HomeA la uneDECLARATION DE POLITIQUE GENERALE : Paul Kaba Thiéba attendu au pied du mur

DECLARATION DE POLITIQUE GENERALE : Paul Kaba Thiéba attendu au pied du mur


Le 5 février dernier, le Premier ministre Paul Kaba Thiéba était devant la représentation nationale pour sa déclaration de politique générale. Ce grand oral est imposé par la Constitution en son article 63. L’enjeu est d’obtenir le quitus de l’Assemblée nationale pour entamer l’exécution du programme de celui que les Burkinabè ont élu démocratiquement le 29 novembre 2015, c’est-à-dire, Roch Marc Christian Kaboré. Paul Kaba Thiéba peut déjà se satisfaire d’avoir reçu l’onction de la majorité absolue des députés. Au décompte, en effet, 72 voix se sont exprimées pour et 53 ont préféré l’abstention. La posture de ces derniers nous rappelle l’attitude de Saint Thomas, disciple de Jésus Christ. Ils attendent de voir avant de croire. Et comme eux, bien des Burkinabè attendent de voir avant de croire.

Les propos du PM sont suffisamment révélateurs de l’immensité de la tâche qui attend l’équipe gouvernementale

Cela est un bon présage pour la démocratie. Car l’unanimisme peut engendrer le nanisme de la démocratie et transformer son espace de vie qui est l’hémicycle en une honteuse et servile chambre d’enregistrement, comme c’est le cas dans certains pays africains. De ce point de vue, même si les 53 avaient voté contre, les Burkinabè ne devraient pas s’en offusquer outre mesure, parce que cela participe du jeu démocratique. Il y aurait eu matière à inquiétude si la majorité des députés avaient décidé de recaler le chef du gouvernement. Dans un tel cas de figure, l’on peut dire qu’au-delà de la déclaration de politique générale, c’est le choix de la personne qui la présente qui est remis en cause. Cela dit et pour s’arrêter sur le contenu de la déclaration, l’on peut faire les constats suivants. Le Premier ministre a fait l’état des lieux. Le moins que l’on puisse dire est qu’il y a péril en la demeure. Et tous les officiels qui se plaisaient à brandir “les avancées économique et sociale du Burkina “, sous l’impulsion de Blaise Compaoré, se chatouillaient pour rire. En effet, Kaba Thiéba a relevé ceci : « Le pays est classé au 183e rang sur 188 selon l’indice de développement humain du PNUD en 2014. En outre, plus de 40% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté estimé à 153.530F CFA par an et par personne… ». Ces propos sont suffisamment révélateurs de l’immensité de la tâche qui attend l’équipe gouvernementale. Le second constat que l’on peut faire y est relatif. Et le Premier ministre semble avoir pris toute la mesure de cette réalité puisqu’il reconnaît que : « Rarement dans l’histoire de notre peuple, un gouvernement n’a été mandataire de tant d’espérances et d’attentes ». Le troisième constat est que ce diagnostic fait, le Premier ministre s’est engagé à mener des actions fortes dans tous les domaines de la vie nationale, pour remettre sur ses deux pieds le grand grabataire que représente le pays des Hommes intègres. Dans le même temps, il annonce la mise en place « d’instances de pilotage et de suivi-évaluation pour mesurer les progrès accomplis ».
Le dernier constat porte sur les valeurs qui doivent servir de boussole à son action. Celles-ci sont au nombre de trois : « Le patriotisme, », « l’attachement viscéral à l’éthique et à la probité », et « le volontarisme pour mettre notre pays sur un sentier de croissance forte, durable et inclusive ». Tout cela est bien beau, peut-on s’exclamer ! Les discours de ce genre, les Burkinabè en sont coutumiers. En effet, tous les gouvernements qui se sont succédé dans ce pays les en ont gavés abondamment. Seulement, ces discours ont tous brillé par leur aspect démagogique. Le résultat est que les Burkinabè, dans leur grande majorité, avaient fini par les assimiler, à juste titre, comme relevant de la diversion publique et du théâtre. La grande question que l’on peut se poser de ce fait est de savoir si oui ou non Paul Kaba Thiéba fera l’exception à cette tradition gondwanaise.

On peut se demander légitimement où le PM trouvera l’argent nécessaire pour la mise en œuvre de tout ce vaste programme

Il lui revient donc d’apporter la preuve qu’en acceptant le poste de Premier ministre, il n’a pas été motivé par les plaisirs du naam (pouvoir). Et cela passe par des actes concrets et mesurables. Pour montrer par exemple qu’il n’est pas un théoricien de « l’éthique » et de « la probité », lui et tous ses collaborateurs doivent montrer l’exemple. Car, c’est cet exemple au sommet de la pyramide qui peut véritablement impacter la base. C’est à ce prix, entre autres, que les Burkinabè peuvent l’accompagner dans sa volonté de moraliser la vie publique. Les Burkinabè donc l’attendent avec beaucoup d’espoirs au pied du mur. Et tous ceux qui aiment véritablement le pays souhaitent qu’il surprenne agréablement. Pour lui faciliter la tâche, la vigilance citoyenne doit être une donnée permanente. Celle-ci doit être d’abord le fait de l’ensemble des députés de la présente législature. Tous autant qu’ils sont, ils ne doivent pas hésiter à remonter les bretelles au gouvernement, chaque fois que celui-ci poserait des actes en porte-à- faux avec l’intérêt général et les promesses annoncées. Cela leur est d’ailleurs imposé par les textes. Dans la même veine, les associations de la société civile doivent mettre un point d’honneur à surveiller comme du lait sur le feu la gouvernance de Paul Kaba Thiéba, de sorte à l’aider à éviter les mauvaises tentations liées à l’exercice du pouvoir. Car l’actuel Premier ministre a certainement des qualités mais il demeure un homme, donc susceptible de se fourvoyer. Mais en attendant, on peut se demander légitimement où il trouvera l’argent nécessaire pour la mise en œuvre de tout ce vaste programme qu’il vient de dérouler dans l’hémicycle. On attend de voir.

SIDZABDA


No Comments

Leave A Comment