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BLOCAGE DU FINANCEMENT DE L’OPPOSITION AU TOGO


A quelques heures du premier tour de la présidentielle du 22 février prochain, le non-déblocage de la subvention de l’Etat aux partis politiques pour battre campagne, fait grincer des dents au Togo. Surtout au sein des candidats de l’opposition dont certains ont dû revoir leurs ambitions à la baisse, en termes d’organisation de meetings ou de mobilisation de militants. Ainsi, entre suspension, réduction et même annulation d’activités, les challengers du président Faure Gassingbé, contraints de « faire avec les moyens du bord », peinent véritablement à exister dans une campagne où le parti au pouvoir, comme c’est généralement le cas en Afrique, a bien souvent à sa disposition, le personnel et les moyens logistiques de l’Administration publique pour son candidat. Et Dieu seul sait s’il ne se prive pas de s’en servir. C’est pourquoi, même si le camp présidentiel dit être aussi pénalisé et demande « au gouvernement de faire le maximum pour que nous puissions également rentrer dans nos fonds », point n’est besoin d’être grand clerc pour savoir à qui le non-déblocage à temps de cette manne financière, porte le plus préjudice.

 

On peut se demander si le retard dans le déblocage de ce financement public, est dû à un laxisme ou s’il répond à des calculs politiciens

 

Certainement pas au candidat Faure pour qui les 42 millions de FCFA que chacun des sept candidats doit recevoir au terme d’un décret pour la présente campagne, s’apparente à une broutille. C’est pourquoi l’on peut se demander si le retard dans le déblocage de ce financement public, est dû à un laxisme ou s’il répond à des calculs politiciens.  Même si, au passage, force est de reconnaître qu’aucun parti politique sérieux ne doit compter totalement sur les fonds publics pour ce genre de rendez-vous importants avec les électeurs. Quoi qu’il en soit, cela n’est pas bon pour l’image du pouvoir qui confirme, au passage, que le Togo reste fidèle à sa réputation de cancre de la démocratie dans la sous-région ouest-africaine. D’ailleurs, le pouvoir  n’a  aucune excuse à ne pas rendre ce financement disponible à bonne date, pour qu’il puisse véritablement servir à ce à quoi il est censé répondre. C’est une question de bon sens, d’équité et surtout d’orthodoxie financière qui participe aussi de la bonne gouvernance. Et dans le cas d’espèce, l’on est même porté à croire que c’est une façon, pour Faure, de boxer en dessous de la ceinture. Car, si cet argent n’est pas vital pour sa campagne à lui, à écouter certains de ses rivaux qui ont « dû revoir leur programme » ou qui, « au lieu de faire de grands meetings, [font] de petits meetings », l’on se demande si cette forme d’asphyxie financière qui ne dit pas son nom, n’est pas une arme dont se sert le président-candidat pour clochardiser davantage ses concurrents. Est-ce le signe d’une certaine fébrilité ? C’est une hypothèse à ne pas écarter. D’autant que non seulement  le Togo expérimente, à ce scrutin présidentiel,  pour la première fois, le scrutin à deux tours, mais aussi l’opposition compte en son sein, des candidats de poids comme Jean-Pierre Fabre, arrivé deuxième en 2015 avec un peu plus de 35% des voix, ou encore l’ex-Premier ministre, Agbeyomé Kodjo, un ex-homme du sérail capable aussi de tailler des croupières au parti du chef de l’Etat.

 

La consultation populaire du 22 février prochain est loin d’avoir livré tous ses secrets

 

Si l’on ajoute à ce tableau, la fin de non recevoir réservée par les autorités à la requête de l’Eglise catholique pour l’accréditation de ses observateurs à ce scrutin, il y a de quoi se demander si le président Faure est aussi serein que ses partisans veulent le faire croire. D’autant plus que d’autres entraves ont été signalées, par endroits, par des candidats de l’opposition qui se sont vu interdire la tenue de meetings quand ceux-ci n’ont pas été simplement perturbés, comme ce fut, par exemple,  le cas du candidat du principal parti de l’opposition, l’ANC (Alliance nationale pour le changement), dans trois communes du Nord, en l’occurrence Cinkansé, Tandjouaré et Gando. De ce point de vue, l’on peut comprendre que Faure ne veuille pas prendre de risque, face à la soif d’alternance d’une grande partie de ses compatriotes qui n’ont certainement pas  renoncé au rêve d’obtenir par les urnes, ce qu’ils n’ont pu avoir par la rue ; eux qui n’ont eu de cesse de battre le macadam pour faire barrage à une énième candidature du locataire du palais de Lomé II, sans jamais avoir gain de cause. En tous les cas, si malgré le bilan qui est le sien et les moyens colossaux dont il dispose avec une administration pratiquement aux ordres, Faure doit encore nourrir des appréhensions pour sa réélection, il y a lieu de croire que la consultation populaire du 22 février prochain est loin d’avoir livré tous ses secrets. Et on attend de voir.

 

« Le Pays »

 


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