HomeA la uneAU CANDIDAT MAHAMADOU ISSOUFOU QUI APPELLE AU «COUP K.-O.» : «Ce sont eux, plutôt, qui sont K.-O. avant le coup », dixit Maman Sani Malam Maman (SG du Moden-Fa Lumana Africa)

AU CANDIDAT MAHAMADOU ISSOUFOU QUI APPELLE AU «COUP K.-O.» : «Ce sont eux, plutôt, qui sont K.-O. avant le coup », dixit Maman Sani Malam Maman (SG du Moden-Fa Lumana Africa)


Maman Sani Malam Maman est le Secrétaire général du parti Moden (Mouvement démocratique nigérien) -Fa Lumana Africa, de l’opposant nigérien, Hama Amadou, candidat à la présidentielle du 21 février 2016, mais écroué depuis 2015 à la prison civile de Filingué (ville située à 160 km à l’Ouest de Niamey). L’opposant à Mahamadou Issoufou avait quitté le pays, fin août 2014, alors que les députés venaient d’autoriser son audition par la Justice, dans une affaire présumée de trafic international de bébés. Hama Amadou a toujours dénoncé un «dossier politique », alors que le gouvernement parle d’un « dossier de droit commun ». Sur les conditions dans lesquelles son parti – ce dernier fait partie de la Coalition pour l’alternance 2016 (COPA) – mène la campagne dans la perspective du double scrutin du 21 février 2016, sur les chances de réussite de la COPA, sur le refus de l’opposition de signer le pacte de bonne conduite, sur l’affaire présumée de trafic international de bébés, Maman Sani Malam Maman revient, non sans décocher des flèches en direction du parti au pouvoir, le Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS)- Tarayya, du président sortant et candidat à sa propre succession, Mahamadou Issoufou. L’interview a été réalisée au siège du parti de Hama Amadou à Niamey, le 8 février 2016.

« Le Pays » : Quel est votre thème de campagne et pourquoi ce thème ?

Maman Sani Malam Maman : Notre thème de campagne, c’est « le temps de la mobilisation pour le travail ». Cela en raison du fait que depuis pratiquement l’avènement du processus démocratique, il y a à peu près un quart de siècle, le Niger a perdu beaucoup de temps dans des querelles intestines parce bien des régimes qui se sont succédé, ont plus ou moins cherché à distraire plutôt qu’à travailler de manière à ce que démocratie rime avec amélioration des conditions de bien-être général. Il est bon que l’ensemble du dispositif institutionnel, politique et administratif soit redimensionné pour être au service du progrès national et du progrès de chaque Nigérien. Il faut absolument que les Nigériens se persuadent que seul le travail permettra au peuple de créer les conditions d’un épanouissement général qui lui permettra de jouer son rôle au sein de la sous-région ouest-africaine, à l’échelle du continent et du reste du monde.

Dans quelle disposition d’esprit votre parti aborde-t-il cette campagne ?

Depuis pratiquement deux ans, le Moden-Fa Lumana Africa, mon parti, a traversé un certain nombre de crises majeures qui vont de la tentative de déstabilisation du parti à des arrestations massives de ses principaux responsables et cadres, en passant par l’exil forcé du président du parti et son incarcération.

Tentatives de déstabilisation du parti ? De quoi s’agit-il exactement ?

Je parle de tentatives de déstabilisation parce qu’à l’intérieur du parti, l’on a créé une dissidence. Cette dissidence a fortement ébranlé notre parti d’autant que ce sont les premiers responsables, c’est-à-dire un secrétaire général, un premier vice-président et plusieurs autres responsables qui sont partis en créant des situations extrêmement difficiles à gérer. Ce faisant, nous avons dû, dans l’urgence, nous réorganiser, revoir la structuration du parti, modifier l’ensemble de nos textes fondamentaux et nous préparer pour aller aux élections. Au total, nous étions convaincus que les élections générales de 2016 nous trouveraient dans des conditions peu favorables. Nous étions déjà conscients qu’il serait difficile, même en liberté, à notre candidat, Hama Amadou, de battre campagne au même titre que les autres. Ne serait-ce que pour sa sécurité physique. Mais nous avons pris toutes les dispositions pour cela. Allez partout à l’intérieur du pays, vous constaterez la présence du Moden-Fa Lumana Africa. Malgré nos difficultés, nous nous battons. Nous sommes convaincus que nous triompherons, au finish, de cette situation délibérément provoquée et dont l’objectif est de nous empêcher de rassembler le maximum de suffrages en faveur de notre candidat.

