HomeA la uneENQUETES SUR LES VIOLENCES DANS LE GRAND KASAÏ : L’attitude suspecte de Kinshasa  

ENQUETES SUR LES VIOLENCES DANS LE GRAND KASAÏ : L’attitude suspecte de Kinshasa  


 

Encore et encore la RDC sous les feux de la rampe ! Et toujours dans le mauvais sens. En effet, hier, 20 juin 2017, le pays de Joseph Kabila se faisait encore remonter les bretelles au Conseil des droits de l’Homme de l’ONU à Genève, par rapport aux violences meurtrières qui endeuillent le Grand Kasaï depuis des mois. En tout cas, l’état de la crise ethnico-politique tel qu’exposé par le Haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, le prince jordanien Zeid Ra’ad Al Hussein, a de quoi susciter de vives inquiétudes dans cette partie centrale de la RDC. Il s’agit, entre autres, de la création et l’armement d’une milice pro-gouvernementale dénommée  Bana Mura, pour contrer les rebelles du Kamuina Nsapu  et qui aurait ‘’mené des attaques horribles contre des civils des groupes ethniques luba et lulua’’. Dans cette vague de violences meurtrières, l’ONU parle de dizaines de fosses communes documentées, sans occulter la mort de ses deux experts et de leurs accompagnateurs congolais. C’est dire que le Kasaï présente tous les signaux d’une catastrophe humanitaire. D’où l’insistance de ‘’Monsieur droits de l’Homme’’ de l’ONU pour l’ouverture d’une enquête internationale dans cette région où de nombreuses sources dénoncent plus de 3300 morts depuis la flambée des violences. Comme à son habitude, le pouvoir congolais a encore eu une réaction épidermique, face à cet appel du prince Jordanien Hussein à mettre en place une commission d’enquête internationale. On se souvient, le 6 juin dernier, à l’occasion de sa 35ème session, le Conseil des droits de l’Homme des Nations unies avait encore haussé le ton contre les autorités congolaises, leur donnant un ultimatum de 48 heures pour mettre en place une commission d’enquête conjointe sur les violations commises contre les civils.

La posture du régime procède d’une stratégie de diversion

Dès le lendemain, la ministre congolaise des droits de l’Homme, Marie Ange Mushobekwa Likulia, a fait part de la disponibilité de la RDC à collaborer avec les Nations unies, avant d’ajouter cependant que la justice congolaise se réservait le droit de garder la direction des enquêtes. De quoi donner la chair de poule aux défenseurs des droits de l’Homme, quand on sait que le régime congolais n’a jamais affiché sa détermination à prendre à bras-le-corps la crise qui sévit dans le Grand Kasaï. Se montrant incapable de maîtriser cette situation de violences, il est à se demander pourquoi Kinshasa n’entend pas adhérer à l’option de la mise en place d’une commission internationale pour situer les responsabilités. On voit bien là une attitude suspecte. Il faut le dire, les autorités congolaises n’ont jusque-là pas fait montre d’une réelle volonté de faire la lumière sur les violences au Kasaï. L’on garde encore bien à l’esprit le mystère de l’assassinat des deux experts onusiens, Zaida Catalan et Michael Sharp, enlevés et exécutés à bout portant alors qu’ils enquêtaient précisément sur ces violences au Kasaï. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cette situation ne plaide pas en faveur du gouvernement congolais dont la responsabilité est pointée du doigt dans ces violences. L’on comprend d’ailleurs difficilement pourquoi ce gouvernement se hâte si lentement, alors que l’occasion lui est donnée par ces enquêtes, de montrer patte blanche. En effet, le gouvernement a toujours rejeté toutes les responsabilités sur les miliciens du Kamuina Nsapu et en a usé même comme argument, pour demander l’aide de l’ONU pour mettre fin aux exactions.

Par ailleurs, on ne peut s’empêcher de penser que cette posture du régime procède d’une stratégie de diversion pour reléguer au second plan la question fondamentale de l’élection présidentielle. Le fait de se jouer du peuple congolais sur l’accord de la Saint-sylvestre, peut laisser croire que le clan Kabila veut jouer la carte du pourrissement en plongeant le pays dans une insécurité qui lui permettrait de ne pas aller aux élections.

Drissa TRAORE


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