement des fonds volés ou détournés. on me dira que ça prend u temps, mais encore faut il commencer pour espérer recuperer. On ne peut pas avoir des problèmes de mobilisation de ressources alors que des individus connus ont pillé le pays et vous regardez sans rien faire. c’est aussi le role de la transition. Qiuand on attrape sin voleur, la sagese voudrait qu’on commence par recupérer ce qu’il n’a fini de dépenser pour minimiser la perte. mais vous vous regardez comme le voleur va venir de lui meme remettre. 9a me fait très mal au coeur!

    21 mai 2015

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