HomeA la uneCENI DE LA RD CONGO : La démocratie  malade de sa CENI

CENI DE LA RD CONGO : La démocratie  malade de sa CENI


 

« Un seul être vous manque et tout est dépeuplé », disait Lamartine. Avec cet aphorisme, peut-on dire que l’Abbé Apollinaire Malumalu, le tout nouveau ancien président démissionnaire de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) de la RDC, manquera aux Congolais ? Ou du moins, sa démission impactera-t-elle négativement le processus électoral en cours au Congo ? En tout cas, le processus électoral congolais a, selon toute vraisemblance, du plomb dans l’aile, s’il faut craindre que ce départ n’ouvre une saison d’incertitudes dans l’organisation des scrutins à venir au pays de Lumumba. C’est vrai, l’homme à la soutane est malade et suit des soins médicaux entre l’Afrique du Sud et les Etats-Unis. Ce faisant, il était de plus en plus absent de son bureau et ne pouvait donc plus assumer correctement ses responsabilités. C’est vrai également que dans son rôle de président de la CENI, l’homme d’Eglise n’avait pas que des amis. Au sein des partis politiques et de la société civile, certains accusaient le prélat d’être à la solde du pouvoir, renforcés en cela par le comportement d’André Mpungwe, le vice-président de la CENI et cadre de la  majorité, le PPRD, (Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie), qui était chargé de gérer le quotidien au bureau de la Commission électorale. C’est dire si beaucoup de contempteurs attendaient avec impatience le départ de Malumalu pour non seulement mettre fin à une certaine inertie au sommet de la CENI, mais aussi exiger une restructuration pure et simple de cette institution.

La crédibilité d’une élection dépend de la qualité de la structure qui l’organise, et donc des Hommes qui l’animent

Mais quel que soit le camp où l’on se situe par rapport à l’appréciation du travail de l’Abbé Apollinaire, force est de reconnaître que la démission de cet homme est un énorme gâchis pour la RDC. Autrement dit, ses détracteurs peuvent le vouer aux gémonies,  il reste que Malumalu a su faire preuve de probité morale et professionnelle. Car comme l’on aime à le rappeler, la crédibilité d’une élection dépend de la qualité de la structure qui l’organise, et donc des Hommes qui l’animent. Malgré les tentatives d’inféodation du pouvoir de Joseph Kabila, l’Abbé a su prendre ses distances pour assurer une indépendance à la CENI. Rien que pour cela, il convient de lui rendre hommage et au-delà, à toute la hiérarchie catholique congolaise qui a fait preuve d’engagement démocratique, quitte à se brûler parfois les ailes.

Les difficultés demeurent

Le processus électoral du pays des léopards est des plus complexes. Et cela, non seulement par la mauvaise foi des acteurs, mais aussi par l’incurie du président de la République. Il se pourrait même que les difficultés rencontrées dans le processus électoral de son pays, aient rendu Malumalu davantage malade, le contraignant à la démission. Faut-il le rappeler, dans ce processus, rien n’est encore joué. La Cour suprême a même dû interpeller les autorités congolaises sur la nécessité de doter de moyens nécessaires, la CENI, pour l’organisation des élections. Mais jusqu’à présent, rien n’y fit. Peut-être,  l’Abbé a-t-il préféré ne pas porter la responsabilité morale et politique d’une mascarade électorale. D’ailleurs, si Malumalu a tenu jusqu’au 10 octobre avant de démissionner, il a sans doute dû brûler beaucoup de cierges, étant donné qu’il n’est pas facile d’organiser des élections crédibles dans un pays de dictature. Dans tous les cas, un entraîneur de football ne peut travailler convenablement si on lui dicte ce qu’il a à faire. Apollinaire Malumalu parti, il reste à lui  trouver un remplaçant, un homme de consensus et digne de confiance. Les Congolais se doivent donc de trouver l’oiseau rare à la hauteur des tâches et des responsabilités dans ce pays-continent où tenir des élections est un véritable casse-tête. Ce n’est pas évident que le pouvoir en place à Kinshasa accepte de composer avec un homme de droiture comme l’a été l’Abbé dont la démission pourrait être un bon débarras pour l’homme fort de Kinsasha qui aspire à un 3e mandat. Mais les démocrates congolais doivent se donner les moyens pour que la direction de la CENI n’échoie pas entre les mains de n’importe qui. En tout cas, il appartient à la société civile et surtout à l’Eglise à qui il est demandé de choisir le remplaçant de Malumalu, de dénicher l’homme providentiel qui saura à la fois plaire à la démocratie et à la dictature. Une  véritable quadrature du cercle.

Michel NANA


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