HomeRencontreCLEMENT SAWADOGO A PROPOS DES ELECTIONS : « J’ai vu plus d’argent circuler dans d’autres partis qu’au MPP»

CLEMENT SAWADOGO A PROPOS DES ELECTIONS : « J’ai vu plus d’argent circuler dans d’autres partis qu’au MPP»


Clément P. Sawadogo est le secrétaire général du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), le futur parti présidentiel. Dans cet entretien qu’il nous a accordé, il revient sur des questions fondamentales en lien avec les élections du 29 novembre 2015 et les futures charges et responsabilités de Roch Marc Christian Kaboré et de ses camarades.

 

Est-ce que la célébration de la victoire continue au MPP ou bien êtes-vous passé à autre chose ?

Nous sortons effectivement de ces élections qui se sont achevées avec la victoire de notre candidat à la présidentielle, monsieur Roch Marc Christian Kaboré et celle de notre parti, le MPP, qui s’est affirmé comme le premier parti politique du Burkina Faso avec ses 55 députés sur 127. Vous me demandez si nous continuons toujours de célébrer cette victoire. Au lendemain de cette élection, nous avions déjà eu une appréciation très claire selon laquelle il faut avoir le triomphe modeste. Il ne sert à rien aujourd’hui pour un parti, à un moment aussi crucial de la vie de notre pays, à un moment où notre pays est à la croisée des chemins   avec toutes les difficultés qu’il connaît au plan économique, social et même politique (heureusement que ce dernier volet est en train de trouver une issue définitive), de se jeter dans des ambiances festives à l’infini. Nous-mêmes nous mesurons l’ampleur de notre tâche et de notre responsabilité en tant que parti qui va gérer désormais les rênes du pouvoir au Burkina Faso. Les défis sont énormes et selon moi, la vraie fête sera célébrée le jour du bilan, quand nous pourrons dire au peuple burkinabè voilà tous les efforts que nous avons pu déployer. Par ailleurs, nous avons dit que cette victoire, nous ne la voyons pas comme une victoire intrinsèque de notre parti et de notre candidat, mais comme la victoire de tout le peuple burkinabè qui a engagé une lutte acerbe contre le recul démocratique pour pouvoir s’attribuer une démocratie pérenne et un avenir radieux.

Est-ce qu’à un moment du processus électoral, le MPP a douté de l’issue ?

On ne peut pas être sûr d’avance de remporter des élections. Si c’est une victoire programmée, elle n’a pas de saveur. Comme le dit le dicton populaire, « à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire ». Cela dit, nous avions déjà des signes qui montraient que notre parti avait des bases solides. D’abord, par l’enthousiasme populaire qui a entouré la naissance même du MPP, le 25 janvier 2014. Ensuite, par l’implantation réussie du parti au plan national, jusqu’au dernier village du Burkina Faso. Cela augurait quand même d’une solidité du parti, malgré sa jeunesse. A partir de là, on pouvait penser que nous avions beaucoup de chances de remporter ces échéances électorales. J’ajoute aussi que depuis la création de ce parti, nous ne nous sommes jamais assis un seul jour. Nous avons toujours été en précampagne. Nous avons abattu un travail énorme aussi bien au sommet qu’à la base en termes de mobilisation et de sensibilisation des populations ou de participation aux différentes luttes que menait déjà le peuple. Ce résultat couronne donc tout un processus et on ne peut pas dire que les évènements nous ont surpris à 100%.

Certains pensent que pour ces élections, les dés étaient déjà jetés au profit de Roch et du MPP. Quel commentaire en faites-vous ?

 

On ne peut pas dire que les dés étaient déjà jetés. Nous sommes un parti comme tous les autres. Si ceux qui le disent font allusion au fait que certains candidats ont été empêchés par l’application du nouveau Code électoral par exemple, ils se trompent. Tous les acteurs politiques burkinabè étaient là ; que ce soit ceux qui ont été empêchés ou non. Mais ils n’ont réussi nulle part de grandes mobilisations comme le MPP dans les périodes d’avant-campagne. Nous n’avions pas de raison de craindre un candidat ou un parti. Il n’y a eu aucun acte de faveur pour nous en particulier !

 

Une certaine opinion a pourtant estimé que la Transition roulait pour le MPP. Est-ce votre avis ?

 

Ce soupçon était inutile parce que sans preuve. Commencez déjà par la composition du gouvernement de la Transition. Vous verrez que nous n’avons eu aucune faveur particulière. Nous pensons même que d’autres partis ou organisations étaient mieux nantis que nous. Sous d’autres formes, je ne vois pas non plus des traitements préférentiels à notre égard.

Vous avez rejoint la lutte contre la modification de l’article 37 et le Sénat plus tard, alors que d’autres acteurs avaient fait une grande partie du chemin. Mais à la fin du processus, c’est vous qui en bénéficiez. Ne peut-on pas qualifier cela de hold-up ?

 

Justement, quand nous disons que nous avons le triomphe modeste et qu’il fallait rendre à César ce qui est à César, c’est-à-dire au peuple burkinabè dans son ensemble cette victoire, c’est une manière d’exprimer notre reconnaissance à tous ceux qui, d’une manière ou d’une autre, ont contribué à la lutte victorieuse pour non seulement empêcher la modification de l’article 37 mais aussi empêcher la mise en place du Sénat et d’une manière générale, mettre fin au recul démocratique. Il y a effectivement au nombre de ces acteurs ceux qui étaient dans l’opposition, qui avaient déjà dénoncé ces velléités de révision constitutionnelle et que nous avons rejoints à un moment donné pour poursuivre la lutte.

