HomeA la uneCOMMUNE DE BOBO- DIOULASSO : Le mémoire en défense du gestionnaire des marchés limogé

COMMUNE DE BOBO- DIOULASSO : Le mémoire en défense du gestionnaire des marchés limogé


 

 

Dans notre édition du 18 février dernier, nous publiions une interview du maire de la commune de Bobo-Dioulasso, qui réagissait au limogeage du gestionnaire des marchés de ladite commune. Le mis en cause, à travers le droit de réponse que voici, donne sa version des faits. Lisez !

 

Il est des propos qui constituent des événements et qui ne peuvent être salués d’un silence ; ce serait du mépris et il nous est difficile de passer radicalement de l’estime, de la considération au mépris. C’est pourquoi, suite à l’entretien accordé au journal « Le Pays » N°6532 du vendredi 16 au dimanche 18 février 2018 par Monsieur le Maire de la commune de Bobo-Dioulasso sur la situation du marché central de Bobo-Dioulasso, nous venons, à travers cet écrit, apporter notre version des faits sur certains points que nous avons pu relever tout au long de l’entretien.

Nous citons : « En fait, ce qui a motivé notre décision, c’est surtout les actes répréhensibles posés par Ibrahima Traoré, à savoir la modification unilatérale des statuts de la structure et la prise d’un nouvel organigramme qui rattache directement le service financier à lui en tant que président de la structure, laquelle structure relève partout ailleurs de la direction qui est l’organe exécutif. Enfin, il a posé des actes financiers comme signer des chèques, que nous avons jugés très graves, du fait que cela ne relève pas de ses compétences ».

 Nous venons donc prendre ici à témoin l’opinion publique de la commune de Bobo-Dioulasso et au-delà, celle du Burkina Faso tout entier, que nous avons été l’objet de multiples publications diffamatoires à travers le journal l’Express du Faso et récemment le journal « Le Pays », au sujet de notre  implication dans  la Structure de Gestion des Marchés (SGM)  de Bobo-Dioulasso. Aussi, après un long temps sans la moindre réaction de notre part, nous estimons qu’il est  de notre devoir de venir porter l’information juste à l’attention de l’opinion publique.

Avant d’en arriver là, nous pensons qu’il est de notre devoir que nous puissions revenir, en quelques lignes, sur l’historique de la réhabilitation du  marché central de Bobo-Dioulasso. Ce marché a été réhabilité  en 2001, sur financement de  la  CFD (Caisse Française de Développement, actuelle Agence Française de Développement) à hauteur de 2,7 milliards de F CFA et sur financement des commerçants usagers de la commune  de Bobo-Dioulasso d’un montant de 1,6 milliards de F CFA (35%), en contrepartie de la remise  de contrats d’occupation du domaine public sur 25 ans.

Comme vous allez vous en rendre compte, cette réhabilitation a donné lieu à la signature d’une convention entre la CFD et la commune de Bobo-Dioulasso, consacrant la création de la Structure de Gestion des Marchés chargée de gérer les marchés structurés en lieu et place de la régie municipale (service de la mairie). La convention précise alors en ces termes, par rapport au mode de gestion de la structure, nous citons: « Les études réalisées dans le cadre de la réalisation  du projet, préconisent la création d’une personne morale du type régie autonome, ou encore  d’une société concessionnaire privée qui aura pour rôle de gérer le marché en remplacement du service des marchés de la mairie centrale. Le statut de cet organisme sera largement déterminé par le niveau de la participation financière des opérateurs de la place, dans le financement du projet ».

