HomeLignes de mireCOMMERCE DU SANG DES RESCAPES D’EBOLA :Les dangers d’une pratique

COMMERCE DU SANG DES RESCAPES D’EBOLA :Les dangers d’une pratique


La recherche de traitements contre le virus Ebola a entraîné des effets pervers aux conséquences désastreuses : le commerce du sang des survivants à la fièvre rouge, porteur d’anticorps qui permettraient de résister au virus mortel. Du reste, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) souligne que « des études suggèrent que des transfusions peuvent prévenir ou traiter l’infection, mais [que] leurs résultats sont encore difficiles à interpréter ». Toute chose qui laisse entendre que cette pratique compte parmi les pistes de guérison explorées et suivies par les chercheurs. Il n’en fallait pas plus pour que se développe, dans certains pays frappés par la maladie, un nouveau commerce autour du sang des personnes qui ont résisté au virus.

 

Le manque de médicament ne saurait être un prétexte pour laisser prospérer un tel commerce

 

Mais attention, danger ! L’OMS tire la sonnette d’alarme sur les risques que peut avoir ce commerce, d’autant plus qu’il se pratique sur le marché noir. En effet, en plus des risques de transmission d’autres infections comme le SIDA ou certaines hépatites, cette pratique peut entraîner chez certains patients, des réactions d’allergie pouvant aggraver l’état de santé de certains malades ou entraîner des complications.

L’OMS a donc raison de sonner l’alerte, car le manque de médicament approuvé, pour l’instant, ne saurait être un prétexte pour laisser prospérer un tel commerce qui s’apparente, d’un certain point de vue, à une attitude suicidaire. En outre, sans véritable contrôle, l’on imagine que des gens peuvent se faire gruger en achetant du vrai « faux sang » de miraculés ou de pseudo-miraculés d’Ebola. Sans oublier que dans ce contexte de psychose, l’analphabétisme et la désinformation aidant, autant certaines personnes continuent de dénier l’existence même de la maladie, autant certains malades pourraient en arriver même à boire le sang de survivants, croyant pouvoir ainsi se sauver de la maladie.

 

Les gouvernants doivent prendre en compte la dimension culturelle dans la lutte contre Ebola

 

Les gouvernants sont donc appelés à plus de vigilance pour éviter de tels dérapages, en attendant que la piste de la transfusion soit scientifiquement prouvée et son application médicalement contrôlée, comme s’y emploie, du reste, l’OMS. L’effort dans la communication doit donc être maintenu, et les dirigeants, appelés à prendre toute décision utile qui pourrait permettre de lutter efficacement contre la propagation de la maladie. En cela, avec le recul, l’on pourrait dire que la décision de confinement de trois jours, prise le week-end dernier par les autorités sierra-léonaises sur toute l’étendue du territoire, n’était pas si saugrenue que cela, en ce sens qu’elle a permis, au finish, de découvrir une soixantaine de corps de personnes victimes du virus, dans des familles, et de dépister une vingtaine de cas suspects. Il faut donc reconnaître que ce n’était pas la solution la plus mauvaise qui soit, même si elle a permis, par ailleurs, de mettre à nu la faiblesse du système sanitaire sierra-léonais, avec par exemple le manque de véhicules pour le transport des corps. Cela dit, la dimension culturelle est une donnée importante que les gouvernants doivent prendre en compte dans la lutte contre Ebola. N’eût été cela, personne n’aurait su que dans des pays comme la Sierra Leone, des familles pouvaient cacher des cadavres pendant plusieurs jours, avec toutes les conséquences néfastes que cela comporte au regard des mauvaises conditions de conservation des cadavres. Que ce soit pour des raisons culturelles ou pour éviter d’être mises en quarantaine, de tels comportements sont inappropriés, car de nature à favoriser une plus grande propagation de la maladie. A l’arrivée, la mesure n’était peut-être pas si absurde, même si l’on ne peut pas totalement écarter la possibilité qu’elle ait pu favoriser certains décès, du fait que les populations ne pouvaient pas sortir de chez elles. Mais, globalement, tout laisse croire que les autorités sierra-léonaises ont pris une bonne décision, aidées en cela par une certaine maîtrise des habitudes de leurs concitoyens dont on a pu aussi mesurer le degré de civisme, par le respect des consignes données. Il faut maintenant espérer que ces mesures permettront aux autorités sierra-léonaises de franchir un cap dans la lutte contre Ebola, par une meilleure maîtrise et prise en charge des personnes infectées. C’est en cela que leur mesure portera véritablement ses fruits.

 

Outélé KEITA


No Comments

Leave A Comment