Par contre, parler de hold-up, ne serait pas du tout exact. Ce n’est pas parce qu’on s’oppose à la révision de l’article 37 qu’on gagne une élection. Les tableaux sont différents. L’élection, c’est aller à la conquête de la confiance du peuple. Vous pouvez ne pas être d’accord pour qu’on tripatouille la Constitution, et rien n’indique que le peuple souhaite que vous dirigiez le pays. Il n’y a pas d’amalgame à faire à ce niveau-là. Nous avons eu le mérite, étant du système de l’époque (pour bon nombre d’entre nous), de claquer la porte à un moment où il était très risqué de le faire. Nous avons risqué nos vies pour défendre des idéaux. Et quelque part, le peuple nous a exprimé une forme de reconnaissance. Mais en plus de cela, nous avons offert une alternative crédible. C’est-à-dire proposer une solution d’alternance en trouvant des hommes avisés ayant les capacités nécessaires pour conduire les affaires du pays.

Quelles sont les mesures prises par le MPP pour éviter le retour des anciennes pratiques (corruption, incivisme, détournements de deniers, etc.) ?

 

Le MPP lui-même est né de la dénonciation d’un certain nombre de pratiques. Si vous avez parcouru les documents fondateurs du parti, vous allez voir que nous y dénoncions la corruption, la mauvaise gestion, notamment des ressources minières avec tous ses contrats suspects. La mal gouvernance ayant été une des raisons pour lesquelles nous avons aussi claqué la porte, il n’y a aucune raison que nous ne puissions pas nous-mêmes nous en démarquer. Le Président Roch Kaboré lui-même, dans toutes ses interventions, revient sur ce point et insiste en ces termes : que ce soit sur les questions de justice, que ce soit sur les questions de gouvernance, que ce soit sur les questions de la démocratie elle-même, nous n’allons pas faire du tout de la place à des pratiques malsaines.

« Je pense que le président Alassane Ouattara doit être invité et qu’il répondra favorablement à cette invitation »

Voulez-vous faire mentir ceux qui pensent que le chien ne change jamais sa façon de s’asseoir et qui soutiennent qu’en tant qu’appendice du CDP, vous ne pourrez pas changer ?

Les faits historiques eux-mêmes démentent cette assertion. Que le chien ne change jamais sa façon de s’asseoir je veux bien l’accepter, mais dans le même temps, la sagesse populaire dit que seuls les imbéciles ne changent pas.

Si Roch, Salif et Simon traînent des casseroles, vont-ils répondre devant la Justice ?

C’est Roch lui-même qui a dit que toute personne devrait répondre devant la Justice pour les actes qu’elle a commis. Et répondre devant la Justice n’est pas forcément mauvais. Sous d’autres cieux, quand quelqu’un est suspecté, il souhaite lui-même être entendu par la Justice. Alors la justice vous blanchit ou elle vous condamne le cas échéant. Personne ne souhaite être condamné mais si la Justice vous condamne, c’est que vous avez posé des actes qui vous condamnent. Donc, pour nous, c’est une question qui ne souffre d’aucune ambiguïté.

Où en êtes-vous avec les tractations pour asseoir une majorité stable à l’Assemblée nationale ?

C’est une question qui est à l’ordre du jour. C’est vrai, nous sommes le premier parti du Burkina Faso désormais, avec 55 députés, mais qui n’avons pas la majorité qualifiée. Donc, nous sommes obligés de tendre la main à d’autres partis. Je pense d’ailleurs que cela est, de manière républicaine, toujours souhaitable. Même si on avait réuni la majorité absolue, à mon avis, il était impérieux pour nous de tendre la main à d’autres formations politiques. On n’est plus à l’heure où on doit chercher à gouverner seul. Il faut donc aller vers d’autres partis qui peuvent non seulement compléter la liste pour avoir la majorité qualifiée permettant de nommer un Premier ministre qui sera sur la même ligne que le président élu, mais aussi d’asseoir un parlement fonctionnel. Ces discussions ont été engagées et je pense qu’il y a un certain nombre d’acteurs qui s’y sont déjà déclarés favorables. Ce n’est pas à moi d’en donner la liste, ce serait à eux-mêmes de le faire.

Est-ce que vous avez le nombre de députés nécessaire pour asseoir la majorité qualifiée ?

 

Je n’ai aucune crainte pour cela parce que je pense qu’aujourd’hui les Burkinabè élus députés sont conscients de la nécessité de préserver la paix sociale, de converger vers une dynamique de reconstruction de ce pays sur tous les plans. Il n’y pas de raison qu’ils soient plus portés vers une dynamique de crise immédiate et de polémique inutile. Je suis convaincu que ceux qui ont été approchés vont, pour la plupart, répondre positivement.

Vous pensez que l’UPC vous accompagnera dans la « majorité » ?

Je n’ai pas d’information pour ce qui concerne l’UPC, mais je me réjouis d’entendre les responsables de ce parti eux-mêmes dire qu’ils ne rejettent pas par principe une possibilité de collaboration avec le MPP. C’est une main tendue que nous saisirons, même si ce n’est pas forcément dans le cadre de la formation d’une majorité. Cela veut dire quelque part qu’il y a une prédisposition à travailler ensemble. Il ne faut pas oublier que nous étions ensemble à l’Opposition politique alors dirigée par Zéphirin Diabré. Ensuite, nous avons constitué le Cadre de concertation des partis politiques pour continuer à œuvrer ensemble pour le triomphe de la démocratie et pour le succès de la Transition. Donc, tous les ingrédients sont réunis pour que d’une manière ou d’une autre, il y ait la concertation. Même si l’UPC déclare aujourd’hui qu’elle est dans l’opposition, sur certaines questions, nous devrions pouvoir continuer à échanger et chercher des solutions ensemble pour le pays.

