HomeA la uneCONDAMNATION A MORT DE MORSI ET COMPAGNIE : Faut-il pleurer les Frères musulmans?

CONDAMNATION A MORT DE MORSI ET COMPAGNIE : Faut-il pleurer les Frères musulmans?


 

En Egypte, la confrérie des Frères musulmans est à nouveau sous les feux de la rampe et pour cause : la Justice égyptienne a confirmé, le 16 juin dernier, la peine de mort prononcée contre Mohamed Morsi, par ailleurs premier président démocratiquement élu du pays. Avec cette confirmation de peine, c’est au total plus de 600 autres islamistes qui sont condamnés à mort depuis l’arrivée du général Al-Sissi au pouvoir. Plus de 600 membres de la confrérie attendent d’être exécutés. Ce verdict a provoqué un concert de désapprobations, notamment celles des Etats-Unis, de Amnesty international et de l’ONU, qui déplorent tous « des condamnations à mort dans des procès expéditifs et sans précédent dans l’histoire de l’Egypte ». Il faut saluer la réaction immédiate de l’Occident qui, bien que ne partageant pas du tout l’idéologie obscurantiste que distillent les Frères musulmans, se font le devoir de rappeler à la Justice égyptienne et surtout au président Al-Sissi, les principes élémentaires et sacrés du respect de la vie humaine. Ce qui est paradoxal cependant et qu’il ne faut pas manquer de relever, c’est que ce verdict qui provoque l’émoi au-delà des frontières du pays, ne semble pas émouvoir outre mesure la grande majorité des Egyptiens. Quid de la réaction du principal concerné, Mohamed Morsi, qui n’a pas hésité à lever le poing pour saluer le verdict du tribunal ? Un geste qui n’a pas manqué de laisser perplexes tous ceux, amis, sympathisants ou détracteurs, qui se trouvaient dans la salle. Mais c’est un geste qui doit surtout donner à réfléchir à tous les Egyptiens sur les probables répercussions de cette condamnation. Aussi bien le quidam que les jurés du tribunal et surtout les autorités politiques. Quel message Morsi a-t-il voulu donner à travers ce geste? Cela dit, doit-on vraiment pleurer les Frères musulmans face à ce qui semble être un acharnement du général Al- Sissi contre leur confrérie?

Quand la violence se retourne contre ses promoteurs, il n’est pas étonnant qu’il ne s’en trouve personne pour les pleurer

Parvenu au sommet de l’Etat égyptien grâce à l’activisme des Frères musulmans, Mohamed Morsi n’a pas tardé à étaler ses limites en matière de gestion démocratique d’un Etat moderne. Fortement influencé par les prédicateurs islamistes auprès de qui il prenait conseils et instructions, il s’est laissé entraîner dans une politique d’islamisation outrancière du pays, cristallisant ainsi contre lui et sa confrérie, la colère des minorités religieuses et surtout d’une grande partie de la jeunesse égyptienne qui n’approuvait pas cette politique aventuriste et moyenâgeuse. C’est sans doute dans ce parcours politique catastrophique de Morsi et de son mouvement qu’il faut aller chercher la raison de l’indifférence quasi totale dans laquelle les Egyptiens ont accueilli le verdict à l’encontre de leur ancien président.

Dans un pays dont l’histoire est fortement imprégnée de spiritualité, il est difficile de comprendre que plus de 600 personnes soient condamnées

à mort dans un procès qui n’a duré que le temps d’un tournoi de maracana. Assurément, les Frères musulmans avaient installé l’Egypte dans un cycle de violence dont personne ne pouvait prévoir l’issue. Alors, quand cette violence se retourne contre ses promoteurs, il n’est pas étonnant qu’il ne s’en trouve personne pour les pleurer. Le général Al-Sissi, arrivé au pouvoir dans une ambiance marquée par la violence engendrée par les Frères musulmans, semble lui-même condamné à maintenir la même pression sur la confrérie, sous peine d’en être lui-même victime. En définitive, c’est l’économie égyptienne qui pâtira de cette situation sociopolitique car ce pays où le tourisme compte pour l’essentiel du budget national, ne sera plus, pour le monde occidental, la « destination à ne pas manquer ». Mais à qui la faute? Bien sûr à ceux qui chérissent la violence au point d’en faire leur arme de combat politique. Et de ce point de vue, on peut se demander s’il faut pleurer les Frères musulmans.

Dieudonné MAKIENI


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