HomeA la uneDISPARITION D’UN JOURNALISTE AU BURUNDI : La descente aux enfers continue

DISPARITION D’UN JOURNALISTE AU BURUNDI : La descente aux enfers continue


Depuis la candidature suivie de la réélection du président Pierre Nkurunziza à un troisième mandat, le Burundi est entré dans une zone de turbulences dont il ne semble pas prêt de sortir, au regard de la dégradation continuelle du climat sociopolitique et de la terreur que le pouvoir continue d’abattre sur les opposants. Mais un an après la forfaiture du pasteur- président, la flamme de la contestation n’est pas éteinte. Rendant fou de rage voire paranoïaque un Nkurunziza qui avait eu la faiblesse de croire qu’en mettant les gens devant le fait accompli, il arriverait à bout de ses détracteurs à l’usure. Mais loin de s’estomper, la flamme de la résilience est restée allumée, poussant le pouvoir à répondre à la détermination des contestataires, par une répression féroce.  Tant et si bien que le quotidien des Burundais est devenu un interminable chemin de croix où la simple manifestation de toute opposition au président Nkurunziza,  peut être synonyme d’arrêt de mort. Ce ne sont pas les familles des plus de mille citoyens tués depuis le début de la contestation, ni les 270 000 exilés, qui diront le contraire. Sans oublier les tortures, les perquisitions et les arrestations arbitraires qui viennent en rajouter au fardeau déjà lourd des populations. Et ce n’est pas tout ! Car, la machine de répression du pouvoir veille toujours au grain. Ainsi donc, la descente aux enfers du peuple burundais se poursuit. Le dernier développement en date est la disparition d’un journaliste, le week-end dernier. Tout porte à croire que Jean Bigirimana, puisque c’est de lui qu’il s’agit, s’est retrouvé dans le collimateur du pouvoir de Bujumbura pour ses va-et-vient jugés suspects au Rwanda voisin, connu pour ne pas être du tout en odeur de sainteté avec le satrape burundais. De là à voir en lui un pactisant du « diable », il y a un pas que les autorités soupçonneuses de Bujumbura devraient ne pas franchir, dans un contexte délétère où le président lui-même n’est pas loin de se méfier de sa propre ombre.

Le boucher de Bujumbura semble pris à son propre piège

C’est ce qui justifie du reste les craintes de la famille du journaliste qui est, depuis, sans nouvelles de lui. D’autant que depuis le début des manifestations, très peu de gens ont disparu pour réapparaître après. Mais, au pays de Pierre Nkurunziza, cela passe désormais pour un non-événement, tant sont monnaie courante les tueries en masse et autres assassinats ciblés dont le dernier en date est celui, la semaine dernière, de la députée Hafsa Mossi, qui n’a pas encore livré tous ses secrets. Et c’est peu de dire que le Burundi est devenu une prison à ciel ouvert pour tous ceux-là qui ne sont pas d’accord avec le président Nkurunziza. Car, si un vice-président de l’Assemblée nationale comme l’ex-opposant Agathon Rwasa, ne peut plus circuler librement, ce n’est pas un journaliste critique vis-à-vis du régime, qui pourrait se permettre une telle liberté. Et dire que tout cela se passe désormais dans la quasi-indifférence de la communauté internationale, on ne peut s’empêcher de croire qu’elle a abdiqué et détourné son regard du Burundi. Une démission qui donne carte blanche au satrape pour sévir à cœur joie contre son peuple. Nkurunziza est dans une logique de pis-aller. Car il est allé trop loin pour reculer. Et sachant qu’il ne peut plus rien attendre de cette même communauté internationale, il fait ce qu’il veut et ne se prive plus d’aucun moyen pour annihiler toute contestation. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le Burundi est en train de sombrer complètement, pour le plus grand malheur de ses populations livrées à elles-mêmes et impuissantes devant la boulimie mortifère d’un président qui a totalement perdu le Nord et qui est prêt à tout pour conserver son fauteuil. Autrement, comment comprendre qu’en pleine année scolaire, l’on puisse jeter en prison ou exclure par centaines, des collégiens et des élèves du primaire, pour une affaire de gribouillages de photos du président dans des manuels scolaires ? Si ce n’est pas hypothéquer l’avenir des enfants, cela y ressemble fort. A moins que le message ne vise à faire comprendre qu’au Burundi, il n’y a point d’avenir envisageable sans Nkurunziza. A la vérité, le boucher de Bujumbura semble pris à son propre piège. Etant allé trop loin, la seule solution pour lui reste la force, et il veut massacrer en silence. Et le fait de s’en prendre à des journalistes, est la preuve qu’il ne veut pas que ces derniers relayent des informations qui pourraient le desservir et ternir davantage son image déjà bien écornée. L’on comprend alors pourquoi dès le début de la contestation, il s’était employé à réduire les médias indépendants au silence.

En vérité, le peuple burundais est extrêmement traumatisé. Et le comble, c’est que son bourreau n’est personne d’autre que son président qui a pourtant, ironie du sort, juré sur la Constitution de travailler à le protéger. Alors, qui pour sauver le Burundi ?

Outélé KEITA


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