Avez-vous pris contact avec Laurent Bado ?

Oui, nous avons rendu visite à monsieur Laurent Bado, tout comme nous avons eu des échanges avec le président de son parti, Tahirou Barry. Je pense qu’il y a une prédisposition d’esprit à ce qu’on puisse ensemble trouver des points communs et travailler ensemble. Comme je le dis, il ne me revient pas, à leur place de dire, s’ils sont d’accord pour être dans l’alliance pour la majorité ou pas.

En ce qui concerne l’investiture du président Roch le 29 décembre prochain, quels sont les pays invités ou à inviter ?

Je dois d’abord préciser que c’est au pouvoir en place d’organiser cette investiture. Donc, l’essentiel des tâches à accomplir comme inviter des personnalités, notamment des chefs d’Etat, revient au président en poste, Michel Kafando et à son gouvernement. Cependant, je pense qu’il est souhaitable que tous les pays qui nous environnent, notamment nos pays frères et voisins, soient invités. C’est dans l’ordre normal des choses. Non seulement, ils nous invitent quand il y a ce genre d’événement chez eux, mais aussi nous sommes condamnés par l’histoire et la géographie à travailler ensemble à la cohésion et à l’intégration dans la sous-région. C’est ce que nous souhaitons, mais c’est au gouvernement d’établir la liste définitive des invités et je pense que le président Roch, certainement aussi, invitera des amis personnels. Notre parti, le MPP, demandera la possibilité d’inviter des partis amis ou alliés et des personnalités. En définitive, ça doit être une fête très ouverte, qui va honorer notre pays et sa démocratie.

Le tapis rouge sera donc déroulé au président Alassane Dramane Ouattara en dépit des bisbilles actuelles entre les deux pays ?

Pourquoi pas ? Moi je pense même qu’il est tout à fait normal que le président Alassane Ouattara soit convié. Comme je le dis, ce n’est même pas une question de simple plaisir ou volonté. Je dis que c’est une obligation pour nous d’œuvrer à la cohésion et à la paix dans l’intérêt de notre sous-région. Un pays comme la Côte d’Ivoire est le frère jumeau du Burkina Faso. On ne peut pas faire autrement que de travailler à apaiser les relations et à les renforcer. Nous avons beaucoup de projets en commun, comme celui de l’autoroute. Sur beaucoup de transactions économiques et financières, nous sommes tenus de passer par la Côte d’Ivoire. En fait, il faut avoir une très haute vision de la question des rapports entre les pays. Pour toutes ces raisons, je pense que le président Alassane Ouattara doit être invité et qu’il répondra favorablement à cette invitation. Les turbulences que nous traversons actuellement devraient faire l’objet d’échanges francs et directs entre les dirigeants de nos deux pays, en plaçant au centre l’intérêt de nos peuples.

Il nous revient que vous êtes partant pour occuper le fauteuil de la mairie de Ouagadougou. Qu’en dites-vous ?

 

On parle d’abord d’installation du président du Faso, de son gouvernement et vous me parlez de mairie. Pour les élections municipales, notre parti n’a pas encore décliné la procédure par laquelle les militants peuvent être candidats au poste de conseiller ou de maire. Donc, qu’aujourd’hui des gens attribuent déjà des postes de maire relève de la pure invention. Pour ma part, je n’ai pas une présomption particulière ou une intention d’occuper un poste de maire, fût-il maire de Ouagadougou.

Combien de ministres pourrait comporter le gouvernement Roch ?

Vous savez que la commission en charge des réformes politiques a proposé que l’on plafonne le nombre de ministres à 25 dans notre pays. De mon point de vue, c’est une recommandation pertinente parce que le souci ici est d’éviter les excès en la matière. Effectivement, on a connu des gouvernements de plus de 35 ministres au Burkina Faso. C’est trop pour un pays comme le nôtre.

Même dans les grands pays, il est question de limiter le nombre de postes de ministres. Ce ne sont pas dans des pays comme le nôtre qu’on peut se laisser aller. Le président Roch et son Premier ministre tiendront certainement compte de cette recommandation.

En tenant compte de cette recommandation, il se pourrait que vous ne puissiez pas récompenser vos soutiens. N’est-ce pas ?

Vous nous disiez justement qu’il faut changer la manière de s’asseoir. On doit commencer par ça. Comme l’a dit notre premier vice-président, Salif Diallo,  il faut qu’on cesse de voir le pouvoir comme un gâteau à partager, une chaine de récompenses à attribuer à des individus, en raison de leur allégeance ou de leur contribution au succès d’une élection. On doit certainement être reconnaissant vis-à-vis de tous ceux qui nous ont aidés à avoir la victoire électorale. Mais c’est une récompense qu’il faut exprimer d’une autre manière, à travers des gestes simples comme aller dire bonjour et merci à un grand électeur, à une personne-ressource. D’ailleurs, nous avons commencé à le faire plutôt que de créer des portefeuilles ministériels et autres postes pour récompenser des gens. C’est cela qui amène les problèmes de gouvernance. Parce que celui à qui vous attribuez un portefeuille ministériel comme récompense, voit cela comme sa part de gâteau et il en fait ce qu’il veut. On veut des serviteurs de la Nation, des gens qui vont travailler pour l’intérêt général, qui vont se sacrifier pour l’intérêt de tous.

