HomeRencontreCHRYSOGONE ZOUGMORE, PRESIDENT DU MBDHP : « Lorsqu’on tue de façon odieuse des jeunes, la priorité n’est pas de leur rendre hommage »

CHRYSOGONE ZOUGMORE, PRESIDENT DU MBDHP : « Lorsqu’on tue de façon odieuse des jeunes, la priorité n’est pas de leur rendre hommage »


Le Burkina a rendu hommage aux martyrs de l’insurrection populaire de fin octobre 2014, le 30 mai 2015. Une cérémonie à laquelle le Mouvement burkinabè des droits de l’Homme et des peuples (MBDHP) a brillé par son absence, en refusant de s’associer à cette commémoration. Chrysogone Zougmoré, président du MBDHP, dans les lignes qui suivent, donne les raisons pour lesquelles le mouvement qu’il dirige, est resté en marge de cette célébration nationale. Lisez plutôt !

 

Pourquoi le MBDHP s’est-il retiré de la cérémonie d’hommage aux martyrs des 30 et 31 octobre  2104 ?

 

Nous n’avons pas voulu nous rendre complices d’une démarche pouvant favoriser l’impunité au Burkina Faso, surtout en ce qui concerne ce qui s’est passé les 30 et 31 octobre 2014. C’est le même scénario que celui qui a concouru à l’institution de la fameuse Journée nationale de pardon, le 31 mars 2001. Du reste, cette journée est tombée en désuétude parce qu’on a jamais fait la lumière, encore moins dit la vérité sur les crimes impunis jusqu’alors. Lorsqu’on tue de façon odieuse des jeunes en tirant sur eux, la priorité n’est pas de leur rendre hommage mais plutôt d’établir les circonstances dans lesquelles ils ont été tués. C’est de dire la vérité et de leur rendre justice. Je pense que c’est cela la priorité. Voilà donc les raisons de notre non-participation à la Journée nationale d’hommage aux martyrs de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014. Du reste, je pense que nous rendons ainsi hommage, en insistant sur le fait qu’il faille leur rendre Justice. On a l’habitude de dire que « plus rien ne sera comme avant », mais on constate que c’est exactement ce qui se passait par le passé. J’ai rappelé tantôt cette fameuse Journée nationale de pardon instituée depuis bientôt 15 ans. Mais jusqu’à présent, on n’a rien vu venir en termes de vérité et de justice. C’est donc pour ne pas nous rendre complices que nous avons pris cette position retranchée.

 

Vous avez tantôt parlé de démarche, de quoi est-il exactement question ?

 

La logique en pareille circonstance, au niveau de la démarche, aurait d’abord consisté à dire la vérité et à rendre justice avant d’entreprendre de rendre hommage à ces martyrs. La démarche inverse peut conduire à l’impunité.

 

Ne croyez-vous pas à la sincérité de la démarche initiée par le gouvernement pour faire la lumière dans cette affaire?

 

Le gouvernement n’a pas dit avoir ouvert des dossiers concernant les morts de l’insurrection populaire. Si des dossiers avaient été ouverts, il aurait informé l’opinion publique. Jusqu’à présent, à notre connaissance, rien de véritablement substantiel n’a été entrepris pour dire la vérité sur ce qui s’est passé les 30 et 31 octobre. C’est simple, nous l’avons dit. Il est évident que ce sont des éléments du Régiment de sécurité présidentiel (RSP) qui ont tiré sur ces jeunes. Je ne sais pas pourquoi jusqu’à présent, plus de sept mois après les évènements, on ne veut pas nous dire qui a ordonné de tirer ? Et quels sont les éléments qui ont tiré ?

 

De quels moyens dispose le MBDHP pour contraindre le gouvernement à prendre en compte ses revendications ?

 

Nous n’avons pas la prétention de contraindre qui que ce soit à dire la vérité et à faire la justice. Nous attirons simplement l’attention du gouvernement et de l’opinion publique, que nous avons l’impression qu’au niveau des autorités de la transition, il y a quelque chose qui ne va pas. Nous avons l’impression qu’elles ne veulent pas nous dire qui a ordonné de tirer.

 

Avez-vous des réponses venant du gouvernement sur vos préoccupations ?

 

Nous n’avons pas de réponse. Nous avons toujours réclamé vérité et justice sur les martyrs des 30 et 31 octobre 2014. Jusqu’à présent, nous attendons la réponse du gouvernement. Il n’y a pas encore de vérité, ni de justice.

 

Quelles sont les actions que vous comptez entreprendre ?

 

Nous avons entrepris des procédures auprès du Tribunal de grande instance (TGI), auprès du ministère de la Défense et auprès du président du Conseil national de la transition. Nous attendons la suite de ces procédures que nous avons enclenchées depuis le mois de mars 2015.

 

Un mot sur l’exhumation des restes de Thomas Sankara

 

Il faut souhaiter que le processus puisse suivre normalement son cours et aboutir à la vérité et à la justice.

 

Propos recueillis et retranscrits par Thierry Sami SOU

 

 


Comments
  • la position du MBDHP peut paraître excessive mais je crois sincèrement que c’est la meilleure posture. En effet, rien n’est effectivement fait sur le plan judiciaire afin d’identifier et de punir les coupables. On l’aurait su car l’ouverture de cette procédure n’entre pas dans le cadre du secret de la procédure. Au Burkina Faso, on ne règle jamais conséquemment les questions. Dès lors une telle cérémonie ressemble à du folklore. Tenez actuellement il y a un grand scandale de détournement de deniers publics à la DGI après le tapage au bout du compte personne ne sera condamnée judiciairement. Et cerise sur le gâteau une des personnes impliquée pourrait un jour Directeur général! Il faut arrêter d’enfumer le peuple!

    6 juin 2015
  • Depuis 1998 le MBDHP prend part aux cérémonies comémoratives de l’assassinants de Norbert ZONGO et pourtant aucune justice n’a encore été rendu sur ce dossier. Mais celà n’a jamais empèché le MBDHP de rendre homage à Norbert ZONGO.
    Au fond, je pense que ce mouvement a toujours du mal à accepter que les morts des 30 et 31 octobre sont des martyrs et pour cause la réussite de l’insurrection n’a pas surpris que Blaise Compaoré seulement, même Chrysogone et son MBDHP ne croyait pas que le peuple pouvait renverser le régime sans eux.

    6 juin 2015
  • Bravo , M. le Président ! Toujours la même rigueur dans la protection , la promotion et la défense des Droits de l’Homme ! Pour rendre justice aux martyrs de l’insurrection , il faut mettre aux arrêts ces gibiers de potence : Luc Adolphe Tiao , Honoré Nabéré Traoré et Gilbert Diendéré !

    6 juin 2015
  • Merci FALINGA, je pense exactement la même chose que toi. Ce monsieur de Chrysogone ne m’inspire pas confiance.

    12 juin 2015

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