HomeA la uneEL HADJ SALIFO TIEMTORE, PCO DU 2E CONGRES ORDINAIRE DU MPP : « Rien ne sert de venir au pouvoir si on est incapable de le gérer »

EL HADJ SALIFO TIEMTORE, PCO DU 2E CONGRES ORDINAIRE DU MPP : « Rien ne sert de venir au pouvoir si on est incapable de le gérer »


El hadj Salifo Tiemtoré est député du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) à l’Assemblée nationale. Secrétaire à l’organisation du parti, il est également le président du Comité d’organisation du 2e congrès ordinaire dudit parti, placé sous le thème : « Mise en œuvre du programme présidentiel : quelles perspectives et quels engagements ? », et qui se tiendra du 10 au 12 mars 2017, à Ouagadougou. Mais en attendant, nous l’avons rencontré le mardi 7 mars 2017, au siège du MPP. Avec lui, nous avons pu échanger sur ce à quoi l’on pourrait s’attendre à l’issue de ce congrès.

 

Sous quel signe se tiendra le congrès ordinaire du MPP ?

 

Je voudrais d’abord vous remercier pour l’ensemble des efforts que vous fournissez pour informer l’opinion. Je vous remercie également de nous donner l’occasion de parler de notre congrès. Etant le parti au pouvoir, tout ce qui nous touche, touche de façon globale l’ensemble du pays. Cela dit, nous plaçons ce congrès sous le signe de la cohésion et de l’unité d’action. Certes, nous avons pris le pouvoir mais depuis, nous ne nous sommes pas encore  réunis pour débattre d’un certain nombre de grandes questions. Nous voulons donc, à travers ce congrès, pouvoir échanger sur l’ensemble des grandes questions et surtout voir dans quelle mesure nous pourrions au mieux accompagner le président Roch Marc Christian Kaboré, dans la mise en œuvre de son programme quinquennal.

 

Spécifiquement, quels seront les enjeux en termes de répartition des postes et d’orientation politique ?

 

Parler de « répartition des postes », c’est trop dire. Comme c’est un congrès ordinaire qui se tient tous les 3 ans, nous devons redistribuer nos forces. Les structures, du Bureau exécutif national aux démembrements en passant par le bureau politique national, seront revues. A l’issue du congrès, nous allons nécessairement remettre en place l’ensemble de nos structures sur le terrain. Je vous rappelle à ce propos que nous sommes présents dans les 9000 villages du Burkina et dans tous les secteurs. Nous sommes présents également dans les 370 communes et arrondissements que comptent les 45 provinces des 13 régions du Burkina. Nous sommes aussi présents à l’extérieur, en Afrique, aux Etats-Unis, en Asie et en Europe. Nous sommes aussi organisés à travers des groupements de jeunes, des femmes, des anciens. Nous disposons de structures spécifiques regroupant les marchés et yaars, le secteur informel, les fonctionnaires, les travailleurs du secteur privé, les universitaires, les élèves et étudiants, les personnes vivant avec un handicap, les ouvriers et les paysans. Toutes ces structures seront revisitées et nous allons mettre à plat ce que nous avons pu accomplir déjà, afin de mieux repartir sur de nouvelles bases.

 

Que voulez-vous dire par l’expression « de nouvelles bases » ?

 

Cela ne veut pas dire que nous allons changer d’orientation politique. Mais, en ce qui concerne la gouvernance sociale, politique et économique, nous avons déjà donné des canevas qui ont été redistribués dans toutes les structures. Les structures sus-citées ont toutes reçu ces canevas et des instructions de travailler à fond sur l’ensemble de ces indications, afin de venir au congrès avec des idées pouvant nous aider à accompagner le gouvernement dans la mise en œuvre du programme présidentiel. Il faut souligner que parmi les structures qui prendront part au congrès, il y a le groupe parlementaire MPP qui compte 55 députés. Tous ces députés seront présents. Nous comptons 272 maires qui seront également présents avec les présidents de Conseils régionaux. Au total, nous attendons, pour cette rencontre, 5000 congressistes.

 

Selon certaines indiscrétions, le trio RSS connaît des difficultés. Ne pensez-vous pas que cela pourrait entamer la bonne tenue du congrès ?

 

Je ne sais pas ce que vous appelez « difficultés » … Sinon, personnellement, je n’en vois pas. Pour emprunter les termes du président Roch Marc Christian Kaboré, je dirai qu’ils ont la même vision, mais des caractères différents. C’est cette différence qui fait que le MPP est très fort. Car, dans tous les domaines, nous avons des leaders qui sont à même d’apporter des idées et de pouvoir rassembler tout le monde. C’est cela qui fait la force du MPP. Vous parlez de divergences alors que les responsables ne cessent de vous répéter qu’il n’y a pas de divergences entre eux. Cela dit, je comprends quand même cette situation. Etant donné qu’ils sont au pouvoir, il faut que leur vie soit tout le temps scannée. Sinon, je puis vous rassurer qu’il n’y a pas de problème.

