HomeA la uneDIALOGUE POLITIQUE EN GUINEE Alpha Condé doit faire sa part de chemin

DIALOGUE POLITIQUE EN GUINEE Alpha Condé doit faire sa part de chemin


La marche de la Guinée vers la démocratie, on le sait, aura été un véritable chemin de croix. Toutes les étapes du processus qui y ont conduit, en effet, ont été marquées par la suspicion, la haine et la violence. Le moins que l’on puisse  dire c’est que le peuple de Guinée y a payé un lourd tribut. C’est dans ces conditions que le professeur Alpha Condé a été porté à la tête du pays à la suite d’une élection qui, malgré ses imperfections, aura été jugée globalement acceptable par la communauté internationale. En principal opposant, Cellou Dalein Diallo, qui avait pourtant des raisons de contester les résultats du scrutin et d’installer de ce fait la Guinée dans la chienlit, avait fait contre mauvaise fortune bon cœur en les acceptant.

 

La Guinée n’a pas totalement soldé le passif de sa politique des décennies antérieures

 

Le monde entier avait applaudi l’élégance et la noblesse de l’acte et les Guinéens pouvaient dès lors entretenir l’espoir de voir leur pays s’installer durablement dans la stabilité pour enfin amorcer son développement. Cellou Dalein Diallo aura donc fait sa part de chemin vers l’apaisement. Mais l’on a l’impression, au regard de la situation politique   actuelle tendue, que la Guinée n’a pas totalement soldé le passif de sa politique des décennies antérieures, marqué essentiellement par l’arbitraire, l’intolérance, la violence et la suspicion. C’est en tout cas dans ce climat que toutes les institutions démocratiques ont été mises en place. L’on ne doit  donc pas être étonné aujourd’hui que le pouvoir et l’opposition soient de nouveau au bord de la rupture à propos de la mise en application de l’accord politique inter-guinéen signé après de laborieuses négociations, le 3 juillet 2013, sous la houlette de Saïd Djinnit, représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest. La relative décrispation politique que la Guinée connaît actuellement, grâce justement à cet accord, risque de faire long feu. En effet, les trois principaux opposants que sont Cellou Dalein Diallo, Sydia Touré et Aboubacar Sylla viennent de menacer de suspendre leur participation aux travaux de l’Assemblée nationale et de reprendre les manifestations de rue si le cadre de concertation pouvoir / opposition, prévu par l’accord politique inter-guinéen du 3 juillet 2013, n’était pas mis impérativement en place pour permettre de plancher sur les conditions d’organisations des élections locales. Il faut dire à ce sujet, que l’opposition est dans son bon droit de formuler cette requête, puisque ces élections étaient censées se tenir à la fin du premier trimestre de 2014. Visiblement, le pouvoir traîne les pieds pour les organiser pour des raisons que l’on ignore. L’impatience de l’opposition et son souci de voir la Guinée désormais organiser des élections propres peuvent se justifier. En effet, en Afrique de manière générale, les processus électoraux sont émaillés de fraudes, si bien que les lendemains des scrutins ont toujours été tumultueux. L’on peut ajouter à cela le caractère précipité et chaotique de leur préparation. La mise en place d’un cadre de concertation où tous les acteurs politiques de toutes les obédiences pourront évoquer toutes les pathologies dont souffrent invariablement sous nos tropiques, les élections,   s’avère nécessaire.

 

Condé n’a pas à avoir peur d’une élection transparente si son bilan est convaincant

 

L’on peut donc avoir du mal à comprendre que le pouvoir du professeur Alpha Condé fasse de la résistance devant cette revendication légitime de l’opposition. Cela est d’autant plus inacceptable que Cellou Dalein Diallo et ses camarades ont déjà fait des concessions en acceptant de siéger à l’Assemblée nationale contre souvent l’avis de leur base et malgré les irrégularités qui ont entaché les dernières législatives. Le professeur Alpha Condé doit donc leur retourner l’ascenseur en prenant langue avec eux si cela peut contribuer à tirer la démocratie guinéenne vers le haut. Sa part de chemin vers l’apaisement et la consolidation de la démocratie et de la paix sociale est donc vivement attendue. Toute autre attitude serait contre- productive et accréditerait l’idée selon laquelle les opposants africains, qui ont le plus souffert de la dictature des Etats d’exception et des républiques bananières, ne sont pas des exemples de démocrates dès lors qu’ils accèdent au pouvoir. Alpha Condé doit travailler à faire démentir cette thèse en ne cherchant pas systématiquement à diaboliser et à ostraciser son opposition.

Il serait plutôt bien inspiré d’opposer à Cellou Dalein Diallo et à ses camarades de l’opposition, son bilan. C’est celui-ci seul qui peut plaider pour lui auprès des Guinéens. Il n’a donc pas à avoir peur d’une élection transparente si son bilan est convaincant. Si celui-ci ne l’est pas, il ne doit pas craindre d’être sanctionné par le peuple souverain de Guinée. C’est en cela qu’il pourra démontrer à la face de ses compatriotes et du monde entier qu’il est positivement différent de tous les présidents qui l’ont précédé.

 

« Le Pays »


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