HomeA la uneDETTE DE L’ETAT VIS-A-VIS DES ETABLISSEMENTS PRIVES ET DES OPERATIONS ECONOMIQUES : C’est le sérieux qui manque le plus

DETTE DE L’ETAT VIS-A-VIS DES ETABLISSEMENTS PRIVES ET DES OPERATIONS ECONOMIQUES : C’est le sérieux qui manque le plus


L’Etat burkinabè, on le sait, traîne depuis toujours la triste réputation de ne pas payer ses dettes dues notamment à ses partenaires nationaux du secteur privé. L’illustration de cette renommée a été confirmée récemment. En effet, les 26 et 27 mai derniers, respectivement le bureau exécutif national de l’Union nationale des établissements d’enseignement privés laïc (UNEE-L) et les responsables de l’enseignement catholique ont évoqué publiquement la question des arriérés de subvention dont l’Etat leur est redevable. La première structure, lors d’une conférence de presse organisée le 26 mai dernier, a révélé à l’opinion que l’Etat lui doit au titre des années scolaires 2014-2015 et 2015-2016 au moins 1 milliard quatre cent quarante millions vingt- cinq mille F CFA (1 440 025 000 F CFA). Un jour après ce coup de gueule, c’était au tour du clergé catholique d’exprimer la même préoccupation. Et il l’a fait devant celui qui incarne le plus l’Etat, c’est-à-dire le président du Faso himself, Roch Marc Christiam Kaboré. A en croire, en effet, les évêques du Burkina, l’Etat leur reste redevable au titre de la scolarité de l’année 2014-2015 pour les élèves affectés dans leurs établissements d’enseignement, de la somme de cent trente-six millions (136 000 000) de F CFA. Il faut rappeler que depuis 2009, l’Etat, pour faire face à la demande sociale, a signé des conventions avec des établissements privés. Aux termes de ces conventions, lesdits établissements doivent recevoir des élèves affectés par l’Etat dans les classes de 6e, de seconde et de 1ère année BEP. En contrepartie, l’Etat doit verser annuellement aux établissements conventionnés un montant représentant la scolarité des élèves affectés. L’on peut faire le constat que les promoteurs privés ont accompli leur part de contrat et que c’est l’autre contractant, c’est-à-dire, l’Etat, qui s’est montré défaillant. Et chaque année, l’on assiste au même scénario. Et si la très réservée et pudique Eglise catholique en est arrivée à outrepasser la voie hiérarchique c’est-à-dire le ministère de tutelle pour poser le problème au président du Faso, c’est que quelque part et c’est le moins que l’on puisse dire, le seuil de sa patience et du tolérable a été franchi. L’on peut comprendre donc que l’Eglise ait menacé en des termes subtils de dénoncer la convention. De la même manière, le bureau exécutif national de l’Union nationale des établissements d’enseignement privés laïc a révélé à l’opinion que si l’Etat ne s’exécute pas dans les meilleurs délais, leurs établissements cesseront de recevoir à la prochaine rentrée scolaire les affectés du gouvernement. Leur réaction est, on ne peut plus légitime.

 

Voilà un pays qui se soucie peu de la relance de l’économie nationale

 

En effet, au rythme où vont les choses, l’on pourrait s’attendre à ce que bien des établissements concernés par le problème, mettent la  clé sous le paillasson pour déficit budgétaire. Et quand on sait que les responsables de ces établissements sont tenus de verser régulièrement des salaires à leur personnel, l’on peut se risquer à dire que le fait que l’Etat rechigne à honorer sa part de contrat pourrait s’apparenter à un crime. Et cette perception de l’attitude  de l’Etat est d’autant plus juste que nous sommes dans un domaine où ceux qui sont susceptibles de payer les pots cassés de la défaillance de l’Etat sont des innocents, c’est-à-dire les élèves. En effet, ces arriérés de subvention créent d’énormes préjudices aux établissements. Et cela rejaillit forcément sur la qualité de l’enseignement-apprentissage. L’on peut se demander si l’Etat est conscient de cela. S’il l’est, c’est grave, s’il ne l’est pas, c’est encore plus grave. Que l’on n’aille surtout pas évoquer la sempiternelle question de manque de ressources financières pour justifier cet état de choses. Car en réalité, c’est le sérieux qui manque le plus. En effet, quand on observe le train de vie de l’Etat, l’on peut avoir le sentiment que le Burkina ne manque pas de moyens au point de ne pas pouvoir payer certaines de ses dettes. Lorsque l’on prend par exemple le montant de ce dont l’Etat reste redevable aux établissements d’enseignement privé, l’on peut en déduire que l’éducation est le cadet des soucis de l’Etat burkinabè. Autrement, l’on peut avoir du mal à s’expliquer la manière dont l’Etat gère ce secteur. Le plus souvent, l’on s’empresse de mettre en place des projets tout en comptant exclusivement sur l’étranger pour les mettre à exécution. Le  continuum, par exemple, est l’un de ces projets. Dans ces conditions, l’émergence qui revient de manière récurrente dans tous les discours officiels, sera une utopie. Car un des prérequis de cette émergence est l’accès à une éducation de qualité par l’ensemble des citoyens. Chaque Burkinabè peut aisément faire le constat que l’Etat burkinabè n’en a cure. Les exemples qui illustrent cela sont légion. L’un d’eux est justement la dette de l’Etat vis-à-vis des établissements d’enseignement privé. Mais pas seulement les opérateurs économiques pâtissent du manque de sérieux pour ne pas dire plus, de l’Etat. Voilà un pays qui se soucie peu de la relance de l’économie nationale complètement émasculée du fait du non paiement de la dette intérieure. On ne peut vouloir d’une chose et de son contraire. Si l’Etat peut trouver de l’argent pour payer régulièrement ses fonctionnaires, augmenter les traitements de certains corps, il devrait pouvoir à tout le moins s’acquitter de sa dette intérieure afin que ceux qui évoluent dans le privé puissent eux aussi payer leurs travailleurs, faire face aux charges sociales et fiscales, booster leurs unités de production, créer davantage de richesses et fouetter la consommation.  Au lieu de cela, c’est la léthargie et bientôt le recul si l’on y prend garde.

 

Sidzabda


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