De quels moyens disposez-vous pour cela et pour la campagne en général ?

Nous disposons de trois moyens colossaux. D’abord, notre conviction. De fait, nous avons un parti de militants dont le niveau d’engagement est inégalé. Nous l’avons prouvé, et demain, peut-être, nous le prouverons mieux, lorsque les résultats seront publiés. Ensuite, nous disposons d’un parti implanté aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. Enfin, nous avons un certain nombre de cadres prêts à transmettre fidèlement les mots d’ordre du parti partout où de besoin. Ces trois moyens, nous en faisons bon usage.

Grosso modo, quel est le programme du parti Moden-Fa Lumana ?

Notre programme tourne autour de 5 points. Le premier point: la nécessité d’une réforme de fond qui donne à la démocratie, une âme et la présente comme un facteur d’union et de progrès, plutôt qu’un facteur de division, de culture du non-travail et de production de toutes sortes de manipulations en termes de corruption, de concussion, de passe-droits, etc. Pour mener une telle réforme, il faut que l’ensemble du dispositif administratif soit révisé. Mais cette réforme en induit une autre. On en vient au 2e point de notre programme : celui de faire en sorte qu’un certain nombre d’institutions publiques qui ont en charge la régulation de la vie économique, sociale et culturelle du pays, soient revues dans leurs attributions. Que leurs prérogatives soient réaffirmées, contrôlées de sorte qu’elles jouent leurs rôles et rien que leurs rôles. De cette façon, il ne sera plus permis à des responsables politiques de confisquer les prérogatives d’une institution au profit d’un groupe d’individus ou d’un clan. Cet environnement est indispensable. Le 3e point consiste en la création et la libération de forces productives de sorte que les secteurs productifs soient dynamisés et modernisés pour mieux contribuer à l’épanouissement général. Je fais principalement allusion au secteur rural qui renferme plus de 80% de la population nigérienne qui travaille dans les secteurs de l’agriculture et de l’élevage. La nature a doté notre pays de possibilités immenses en matière de production agro-pastorale. Il ne faut pas croire que les timides productions pétrolières et minières pourraient, aujourd’hui, se substituer à ce potentiel qui, lui, est intarissable. Nous voulons réhabiliter le travail de la terre, régler définitivement les questions de production et d’accès à la terre. Tout cela doit être véritablement réglementé de manière à ce qu’on ne laisse plus nulle place aux conflits d’intérêt. Le 4e point repose sur la production de cadres et de ressources humaines de qualité et en nombre suffisant, dans le secteur de l’éducation. Notre objectif ne sera pas, comme dans la situation actuelle, d’aligner seulement des classes. Car, nous ne réduisons pas la question du système scolaire, à des dimensions instrumentales et matérielles. Nous veillerons à ce qu’il y ait une autre Ecole. Sa vocation première sera de former, d’instruire les apprenants, de former des citoyens capables de s’intégrer au sein de la société, de faire en sorte que l’Ecole joue un rôle actif à leur propre profit, mais aussi au profit de tous. Nous créerons les conditions d’une véritable émulation et travaillerons à ce que les enseignants puissent être dans les meilleures conditions de produire un meilleur rendement pour soutenir le développement national.

