HomeOmbre et lumièreCANIVEAUX SANS DALLES DANS VOS VILLES : Ceux qui meurent et ceux qui mangent

CANIVEAUX SANS DALLES DANS VOS VILLES : Ceux qui meurent et ceux qui mangent


Le lundi dernier, j’allais de quartier en quartier à la recherche de ma pitance quotidienne, le cœur serré, la mine déconfite et les bras croisés, lorsque je vis soudainement un attroupement. Je pressai le pas pour savoir ce qui s’y passait. Arrivé sur les lieux, je vis un véhicule complètement caillassé, renversé dans un caniveau. Par la grâce de Dieu tout-puissant, l’occupant, la cinquantaine bien sonnée, en est sorti indemne. Mais son véhicule était irrécupérable à tout point de vue. Cet accident m’a rappelé celui du voisin de mon oncle Tiga qui, malheureusement, n’a pas survécu. Profondément touché à la tête et aux côtes, il est décédé une semaine après un accident de la circulation, alors qu’il revenait du service, l’année dernière. Ce jour-là, il avait perdu le contrôle du volant de son véhicule et s’était retrouvé dans un caniveau. Le choc était tellement brutal que le véhicule avait même pris feu. Il a fallu le secours d’autres personnes pour l’en extirper. Mais hélas, il nous a finalement quittés.

En fait, ce genre d’accidents liés aux caniveaux sans dalles sont très nombreux dans nos villes. J’ai en mémoire bien d’autres qui ont endeuillé des familles. Cela m’attriste au plus haut point.

Pourquoi construire des voies avec des caniveaux sans dalles dans une ville comme Ouagadougou? Car, cela, on le sait, pose un grand problème de sécurité urbaine. La moindre inattention peut nous être fatale. Puisqu’on peut y laisser la vie ou dans le meilleur des cas, devenir handicapé à vie. Ce n’est pas normal. Si ce n’est pas un manque de vision, il doit y avoir un problème de probité.

Quand on gagne à manger, on se tait ou on ferme l’œil sur les dérives

Car, sous le règne de Blaise Compaoré, tout était permis. On pouvait détourner de l’argent comme on voulait, sans être inquiété, pourvu que l’on ne donne pas l’impression de convoiter le douillet fauteuil de Kosyam. On a vu des délinquants à col blanc décorés pour services rendus à la Nation. Ne me demandez pas quel service un délinquant peut rendre à une nation. Je vous renverrai tout simplement auprès de Blaise Compaoré qui, seul, peut répondre à cette question. Cela dit, je reste convaincu que certains esprits malins n’hésiteront pas à empocher l’argent des dalles des caniveaux, même si cela est prévu dans le cahier des charges. Car au Burkina ici, on se connaît tous. On sait qui est qui. On sait qui a fait quoi pour devenir ce qu’il est aujourd’hui. Les vampires, on en dénombre à la pelle dans tous les secteurs de la vie, prêts à sucer le sang des autres. Et ils n’ont aucune gêne, si, par leur faute, des milliers de personnes en viennent à mourir. Cela leur importe peu. Pourvu seulement que leurs poches soient pleines, leur bedaine bien entretenue et leurs maîtresses bien gérées.

Ainsi va la vie au pays des Hommes intègres. Les uns meurent, les autres mangent. Je comprends pourquoi d’ailleurs certaines voies bitumées n’ont même pas de caniveaux. Et le peu que l’on y trouve, n’est pas couvert.

Ce qui me fait mal, c’est quand j’entends parfois ces mêmes gens se plaindre du fait que certains caniveaux sont bouchés d’ordures en tout genre, rendant difficile pour ne pas dire impossible, par moments, l’évacuation des eaux de pluies. Conséquences, on assiste parfois à des inondations avec leurs lots de maladies. A qui la faute ? Si j’allais répondre, je dirais que c’est la faute aux vampires de la République. Car ce sont eux qui vivent sur le dos des autres. Au fait, le laisser-aller est tel que je me demande parfois s’il y a un suivi ou un contrôle de la part des services compétents, tant les choses vont de mal en pis. Mais je comprends que dans ce pays-là, la réalité est tout autre. Tout le monde veut manger. Et quand on gagne à manger, on se tait ou on ferme l’œil sur les dérives même les plus graves. L’essentiel étant que la poche soit pleine. La seule solution, à mon avis, passera par l’implication de la société civile. Je veux parler de la vraie société civile et non pas celle-là qui a été infiltrée par les princes régnants. Elle seule pourrait redresser les choses et éviter le sabotage dans l’exécution des travaux publics. C’est ce que je souhaite pour que le Burkina nouveau auquel on aspire, depuis la chute de Blaise Compaoré, ne soit pas une vue de l’esprit. On peut y parvenir si l’on y met de la volonté.

« Le Fou »


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