HomeOmbre et lumièreCOUR ASSIDUE DES HOMMES POLITIQUES AUX AUTORITES RELIGIEUSES ET COUTUMIERES:Attention à la récupération !

COUR ASSIDUE DES HOMMES POLITIQUES AUX AUTORITES RELIGIEUSES ET COUTUMIERES:Attention à la récupération !


Les formations politiques de toutes les obédiences se bousculent actuellement aux portillons des mosquées, des palais royaux et des églises pour, disent-elles, exposer leurs préoccupations aux chefs religieux et coutumiers, et recevoir en retour leurs conseils et bénédictions. Ce qui est une bonne chose. En effet, quand une nation traverse une crise, et c’est le cas du Burkina aujourd’hui, il est normal qu’elle se tourne vers ses fils et filles censés l’aider à la surmonter. Les personnes les plus indiquées pour jouer ce rôle d’apaisement sont, de toute évidence, les chefs coutumiers et religieux, au regard de leur aura et de leur profil de rassembleur.

 

L’on peut se demander ce que peuvent bien faire les responsables religieux et coutumiers, sinon que de prôner le dialogue

Mais, ce qui est curieux, c’est qu’au sortir de leurs entretiens avec ces personnalités morales, toutes les formations politiques ont donné l’impression d’avoir été ragaillardies par les propos de leurs interlocuteurs. Visiblement, chaque acteur, voyant certainement midi à sa porte, se frotte les mains d’avoir été écouté et compris. L’on peut donc en déduire que tous ont reçu l’onction des serviteurs de Dieu et des ancêtres pour les accompagner, les uns dans leur volonté de modifier la Constitution, les autres dans leur détermination à y apporter la réplique qui sied. Dans un tel contexte, marqué notamment par un manichéisme très prononcé, l’on peut se demander ce que peuvent bien faire les responsables religieux et coutumiers, sinon que de prôner le dialogue entre acteurs politiques pour sauvegarder la paix. Et c’est ce qu’ils ont dit, à tour de rôle, à tous leurs interlocuteurs. Ils sont donc dans leur rôle, mais dans la situation actuelle du Burkina, il revient au pouvoir de prendre l’initiative de la paix, en posant des actes susceptibles de ne pas la remettre en cause. Or, tout indique que son obstination à modifier la Constitution est porteuse de graves menaces pour la paix. Pourquoi ne pas y renoncer ici et maintenant, au lieu de se lancer dans des opérations de diversion ou de charme en direction des chefs religieux et coutumiers ? En effet, ces derniers avaient déjà fait connaître leur position d’une manière ou d’une autre, puisqu’ils ont été mis à contribution dans le cadre du Conseil des Sages et du Conseil consultatif sur les réformes politiques (CCRP). Dans ces deux instances, ils avaient insisté sur la nécessité de ne pas poser des actes susceptibles de nuire aux intérêts supérieurs de la nation. La démarche du consensus avait été fortement recommandée pour les réformes politiques qui présentent un intérêt national. Mais tout cela n’aurait servi à rien, puisque visiblement, il y a un camp qui juge qu’il est dans son bon droit de passer outre ces recommandations, sous le prétexte que le peuple est souverain. Pourquoi alors repartir vers ces mêmes autorités pour demander encore conseil ? Que souhaite-t-il entendre de nouveau qu’il n’ait déjà entendu ?

Les autorités religieuses et coutumières doivent rester dans la logique de leur ministère

L’Eglise catholique, par exemple, a suffisamment été explicite sur la question de la modification de la Constitution et la mise en place du Sénat. Espère-t-on que cette institution, au détour d’une visite, reviendra sur sa position ? Ce serait un parjure qui ferait perdre à l’Episcopat catholique son âme et sa crédibilité. L’on peut donc estimer que c’est par courtoisie que certains chefs religieux et coutumiers reçoivent tout le monde. Cela dit, il est plus que jamais nécessaire que ces institutions respectables ne soient pas tentées de se laisser instrumentaliser par les hommes politiques. Aujourd’hui, leurs responsables doivent peser leurs mots avant de les prononcer, au risque de les voir exploités par des hommes politiques de mauvaise foi, pour créer la confusion et l’amalgame au sein des populations. Contre vents et marées, ils doivent rester dans la logique de leur ministère qui consiste à servir Dieu et les mânes des ancêtres, même si pour cela ils doivent s’attirer les foudres des hommes politiques. C’est le moindre mal, au regard des valeurs sacrées qu’ils incarnent. Ils ne doivent, en aucun cas, les pervertir pour des intérêts bassement matériels et temporels. C’est cette posture seule qui fera des chefs religieux et coutumiers des remparts inexpugnables contre la bêtise humaine. Pour le moment, l’on peut dire qu’ils semblent bien tenir ce rôle. Pourvu qu’il en soit ainsi et pour toujours !

SIDZABDA


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