Les commerçants du marché central ayant participé au financement de la réhabilitation du marché central de Bobo-Dioulasso à hauteur de 35%, c’est l’option établissement public local de type concessionnaire, chargé de gérer le marché central en lieu et place de la régie municipale, sur une période de 25 ans (bail emphytéotique) qui a été retenue, eu égard à l’absence d’intérêt manifesté par le privé pour la gestion de l’infrastructure et à l’offre faite mais déclinée par la CCI-BF pour cette gestion. Des échanges au sein du partenariat ont donc abouti à la possibilité de création, par la Commune, d’une structure spécifique de gestion du marché central de Bobo-Dioulasso. Cette structure particulière est issue d’un consensus dégagé au sein du partenariat et qui, quoique créée par Arrêté municipal N°2001-001/MATD/PHUE/CB/CAB du 9 mars 2001, ne devrait pas être comprise suivant l’entendement de l’article 1 du décret N°94-313/PRES/MAT portant statut général des unités socio-économiques des collectivités territoriales.

Ainsi donc, la SGM est, au demeurant, un établissement public local (car créée par la collectivité territoriale) mais de type concessionnaire, avec un contrat de concession matérialisé par un bail emphytéotique (bail de location de très longue durée, 25 ans allant donc de 2001 à 2026 qui confère à l’emphytéote un droit sur le bien immobilier, les améliorations bénéficiant au bailleur en fin de bail sans que ce dernier ait à indemniser le locataire) et elle est dotée  de l’autonomie financière et de la personnalité morale (personnalité juridique distincte de celle de la municipalité) comme le précisent les statuts  de la SGM en leur article N° 01. Ce qui lui confère des droits  et des devoirs. De ce fait, elle peut ester en Justice, conclure des contrats (cf. convention d’exploitation du marché des fruits et légumes signée entre la commune et la SGM), acquérir ou céder des biens. Par rapport donc à la situation de la SGM, le rattachement est de type organique. Il se distingue donc de la tutelle en ce qu’il n’implique pas nécessairement un contrôle, a priori ou a posteriori, sur les actes édictés par les établissements publics. Il implique plutôt une participation au processus décisionnel (des représentants de la collectivité territoriale, à savoir deux conseillers municipaux siègent dans le comité de gestion de la SGM).

La SGM, jusqu’en 2026, est tenue de verser annuellement à la commune, des redevances : 18 millions de F CFA comme part fixe et 30% du résultat comme part variable.

Le Conseil municipal de  la commune de Bobo-Dioulasso est représenté au sein du comité de gestion (organe de délibération) par deux conseillers municipaux  pouvant être considérés comme les « yeux » et les « oreilles » du Conseil municipal au sein du comité de gestion.

Par ailleurs, les statuts étant les textes suprêmes de la SGM, nous  pensons qu’aucun arrêté ne devait être pris pour contredire et annuler les dispositions des statuts, même si la structure a été créée par un arrêté du Conseil municipal.

En se référant à certaines dispositions de l’arrêté n°2011-0181/CO/M/SG, nous disons ceci : l’article n° 4 de l’arrêté sus-cité dit que « l’organisation, le fonctionnement et les attributions de la SGM sont définis par les statuts de la SGM. Le présent arrêté  vaut approbation des statuts de la SGM ».

Ce qui, à notre sens,  nous conforte dans la position que ce sont les statuts de la SGM qui tiennent lieu de référence dans la gestion de la SGM.

L’article n°5 dudit arrêté qui dit que le Maire nomme au Comité de Gestion le Président de la commission des affaires économiques et financières de la commune de Bobo-Dioulasso, viole donc de façon gravissime les dispositions des statuts. Les statuts de la structure constituent le contrat de société entre les différents acteurs, qui ne saurait être violé par un seul acteur.

Du mode de gestion de la SGM

 

La SGM est administrée par un comité de gestion, un Comité consultatif des usagers (CCU) et un directeur.

Selon les statuts, le président de la commission des Affaires Economiques et Financières du Conseil municipal est le Président du Comité de gestion de la SGM. Il s’agit ici d’une compétence liée, qui est un pouvoir que le président de la commission des Affaires Economiques et Financières est obligé d’utiliser, qu’il le veuille ou non, ce qui signifie en théorie que le président de la commission des Affaires économiques et financières n’a pas le choix. Il est donc de facto le Président du CGM. Il y a lieu de préciser ici que ce poste ne pouvant être électif et nominatif à la fois,  et qu’ayant été déjà élu président de la commission des Affaires Economiques et Financières du Conseil municipal, nous ne devons, à notre sens, faire l’objet également d’une quelconque nomination.

