HomeA la uneDr GEORGES OUEDRAOGO, PNEUMOLOGUE«  : La tuberculose demeure une maladie des pays dits pauvres »

Dr GEORGES OUEDRAOGO, PNEUMOLOGUE«  : La tuberculose demeure une maladie des pays dits pauvres »


 

Le monde entier a célébré la journée de lutte contre la tuberculose le 24 mars dernier. Au Burkina, selon les données de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la lutte contre cette maladie est efficace. Le maître de conférence agrégé en pneumologie, Dr Georges Ouédraogo, au service de pneumologie au centre hospitalier universitaire Yalgado Ouédraogo, dans cet entretien, donne des mesures à suivre pour éviter cette maladie qui est mortelle. Lisez !

« Le Pays » : Comment peut-on définir la tuberculose ?

Dr Georges Ouédraogo : C’est une maladie infectieuse, endémique, contagieuse essentiellement à transmission interhumaine et est curable. La tuberculose n’est pas seulement localisée au niveau du poumon, mais elles peut atteindre tous les organes du corps. Cependant, la première localisation est d’abord pulmonaire et au fur et à mesure va atteindre les autres organes du corps humain.

Par quoi est-elle causée ?

La tuberculose est causée par des germes appelés mycobacteries ; on parle aussi de Complexe Mycobactérium Tuberculosis qui sont hominis dont le plus fréquent, le mycobactérium tuberculosis bovis et celui africanum qui est beaucoup plus rencontré dans notre contexte africain. Le réservoir de ces microbes est essentiellement l’homme. Puisque c’est l’homme malade qui va transmettre la maladie aux autres qui sont sains, autour de lui.

Il y a combien de formes de tuberculose ?

Il y a deux familles de tuberculose. C’est-à-dire celle pulmonaire localisée dans les poumons et la tuberculose extra pulmonaire. En ce qui concerne la tuberculose pulmonaire, il y a la forme primaire de la maladie qui est la première manifestation quand on rentre en contact avec le germe de la tuberculose. Il y a aussi la 2e forme qui est celle grave qui est une infection généralisée. Quant à la tuberculose extra pulmonaire, elle est localisée en dehors des poumons. Elle peut être de l’enveloppe des poumons, du cœur, des intestins, de l’articulation du genou, des testicules et de la peau. En général, ces formes ne sont pas contagieuses. Parmi ces deux grandes familles de tuberculose, la plus dangereuse est celle qui est contagieuse. C’est cette forme qui va maintenir la transformation de la maladie, les autres formes sont relativement moins graves.

Quelles sont ses manifestations ?

Les signes de présomption de la tuberculose sont divers. Mais, pour la forme pulmonaire qui est la plus fréquente, on distingue des signes de présomption qui sont,  entre autres, la toux chronique qui a une durée de plus de 14 jours et accompagnée d’un amaigrissement, les signes d’imprégnation tuberculeux, une hémoptysie des images de radio pulmonaire évocatrices. Mais les signes de confirmation, c’est l’examen de crachat qui met en évidence les bacilles acido-alcolo-résistants qui sont la forme visible de mycobactérium tuberculogiste. La confirmation se fait par l’examen des crachats à la recherche d’un BAAR et mieux, les tests moléculaires, la culture et la biopsie.

Qui peut contracter cette maladie ?

Tout le monde peut contracter la tuberculose. Mais plus facilement les personnes vivant avec le VIH et les enfants de moins de 5 ans en contact avec les personnes bacillifères ; la transmission se fait d’homme à homme.

Y a-t-il une cible particulière qui est exposée à cette maladie ?

La tuberculose n’est pas héréditaire. Il existe des facteurs favorisants. Au niveau du cadre socioprofessionnel, nous pouvons dire que les travailleurs migrants souvent victimes de surmenage, les groupes socio-économiques défavorisés sont plus exposés à la maladie. La tuberculose touche plus les hommes que les femmes. Au niveau de l’âge, la tuberculose dans les pays en développement est la maladie des jeunes. Il y a aussi la promiscuité. Il s’agit des malades bacillifères en contact avec les enfants et les conjoints dans des situations de promiscuité (prisons, crèches, foyers surpeuplés). En plus de ces facteurs, il y a le phénomène des terrains débilités, notamment la malnutrition, l’éthylo-tabagique, les gastrectomisés, les diabétiques, les immunodéprimés qui sont des maladies virales dont la rougeole, la coqueluche, etc., le SIDA, les néoplasies et les hémopathies.

