HomeA la uneCARNAGE A GARISSA : La Pâques crucifiée au Kenya

CARNAGE A GARISSA : La Pâques crucifiée au Kenya


Les chrétiens du Kenya ont    vécu la Pâques la plus ensanglantée de leur histoire. 148 morts, c’est le bilan de l’attaque des Shebabs  somaliens, contre l’université de Garissa. 148 morts, en majorité des chrétiens, fusillés à bout portant ou égorgés devant leurs camarades musulmans, à qui les assaillants avaient bien  voulu laisser la vie sauve. Ce n’est pas la première fois que le Kenya fait face à une attaque des Shebabs ; on est même tenté de dire que la lutte contre les Shebabs est devenue la première préoccupation du Kenya, du point de vue sécuritaire. Ces milices islamistes reprochent au Kenya sa participation à la force de l’Union africaine en Somalie, mais au-delà de cette raison officielle, on peut dire que les Shebabs trouvent dans  les différentes attaques contre ce pays, une façon de traduire toute la haine qu’ils vouent à l’Occident chrétien. Et c’est bien ce qu’il faut comprendre dans cette troisième attaque terroriste contre le pays du président Kenyatta. En s’attaquant à l’université, ces gens qui prétendent défendre l’islam s’en sont pris avant tout à un lieu fortement emblématique. L’université est l’objet du courroux des islamistes, parce que tout ce qui  participe de l’éveil des consciences des populations va à l’encontre  de la doctrine de ces obscurantistes qui y voient une menace contre leur pouvoir. Dans d’autres pays, ils s’opposent ouvertement à la scolarisation des filles, quand ce n’est pas  la femme au volant qu’ils haïssent, parce que, disent-ils, la conduite est un acte que Dieu lui-même réprouve. S’en prendre donc à un temple du savoir, telle que l’université, c’est combattre tout ce qui va à l’encontre de l’idéologie obscurantiste que ces psychopathes distillent. C’est une lutte contre l’Occident qui, pourtant, manque totalement de cohérence dans la mesure où ces malades mentaux n’interdisent pas l’utilisation des armes de fabrication ou de conception occidentale. Mais au-delà de cette haine contre l’Occident, ce choix d’endeuiller la Pâques des chrétiens du Kenya, est un signal fort que les Shebabs envoient aux  Kenyans et qui amène à se poser des questions quant  à l’existence d’éventuelles  passerelles entre ce mouvement islamiste et celui qui sévit au Nord du Nigeria, Boko Haram, pour ne pas le  nommer. Le fait d’avoir choisi la fête de la résurrection pour semer la mort dans ce pays chrétien à 80%, révèle une contradiction flagrante de l’idéologie de paix que prêche l’islam dont ils se réclament pourtant.

 

Tant que la Somalie ne sera pas libérée, le Kenya mettra longtemps à retrouver la paix

 

Cela dit, un des constats les plus désarmants que l’on peut faire à la suite de cet  acte terroriste, c’est qu’il révèle deux grosses lacunes du système de sécurité du Kenya. Il s’agit de la vulnérabilité de son  système de défense et l’inefficacité  de ses services de renseignement. En effet, des sources bien informées affirment avoir alerté à maintes reprises les autorités kenyanes sur une probable attaque terroriste contre l’université de Garissa.  Mais, de toute évidence, les autorités kényanes n’ont  donné aucune suite à cette alerte. Ces 148 morts sont donc le prix que paient les Kenyans pour le  laxisme de leurs autorités. A quoi servira donc ce fameux mur que le gouvernement prévoit de construire à sa frontière avec la Somalie, s’il s’est montré incapable d’exploiter des informations qui devaient lui permettre d’éviter un tel drame ? 

Enfin, il faut dire que l’Occident partage la responsabilité de ce carnage, pour avoir abandonné la Somalie pendant près de deux décennies. Deux décennies sans Etat, qui ont finalement fait de ce pays le terreau de prédilection des terroristes de tous poils. Tant que la Somalie ne sera pas libérée de ces êtres maléfiques qui tuent au nom de Dieu, le Kenya mettra longtemps à retrouver la paix.

Mais en attendant, on peut déplorer une chose : l’absence d’une action forte de solidarité à l’endroit du Kenya, de la part de la communauté internationale. L’acte terroriste perpétré dans les locaux de Charlie Hebdo a laissé une douzaine de victimes sur le carreau. On a vu la grande mobilisation qui s’en est suivie, rassemblant des chefs d’Etats d’Europe et d’Afrique. A Garissa, les personnes tuées étaient, excusez du peu, 148. Alors, question à la conscience morale universelle : face à la barbarie de ces hommes à esprit médiéval, la solidarité humaine internationale fonctionne-t-elle sur la base d’une géométrie variable qui tient compte de la géographie et de la race ? Mais avant toute réponse à cette interrogation, honte aux dirigeants africains !

 

Dieudonné MAKIENI


Comments
  • Félicitation Monsieur MAKIENI pour cet écrit de belle facture. Ton français est propre et les arguments bien sequencés. Le fond en dit long et est sans commentaire. C’est du propre.

    7 avril 2015
  • En réalité, les rumeurs d’attaques qui visent tel ou tel lieu foisonnent au Kenya et principalement à Nairobi. Donc, reprocher aux services de renseignement leur manque de relativité c’est aller un peu vite en besogne. Quant au manque de soutien de la communauté international, c’est connu, on a vu le cas au Nigeria, il a fallu l’implication de Michelle Obama pour qu’on s’indigne de l’enlèvement des jeunes lycéennes. Le Kenya est un pays riche et fier et qui ne mendie pas, donc réaction ou pas, solidarité ou pas, le peuple Kenyan se relèvera, comme toujours. Je suis surpris que vous ne fassiez pas cas de la complicité ou du moins la passivité de la communauté dite musulmane qui, pour des caricatures crie au scandale et quand on massacre 148 adolescents au nom de l’islam, demeure muette comme une carpe.

    8 avril 2015

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