Les femmes et les jeunes ont été pour beaucoup dans votre élection. Auront-ils de la place dans vos instances décisionnelles ?

Sans que ce ne soit des récompenses, je pense que toute la gestion du nouveau régime va être marquée par la place prépondérante réservée aux jeunes et aux femmes. C’est une option politique de fond que notre parti a prise et vous l’avez déjà constatée. Quand nous avons publié la liste de nos candidats aux législatives, il y a un point d’honneur qui a été fait aux jeunes et aux femmes. Cela est dans l’ordre normal des choses et on va continuer ainsi. Le président Roch lui-même a dit que ce mandat était prioritairement dédié à la jeunesse parce que c’est elle qui s’est le plus exposée pour empêcher la victoire de la forfaiture dans notre pays. Je pense aussi que les jeunes, aujourd’hui, paient le plus fort prix de la mal gouvernance parce qu’ils sont exposés au chômage et aux très nombreux problèmes de la vie scolaire et sociale. Il faut trouver des solutions urgentes. On n’est jamais mieux servi que par soi-même et on devrait responsabiliser beaucoup de jeunes mais aussi de femmes pour que, eux-mêmes puissent mettre la main à la pâte ; qu’ils soient aussi préparés comme relève et que le pays soit vraiment sur des assises fortes.

 

« Un état de grâce, nous n’en demandons pas comme pour dire « donnez-nous du temps et après nous allons donner toutes les réponses ».

 

Quel pourrait être le portrait robot du futur Premier ministre ?

De mon point de vue, le futur Premier ministre devrait avoir un profil à la fois politique et gestionnaire. Sous l’angle politique, nous savons que notre pays fait face à des préoccupations d’ordre politique. D’abord, il faut travailler à garantir définitivement la paix sociale, la cohésion nationale, la réconciliation nationale. Ensuite, il faut régler définitivement la question de l’avènement d’une Ve République et travailler à asseoir définitivement la démocratie et des institutions fortes. Ce sont des chantiers politiques ébauchés à travers le programme du candidat Roch, désormais président, et qui ont également fait l’objet de propositions de la part de la commission en charge des réformes politiques. Je pense qu’il faut un Premier ministre capable de faire face à ces préoccupations, donc un Premier ministre « politique ». Mais il faut aussi un Premier ministre qui peut faire face aux questions de l’économie parce que notre économie, aujourd’hui, n’est pas sur ses deux jambes. Il faut relancer en urgence l’économie, régler les questions financières, de gestion des services, la gouvernance saine, etc. Cela nécessite des qualités de gestionnaire, de grand commis et d’énormes capacités d’anticipation. C’est tout cela qui devrait caractériser le Premier ministre. A mon avis, c’est un homme exceptionnel qu’il nous faudrait, apte à gérer toutes les préoccupations de l’heure, y compris les préoccupations sociales. Il faut relancer les discussions avec les syndicats, régler les questions de l’Education, de la santé, etc.

Avez-vous déjà une idée de ces hommes exceptionnels à qui on pourrait confier cette mission ?

Ça, c’est un casse-tête. Je préfère laisser à mon président Roch le soin de répondre à cette question. Moi, en tout cas, je déclare mon incompétence à trouver l’Homme de ce profil (encore que cette mission ne me revient pas) mais je sais que notre pays et notre parti regorgent de compétences avérées.

N’avez-vous pas vous-même ces qualités ?

Non, moi je ne les aies pas. A titre de rappel, j’ai été directeur de cabinet d’un Premier ministre pendant près de quatre ans et aussi secrétaire général du Gouvernement et du Conseil des ministres avant même d’être au Gouvernement. J’ai quand même connaissance de ce que cette haute charge représente. Il y a certainement des gens plus compétents que moi.

Les syndicats disent qu’il n’y aura pas d’état de grâce, ni de trêve sociale pour les nouvelles autorités. Quels commentaires en faites-vous ?

 

Je ne pense pas que nous-mêmes, nous nous attendions à un état de grâce. Toutes les préoccupations sont brûlantes mais un des traits essentiels de notre stratégie, c’est de ne pas gouverner seul. Je pense que nous gouvernerons avec la société burkinabè dans toutes ses composantes, y compris la société civile, les syndicats avec qui nous entretiendrons un climat de concertation permanente. La pratique qui veut que les uns revendiquent et les autres apportent des solutions peut être dépassée pour davantage être une relation de partenaires dans l’édification d’une nouvelle gouvernance dans notre pays, et dans ce sens-là, tout le monde étant responsable et responsabilisé, personne ne doit faire de la surenchère inutile. Tout le monde sera associé à la recherche des solutions. Un état de grâce, nous n’en demandons pas comme pour dire « donnez-nous du temps et après nous allons donner toutes les réponses ». Nous disons seulement qu’ensemble, nous allons nous battre pour régler les problèmes de ce pays en toute responsabilité. Chacun apportera sa pierre à la construction nationale.

Au niveau de l’Education, il y a des problèmes majeurs constitués du binôme LMD- Continuum. Est-ce que vous avez une approche tendant à les régler ?

