HomeFocusANNIVERSAIRE DE LA BAD : Cinquante ans après, de nombreux défis restent à relever

ANNIVERSAIRE DE LA BAD : Cinquante ans après, de nombreux défis restent à relever


La Banque Africaine de Développement (BAD) est cinquantenaire. 50 ans dans la vie d’une institution comme dans celle d’un individu, c’est beaucoup et ça se fête. La Banque africaine est ainsi devenue mâture. Beaucoup de défis ont été relevés par cette banque. Son aide budgétaire a permis bien des réalisations, surtout en matière d’éducation, de transport, de santé et d’énergies propres sur le continent. Tout cela a aidé les pays africains dans leurs efforts de développement. De nos jours, la BAD jouit d’une excellente réputation. En atteste la note triple A qui lui a été accordée par les institutions de notation internationales. Avec un capital qui culmine aujourd’hui à 100 milliards de dollars, la BAD a une solide assise financière.

 

On peut se réjouir du fait que la règle de l’alternance fonctionne à la tête de cette institution

Il est largement accepté aujourd’hui que si la BAD n’existait pas, il faudrait la créer. Ne serait-ce que pour la symbolique qu’elle représente, en termes de banque du continent. L’arrivée probable de son 80e membre, à savoir le sud-Soudan, en dit long sur l’intérêt que cette institution suscite. Et ce, même au-delà des frontières de l’Afrique. En atteste la participation de 26 pays membres non-africains à près de la moitié (40%) du capital de la Banque. Cette institution fait donc la fierté de l’Afrique. Elle avait malheureusement été, dans un passé récent, obligée de se délocaliser du côté de Tunis, du fait de la crise politico-militaire qui a secoué la Côte d’Ivoire où se trouve son siège.

Du reste, la bataille livrée tambour battant par la Côte d’Ivoire pour le retour de la BAD à son siège, est une preuve de l’importance de la banque et de l’intérêt qu’il y a à l’abriter. La guerre de positionnement par rapport à la présidence de la Banque, participe certainement de la même veine. Chaque Etat se dit que s’il a son « homme » aux commandes de cette institution, ce sera tout bénef pour le pays. Chaque président soutient donc tel ou tel candidat, d’une manière ou d’une autre, en fonction de ses intérêts. C’est un véritable lobbying qui est ainsi exercé. C’est dire combien la guerre de positionnement à des relents politiques.

Le choix du nouveau président de la BAD est justement au menu de ces assemblées annuelles 2015. Pour succéder au président sortant, Donald Kaberuka qui est à la fin de son deuxième mandat de 5 ans à la tête de la banque, 8 candidats sont en lice. Une dame et 7 hommes : Cristina Duarte du Cap Vert, Birama Boubacar Sidibé du Mali, Sufian Ahmed de l’Ethiopie, Thomas Zondo du Zimbabwé, Samura Kamara de la Sierra Leone, Kordje Bedoumra du Tchad, Jalloul Ayed de la Tunisie, Akinwumi Adesina du Nigeria. En attendant qu’un nom sorte du lot, on peut déjà se réjouir du fait que la règle de l’alternance fonctionne à la tête de cette institution. Les chefs d’Etat africains feraient mieux de s’en inspirer pour la stabilité et le développement du continent. Le/la candidat (e) qui aura les faveurs du collège de désignation, devra continuer l’œuvre de l’ancien ministre des Finances du Rwanda, dont le passage à la tête de l’institution a été marqué par des acquis, mais aussi des insuffisances.

Au chapitre des acquis, il y a l’augmentation du capital de la banque, mais aussi et surtout les prêts avec facilités qui ont été octroyés par la BAD aux Etats en matière de commerce et d’infrastructures, toute chose ayant contribué à « limiter les dégâts ». En d’autres termes, grâce au leadership de Donald Kaberuka, les pays africains ont pu limiter les effets de la crise financière qui a secoué l’Occident en 2008. L’investissement de la banque dans le secteur des énergies renouvelables est également fort appréciable. Il ressort en effet, que la banque a autorisé des financements de l’ordre de 1.9 milliards de dollars en 2014 dans ce domaine. Cette option de la BAD est heureuse et mérite d’être saluée à sa juste valeur. L’énergie, c’est une lapalissade, est indispensable au développement. Et quand on sait que le développement est aussi celui qui préserve les intérêts des générations futurs, on ne peut que se réjouir de l’option faite par la BAD d’investir dans les énergies vertes pour promouvoir une croissance forte et robuste.

Il y a donc de nombreux motifs de satisfaction en ce cinquantenaire de la BAD. Mais, les succès restent relatifs.

La banque doit se donner tous les moyens de surmonter les obstacles qui plombent ses efforts de soutien au développement

En effet, 50 ans après son lancement, l’Afrique cherche toujours le chemin du développement. C’est la preuve, si besoin en était encore que des efforts et non des moindres, doivent être déployés. Bien entendu, on ne saurait rendre la BAD responsable du sous-développement des pays africains. Les vrais coupables sont à rechercher du côté des hommes politiques, l’élite des pays concernés. Seulement, en tant qu’institution qui ambitionne d’éradiquer la pauvreté sur le continent africain, la BAD est loin d’avoir atteint son objectif. Et pour ce qui est de la présidence Kaberuka, il lui est reproché, entre autres, des problèmes de gestion, des « recrutements fantaisistes » qui ont conduit à une augmentation vertigineuse des effectifs du personnel et à une multiplication exagérée du nombre de bureaux pays. Si cela est avéré, la nouvelle présidence devra s’employer à gommer les scories du passé avec le plus de rigueur possible, pour faire briller davantage cette institution financière. La BAD devrait par ailleurs marquer à la culotte ceux qui sont passés maîtres dans les détournements et autres investissements sans lendemain. Ce qui n’est pas une mince affaire au regard de l’impact encore énorme du politique sur la banque. Même des dictateurs rêvent d’imposer leurs poulains à sa tête. Cette question de gouvernance est l’un des problèmes majeurs de l’Afrique. Comme on peut le constater, dans bien des pays, la mauvaise gouvernance conduit à des crises qui ont pour effet de saper les efforts de développement. La tâche s’annonce ardue, mais la banque doit se donner tous les moyens de surmonter les obstacles qui plombent ses efforts de soutien au développement.

Mais, il faudra d’abord et aussi qu’elle corrige son déficit en communication. On ne dira jamais assez à quel point la communication donne de la visibilité à une structure. La BAD, malgré ses 50 ans et les réalisations énormes que les pays lui doivent, est très peu connue des populations. Elle agit beaucoup plus dans l’ombre. Tant et si bien que ses efforts ne sont pas toujours connus et salués à leurs justes valeurs. La Banque africaine gagnerait donc à projeter un peu plus de lumière sur son travail. Cela contribuerait à susciter beaucoup plus d’enthousiasme des populations qui se sentiraient ainsi plus accompagnées par une institution sérieuse, sur les chantiers du développement.

« Le Pays »


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