«Jusqu’à preuve du contraire, nous n’avons jamais dit que Mahamadou Issoufou n’est pas le président de la République, même candidat»

Enfin le 5e point, 5e orientation de notre programme: le secteur des services. Nous voulons que le secteur des services soit un secteur productif de sorte qu’il puisse non seulement accompagner, mais aussi soutenir, à travers divers mécanismes financiers, les efforts de production et d’amélioration de l’ensemble du bien-être des populations nigériennes. Mais tout cela a besoin d’une administration de qualité, d’une Fonction publique réhabilitée, d’un système éducatif qui ne produise pas que des diplômés, d’un système de sécurité national bien adapté au contexte et à la dimension géographique de notre pays. A ce moment, nous aurons besoin d’une coopération régionale affirmée, de relations de bon voisinage assainies. Nous œuvrerons à ce que le Niger, comme il l’a toujours fait, quoique cela ait été momentanément interrompu, joue un rôle actif dans l’édification d’une Afrique fédérée et solidaire, forte et débarrassée de tout complexe pour assumer entièrement son rôle.

Voudriez-vous dire que le pouvoir en place, ne mène pas une bonne politique en matière d’éducation notamment ?

J’entends dans les discours officiels, le pouvoir se vanter d’avoir, soi-disant, construit quelque 15 000 classes. En tant que spécialiste des questions de l’Education et planificateur du secteur de l’Education, je soutiens que la question du système éducatif ne saurait être ramenée à des dimensions matérielles. Lorsqu’un système est, dans son ensemble, défaillant, on ne formera que des cadres tout aussi défaillants. Et les défaillances seront ainsi multipliées à l’infini.

En quoi ce système est-il défaillant ?

Il n’y a qu’à regarder le taux de déperdition scolaire, les différents taux de réussite aux examens. C’est une tare du système éducatif actuel : on ne met pas un accent particulier sur l’effort, le mérite, la nécessité de produire en qualité. On veut que l’école soit tout simplement une machine à produire des diplômés, lesquels sont du reste pressés de parvenir au sommet à travers des raccourcis. Ce qui constitue un facteur de développement de la corruption, de tout ce qui contribue à générer des comportements malsains et dégradants.

Etes-vous confiants quant à votre victoire à l’issue du scrutin du 21 février prochain ?

Nous appartenons à une coalition de partis (ndlr : Coalition pour l’alternance en 2016). Mais pour parler particulièrement de mon parti, le Moden- Fa Lumana Africa, j’ai eu à répondre sans ambages, dans cette même salle (ndlr : la salle de conférence du siège du parti), au lendemain du retour de Hama Amadou, et de son incarcération, que nous avons aidé l’actuel parti au pouvoir, à accéder au pouvoir. Pour l’avoir fait, nous sommes bien placés pour connaître ses forces…
Ainsi que ses faiblesses …
Les faiblesses du parti au pouvoir résident dans la gestion. Cela dit, alors qu’il venait tout juste de naître, en juillet 2010, le Moden-Fa Lumana Africa s’est présenté aux élections et a obtenu 20 % des suffrages. Et depuis lors, nous nous sommes organisés pour nous préparer à affronter les élections générales 2016. Ceux d’en face savent ce dont Moden-Fa Lumana Africa est capable. Et nous le leur démontrerons encore. En tout cas, on les battra.

Reste que le parti au pouvoir bénéficie d’un soutien de taille : celui d’une quarantaine de partis politiques. Ce n’est pas rien …

En fait de quarantaine de partis soutenant Mahamadou Issoufou, c’est plutôt quarante-deux chefs de familles qui se sont réunis. La dimension de ces partis se réduit à ces chefs de familles. En tous les cas, la politique, ce n’est pas de la simple arithmétique. L’analyse politique, particulièrement celle de l’électorat, se fait sur des bases plus objectives, des bases scientifiques qui permettent de faire une évaluation acceptable. Nous avons même entendu le slogan «un coup K.-O.». Ce sont eux, plutôt, qui sont K.-O. avant le coup.

« Ils sont K.-O. avant le coup », dites-vous. Mais quel est le degré d’implantation de votre parti ?