 

« Nous avons invité tous les partis amis »

 

Vous disiez tantôt qu’il y aura 5000 participants. Partant de cela, pouvez-vous nous dire approximativement le coût d’organisation de ce congrès ?

 

Nous ne pouvons pas a priori estimer le coût de ce congrès. Mais, sachez que la direction ne prend en charge que les éléments centraux. Pour le reste, les militants se prennent eux-mêmes en charge. Ceux qui sont à l’extérieur viennent par leurs propres moyens. Ce que nous comptons faire, c’est regrouper les uns et les autres pour une prise en charge commune des repas et de l’hébergement. Nous avons pris des bâtiments que nous allons équiper avec des matelas. C’est une rencontre de camarades. Aussi, il faut dire que les 800 membres que compte le bureau politique national, cotisent. Les députés et l’ensemble de nos responsables cotisent également et chacun apporte son soutien comme il le peut. Certains nous envoient de l’eau, d’autres des véhicules pour le transport, et du carburant. C’est donc difficile pour nous de capitaliser car, c’est l’effort conjugué de tous les militants.

 

Quels sont les partis que vous comptez inviter à ce congrès ?

 

Nous avons invité tous les partis amis et alliés de l’intérieur comme de l’extérieur. Nous avons invité le CFOP (ndlr : Chef de file de l’opposition politique) et d’autres personnalités. Nous sommes le parti au pouvoir. Donc, nous n’avons pas fermé notre porte. A l’international, il y a une vingtaine de partis qui ont demandé à participer.

 

Il y a peu, le bureau politique avait sanctionné quelques-uns de vos militants. Pouvez-vous revenir sur la nature de ces actions et nous dire également si le congrès aura à se prononcer sur cette question ?

 

En effet, il y a eu, à un moment donné, des écarts de conduite, surtout pendant les élections municipales. Sur le terrain, les ambitions des uns et des autres se sont heurtées. Nous avons laissé faire. Certains nous ont critiqués mais, nous avons voulu laisser exprimer la démocratie et ne pas imposer quoi que ce soit. C’est ce qui a d’abord engendré toute cette pagaille. Ensuite, au moment de la mise en place des exécutifs locaux, cette difficulté est encore apparue, puisque la direction politique n’a pas indexé telle ou telle personne pour y siéger. Nous avons simplement demandé de tenir compte, entre autres, des femmes, des jeunes, de la représentativité locale. Il est bon que vous vous rappeliez le contexte dans lequel le MPP a été créé. Certes, il y a des entités homogènes, mais il y a eu des adhésions qui sont venues de différents niveaux. Nous n’avons que trois ans d’existence et avec ces adhésions, nous ne nous connaissions pas tous au sein du parti. Il y a des gens qui ont fait leurs premiers pas en politique avec le MPP. Ces derniers ont vu ce « soleil levant » et, à travers ses trois dirigeants, une lueur d’espoir pour le développement de ce pays et ont voulu y adhérer. Maintenant, dans la pratique, il a fallu d’abord travailler à se connaître. Sur ce point, je voudrais, au passage, féliciter tous les militants et les responsables. Car, en même temps que l’on essayait d’implanter le parti, l’on essayait de se connaître et c’est également au même moment que l’on se battait pour lutter pour l’avènement d’une vraie démocratie. Pendant ce temps, les gens continuaient d’adhérer au parti. Les gens venaient de partout pour qu’on évolue ensemble. Cela répond d’ailleurs au nom du parti : «Mouvement du peuple pour le progrès ». Maintenant que dans ce mouvement, nous avons pu prendre le pouvoir, il faut bien que nous nous arrêtions un instant, pour voir ce que nous avons pu accomplir. Même au niveau du programme présidentiel…

 

Nous reviendrons sur la gestion du pouvoir par le MPP mais en attendant, parlons des sanctions…

 

Avec les écarts qui ont été constatés, nous avons été obligés de mandater la Commission de contrôle et de médiation qui a auditionné près d’un demi-millier de  personnes. Chez nous, nul ne peut être sanctionné s’il n’a été entendu. La direction donne au militant la possibilité de se défendre et de faire son autocritique. Après, les sanctions sont infligées suivant les textes. Ces sanctions vont de l’avertissement à l’exclusion. Pour ce cas précis, les sanctions prises contre les 129 premières personnes, vont de l’avertissement à l’exclusion en passant par la suspension. Le congrès va revenir sur cette question car, les décisions de sanctions seront dans le rapport de la direction politique. Le bureau politique a fait un rapport au congrès, pour faire part de toutes ses activités. Naturellement, les sanctions en feront partie et le congrès peut rejeter, amender ou aggraver certaines sanctions.

 

Les écarts de comportement de certains de vos militants sont survenus avec la tenue des élections municipales. Bientôt, il sera organisé des élections municipales partielles dans les zones où il y a eu des violences. Peut-on s’attendre à des décisions fortes et des directives fermes du congrès pour que ces élections ne donnent pas lieu à d’autres couacs ?