C’est sûr que dans le cadre des échanges à l’intérieur du parti, nous en avons beaucoup discuté. Une commission qui traite des questions d’Education s’en est saisie. Il y a eu beaucoup d’échanges. Sur les questions de la réforme LMD et du continuum, nous notons tout simplement qu’il y a des difficultés et beaucoup d’incompréhensions. Quand on écoute les étudiants par exemple qui dénoncent le système LMD, on voit qu’ils évoquent un certain nombre de préoccupations. Quand on écoute les enseignants et les dirigeants des universités, ils ont aussi leurs préoccupations. Entre les deux, il faut favoriser déjà un dialogue. Il y a eu des discussions plusieurs fois, mais tant que les discussions n’ont pas abouti, il faut les poursuivre. Il y a une tierce voie qui préconise qu’on essaie de trouver des solutions intermédiaires. J’ai entendu beaucoup de gens dire que pour le système LMD, on est obligé d’y aller mais qu’on n’a pas suffisamment créé les conditions pour y aller. Peut-être qu’il faut alors voir la question des conditions à créer pour optimiser et obtenir le consensus. C’est une ouverture possible qui peut paraître comme une solution-synthèse. Sur la question du continuum, c’est presque la même chose. Effectivement, on ne remet pas en cause le principe de revoir les cycles terminaux mais encore une fois, il y a un certain nombre de mesures d’accompagnement qu’il faut prendre, à la fois au plan institutionnel et au plan stratégique impliquant notamment le renforcement des infrastructures, des ressources humaines, matérielles, financières, etc. Cela me paraît être des questions urgentes auxquelles nous aurons à faire face, mais je reste convaincu que de concert avec les parties prenantes, on pourra trouver de bonnes solutions.

« Si les dirigeants trahissent les principes fondateurs de la République, le citoyen a le droit d’y opposer sa désobéissance »

 

Avez-vous des meilleures approches pour ce qui est de la question du chômage des jeunes ?

Il est déjà important de faire le point de la situation et de faire un diagnostic vraiment sérieux sur la question formation-emploi. Le système de formation en vigueur chez nous produit des chômeurs. C’est une réalité. On peut s’inspirer des pays voisins qui ont mieux réussi la relation formation-emploi. En principe, si vous avez fait trois ans d’études dans le secondaire, vous devriez pouvoir être déjà un acteur de production pour vous-même. Mais notre système met l’accent sur l’enseignement général et ne permet pas de bien résoudre cette adéquation formation-emploi. Ces problèmes sont connus. Il faut maintenant des solutions vigoureuses, donc une réforme en profondeur de notre système de formation. Il faut le réorienter vers les formations qualifiantes et professionnalisantes à tous les niveaux.

Avez-vous les moyens d’y parvenir ?

En fait, on n’a pas le choix. Réformez un système éducatif est une affaire de moyen et long termes. A très court terme, il faut déjà trouver une solution pour désamorcer la bombe que constitue le chômage à son niveau actuel. De très nombreux diplômés sont actuellement au chômage. C’est là que le président Roch, dans son programme, a dit, étant donné qu’il y a des emplois potentiels qui sont là, comme l’enseignement où on a encore besoin de très nombreuses ressources humaines, commençons déjà par employer les diplômés pour régler la question de déficit en enseignants. Cela permettra également de renforcer la scolarisation à tous les niveaux et pourquoi pas aussi d’améliorer la qualité de l’enseignement. Il faut combiner plusieurs solutions à court et moyen termes.

Pouvez-vous embaucher tous les chômeurs ?

 

C’est vrai qu’il est difficile de prendre tout le monde mais il faut aller sur cette option. Il y aura des études pour en cerner tous les contours. Nous considérons qu’il n’y a pas mille solutions dans cette affaire et il faut que toute la société accepte de suer pour notre jeunesse.

 

Quelles sont les mesures prioritaires en vue de restaurer l’autorité de l’Etat ?

On dit souvent que l’exemple vient d’en haut et que le poisson pourrit par la tête. A partir du moment où au sommet de l’Etat, il se développe une mal gouvernance insupportable pour la société, la société elle-même réagit par l’incivisme. C’est un peu comme notre Constitution l’a dit. Si les dirigeants trahissent les principes fondateurs de la République, le citoyen a le droit d’y opposer sa désobéissance. A partir du moment où il y a trop de critiques, de réprobations de la manière dont l’Etat est géré, vous ne pouvez pas arrêter l’incivisme à la base. C’est pour cela, je pense, qu’il faut travailler à instaurer un Etat vertueux parce que c’est par là qu’on a les arguments pour inviter le citoyen à faire preuve de sagesse. Donc, c’est un couple dialectique et dynamique qui commence par le bon exemple donné par le sommet. De ce fait, vous allez voir s’instaurer une autorégulation citoyenne. Beaucoup de choses vont se répercuter à la base. Car, si vous posez des actes indisciplinés, vos concitoyens eux-mêmes vont vous demander de ne pas continuer parce que vous faites du mal à toute la société. Et l’Etat lui-même se donne les raisons suffisantes pour aussi intervenir afin de raisonner ceux qui tendent vers les excès. Ce n’est pas l’usage de la force seule qui peut venir à bout de l’incivisme et des manifestations spontanées. Il faut qu’il y ait une combinaison entre gouvernance vertueuse et l’usage de la force qui, il faut aussi l’admettre, est obligatoire dans certaines conditions.

Trouvez-vous opportun que les autorités de la Transition continuent de faire des nominations actuellement ?

 

A partir du moment où il n’y pas de passage à témoin entre le président Michel Kafando et le nouveau président Roch Kaboré, celles-ci gèrent toujours l’Etat. Le président nomme aux emplois supérieurs comme c’est indiqué dans la Constitution. On ne méconnaît donc pas à la Transition son droit de nommer des fonctionnaires à de hauts postes. Maintenant, nous sommes dans une période transitoire entre la Transition et le nouveau régime. Dès lors que les élections sont faites et le président est connu, moi je pense que normalement, il doit y avoir une concertation entre les deux, dans cette phase de passation pour procéder à la nomination d’un certain nombre de responsables à des postes ; d’autant plus que l’un assume ses prérogatives mais l’autre devrait en assumer les conséquences. Tout cela doit se résoudre par la négociation et la concertation.