En 2010-2011, beaucoup de nos listes ont été rejetées. Conséquence : dans certaines zones, notre parti n’a pas pu se présenter aux élections. Pour l’élection présidentielle, au-delà du programme, il faut compter avec la notoriété, le leadership incarné par le candidat. Par contre, les élections locales et législatives ont le mérite de coller plus à la légitimité territoriale. Et c’est cela, l’indicateur sûr de l’implantation d’un parti. Pour revenir à votre question, je dirais que Moden-Fa Lumana Africa est présent partout. En tout cas, aux élections passées, nous étions leader à Tillabéry, à Niamey, à Diffa et quasi-leader à Dosso. Ça c’était juste après la naissance du parti, quelque 3 mois avant les élections. Depuis, nous avons travaillé et en ma qualité de secrétaire général, je suis convaincu que notre travail portera ses fruits. D’autant que nous avons particulièrement un atout que les autres partis n’ont pas : l’extrême jeunesse de nos militants. Partout, vous constaterez que ce sont les jeunes et les femmes qui sont en avant. Les gens qui ont mon âge, dans notre parti, se comptent sur le bout des doigts. Et lorsque nous avions eu à accéder à tout un pan de la gestion du pouvoir d’Etat, dans le cadre d’une coalition gouvernementale, nous avions mis en avant, les jeunes. Nous avons été le parti à avoir nommé les ministres, les Directeurs généraux, les chefs de services les plus jeunes.

Quelles seraient vos priorités si vous parveniez au pouvoir ?

Il s’agirait d’abord de recentrer la gestion de l’Etat sur des principes saints. Les fonctions régaliennes des institutions doivent être respectées. Nous ne pouvons pas avancer si nous ne remettons pas la démocratie sur les rails.

Parce qu’elle n’est pas sur les rails à votre avis ?

Elle est seulement sur les rails qui partent de Niamey à Dosso (ndlr : allusion à l’inauguration de la voie ferrée Niamey-Dosso, permettant au train de siffler, pour la 1ère fois, au Niger, le 29 janvier dernier). La démocratie a quitté les rails si l’on en juge par certains indicateurs : libertés collectives et individuelles aujourd’hui bafouées. Comme vous l’avez sans doute appris, en pleine campagne électorale, nous organisions un meeting ( ndlr : le 2 février dernier à Niamey, devant le siège du parti) quand nous avons été pourchassés au motif qu’il y avait un candidat qui devait emprunter la grande voie passant devant le siège de notre parti (ndlr : allusion au président sortant et candidat à sa propre succession, Mahamadou Issoufou, qui revenait d’un meeting à Filingué) ; alors que nous sommes censés être dans un pays civilisé. Les services chargés du maintien de l’ordre pouvaient au moins venir voir les responsables de notre parti, pour leur dire qu’entre telle et telle heure, il est prévu le passage d’une personnalité. Jusqu’à preuve du contraire, nous n’avons jamais dit que Mahamadou Issoufou n’est pas le président de la République, même candidat. Et nous ne nous en sommes pris à aucune institution de la République ! Nous connaissons les valeurs et les responsabilités de chacun.

Mais il semble que vous occupiez l’espace public, la voie notamment…

Y a-t-il un parti qui n’occupe pas la voie publique ? Leur siège (ndlr : celui du parti au pouvoir) est situé à quelque 200 mètres du nôtre (dans la quartier Zabarkan à Niamey). Leurs militants ne sont-ils pas eux aussi sur la voie ? Ils l’ont même occupée militairement car il y a des policiers qui empêchent les habitants du quartier de bien dormir. Il n’y a pas que les libertés individuelles et collectives qui sont bafouées. Il faut y ajouter la corruption électorale. On a vu des militants d’un parti au pouvoir, candidats aux législatives, exposer de l’argent sur une table. En plus de cela, il y a que tout le monde est intimidé, y compris nous. Avec tout cela, peut-on dire qu’il y a la démocratie au Niger ? Pour le moment, je dirais plutôt que la démocratie est étranglée et il faut la libérer.

La coalition pour l’alternance 2016, a-t-elle les moyens de ses ambitions, à savoir barrer la route au candidat et président sortant, Mahamadou Issoufou ?

C’est déjà fait. La route est déjà barrée. Je vous l’ai dit, ils sont déjà K.-O. avant le coup.

