HomeA la uneCONCLUSIONS DU DIALOGUE NATIONAL AU GABON : Des réformettes pour divertir le peuple  

CONCLUSIONS DU DIALOGUE NATIONAL AU GABON : Des réformettes pour divertir le peuple  


Tout ça pour ça ? Peut-on se demander, au regard des conclusions du dialogue national initié par le président Ali Bongo, en mars dernier, pour tenter d’endiguer la crise post-électorale générée par sa réélection, dans des circonstances frisant le hold-up électoral, en août 2016. En effet, de la dizaine des principales mesures contenues dans le rapport général remis le 26 mai 2017 au chef de l’Etat, on peut faire le triste constat du non-verrouillage du mandat présidentiel, et du maintien du septennat. De quoi faire déchanter tous ceux qui croyaient en cette initiative de dialogue qui devrait permettre aux Gabonais d’asseoir les bases d’une véritable démocratie dont l’une des valeurs cardinales est l’alternance. Il faut le dire, en préconisant la non-limitation des mandats présidentiels, les participants à ce forum ne font pas autre chose que donner carte blanche à Ali Bongo, pour s’éterniser au pouvoir. Alors qu’il est su de tous que la gangrène gabonaise, c’est cette famille Bongo qui règne depuis les années 60. De fait, les conclusions de ce fameux dialogue national apportent de l’eau au moulin de l’opposant Jean Ping qui, tout en le récusant, avait effectivement fait savoir qu’il s’agissait d’un écran de fumée. Aujourd’hui, tout porte à croire que le pouvoir gabonais, en initiant ce dialogue national, n’avait pas la volonté réelle de faire diagnostiquer les causes profondes de la crise sociopolitique que connaît le pays depuis la présidentielle de 2016. Comme un air de déjà vu sous Bongo père qui avait initié un simulacre de forum pour calmer la contestation de son élection en décembre 1993, Bongo fils se joue aussi de son peuple. C’est dire que, de ce dialogue qu’on voulait ‘’inclusif et sans tabou’’ et qui a  porté sur la réforme des institutions, les futures élections, la modernisation de la vie politique, la cohésion sociale et la paix, l’on sort sans la clé au problème fondamental : la limitation du mandat présidentiel. Les parties prenantes, à savoir les représentants du pouvoir, de l’opposition et de la société civile, à cette table du dialogue, ne se contentant que de propositions de réformettes, juste pour divertir le peuple gabonais.

Ali Bongo ne manque-t-il pas son rendez-vous avec l’histoire ?

Il est vrai qu’on ne doit pas, pour autant, jeter le bébé avec l’eau du bain, en ce sens qu’il y a des conclusions de ce dialogue qui prennent en compte certaines aspirations de l’opposition. A savoir le passage du mode du scrutin présidentiel à deux tours, la mise à l’écart du ministère de l’Intérieur dans la proclamation des résultats des élections au profit d’une commission électorale qui sera baptisée Centre gabonais des élections. On note aussi la possibilité, pour les binationaux, d’être candidats à l’élection présidentielle et la création d’une Cour de justice de la République pour connaître des actes délictueux des membres du gouvernement. Toute chose qui participe de la moralisation de l’Etat. Cependant, au regard du contexte national qui a poussé Ali Bongo à inviter la classe politique et la société civile sous l’arbre à palabres, on dira de ces conclusions que c’est bon, mais ce n’est pas arrivé. En effet, si tant est que c’est l’élection d’Ali Bongo en 2009 comme en 2016 qui a toujours été source de secousses politiques au Gabon, c’est dire que c’est lui-même le problème. Et il sied qu’il en tire toutes les conséquences. Même s’il se refuse à reconnaître le tripatouillage des urnes qu’on lui reproche lors de la présidentielle du 27 août 2016, il doit se rendre à l’évidence que les résultats serrés de ce scrutin sont un signe des temps. Il est temps pour lui de savoir décrypter le message des Gabonais à travers cette élection et les émeutes qui l’ont émaillée, après la proclamation des résultats. Le fait que le dialogue national qu’il a voulu ne limite pas les mandats présidentiels, ne doit nullement être comme la baraka pour lui. Il doit plutôt mettre un point d’honneur à ne pas céder à cette possibilité de pouvoir à vie. Et s’employer à partir par la grande porte et non la porte étroite. L’Histoire lui en saurait gré.

Drissa Traoré     


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