« Nous n’avons jamais distribué de l’argent dans les familles »

 

Pourrait-il arriver que vous reveniez sur certaines décisions de la Transition ?

La Transition elle-même, à certains moments, est peut-être revenue sur certaines de ses propres décisions. Tout régime, quel qu’il soit, peut à tout moment être amené à corriger des décisions qu’il a lui-même prises. Je prends l’exemple du cas de l’échangeur du nord. Le gouvernement de la Transition, au début, n’était pas partant pour réaliser ce projet mais il est revenu sur sa décision. En matière de nomination, c’est pareil. Il y a des gens qui ont été nommés par la Transition et qui ont été remplacés plutard par d’autres. Donc, le gouvernement Roch pourrait réviser certaines décisions. Il pourrait nommer certainement de nouveaux responsables. Ce que nous n’allons pas faire, c’est nous livrer à une remise en cause généralisée et par principe des actes de la Transition dont nous-mêmes avons été partie prenante. Nous devons exprimer notre reconnaissance à la Transition pour les efforts réalisés. Nous n’avons aucune raison de nous attaquer à elle.

Seriez-vous prêts à nommer des personnes qui ont occupé des postes au niveau de la Transition ?

Tout Burkinabè doit être apprécié au regard de ses compétences. Pour ceux qui sont des fonctionnaires de l’Etat ou qui sont des responsables de haut rang, ils seront redéployés chacun en fonction de sa position et de ses compétences. Il n’y aura aucun particularisme dans ce sens. Le principe « mettre l’homme qu’il faut à la place qu’il faut » sera appliqué.

Dans les écoutes téléphoniques Soro-Bassolé, il est indiqué que Roch aurait reçu de l’argent de l’étranger pour sa campagne. Qu’en dites-vous ?

Je préfère ne pas me prononcer sur cette affaire d’écoutes téléphoniques, mais en qui concerne l’information selon laquelle le MPP aurait reçu des mannes financières venant de tel et tel milieu étranger, je ne saurais le confirmer. Je n’ai pas l’information que tel homme d’affaires ou personnalité friquée a envoyé de l’argent au MPP. Le MPP n’a pas été le parti le plus fortuné dans ces élections, contrairement à ce que certains pensent.

 

Avez-vous des éléments qui confirment vos propos ?

 

Je le dis parce que si vous regardez même les éléments apparents, il y a des partis qui nous ont damé le pion en matière d’emploi de moyens. Sur toute l’étendue du territoire, c’était vérifiable. Si vous étiez un peu au parfum des activités des équipes de campagne dans les provinces, beaucoup de nos militants se plaignaient. Il y en avait qui disaient ne pas comprendre que le MPP soit un grand parti et qu’on n’ait même pas le minimum de moyens pour travailler. C’est la réalité. Dans le même temps, nous apprenions que d’autres partis rentraient dans les familles et distribuaient de l’argent pour tenter de corrompre l’électorat de manière éhontée, alors qu’ils prétendent travailler pour le changement.

Etes-vous sûr de n’avoir pas distribué de l’argent ?

Nous n’avons jamais distribué de l’argent dans les familles. En tout cas, moi qui vous parle, j’ai été directeur de campagne pour la province du Kadiogo. S’il y avait à distribuer, ce serait dans le Kadiogo, province-capitale. Je ne l’ai pas fait, pour n’en avoir jamais eu l’intention et même si je voulais le faire, je n’en avais pas les moyens. Quand on dit qu’il y a eu de grosses sommes qui ont circulé en faveur du MPP, je ne peux pas le confirmer. Si c’était vrai, j’aurais pu en avoir pour ma campagne à Ouagadougou mais je n’ai pas eu de moyens colossaux à l’occasion. J’ai plutôt travaillé avec le strict minimum.

Combien a coûté votre campagne ?

Je n’ai pas les chiffres. Il n’y a que le directeur national de campagne et le trésorier qui peuvent répondre à cette question. Je ne peux donc pas avancer de chiffres mais je dis que le MPP a forgé sa victoire par la force de sa mobilisation, par la confiance du peuple, par le travail opiniâtre des militants sur le terrain depuis la création du parti, et par le fait de notre forte implantation. Je pense que c’est cela les vraies raisons. L’argent n’y est pour rien. Je le dis et le répète, moi j’ai vu plus d’argent circuler dans d’autres partis qu’au MPP.

Que ferez-vous pour la presse au regard de son rôle dans l’évolution de la démocratie récente du Burkina Faso ?

 

Je pense que le nouveau pouvoir doit exprimer une forme de reconnaissance à la presse, tout comme aux autres composantes de la société qui ont travaillé à défendre la démocratie et à la sauver. Maintenant, sous quelle forme ? Je pense qu’il faut du temps aux nouvelles autorités pour qu’elles déterminent sous quelle forme elles peuvent exprimer cette reconnaissance à la presse. Mais en tout cas, nous sommes tous honorés de constater le travail immense réalisé par les médias. Cette presse burkinabè, toutes tendances confondues, est digne. C’est une presse plurielle. On a vu aussi des médias ou des éditoriaux faire l’apologie de l’indéfendable comme ceux qui tiraient à boulets rouges sur le peuple pour dire que le pouvoir avait le droit de modifier l’article 37. Tout cela fait partie de la liberté d’expression. Mais globalement, il faut admettre que la presse a bien joué son rôle. Donc, il n’y a aucune raison qu’elle soit négligée ou méprisée par le nouveau pouvoir.