Qu’est-ce qui a motivé la fuite puis le retour de votre candidat au bercail, dans l’affaire présumée de trafic international de bébés ?

J’ai eu à expliquer, au lendemain du départ de notre candidat, le 27 août 2014, que nous l’avons tout simplement mis en sécurité.

En clair, il ne s’agissait donc pas d’une fuite ?

C’est nous qui l’avons plutôt mis en sécurité. Nous lui avons dit de s’en aller momentanément. Lui, plusieurs des cadres du parti et moi, sommes des anciens qui ont exercé de hautes fonctions de l’Etat. Que les gens le veuillent ou non, nous sommes au courant d’un certain nombre de choses. Nous savions ce qui était en train de se tramer. Nous avions des informations de l’intérieur, comme de l’extérieur du Niger. En raison donc de ce qui se préparait, nous avons mis notre président à l’abri.

Le choix de la France a-t-il aussi été le vôtre ?

Je vais y revenir… C’est nous qui avons aussi choisi le moment du retour de France, de notre président. Cela aussi, je l’ai dit. Le pouvoir misait sur son départ d’autant que le mandat émis contre lui, n’était pas international. Donc, pour le pouvoir, il pouvait y rester cent ans s’il le voulait. En fait, le régime en place ne voulait pas que notre président soit candidat. Mais comment y arriver, du moment que notre législation ne le prévoit pas ? On a voulu nous opposer une disposition à travers le nouveau droit positif nigérien, en nous disant que le certificat de résidence constitue une des pièces de constitution du dossier pour la présidentielle, et que ce certificat ne pouvait être délivré qu’au vu de la présence physique du candidat. Voilà ce qu’on a voulu nous opposer. C’est ainsi que nous avons dit à notre président, qu’il était temps qu’il rentre au bercail, tout en lui présentant les risques qu’il encourait. Mais il valait mieux prendre ce risque que de se voir disqualifier. Et d’ailleurs, on a exigé, lorsque nous avons demandé qu’on lui fasse un certificat de résidence, sa présence physique. Ils avaient son passeport, son billet d’avion, son certificat d’écrou, son mandat d’arrêt national, son certificat de transfèrement à la prison civile de Filingué (ville située à 160 km au nord-est de Niamey) et avec tout cela, ils disent ne pas savoir où il est. Filingué ne fait-il pas parti du territoire nigérien ? Et bien qu’on nous dise dans quel commissariat Hama Amadou a obtenu son certificat de résidence.

LePays

«La démocratie est seulement sur les rails qui partent de Niamey à Dosso »

En fait, tout cela participe de déviations extrêmement dangereuses. Et Moden-Fa Lumana ne l’acceptera pas. D’autant que Hama Amadou fait partie de ceux-là qui ont contribué à installer le pouvoir en place. Pendant tout le temps qu’il a séjourné en France, notre candidat a travaillé particulièrement à promouvoir une diplomatie partisane active. Il a pris tous les contacts au profit de notre pays. Voilà ce qui justifie le choix de la France. Il s’est employé à un travail de sensibilisation, d’information, de désintoxication. Il est président de parti et comme tel, il était chargé d’une mission.

Pourquoi l’opposition a-t-elle refusé de signer le code de bonne conduite ?

Pourquoi devrait-on le signer ? Y a-t-il eu mauvaise conduite ? Quand quelqu’un vous dit : attention au trou, c’est qu’il y a effectivement un trou devant. S’il n’y a pas de trou, pourquoi alors en parler ? En 2010, c’est moi qui ai signé ce code pour le compte du Moden-Fa Lumana. Cela n’a pas empêché qu’on vive la situation actuelle.

De quelle situation parlez-vous ?

Nous vivons une situation de ségrégation. Ce n’est pas différent de ce que Pieter Willem Botha a fait à Nelson Mandela. Pour le simple fait d’appartenir à un parti de l’opposition, on vous empêche d’exercer vos activités librement. Pour le simple fait d’être un animateur-artiste travaillant pour le compte de l’opposition, on vous incarcère. Pour le simple fait d’être candidat du parti Moden-Fa Lumana, vous êtes vilipendé, intimidé, etc. C’est de la discrimination.

