HomeA la uneCHRYSOGONE ZOUGMORE, PRESIDENT DU MBDHP, A PROPOS DU DOSSIER NORBERT ZONGO : « Les choses n’ont pas bougé»

CHRYSOGONE ZOUGMORE, PRESIDENT DU MBDHP, A PROPOS DU DOSSIER NORBERT ZONGO : « Les choses n’ont pas bougé»


Avec la chute du régime de Blaise Compaoré, nombreux sont les Burkinabè qui croyaient que justice serait vite rendue au journaliste d’investigation Norbert Zongo, assassiné le 13 décembre 1998 avec ses compagnons sur la route de Sapouy. Hélas, plus de deux ans après et malgré les efforts déployés par la Transition qui a rouvert le dossier, force est de constater que la justice se fait toujours attendre. C’est, du moins, l’avis du président du Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples (MBDHP), Chrysogone Zougmoré, que nous avons, à la faveur de la commémoration du 18e anniversaire de l’assassinat de Norbert Zongo, rencontré le 8 décembre dernier au siège du mouvement à Somgandé, à Ouagadougou. Outre le dossier Norbert Zongo qu’il estime n’avoir pas bougé, ce militant de première heure de la lutte pour la justice pour le journaliste assassiné, a aussi, sans langue de bois, apporté des éléments de réponses  aux  questions relatives au front social qui est en ébullition depuis quelques mois. Lisez plutôt.

 

« Le Pays » : Sous quel signe sera commémoré le 13 décembre de cette année?

 

Chrysogone Zougmoré : Il faut dire que cela fait 18 ans que Norbert Zongo et ses compagnons ont été assassinés sur la route de Sapouy, et depuis cette date, nous luttons pour que justice se fasse. Malheureusement, 18 ans après, justice n’a toujours pas été rendue. Si bien que cette année, nous avons placé la commémoration de ce 18e anniversaire sous le thème de la poursuite de la mobilisation citoyenne contre l’impunité des crimes de sang et des crimes économiques. Mais, nous l’avons élargi et nous allons nous intéresser aussi aux questions de la vie chère et à celles de la domination de notre pays par certaines puissances étrangères.

 

Pourquoi cela?

 

Nous avons jugé utile de le faire parce que Norbert Zongo s’intéressait à ces questions-là. Et compte tenu de l’évolution de la situation actuelle au plan national et international, nous avons estimé que nous pouvions intégrer ces données-là, dans la commémoration de ce 18e anniversaire de l’assassinat de Norbert Zongo.

 

Plus de deux ans après la chute du régime Compaoré, ne craignez-vous pas que la mobilisation faiblisse ?

 

Je pense que l’essentiel, pour ce genre d’événements, c’est surtout de maintenir la flamme de la mobilisation, allumée. Qu’elle soit grande ou pas, pourvu que cette flamme-là soit allumée, que l’oubli ne se fasse pas autour de tels événements malheureux que notre pays a connus. Si nous avons tenu pendant 17 ans et si nous nous apprêtons à commémorer le 18e anniversaire, c’est que cette flamme-là est allumée. Et quoi qu’on dise, nous avons quand même marqué des points. Nous avons obtenu la condamnation de l’Etat burkinabè (NDLR :  par la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples) et c’est le MBDHP qui était à l’initiative de cette démarche, de cette victoire-là.

 

«  Tant que la lumière ne sera pas faite, nous allons poursuivre la lutte »

 

C’est pour dire que nous restons mobilisés, quel que soit le nombre de personnes qui viendront aux différentes manifestations. Naturellement, nous souhaitons qu’il y ait le maximum de gens à nos activités. Mais, beaucoup conviendraient avec moi que 18 ans après, on ne peut plus avoir la même mobilisation que celle que nous avons connue au tout début en 1998. Mais, nous restons constants dans notre démarche en nous disant que tant que la lumière ne sera pas faite, nous allons poursuivre la lutte.

 

Au plan judiciaire, où en est-on avec le dossier Norbert Zongo?

 

Au plan judiciaire, nous sommes malheureusement toujours pratiquement à la case départ si je puis m’exprimer ainsi. Après le verdict de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples à Arusha, il y a eu un dédommagement des ayants- droit qui sont rentrés dans leurs droits. Mais, comme je l’ai dit en son temps, ce n’est pas cela l’essentiel. L’essentiel pour nous, c’est le volet pénal. Je dois dire qu’à ce jour, nous sommes malheureusement dans l’obligation de reconnaître que les choses n’ont pas suffisamment avancé. On nous a annoncé, le 10 décembre 2015, l’inculpation de trois anciens militaires de l’ex-Régiment de sécurité présidentielle (NDLR : il s’agit du caporal Wampasba Nacoulma, du sergent Banagoulo Yaro et du soldat Christophe Kombasséré). Depuis ce temps-là, à notre connaissance, les choses n’ont pas bougé.  Et nous trouvons que cela n’est pas normal. Avec la chute du régime Compaoré et l’avènement de celui de Roch Marc Christian Kaboré, nous pensions que les choses iraient vite. Malheureusement, nous constatons que le dossier est resté en l’état.

 

Selon vous, à quoi cela est-il dû?

 

Je ne peux pas avancer des choses dont je ne maîtrise pas les éléments essentiels. C’est une question à poser à la Justice parce que ce n’est pas normal que 18 ans après, qu’après tout ce qui a été dit, fait et avec des faits constants, on ne puisse pas faire la lumière sur le dossier Norbert Zongo.  Nous aurons des échanges avec notre conseil, Me Prosper Farama, et nous allons chercher à comprendre pourquoi le dossier bloque.

 

Le front social est en ébullition depuis un certain moment. Ne pensez-vous pas, comme certains, que les partenaires sociaux que vous êtes, demandent  trop au régime de Roch Marc Christian Kaboré qui n’a qu’un an d’exercice du pouvoir?

 

Je ne pense pas qu’au niveau du front social, les gens demandent trop. Les revendications sont légitimes. Du reste, toutes les revendications ne sont pas liées à la question des salaires. Certaines portent sur l’amélioration des conditions de travail et à l’accès des populations à des soins de qualité, etc. Donc, je ne trouve pas que les gens en demandent trop.

 

Propos recueillis par Dabadi ZOUMBARA

 

 

   


No Comments

Leave A Comment