 

De la modification unilatérale des statuts de la structure

 

Les statuts peuvent être modifiés tout au long de la vie de la structure. Pour modifier les statuts, il faut obligatoirement la participation des membres décideurs (membres du CGM) dans les formes prévues statutairement.

Entre personnes de bonne foi et faisant preuve de responsabilité et se voulant raisonnables, peut-on considérer comme crime de ‘’lèse-majesté’’ le fait de procéder à une modification de statuts datant de 2001 ? Non évidemment. Aussi, certaines  dispositions de ces mêmes anciens statuts ne sont plus d’actualité de nos jours :

– Article 4, le siège de la SGM est localisé dans le marché central : aujourd’hui, il est situé au quartier Sikassocira ;

-Article 7, les membres commerçants du CGM sont des représentants des syndicats (Syncomyf, Symacomb, UCMB), des associations (Amicale des commerçants, bouchers, associations féminines) et les commerçants du marché de Lafiabougou: de nos jours, ces membres sont élus par l’ensemble des commerçants usagers du marché central et du marché des fruits et légumes et non nommés.

-Article 8, le mandat du comité de gestion est de un (1) an renouvelable. De nos jours, il est passé de un  à  cinq ans. Malgré l’existence de cette disposition, le CGM précédent a siégé pendant 10 ans (2007/2017).

-L’effectif des membres commerçants du CGM a évolué avec la prise en compte du marché des fruits et légumes par la SGM.

-Des aspects tels que les conditions de révocation, de sanctions, de modification des statuts et le marché des fruits et légumes du secteur 9, ne sont pas pris en compte par les anciens statuts.

-etc.

Il est à préciser que lors de la session d’adoption des nouveaux statuts, tous les membres du CGM, à savoir les représentants  du Conseil municipal, des commerçants, de la Chambre de commerce, du ministère des Finances et du ministère  du Commerce, de l’industrie et de l’artisanat,  tous y ont activement pris part, à l’exception du Directeur régional de la Chambre de commerce, et un document portant adoption à l’unanimité des nouveaux statuts avec à l’appui les différentes signatures des participants, fait foi. Il n’a donc pas été question d’une modification unilatérale des statuts de la SGM. Par ailleurs, comme les représentants ci-dessus indiqués participent à la prise de décision stratégique du CGM, les statuts, une fois adoptés, ne doivent plus faire l’objet de soumission pour approbation au Conseil municipal ou à l’un des ministères membres du CGM. Selon les statuts de la SGM, seuls les états financiers sont à transmettre à la commune pour vérification des 30% du résultat. Le contrôle vis-à-vis de la SGM par la commune, est un contrôle de légalité. Cependant, si la SGM était une régie autonome (dotée de l’autonomie financière mais pas de la personnalité morale), le président du Conseil municipal serait le représentant légal et l’ordonnateur de ladite régie. Dans ces conditions, des rapports et des inspections régulières devraient permettre d’assurer le suivi et l’évaluation de la gestion de cette régie autonome.

De la question d’un nouvel organigramme qui rattache directement le service financier au président de la structure

 

Il est à préciser qu’au niveau de la SGM, le service financier ne s’occupe pas du recouvrement des redevances. Cette tâche relève plutôt de la compétence du service animation et collecte, lequel service est rattaché au Directeur de la SGM.

Les attentes à l’égard du président du Comité de gestion (élu pour un mandat de 5 ans avec obligation de résultat) ne sont-elles pas plus élevées que celles applicables aux autres administrateurs délégués et au Directeur de la SGM ? Dans tous les cas, nous pensons que certaines situations peuvent et, dans nombre de cas, doivent provoquer une implication plus directe  du Comité de Gestion et par voie de conséquence, du président du Comité de Gestion.

