HomeA la uneEXPULSION DE REFUGIES BURUNDAIS DU RWANDA : Les a-t-on conduits à l’abattoir ?  

EXPULSION DE REFUGIES BURUNDAIS DU RWANDA : Les a-t-on conduits à l’abattoir ?  


 

Depuis la fin de la semaine écoulée, de nombreux réfugiés burundais dont le nombre, à en croire des médias burundais, avoisinerait le millier, ont été expulsés du Rwanda et renvoyés dans leur pays. Pour Kigali, ces expulsions ont eu lieu dans le cadre d’opérations de routine visant des ressortissants étrangers en situation irrégulière et « ne visaient pas les Burundais en particulier ». De plus, les autorités rwandaises jurent, la main sur le cœur, qu’il a été préalablement demandé à ces réfugiés qui n’avaient pas de documents, de « régulariser leur situation  ou de demander le statut de réfugiés ». C’est pour n’avoir pas satisfait à ces recommandations que ces derniers ont été renvoyés manu militari chez eux. L’une des premières observations que l’on peut faire, c’est que ces expulsions se présentent comme un nouveau tournant, un des nombreux avatars de la crise burundaise qui n’en finit pas de se prolonger, et qui voit chaque jour le fossé de la défiance s’agrandir non seulement entre le pasteur Pierre Nkurunziza et les brebis frondeuses de son enclos, mais aussi entre lui et certains de ses pairs de la sous-région dont le Rwandais Paul Kagamé, accusé par Bujumbura de soutenir les rebelles burundais. C’est dire si les relations entre le pasteur-président et son voisin du Nord sont devenues exécrables.  Dans ces conditions, comment donner tort à Paul Kagamé qui, manifestement, cherche à se dédouaner de ces accusations ? En tout cas, dans le principe, le président rwandais ne manque pas de bonnes raisons pour justifier son acte, puisqu’il est accusé non seulement par Bujumbura, mais aussi par certaines capitales occidentales, notamment Washington, de velléités de déstabilisation de son voisin burundais. Ces expulsions peuvent donc être la conséquence d’un ras-le-bol du président rwandais excédé par des accusations qu’il trouve injustes, au regard des sacrifices que consent son pays à l’endroit des réfugiés. C’est sans doute pourquoi il a décidé de jeter le bébé avec l’eau du bain en renvoyant les réfugiés burundais, pour s’éviter des ennuis supplémentaires. En quelque sorte, une occasion ou une manière pour lui de prouver qu’il avait accueilli ces réfugiés simplement à titre humanitaire. Même si l’on peut aussi penser qu’il se débarrasse de ces Burundais à son corps défendant, dans le but de sécuriser aussi son pays.

Si ce n’est la réponse du berger à la bergère, cela semble bien être celle de Paul à Pierre

Car, dans la situation actuelle, il n’est pas exclu que certains de ces réfugiés ou prétendus tels, puissent  être instrumentalisés par l’un ou l’autre camp (du pouvoir ou de l’opposition), dans le but d’infiltrer et de porter un coup dur au camp d’en face. Mais l’on peut penser que d’autres réfugiés, par contre, et ils sont probablement les plus nombreux, ont fui les violences pour tout simplement sauver leur peau. Et certains autres,  en raison de leur opposition au troisième mandat de Nkurunziza, ont fui leur pays. Les renvoyer alors de la sorte entre les mains de leur bourreau, c’est les envoyer à l’abattoir. Mais comment faire le distinguo entre les réfugiés « innocents » et les refugiés « suspects » ? Question à mille inconnues. Mais, il faudrait éviter, autant que faire se peut, de livrer les agneaux au loup. Car, Nkurunziza n’attend qu’une occasion pour  mettre la main sur ses ennemis déclarés et croquer à pleines dents tous ces contestataires qui ont eu le culot de dénoncer son acte comme étant une forfaiture. En tout état de cause, le Rwanda est difficilement condamnable même s’il est facile de  s’imaginer qu’en se débarrassant  de la sorte de ces colis encombrants à plus d’un titre, Kagamé nourrit le secret espoir de compliquer davantage la tâche au satrape burundais. Mais fait-il le bon choix ? L’histoire nous le dira. En attendant, c’est « à la guerre comme à la guerre », comme qui dirait. D’autant plus qu’il se susurre dans certains milieux, que depuis le début de la crise burundaise, certains Rwandais ont dû fuir le pays de Pierre Nkurunziza à la suite de mauvais traitements et que ceux qui étaient en situation irrégulière, se sont vu systématiquement renvoyés aux frontières. Dans l’éventualité d’un tel cas de figure, si ce n’est la réponse du berger à la bergère, cela semble bien être celle de Paul (Kagamé) à Pierre (Nkurunziza). Mais en attendant, il faudra trouver une solution au problème de ces réfugiés pour éviter qu’ils se fassent massacrer à leur retour au bercail par un président paranoïaque, qui voit quasiment le mal partout.

Outélé KEITA


No Comments

Leave A Comment