HomeA la uneATTENTATS-SUICIDES AU NIGERIA : Boko Haram a-t-il encore un adversaire en face ?  

ATTENTATS-SUICIDES AU NIGERIA : Boko Haram a-t-il encore un adversaire en face ?  


 

A bord d’un minibus ou à vélo, des éléments de Boko Haram ont attaqué deux villages du Nord-Est du Nigeria, tuant au moins trente personnes, le week-end écoulé. Peu avant, soit le 9 février dernier, c’est le camp de réfugiés de Dikwa qui avait été attaqué. 60 personnes y avaient péri et 78 autres blessées. Les bilans de plus en plus effroyables qui viennent s’ajouter à la comptabilité déjà macabre qui fait état de plus de 17 000 morts depuis que la secte a basculé dans la radicalité en 2009, sont la preuve que l’arrivée d’un Général de division aux commandes du Nigeria et la mise en place d’une force conjointe multinationale n’ont pas fondamentalement fait bouger les lignes de la tragédie dans le sanctuaire des islamistes. On se rappelle en effet, que le président tchadien Idriss Déby, auréolé, pour ne pas dire grisé, par le comportement héroïque de ses troupes en pointe dans la guerre contre d’autres djihadistes au Nord-Mali avait, de façon trop euphorique et prématurée, fixé au 31 décembre de l’année dernière, la disparition de Shekau et de ses ouailles, du Nigeria et de tout le pourtour du Lac Tchad. Certes, on n’assiste plus aux mises en scène parfaitement théâtralisées où Aboubakar Shekau, sans doute sous l’effet de la drogue, portait la kalachnikov en bandoulière et pointait du doigt « les ennemis de l’islam » tout en tremblant de tout son corps, mais il n’en reste pas moins vrai que Boko Haram a, depuis la menace du président Déby, franchi un pas dans la banalisation de la mort à travers les attentats-suicides dans tous les pays voisins du nord-Nigeria. D’ailleurs, les présidents Buhari et Déby qui avaient imprudemment et prématurément vendu la tête de Shekau avant de l’avoir décapité, semblent avoir revu leurs « ambitions » à la baisse, puisqu’on les entend de moins en moins sur le sujet. C’est, du reste, un mauvais signe pour la suite de la lutte contre la sanguinaire secte, puisque le mutisme pourrait être assimilé sinon à une panne de stratégie militaire, du moins à un aveu d’incapacité à occire les terroristes à court terme. En tout état de cause, c’est une leçon de vie pour tous ceux qui sont en première ligne dans le combat contre le terrorisme, puisqu’ils apprennent à leurs dépens, qu’on ne dégomme pas aussi facilement un ennemi insaisissable dont les objectifs et les méthodes de combat sont tout aussi insondables.

Les attentats-suicides sont un moyen efficace pour ébranler les populations

Tandis que les adeptes de Boko Haram réussissent à faire énormément de mal avec des moyens modestes (usage d’armes automatiques, destructions d’infrastructures indispensables à l’économie), les gouvernements engagés dans la guerre sont obligés de répondre par des demi-mesures, craignant d’être impopulaires s’ils demandent aux citoyens trop d’efforts en argent, comme en troupes ou en multipliant les contrôles qui limitent la liberté. Avec cette situation toujours chaotique, dix mois après l’arrivée au pouvoir de son successeur dont les qualités de commandant de troupes avaient visiblement été exagérées, l’ancien président Goodluck Jonathan qui a perdu le pouvoir en partie à cause du pied-de-nez que lui faisait Boko Haram, doit être en train de rire cyniquement sous cape. Mais face à cette incapacité à anéantir les terroristes, doit-on considérer comme responsables le Généralissime Muhammadu Buhari, le très offensif Idriss Déby, le pragmatique Mahamadou Issoufou ou le discret Paul Biya ? La réponse est évidemment non, puisqu’il est admis qu’aucune armée régulière au monde ne peut venir à bout de ces individus fanatisés à outrance, endoctrinés par des chefs terroristes qui exaltent à longueur de journée la cause pour laquelle ils se sont engagés, en traitant de héros les candidats au martyre qui « décident librement » de tuer des innocents afin de les expédier au paradis  avant qu’ils ne se corrompent, et de les faire souffrir pour leur permettre d’atteindre plus vite encore la félicité. Et comme les attentats-suicides sont un moyen efficace pour ébranler les populations, Boko Haram, qui ne fait visiblement pas le poids dans une guerre conventionnelle face aux armées aguerries des pays riverains du lac Tchad, n’a plus le choix que d’user et d’abuser de cette méthode imparable pour donner l’impression qu’il n’a pas d’adversaire en face. Ni la puissance de feu ni le nombre impressionnant de troupes déployées pour sécuriser cette zone n’ont, en effet, permis de dissuader, encore moins d’arrêter les bombes humaines préparées et lancées à partir d’endroits difficilement localisables. Et le sentiment d’impuissance est tel que le président camerounais Paul Biya a appelé les charlatans les plus émérites de son pays à la rescousse, les unités d’élites opérant à la frontière avec le Nigeria et les comités de vigilance créés pour les besoins de la cause n’ayant pas donné les résultats escomptés.

Le désespoir des populations de cette partie du continent est si grand que certains, les plus extrémistes, demandent rien moins que le bombardement au napalm de la fameuse forêt de Sambissa où semblent s’être nichées les têtes de proue de la nébuleuse terroriste, oubliant sans doute que cela ferait forcément des victimes collatérales et déclencherait du coup, l’ire des organisations des droits de l’Homme. Alors, que faut-il faire ? Quels moyens et quelles méthodes utiliser pour vaincre ces criminels de la pire espèce? Comment identifier et mettre hors d’état de nuire des personnes bien portantes, mais qui se déguisent en malades mentales pour mieux frapper leurs cibles ? Comment désamorcer une bombe cachée sous la burqua que porte une femme avant qu’elle n’en déclenche la charge, surtout que toucher au corps d’une personne de sexe féminin est un sacrilège en Afrique ? Quel type de sommation faut-il pour un kamikaze dopé au tramadol ou à la marijuana, qui n’a plus aucun respect ni pour sa propre vie, ni pour celle des autres ? Voilà autant de questions et d’équations paramétrées auxquelles les dirigeants nigérians, camerounais, nigériens tchadiens et leurs armées respectives n’arrivent pas à répondre adéquatement, du moins pour l’instant. Il ne reste donc plus qu’à espérer qu’avec le temps, et la désaffection des adeptes potentiels de la secte aidant, Boko Haram n’ait plus de ressources humaines qui se bousculent au portillon de la mort sur ordre d’un chef prétendument religieux. C’est à ce moment, et à ce moment seulement qu’on pourrait faire le requiem de l’insurrection terroriste, car ses dirigeants seront isolés et massacrés les uns après les autres, à la grande satisfaction des populations locales qui auront été les plus grandes victimes de ces voyous incultes et irrationnels.

Hamadou GADIAGA


Comments
  • Boko haram multiplie les kamikazes, se sachant peu capable d’affronter une armée. Il use donc de lâcheté, toute honte bue, pour assassiner, non pas attaquer,des villageois. Il est indispensable de mettre main sur des kamikazes vivants, pour remonter aux fabriquant de bombes artisanales. Une méthode serait d’utiliser des balles paralysantes, et les soldats Américains présents au Cameroun peuvent nous éclairer sur ces balles paralysantes.

    14 février 2016
  • Pourquoi n’affiche-t-on pas les commentaires?

    15 février 2016

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