Citons de manière non exhaustive, quelques circonstances :

– la survenance d’évènements susceptibles d’influer négativement et de manière importante sur la profitabilité de la SGM, la capacité de la SGM de poursuivre ses objectifs et sa mission ou encore sa réputation (incapacité de la Direction d’établir les états financiers à temps, ceux de 2016 n’ont été établis que 10 mois après la clôture de l’exercice concerné) ;

– les situations d’insolvabilité de la SGM (la non- information  par le Directeur des membres CGM de l’existence d’impayés de plus de 30 millions de F CFA et ce, au profit de la société de gardiennage, Service Universel alors que le résultat est généralement inférieur à 6 millions) ;

– à la SGM, les statuts n’interdisent pas à un membre du comité de gestion  d’occuper un poste de direction ou de service (cf. Arrêté N°2011/0122/CB/M/SG/DRH du 21 juin 2011, nommant Monsieur Boubakar Sidiki Traoré, cumulativement à son poste de président du CGM, au poste de Directeur de la SGM) ;

-etc.

 

De la modification unilatérale des statuts par des arrêtés pris par des maires

 

 Par arrêté n°2011-0181/CB/MSG du 30 décembre 2011 et par arrêté n°2018-00012/CB/M/CAB, il a été apporté une modification substantielle des statuts, des fonctions, des organes de gestion en contradiction avec les engagements pris dans la convention de financement avec le partenaire technique et financier.

L’arrêté est également en porte-à-faux avec l’obligation contractuelle de la délégation et de la concession de la gestion de la structure sur une période de 25 ans. Cela entraîne une rupture unilatérale des termes contractuels envers les associés qui ont fait des apports financiers et entendent bien exercer un contrôle direct sur la gestion de la structure.

Les statuts de la structure constituent le contrat de société entre les différents acteurs, qui ne saurait être rompu par une autorité étrangère à la structure, la structure bénéficiant d’une personnalité juridique et ayant une autonomie de gestion. L’arrêté mis en cause, après avoir réaffirmé en son article 4 que l’organisation, le fonctionnement et les attributions de la SGM sont définis par les statuts de la SGM et qu’il vaut approbation des statuts, contredit formellement en son article 5 les dispositions statutaires, les termes de la convention de financement, en donnant pouvoir de nomination du président de la SGM, du vice-président et de certains membres.

Dans un même acte règlementaire, apparaît ainsi une contradiction, et une prise de décision qui ne devrait pas s’imposer à la Structure, en raison du fait qu’elle jouit d’une personnalité juridique distincte de la municipalité. Des conséquences résultent de ces arrêtés :

– sur le plan juridique,

– sur le plan des conséquences ou impact sur l’activité commerciale,

– sur le plan social et surtout de la perception du citoyen de la gouvernance municipale.

NB : selon certains ex- présidents du comité de gestion de la SGM, « la mention faite dans l’article 5 de l’arrêté modificatif N°2011-0181/CB/M/SG n’est que de pure forme, avec pour objectif de faire juste un constat de la composition du CGM tel que définie dans les statuts. A leur sens, il n’y a pas d’obligation pour une nomination ».

De la question des signatures de chèques par le président du CGM

 

Il faut préciser qu’à ce  niveau, tous les présidents qui se sont succédé   à la tête du comité de gestion de la SGM ont été signataires des chèques. Il s’agit de Monsieur Guy Somé et de Monsieur Boubakar Sidiki Traoré, à l’exception du Haut-Commissaire du Houet qui a dirigé le CGM en sa qualité de président de la délégation spéciale sous la Transition. Toutes ces informations peuvent être vérifiées auprès des intéressés et au niveau du service financier de la SGM.

Nous espérons avoir apporté des éléments d’éclairage nécessaires  à l’opinion publique,  afin de lui permettre d’apprécier la situation qui prévaut au sein de la SGM.

De notre point de vue, il n’y a véritablement pas de problème majeur dans le fonctionnement de la SGM, en dehors des fautes  de gestion que l’on peut relever  au niveau de la  Direction.

 

Président du Comité de Gestion de la SGM

 

Dr Ibraïma TRAORE

 

 

 

 

 

 


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