Je salue au passage le rôle joué par votre quotidien « Le Pays », temple de la richesse d’opinions et de l’objectivité, et dont la renommée va au-delà de nos frontières.

Avez-vous un autre commentaire à faire ?

 

Merci à tous ceux qui nous ont fait confiance et qui nous ont portés au pouvoir par leurs actions sur le terrain ou leur vote. Encore une fois, je dis bravo à tout le peuple burkinabè. C’est un peuple formidable et fantastique, qui fait honneur à son pays si judicieusement nommé « pays des Hommes intègres ». J’implore le Tout-Puissant pour que ce peuple soit toujours béni et que ce pays avance dans le concert des Nations.

Propos recueillis par Michel NANA

 


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  • Une grande interview qui malheureusement se termine en queue de poisons au sujet des achats massifs de consciences lors des élections couplées du 29 novembre 2015.
    En effet, c’est avec délectation que j’ai lue votre brillantissime interview accordée au journal le pays sur les questions fondamentales en lien avec les élections passées et les futures charges du Président Roch Marc Christian KABORE et son équipe gouvernementale.
    Vos réponses aux multiples questions des journalistes ont été limpides jusqu’aux questions ci-après, où elles n’ont pas été à la hauteur des précédentes. On a senti beaucoup de gène sur ces questions et vite une certaine nervosité s’est emparée de vous, vous faisant perdre quelque peu les pédales. Voici vos réponses aux dites questions et les commentaires qu’elles m’ont suscités :
    Question : Dans les écoutes téléphoniques Soro-Bassolé, il est indiqué que Roch aurait reçu de l’argent de l’étranger pour sa campagne. Qu’en dites-vous ?
    Réponse : Je préfère ne pas me prononcer sur cette affaire d’écoutes téléphoniques, mais en qui concerne l’information selon laquelle le MPP aurait reçu des mannes financières venant de tel et tel milieu étranger, je ne saurais le confirmer. Je n’ai pas l’information que tel homme d’affaires ou personnalité friquée a envoyé de l’argent au MPP. Le MPP n’a pas été le parti le plus fortuné dans ces élections, contrairement à ce que certains pensent.
    Commentaire : On ne vous a pas demandé de vous prononcer sur l’affaire des écoutes téléphoniques, mais sur une substance des dites écoutes. Vous avez donc préféré botter en touche en affirmant que le MPP n’était le parti le plus fortuné lors de ces élections. Votre réponse contribue, à mon sens, à semer davantage la confusion sur ce volet des écoutes téléphoniques et ne lève pas le doute sur l’argent qu’aurait reçu votre candidat de l’étranger.
    Question : Avez-vous des éléments qui confirment vos propos ?
    Réponse : Je le dis parce que si vous regardez même les éléments apparents, il y a des partis qui nous ont damé le pion en matière d’emploi de moyens. Sur toute l’étendue du territoire, c’était vérifiable. Si vous étiez un peu au parfum des activités des équipes de campagne dans les provinces, beaucoup de nos militants se plaignaient. Il y en avait qui disaient ne pas comprendre que le MPP soit un grand parti et qu’on n’ait même pas le minimum de moyens pour travailler. C’est la réalité. Dans le même temps, nous apprenions que d’autres partis rentraient dans les familles et distribuaient de l’argent pour tenter de corrompre l’électorat de manière éhontée, alors qu’ils prétendent travailler pour le changement.
    Commentaire : Là, vous avez tout faux. D’abord sur les « éléments apparents » dont vous faites allusion, aucun parti en dehors du MPP n’a affiché autant d’éléments apparents dont je mettrai en relief les plus flagrants :
    – Seuls les militants du MPP arboraient des signes distinctifs frappés de la couleur orange (T-shirts, casquettes et autres gadgets) en porte-à-faux total avec la loi électorale. Je suis sûr que c’aurait été un autre parti qui avait eu ce comportement que la CENI et les autorités de la transition lui seraient tombé dessus à bras raccourcis et l’auraient recadré proprement. Mais c’est le MPP, donc « motus, bouche cousue ». Le MPP, au passage, démontre, par là, son habileté voire, son art à contourner la loi sans en donner l’air. Et cela inquiète plus d’une personne, surtout que ces comportements nous rappellent un passé récent où, un parti qui avait pignon sur rue en était le dépositaire de la marque de fabrique. Et comme par hasard, le MPP est issu des flancs de ce parti. On est alors en droit de se demander s’il n’a pas aussi hérité de certaines tares congénitales…

    – Seul le MPP, lors de la campagne, a donné des concerts géants en « live » animés par des artistes de renommée internationale qu’aucun autre parti ne pouvait s’octroyer le luxe d’inviter;

    – Ayant battu campagne dans ma province, j’ai pu mesurer, de mes yeux, la différence abyssale de moyens déployés par le MPP d’avec les autres partis présents (sauf le CDP) qui, même s’ils mettaient leurs moyens ensemble demeureraient à des années-lumière, loin derrière le MPP. Et, c’est à posteriori, que j’ai compris toute la confiance affichée par nos adversaires d’en-face, qui sur le plan proprement dit de la campagne ont reconnu que nous avons réalisé une campagne nettement au-dessus de la leur et, en prenaient même de l’ombrage. Seuls les achats de conscience et l’ethnicisme évoqué plus bas, je le dis et je le répète, ont fait la différence. Là également, la CENI et les autorités de la transition ont fermé les yeux et les oreilles.

