HomeOmbre et lumièreCOMMISSION INTERMINISTERIELLE SUR LE FONCIER URBAIN : Aller jusqu’au bout !

COMMISSION INTERMINISTERIELLE SUR LE FONCIER URBAIN : Aller jusqu’au bout !


Suite aux conclusions des travaux de l’enquête parlementaire sur le foncier urbain au Burkina pour la période de 1995 à 2015, le Conseil des ministres, en sa séance du 28 décembre 2016, a créé une commission interministérielle ad’hoc, placée sous l’égide du Premier ministre. L’installation officielle des membres de cette commission a eu lieu le 10 mars dernier, dans la salle de réunion du Premier ministère. Cette commission, qui aura des ramifications dans les régions, communes et arrondissements, poursuit deux objectifs majeurs. Le premier est d’apurer le passif lié au foncier urbain. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il est lourd, voire très lourd. En effet, l’enquête parlementaire qui a porté sur les lotissements effectués de 1995 à 2015 dans différentes localités, a mis à l’index plus de 105 000 parcelles entachées d’irrégularités. A ce propos, le Premier ministre, dans le discours tenu à l’occasion de la mise en place de la commission interministérielle ad’hoc, n’a pas porté de gants pour marteler ceci : « Les dérives relevées dans les conclusions de l’enquête parlementaire sur le foncier démontrent à souhait comment nos braves populations ont été spoliées de leurs terres, bafouant ainsi le droit au logement pour de nombreuses familles ». Le deuxième objectif majeur poursuivi par la commission interministérielle est d’anticiper sur les mauvaises pratiques par la prise de textes juridiques et administratifs forts, de nature à dissuader les personnes indélicates. Pour faire le boulot, six mois ont été accordés aux membres de ladite commission. Et la feuille de route à elle confiée par Paul Kaba Thiéba, indique sans ambiguïté que la nation attend énormément d’elle. Morceaux choisis : « En vous investissant dans vos fonctions aujourd’hui, je vous charge d’une mission de la plus haute importance. Répondre aux exigences citoyennes qui ont fondé et nourri le mouvement insurrectionnel d’octobre 2014 ».

 

Le gouvernement ne doit pas se chatouiller pour rire

 

Les mots employés par Paul Kaba Thiéba condamnent les membres de la commission à déployer toute leur énergie pour réparer une injustice qui n’a que trop duré. Et le peuple burkinabè spolié, n’en demande pas mieux. L’on peut donc déjà se permettre de saluer l’initiative du gouvernement tout en l’invitant à aller jusqu’au bout. En effet, des initiatives de ce genre, les Burkinabè en ont connu de par le passé. Même Blaise Compaoré dont la gouvernance a été la plus vermoulue de l’histoire politique du pays, en a servi de temps à autre aux Burkinabè. Seulement, l’on pouvait faire le constat que c’était plus pour amuser la galerie que pour sévir contre les prédateurs des deniers publics et du patrimoine national. De ce point de vue, les Burkinabè sont en droit de ne pas se contenter de croire le Premier ministre rien qu’aux mots. Ils attendent de voir si le lièvre levé par l’enquête parlementaire sera effectivement poursuivi par le gouvernement, jusqu’à ce qu’il soit abattu. C’est pourquoi l’on peut suggérer aux organisations de la société civile, de marquer, peut-on dire, à la culotte le gouvernement de manière à ce que l’éléphant annoncé, à grands renforts de publicité, n’arrive pas avec une patte cassée. Cela peut non seulement contribuer à rendre les choses plus transparentes, mais aussi a l’avantage de priver d’arguments, tous ceux qui seraient tentés de crier à la chasse aux sorcières. Par ces temps qui courent, où certains bourreaux, par mauvaise foi manifeste, n’hésitent pas à recourir à cet argumentaire pour échapper à la justice, le gouvernement a plus intérêt à impliquer de manière significative les organisations de la société  civile qui ont toujours pris fait et cause pour les sans- voix. Et au Burkina, on les connaît. De la même manière, on connaît les personnes qui s’abritent derrière les organisations de la société civile pour faire l’âne afin d’avoir du foin. En tout état de cause, le gouvernement ne doit pas se chatouiller pour rire. Car, l’insurrection populaire a cela de positif qu’elle a enfanté des hommes et des femmes qui refusent que l’on insulte leur intelligence en leur servant des discours démagogiques. Ils refusent également que l’on enterre les cadavres en laissant leurs pieds dehors. Le Premier ministre semble avoir compris la psychologie de ce Burkinabè nouveau, puisque dans son discours prononcé à l’occasion de l’installation des membres de la commission ad’hoc, il a invité les uns et les autres à effectuer leur mission sous l’angle de la rupture pour que plus rien ne soit comme avant. Après tout, et pour reprendre la boutade de Wolé Soyinka, « le tigre ne crie pas sa tigritude. Il bondit sur sa proie et la dévore ». Ce qui intéresse donc les Burkinabè à propos des dérives gravissimes constatées dans le foncier urbain, ce ne sont pas les longues tirades des autorités. C’est plutôt les actes forts tendant à faire rendre gorge à leurs auteurs. Et là, nous rappelons les propos de Paul Kaba Thiéba himself, quand il demande aux membres de la commission de traquer «toutes les malversations sciemment orchestrées afin de favoriser l’enrichissement illicite des personnes sans scrupule qui ont décidé de piller le patrimoine national à leur seul profit ».

 

SIDZABDA


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