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DIALOGUE POLITIQUE AU BURKINA


Dans une lettre adressée au Chef de file de l’opposition, (CFOP), Zéphirin Diabré, le président du Faso annonce la tenue d’un dialogue politique. Il doit, en principe, débuter aujourd’hui 15 juillet et refermera ses portes le 22 prochain. Pendant 7 jours donc, les participants (majorité et opposition) se pencheront sur les grands problèmes qui secouent la Nation afin de leur trouver des solutions. Il faut rappeler que ledit dialogue se déroulera autour des deux points centraux suivants : le Code électoral et la situation nationale. Ce premier point central se décline en des sous-points. Au nombre de ceux-ci, on peut citer, entre autres, le vote des Burkinabè de l’étranger, l’élection au suffrage universel direct des présidents de Conseil des collectivités territoriales. Le deuxième point central est la situation nationale. Ses sous-points portent, entre autres, sur la question sécuritaire, la question de la réconciliation nationale, celle de l’unité nationale et de la cohésion sociale.

Une chose est de tenir un dialogue, une autre est que ce cadre accouche de solutions susceptibles de sauver le Burkina

L’on peut se réjouir d’emblée que les acteurs politiques majeurs aient enfin réussi à aplanir leurs divergences pour permettre à cet événement d’intérêt national d’avoir lieu. En effet, initialement prévu pour avril dernier et boudé par l’opposition au motif que la partie d’en face n’avait pas pris en compte ses préalables, c’est finalement en juillet que le dialogue se tient. Et la date a été arrêtée suite à des concertations entre les deux parties et après le rapport du comité préparatoire. En tout cas, c’est ce qui ressort de la lettre du président du Faso, adressée au Chef de file de l’opposition. L’on peut également se féliciter que les grands défis du moment auxquels la Nation est confrontée, figurent à l’ordre du jour du dialogue politique. On peut, à titre d’exemple, citer la question sécuritaire et celle de la réconciliation nationale. Mais, n’allons pas trop vite en besogne. Car, une chose est de tenir un dialogue parce que la situation l’exige, une autre est que ce cadre accouche de solutions susceptibles de sauver le Burkina. Pour se donner toutes les chances pour que ces pourparlers n’accouchent pas d’une souris, il faut absolument que les deux parties fassent preuve de ce qui suit. D’abord, la sincérité doit être de mise. Cette qualité, on le sait, est la chose la moins partagée chez les hommes politiques. En pareilles occasions, On avance généralement masqué. Chacun y vient avec le secret espoir de tirer la couverture à soi, si fait que tous les coups bas sont permis. Pour reprendre Nicolas Machiavel, en politique, « seules les fins justifient les moyens ». La situation du pays ne peut pas s’accommoder d’une telle perception des choses. La deuxième qualité qui doit s’inviter aux débats, est la confiance mutuelle. Et cette qualité découle justement de la sincérité des uns et des autres. En effet, pour parler comme les pédagogues, la sincérité s’avère comme un prérequis si l’on veut que les uns et les autres se fassent confiance. La troisième et dernière exigence est que les uns et les autres s’accordent sur les objectifs à atteindre à l’issue du dialogue. Sur ce point, il ne doit pas y avoir matière à tergiverser. En effet, tous les participants doivent tendre vers l’intérêt supérieur de la Nation.

Des acteurs politiques pourraient venir à ce dialogue avec des motivations différentes

Et cela passe par la résolution de la question sécuritaire, la mise en place d’un large rassemblement pour sauver la cohésion sociale et le vivre-ensemble aujourd’hui sérieusement malmenés ainsi que la préparation, dans les règles de l’art, des élections de 2020. L’intérêt supérieur de la Nation commande que les acteurs politiques mettent en berne leurs intérêts partisans pour relever ensemble ces défis. Et ils n’auront aucune excuse de ne pas se laisser guider par cet impératif catégorique. En tout cas, le peuple burkinabè est plus préoccupé aujourd’hui par les questions sécuritaires et celles liées au vivre-ensemble et à la cohésion sociale que par autre chose. Faire une fixation sur les questions purement politiques et partisanes au point d’occulter les questions existentielles des Burkinabè peut s’apparenter à un combat où on laisse la proie pour s’acharner sur l’ombre. Pour sûr, les Burkinabè ne se reconnaîtront pas dans ce combat byzantin. Ce risque est d’autant plus à relever que des acteurs politiques pourraient venir à ce dialogue avec des motivations différentes. Sans doute certains espèrent-ils que ce dialogue débouche sur un gouvernement d’union nationale où ils pourraient être gratifiés d’un maroquin ministériel. Pour d’autres encore, c’est l’occasion de faire l’âne pour avoir du foin. Toutes ces motivations sont loin des préoccupations du moment, des Burkinabè. C’est pourquoi d’ailleurs, l’on peut déplorer que pour la résolution de certains problèmes inscrits à l’ordre du jour, on se soit limité aux acteurs politiques. On aurait pu élargir le profil des participants en associant les acteurs de la société civile. Pour des questions touchant à la réconciliation nationale, au vivre-ensemble et à la sécurité, le cadre retenu semble étriqué.
Il faut espérer que cela sera rattrapé plus tard et dans les meilleurs délais par la tenue d’un dialogue national. Et dans un tel format, toutes les composantes de la Nation, chacune en ce qui la concerne, peut apporter sa petite pierre à l’édification d’une Nation plus juste, apaisée et résolument tournée vers les questions de développement. L’on peut également déplorer que tous les acteurs politiques n’aient pas été associés à ce dialogue. En effet, si au niveau de la majorité présidentielle, tous les partis membres se sont positionnés pour dialoguer, il n’en est pas de même pour l’opposition.
Seuls prendront part à ce dialogue, tous les partis membres du CFOP. Toutes les formations qui n’en sont pas membres, ne sont pas concernées. Dans ces conditions, l’on peut s’attendre à la construction d’un abri de singes. Pendant que les uns construisent, les autres mettront un point d’honneur à détruire. Toute chose dont les Burkinabè n’ont pas besoin aujourd’hui. Cela dit, et dans l’hypothèse où le dialogue accoucherait de solutions consensuelles et idoines pour le Burkina, il faut d’ores et déjà prévoir un comité équilibré pour leur mise en œuvre. On le dit d’autant plus que le Burkina est passé maître dans l’art de produire de beaux textes, mais qui ont tout le temps de jaunir dans les tiroirs, faute d’application. Pour le Burkina, tout le monde doit prier pour que le dialogue politique qui s’ouvre aujourd’hui, soit à la hauteur de l’espérance des populations dont une partie aujourd’hui est réfugiée dans son propre pays. Il ne faut jamais oublier cela.

« Le Pays »


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