    – Enfin, seul le MPP a mis le doigt où il ne fallait surtout pas, en évoquant l’origine ethnique d’un certain candidat (cf. meeting du MPP à Ouahigouya). Sur ce volet, j’en veux beaucoup plus à la CENI et aux autorités de la transition qui n‘en pas pipé mot et ont joué aux trois singes : « Pas vu, pas entendu, pas dit ». Mais, l’Histoire se chargera de recadrer chaque acteur de cette vaste comédie, sauf que là, cela pourrait se révéler être plutôt la « commedia dell’arte » allant des fourberies de Scapin à la tragédie de Hamlet dans l’œuvre gigantesque de Williams Shakespeare. Ne tentons pas le Diable pour nous poser un jour la question existentielle et dramatique que s’est posée Hamlet, à savoir : « to be or not to be ». Ca sera le début de la fin du pays des hommes intègres. A ce sujet, j’espère un mea culpa sincère des auteurs cette bévue monumentale digne de l’apartheid, pour éteindre le feu ainsi allumé. Les drames révèlent des héros, mais ce sont des gens médiocres qui les provoquent.

    Question : Etes-vous sûr de n’avoir pas distribué de l’argent ?
    Réponse : Nous n’avons jamais distribué de l’argent dans les familles. En tout cas, moi qui vous parle, j’ai été directeur de campagne pour la province du Kadiogo. S’il y avait à distribuer, ce serait dans le Kadiogo, province-capitale. Je ne l’ai pas fait, pour n’en avoir jamais eu l’intention et même si je voulais le faire, je n’en avais pas les moyens. Quand on dit qu’il y a eu de grosses sommes qui ont circulé en faveur du MPP, je ne peux pas le confirmer. Si c’était vrai, j’aurais pu en avoir pour ma campagne à Ouagadougou mais je n’ai pas eu de moyens colossaux à l’occasion. J’ai plutôt travaillé avec le strict minimum.
    Commentaires : Je ne sais pas pourquoi, à prime abord, vous dites que vous n’avez jamais distribué de l’argent dans les familles (sic). A moins que la question ne soit pas textuellement retranscrite, elle ne fait nullement allusion que l’argent aurait été distribué dans les familles. Cela pourrait donc être un lapsus révélateur dans ce sens. Dire que : « quand on dit qu’il y a eu de grosses sommes qui ont circulé en faveur du MPP, je ne peux pas le confirmer » est une tautologie ». Confirmez-le et vous serez viré à bâbord sur le champ ; qui est fou ? Mais toute la question demeure…
    Question : Combien a coûté votre campagne ?
    Réponse : Je n’ai pas les chiffres. Il n’y a que le directeur national de campagne et le trésorier qui peuvent répondre à cette question. Je ne peux donc pas avancer de chiffres mais je dis que le MPP a forgé sa victoire par la force de sa mobilisation, par la confiance du peuple, par le travail opiniâtre des militants sur le terrain depuis la création du parti, et par le fait de notre forte implantation. Je pense que c’est cela les vraies raisons. L’argent n’y est pour rien. Je le dis et le répète, moi j’ai vu plus d’argent circuler dans d’autres partis qu’au MPP.
    Commentaires : Nous y voilà ! Vous affirmez sans ambages, je cite : « moi j’ai vu plus d’argent circuler dans d’autres partis qu’au MPP ». Cette assertion révèle toute l’ampleur des achats de conscience qui ont jalonné cette campagne. En effet, votre sentence confirme qu’au MPP, l’argent a bel et bien circulé, mais moins qu’ailleurs. J’avoue que cette dernière réponse m’a le plus estomaqué car au vu de vos réponses sur les premières questions, je ne m’attendais pas à ce qu’on retombe si bas. Que de dénégations, pour enfin avouer la vérité ! Cela me renvoie à mes années d’école primaire où quand le maître prenait un écolier en flagrant délit de copiage, celui-ci pour se défendre ne trouvait pas mieux que de dénoncer ses camarades qui ont aussi triché. Ou bien, le gendarme vous attrape parce que vous avez brûlé un feu rouge et vous dites que d’autres aussi l’ont fait. Ce n’est pas une bonne ligne de défense, mais plutôt un prétexte, une argutie. Tout comme nul ne peut se prévaloir de ses propres turpitudes, on ne peut également se prévaloir des turpitudes des autres. Il faut être responsable et assumer ses faits « d’armes » et non dire que d’autres en font plus. Encore qu’il faille apporter les preuves de vos affirmations qui semblent bien gratuites.
    Lors de cette campagne seuls le MPP et le CDP pouvaient rivaliser en matière de « feuilles » pour reprendre un terme cher dans votre milieu. Et comme par hasard, ces deux partis sont comme : le père et le fils (prodigue ?). Leurs dirigeants ont occupé les plus hautes responsabilités du pays ensemble depuis 30 ans, avant le divorce pour convenance personnelle. On pourrait conclure que leurs fortunes respectives viennent d’où l’on sait ou soupçonne, sans trop se tromper. L’UPC qui pourrait venir en 3è position en matière de fortune ne peut voir la poussière de ces deux partis précités en la matière. Ne nous leurrons pas. En conclusion, s’il y a eu distribution de feuilles et, par voie de fait, achats de conscience, cela ne peut provenir que du père et du fils, ainsi soit-il !

    Le peuple vous fait confiance. Vous pouvez aussi faire confiance au peuple. En effet, plus rien ne sera comme avant dans ce beau pays et, le peuple debout, comme une sentinelle, veille au grain ! Si jamais…gare à vous !

    24 décembre 2015

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