HomeA la uneANSELME DABILGOU, NEUROLOGUE, A PROPOS DE LA MALADIE DE PARKINSON

ANSELME DABILGOU, NEUROLOGUE, A PROPOS DE LA MALADIE DE PARKINSON


La maladie de Parkinson, parlons-en. Elle se définit comme « une maladie du mouvement qui se caractérise par un ralentissement du mouvement avec des tremblements, une raideur au niveau des articulations ». La Société de neurologie du Burkina a décidé de s’y intéresser le 22 juillet prochain, à l’occasion des activités en rapport avec le « brain-day » co-organisé par la Fédération mondiale de neurologie et l’association des Movement Disorder localisée à Chicago, aux Etats-Unis. Dr Anselme Dabilgou, neurologue au Centre hospitalier universitaire Yalgado Ouédraogo (CHU-YO) que nous avons rencontré le 8 juillet dernier, nous renseigne sur la maladie de Parkinson.

« Le Pays » : Pourquoi avoir choisi de mettre l’accent sur la maladie de Parkinson cette année ?

Dr Anselme Dabilgou : Cette année, l’accent est mis sur la maladie de Parkinson parce que les patients n’ont pas accès au traitement et c’est une maladie qui touche beaucoup plus les sujets âgés. Nous allons organiser une conférence adressée aux personnels soignants pour les sensibiliser par rapport à la maladie de Parkinson parce qu’il y a beaucoup d’agents de santé qui ne connaissent pas la maladie de Parkinson.

Qu’est-ce que la maladie de Parkinson ?

C’est une maladie neurologique qui est chronique. C’est une maladie du mouvement, qui se caractérise par un ralentissement du mouvement avec des tremblements, une raideur au niveau des articulations. Au niveau du cerveau, il y a un centre qui s’occupe du mouvement et qui fait que le mouvement peut être rapide ou extrêmement lent. Et c’est ce centre qui est touché au cours de la maladie de Parkinson. Ce qui entraîne une lenteur dans les mouvements. La maladie de Parkinson touche aussi bien les sujets âgés que les sujets jeunes. Mais c’est beaucoup plus les sujets âgés après 50 ans.

Quelle est la fréquence de cette maladie au Burkina Faso ?

Nous n’avons pas la fréquence exacte mais sur deux ou trois consultations, on peut avoir un cas de Parkinson. La maladie est rare en Afrique par rapport à l’Europe et aux autres pays. En Afrique, 7 personnes sur 100 000 sont touchées. Dans le monde, c’est 1% des personnes âgées de plus de 60 ans. En général, la maladie de Parkinson touche plus les hommes que les femmes.

Les patients comprennent-ils ce qui leur arrive ?

Non. Ils confondent la maladie avec la vieillesse. La maladie commence par un tremblement de la main de façon insidieuse. Les malades ne s’en rendent pas compte et ensuite, ça touche l’autre main. La personne marche de façon difficile. Le visage devient inexpressif. On ne sent pas les émotions sur le visage de la personne atteinte de la maladie de Parkinson.

Quelles sont les causes de la maladie ?

La maladie de Parkinson est différente du syndrome parkinsonien. La maladie de Parkinson détruit de façon progressive les neurones alors que le syndrome parkinsonien est dû à certains médicaments, à l’atteinte du cerveau par l’accident vasculaire cérébral, les traumatismes crâniens et les tumeurs cérébrales. La maladie de Parkinson est dégénérative. Les facteurs génétiques interviennent avant l’âge de 50 ans. Il y a également les facteurs environnementaux, notamment les métaux lourds en général, utilisés dans l’orpaillage et la métallurgie, les pesticides utilisés dans l’agriculture.

Comment se manifeste la maladie de Parkinson ?

Il y a trois signes qui caractérisent la maladie de Parkinson : le tremblement, le ralentissement de mouvement et la raideur au niveau des articulations. Le tremblement est exagéré par les émotions, la faim, la fatigue.  On conseille aux personnes atteintes de la maladie de Parkinson la marche. De la rééducation au niveau des articulations pour améliorer le mouvement.

Est-ce qu’une personne qui abuse des excitants peut faire la maladie de Parkinson ?

Le thé, le café ne peuvent pas entraîner la maladie, mais il y a une substance contenue dans la cocaïne qui peut favoriser la maladie de Parkinson.

Peut-on guérir de la maladie de Parkinson ?

On ne guérit pas de la maladie de Parkinson parce que c’est une maladie chronique. On peut la contrôler mais on n’en guérit pas. Elle ne conduit pas de façon directe à la mort. Mais il faut comprendre, dans un premier temps, que c’est une maladie qui entraîne une incapacité à se déplacer, à communiquer. Dans un second temps, elle va entraîner des problèmes au niveau de la mémoire, des problèmes au niveau du temps des sphincters, c’est-à-dire au niveau de la rétention des urines. Le malade aura des problèmes pour manger et peut être exposé à une constipation chronique.

Quelles sont les difficultés liées à la prise en charge de cette maladie ?

C’est une maladie neurologique. Le nombre de médecins-neurologues au Burkina Faso est faible par rapport aux normes de l’OMS. Ce qui fait qu’on a des patients qui consultent de médecins en médecins et quand ils arrivent chez le médecin-neurologue, c’est avec une maladie assez avancée.
Pour ce qui est du traitement, l’organisme sécrète une substance qui s’appelle la dopamine et c’est la diminution de cette substance dans le cerveau qui entraîne la maladie de Parkinson. Donc, c’est la dopamine que nous devons apporter aux patients par les médicaments. Et en Afrique, l’accès au médicament est limité, seulement 3 malades sur 100 en Afrique ont accès aux médicaments par la dopamine. Il y a une alternative. On a d’autres médicaments qu’on peut prescrire mais qui sont moins efficaces avec plus d’effets secondaires. Ces produits ne sont plus utilisés dans les pays développés, notamment en Europe, mais c’est ce que nous, nous continuons d’utiliser ici. Ces médicaments ne résolvent pas le problème. Pour les malades qui ont accès aux médicaments de référence, ils ne peuvent honorer le traitement sur une longue durée et en plus, il y a plusieurs ruptures. Ce qui fait qu’ils sont sous-dosés.

Quelle peut être la conséquence d’un sous-dosage ?

Rien ne change dans la vie du patient, malgré le médicament qu’il prend. Alors que si on donne le médicament, il y a ce qu’on appelle « la lune de miel ». Le patient est bien équilibré et c’est comme s’il n’était pas malade et ce, pendant plusieurs années pouvant aller à une période de 10 ans. Mais après cette période, l’état de santé du malade peut décliner de façon progressive. Mais on ne donne pas la dopamine à tous les malades. C’est le traitement le plus efficace à utiliser dans les formes d’emblée graves ou évoluées. C’est ainsi qu’on donne la dopamine aux patients âgés de 70 ans. Pour les plus jeunes, il donne des médicaments ayant les mêmes propriétés que la dopamine, donc moins efficace pouvant traiter les formes légères. Par contre, si on le donne à un patient de 40 ans, l’efficacité du médicament risque de s’épuiser rapidement alors qu’on n’aura pas d’autres alternatives. Nous souhaitons que le médicament soit disponible sous forme de génériques, plus accessibles à nos malades.

Comment peut-ont être utile à une personne atteinte de la maladie de Parkinson ?

Etant donné que les médicaments ne sont pas disponibles, il faut en plus agir au niveau de la rééducation pour améliorer la mobilité, la raideur et la douleur.

Françoise DEMBELE


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