Quelles sont ses complications ?

La tuberculose est mortelle. Non traitée, ce qui n’est pas concevable, on observera 50% de décès dans les 2 à 4 ans, 25% de porteurs chroniques et 25% de guérison spontanée. Même traitée, les complications possibles sont surtout des lésions séculaires : la dilatation des bronches, l’emphysème pulmonaire péri cicatriciel, la greffe de parasites ( Aspergillus) dans les cavernes pulmonaires, la fibrose pulmonaire, la chronicité liée à la résistance au traitement.

Quels comportements adopter face à une personne qui a la tuberculose ?

Quand une personne a la tuberculose, il faut éviter de l’isoler, mais plutôt accompagner cette personne dans un centre de santé et l’aider à faire le traitement de fait à réduire les risques de transmission. Sur le plan social, il faut aussi aider le malade par un soutien affectif.

Comment se fait le traitement contre la tuberculose et où peut-on en trouver ?

Le traitement est disponible dans tous les centres de santé au Burkina, du niveau le plus bas jusqu’au sommet, c’est-à-dire du CSPS jusqu’au CHU. Le médicament de la tuberculose est gratuit et mis à la disposition gracieusement aux patients qui sont tenus de prendre les médicaments en présence d’un agent de santé qui va s’assurer d’une bonne prise des médicaments. La durée habituelle du traitement pour les nouveaux cas est de 6 mois suivi de contrôle pour vérifier l’efficacité du traitement.

Quel est l’état des lieux de cette maladie au Burkina ?

Le programme de la lutte contre la tuberculose au Burkina s’appuie sur l’organisation du système sanitaire du pays. Ainsi, tous les niveaux sont impliqués, notamment le niveau central, intermédiaire et périphérique. Chacun a un rôle à jouer et nous constatons que la lutte est assez coordonnée et efficace. Pour le Burkina, 115 laboratoires aident au diagnostic de la tuberculose au Burkina. En 2018, on a notifié 6194 cas, toutes formes confondues, soit une augmentation de 4,5% par rapport à 2017. Mais sous notification, l’OMS estime la prévalence à 49 cas pour 100 000 habitants soit théoriquement Presque 10 000 cas que nous devions notifier.

Peut-on guérir de la tuberculose ?

Oui. Si l’on observe scrupuleusement les règles du traitement tel que le respect de la durée du traitement et la dose adaptée au poids avec des contrôles périodiques des crachats, on guérit de la tuberculose.

Comment la soigne-t-on ?

On soigne la tuberculose en adoptant les règles d’hygiène de l’organisme, c’est-à-dire pas de tabac ni d’alcool. Mais aussi suivre un régime alimentaire hyper protidique et hypercalorique. On soigne la tuberculose par la prise de médicaments antibiotiques appelés antituberculeux qui existent sous des formes combinées de 2 à 3 ou 4 antituberculeux. Ce traitement est gratuit sur tout le territoire de notre pays.

Comment l’éviter ?

A travers la vaccination des enfants par le BCG qui protège jusqu’ à 15 ans contre les formes graves de la tuberculose. L’hygiène de la toux chez les malades ayant la forme pulmonaire contagieuse. Il faut qu’on améliore la prévention des infections dans les centres de santé pour éviter que ceux déjà atteint ne puissent contaminer les autres. Il faut aussi faire le dépistage périodique afin de traiter précocement et efficacement tous les patients tuberculeux. Il faut, en plus, améliorer les conditions de vie socio-économique dans nos pays, car la tuberculose demeure une maladie des pays dits pauvres.

Autre chose à ajouter ?

La tuberculose n’est pas héréditaire, elle n’est pas non plus liée à un jet de sort. Je rappelle que le traitement de la tuberculose est gratuit au Burkina et est aussi efficace. Si vous toussez plus de 14 jours, il faut aller dans un centre de santé pour faire le diagnostic et bénéficier des soins. Je dirai qu’il est presque superflu d’isoler le patient quand le diagnostic est posé. Par contre, il vaut mieux l’entourer de toute l’affection et le soutien nécessaire pour le conduire vers la guérison. La tuberculose est guérissable si le patient est diagnostiqué à temps et suit correctement le traitement prescrit.

Propos recueillis et retranscrits par Valérie TIANHOUN

 


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