HomeA la uneATTENTAT MEURTRIER A MOGADISCIO : Le comble de l’horreur

ATTENTAT MEURTRIER A MOGADISCIO : Le comble de l’horreur


Trois jours après l’attentat au camion piégé qui a frappé la capitale somalienne, c’est la stupeur et l’émotion au sein des populations. Et pour cause. De mémoire de Somaliens, jamais un attentat terroriste n’avait fait autant de victimes : près de 300 morts et autant de blessés. C’est tout simplement le comble de l’horreur pour ce pays qui est certes coutumier des attaques des islamistes shebabs, mais qui n’en avait jamais connu d’une telle ampleur auparavant. D’où les interrogations quant au mode opératoire qui a visé un quartier commercial très animé, mais aussi au choix de la cible constituée de populations innocentes dont des enfants. En effet, passés les premiers moments d’émotion, l’on en est encore à se  demander comment ce camion bourré d’explosifs a pu échapper au contrôle des forces de sécurité. Faut-il y voir un signe de relâchement de la vigilance ou une défaillance du système sécuritaire ? Ce centre commercial très fréquenté était-il la véritable cible des terroristes ou est-ce par un concours de circonstances que l’attaque s’y est produite ? Quoi qu’il en soit, le mal est déjà fait et il faut souhaiter que la Somalie se relève de ce coup dur qui restera sans nul doute longtemps gravé dans les mémoires.

Un seuil a été franchi dans la bêtise et la barbarie humaines

 

Au moment où nous tracions ces lignes, l’attentat n’était pas encore revendiqué. Mais tous les regards étaient tournés vers les islamistes shebabs qui se sont déjà signalés à plusieurs reprises dans le pays, et qui sont en passe de mettre cette région de l’Afrique sous coupe réglée. Chassés de Mogadiscio en 2011, ces « barbus » somaliens contrôlent néanmoins encore de vastes zones rurales d’où ils lancent leurs opérations d’attentats-suicides, souvent dirigées contre la capitale. La bête est donc loin d’être vaincue. Du reste, elle voudrait montrer qu’elle est encore vivante avec une capacité de nuisance hors du commun, qu’elle ne s’y prendrait pas autrement. Cela dit, depuis la chute du président Siad Barre en 1991, la Somalie a de la peine à retrouver ses marques. Et ce vaste pays de la corne de l’Afrique que d’aucuns qualifient de concentré de toutes les calamités et de tous les trafics, traîne aussi la sulfureuse réputation d’être l’un des pays les plus corrompus au monde.  Depuis quelques années, il est confronté à la montée en puissance des islamistes shebabs qui ont juré la perte du gouvernement central soutenu par la communauté internationale et ses 22 000 hommes de l’Amisom (force de l’Union africaine) envoyés à son chevet. Et avec l’attentat du 14 octobre dernier, un seuil a été franchi dans la bêtise et la barbarie humaines. Et l’ampleur du drame porte à croire que beaucoup reste encore à faire en matière de lutte contre l’insécurité de façon générale, et de lutte contre les radicaux shebabs en particulier, dans cette partie du continent. C’est pourquoi cette boucherie humaine doit interpeller la communauté internationale, au-delà des déclarations  de compassion, à multiplier davantage les efforts pour véritablement soutenir la Somalie dans la lutte contre les fondamentalistes et  l’aider à se débarrasser de cette vermine.

C’est un signal sanglant fort envoyé au nouveau maître de Mogadiscio

Au-delà de la Somalie, ce combat appelle l’implication de tous les pays de cette sous-région, en l’occurrence le Kenya et l’Ethiopie, confrontés aussi à la même menace islamiste et aux mêmes problèmes sécuritaires, à apporter  une réponse sous-régionale à un mal qui n’a aucune difficulté à se métastaser, et qui frappe sans distinction, d’une frontière à une autre. Sous un autre angle, cet attentat meurtrier peut être décrypté comme une réponse à la déclaration du nouveau président somalien, Mohamed Abdullahi Farmajo, élu en février dernier et qui se promettait de relever le défi sécuritaire contre les islamistes shebabs dont il avait fait de la lutte, l’un de ses chevaux de bataille. Avec l’attentat particulièrement meurtrier de samedi dernier, il n’y a pas de doute que le péril terroriste reste entier et que la situation sécuritaire est toujours précaire. C’est un signal sanglant fort envoyé par les apôtres de l’apocalypse au nouveau maître de Mogadiscio. C’est dire si le nouveau président a du pain sur la planche. Et cette façon pour le moins tonitruante des terroristes de se signaler, n’augure pas de lendemains paisibles pour le gouvernement. Il lui revient donc de prendre la mesure du péril et de se donner les moyens d’y faire face. Autrement, la Somalie risque de connaître encore et encore d’autres attentats d’ampleur et de continuer à compter ses morts.

 « Le Pays »


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