 

« C’est parce qu’il y a des difficultés que les élections se font pour que des gens viennent tenter de les résoudre »

 

Je vous rappelle qu’il y a trois commissions qui travaillent actuellement sur le congrès. La première commission travaille sur le programme présidentiel. La deuxième sur la vie du parti et la 3e sur le bilan des élections et les perspectives. Au niveau de cette commission, ils ont fait le bilan de notre stratégie de campagne, des résultats et proposé des solutions. Il y a donc des suggestions qui sont faites et c’est clair que pour les élections à venir, nous allons rectifier le tir en fonction de ce que nous avons vu sur le terrain.

 

Cela fait un moment que le MPP est au pouvoir. Peut-on, au regard de certaines difficultés rencontrées dans la gestion du pouvoir d’Etat, dire que le peuple a fait le meilleur choix ?

Dites-moi, dans quel régime au monde, il n’y a pas de difficultés actuellement ? Il n’y en a pas. C’est parce qu’il y a des difficultés et c’est parce que les peuples ont des attentes que les élections se font, que la politique se fait, pour que des gens viennent tenter de les résoudre.

 

Mais il y a quand même une différence selon les régimes ?

 

Nous sommes venus trouver un certain nombre de préoccupations. Nous essayons de travailler ensemble à les résoudre. C’est d’ailleurs ce pour quoi nous partons en congrès pour nous pencher sur « la mise en œuvre opérationnelle du programme présidentiel : quelles perspectives et quels engagements ? ». Nous sommes là pour tenir le congrès, dans le but de voir comment nous allons amener l’ensemble de nos militants, non seulement à s’approprier le programme présidentiel, mais également à travailler à sa mise en œuvre. Il s’agit de recenser les difficultés et d’analyser ce que nous avons pu faire depuis que nous sommes au pouvoir. C’est un bilan à mi-parcours. C’est dans ce sens que les débats dans les commissions sont assez houleux, si fait que que nous ne nous entendons pas. Non, il ne s’agit pas de mésententes. Si on ne discute pas de cette façon, comment allons-nous diriger le pays ? D’ailleurs, je disais que ce serait un crime si nous n’arrivons pas à nous entendre pour embrasser une vision bien déterminée. Sinon, rien ne sert de venir au pouvoir si on est incapable de le gérer. C’est parce qu’il y a des préoccupations qu’il y a des gouvernants.

 

Quel message avez-vous pour le peuple burkinabè et vos militants, pour la concrétisation du changement promis ?

 

D’abord, je remercie le peuple burkinabè pour avoir fait confiance au MPP. Je l’invite à maintenir cette confiance car, ce que nous avons promis, nous allons tenter de le réaliser, Dieu aidant. Ce que nous souhaitons le plus, c’est que les uns et les autres se mettent au travail. C’est ensemble que nous pouvons construire ce pays. Une fois les élections terminées, il est intéressant que l’ensemble du peuple se mette à la tâche. On ne va pas dire qu’il y a des gens qui sont contre le MPP car, quand il s’agit de développement, nous devons laisser tout ce qui nous divise et aller dans un même seul sens. C’est en cela que nous pourrons sortir du sous-développement. Nous avons assez de préoccupations et il est intéressant que même lorsque l’on veut revendiquer, on le fasse dans le respect de ce qui est prévu par la loi. Car, comme dit l’adage, « avant de se plaindre de n’avoir pas reçu une bonne part de viande du partage qui est fait de la tête du mouton, touches ta propre tête pour te rendre compte de la quantité de viande qu’il peut y avoir sur une tête ». Je souhaite donc que nous sachions raison garder et que ce qui nous unit soit plus fort que ce qui nous divise.

 

Vous avez beaucoup parlé de rassemblement et d’unité d’action, afin de travailler pour le développement du pays. Toute chose qui suppose également la cohésion et qu’il faut travailler à la réconciliation nationale. Quelle sera l’orientation du congrès sur cette question de réconciliation qui tarde à se matérialiser ?

 

Vu que nous parlerons des engagements et des perspectives de la mise en œuvre du programme présidentiel, il faut que nous sachions dans quelle mesure nous pouvons réunir l’ensemble des forces vives de la nation. Toutes les questions seront donc abordées et nous allons dégager notre position. Nous avons beaucoup plus besoin de la réconciliation de l’ensemble du peuple que n’importe qui. Mais, on ne peut pas aller à la réconciliation, juste comme ça. Rappelez-vous, il y a eu la Journée nationale du pardon, le collège des sages … Mais, nous continuons toujours à parler de réconciliation. Ce qui veut dire que peut-être, nous n’avons pas encore attrapé le bon bout. Donc, la réflexion continue. Toutes les personnes de bonne foi qui veulent contribuer à la bonne marche du processus, sont les bienvenues.

 

Interview réalisée par Adama SIGUE

 

 


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