« Nous n’avons pas dit que nous descendrons dans la rue pour empêcher le vote»

Un comité d’évaluation a été prévu pour le Code. Quel bilan a-t-il produit ? Nous avons demandé qu’on fasse le bilan. Et avec nous. S’il est fait, nous verrons si effectivement il y a eu une bonne conduite dans le camp du candidat au pouvoir. Du reste, depuis qu’il a été élu ( ndlr : parlant de Mahamadou Issoufou), s’est-il conformé à ce code ? S’il ne l’a pas fait, qu’on ne nous demande pas d’appliquer quelque chose qui n’a servi à rien d’autre qu’à faire le contraire de ce que les partis ont signé.

L’opposition aurait menacé de semer le trouble dans le pays si sa victoire lui est confisquée. Autant dire que vous n’êtes pas fair-play puisque vous prévoyez votre victoire avant l’heure …

Quel fair-play ? De quel côté se trouve-t-il ? Chez quelqu’un qui promet le coup K.-O. avant le match pour la simple raison qu’il prétend disposer du soutien de 43 partis ? Tout ce qui se discute dans les différents états-majors des partis, est su par l’autre camp. En fait, on veut préparer un conditionnement psychologique, politique dans la perspective d’un hold-up électoral. Nous disons simplement que nous n’accepterons pas que le suffrage du peuple souverain, soit confisqué par qui que ce soit. Nous n’avons pas dit que nous descendrons dans la rue pour empêcher le vote. Mais nous disons que la volonté du peuple souverain nigérien, doit être respectée. Et si dire cela est perçu comme une déclaration de guerre, alors c’est la démocratie qui est agressée. Car, c’est elle qui impose la volonté du peuple sur la base de laquelle le pouvoir est dévolu. Le Niger est un régime démocratique et il faut par conséquent laisser le peuple s’exprimer librement. Si, en dehors des manipulations en termes d’achats de conscience, de déploiement massif des moyens de l’Etat, etc., on veut, en plus, choper les voix du peuple, alors, ceux qui se livreront à un tel exercice nous trouveront sur leur chemin.

Le Niger a été plusieurs fois victime d’attaques de Boko Haram. Si vous étiez élus, quelle serait votre stratégie pour y faire face et faire face au terrorisme en général ?

Le problème de Boko Haram est un problème bien connu parce qu’il a germé et a évolué. En tout cas, pour ce qui concerne notre pays, notre position est que le problème a été mal géré par les autorités nigériennes. Si Dieu fait que le président Hama Amadou est élu, nous créerons les conditions qui permettent aux populations des zones attaquées, de bénéficier d’une attention particulière en termes d’investissements publics. Certes, figurent parmi ces mouvements, des étrangers. Mais on sait que parmi les personnes qui alimentent ces mouvements depuis pratiquement une trentaine d’années, il y a des Nigériens. Il faut chercher les causes profondes du phénomène. Et j’en vois deux : le problème de l’intégration économique et celui de l’élargissement du phénomène de la pauvreté. Il faut régler ces questions au plus vite. Bien sûr, le Niger, tout seul, ne viendra pas à bout du fléau. La coopération sous-régionale et internationale est indispensable. Mais il faut bien le reconnaître, le Niger fait partie des pays les plus exposés. Car, il est voisin de qui vous savez, et je parle au pluriel. Par ailleurs, notre type d’habitat, type dispersé, les caractéristiques géo-climatiques du Niger, sont favorables au développement d’activités criminelles. Et cela ne date pas d’aujourd’hui. Il y avait dans le temps, les razzias et autres formes de banditisme. Ce sont tous ces phénomènes qui sont en train de prendre des formes modernes avec l’utilisation de moyens et d’armes modernes. Nous sommes face à un problème difficile, complexe, structurel. Et il faut lui appliquer des solutions de long terme.

Propos recueillis à Niamey par Cheick Beldh’or SIGUE (envoyé spécial)


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