HomeA la uneFORUM POUR L’ARRET DES HOSTILITES EN RCA :Peut-on y arriver sans les parrains ?

FORUM POUR L’ARRET DES HOSTILITES EN RCA :Peut-on y arriver sans les parrains ?


« La qualité d’une fête à venir se sent dans ses préparatifs », dit une sagesse de chez nous. La capacité des Centrafricains à restaurer rapidement la paix dans leur pays n’est pas visible dans leurs attitudes. Les faits et attitudes des uns et des autres ne poussent pas vraiment à l’optimisme. Les chances d’un succès rapide de la médiation congolaise ne sont pas encore réunies. En effet, alors qu’initialement, la rencontre qui se tient actuellement à Brazzaville devait, en plus de la cessation des hostilités, servir de cadre à l’élaboration d’une feuille de route pour la transition politique en République centrafricaine (RCA), certains acteurs ont refusé d’y prendre part, estimant qu’elle devait avoir lieu sur le territoire centrafricain.

 

La situation du pays nécessite une mise en commun des forces de tous les Centrafricains

 

Pourtant, le processus de normalisation en RCA passe nécessairement par la cessation immédiate des hostilités et des négociations sur la transition politique devant déboucher à terme sur des élections démocratiques. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il vaut mieux ne pas perdre du temps car chaque seconde perdue est une seconde de trop dans les souffrances des populations.

En tout état de cause, la situation du pays nécessite une mise en commun des forces de tous les Centrafricains. Le climat sécuritaire est des plus désespérants. Ce n’est pas Catherine Samba-Panza qui a, jusqu’à présent, échoué à améliorer la situation sécuritaire du pays, qui dira le contraire. La mollesse de l’Etat centrafricain, conjuguée à l’activisme des groupes armés, offre un spectacle des plus déplorables. Compte tenu de ce contexte difficile, le fait que certains acteurs ont boudé le forum de Brazzaville, s’il peut être compréhensible pour des questions de patriotisme, ne fait pas du bien au pays. Ce n’est ni plus ni moins qu’une manière pour les Centrafricains, de remettre à plus tard ce qui peut être fait maintenant. Et les attitudes de ce genre mettent en difficulté les initiatives pour tirer la Centrafrique du bourbier dans lequel elle patauge depuis bien longtemps. Au regard de l’urgence de trouver des solutions à cette crise, c’est déjà cela de gagner que le forum ait été maintenu malgré tout, moyennant quelques aménagements. En effet, au regard de la nouvelle donne née du refus de bien des acteurs de faire le déplacement de Brazzaville, les organisateurs ont dû revoir l’ordre du jour de ce forum. Exit la feuille de route qui devra être discutée plus tard à Bangui. Autour de la table, Séléka et anti-balaka devront faire la paix des braves.

Mais la question essentielle réside dans le sort qui pourrait être réservé à un accord de cessation des hostilités dans le contexte actuel de la RCA. Aura-t-il une quelconque chance d’être appliqué ? Rien n’est moins sûr. De fait, il n’est pas évident que les acteurs qui ont boycotté la rencontre de Brazzaville donnent toute la caution nécessaire à ce qui sortirait de la rencontre. Malgré leur promesse de rejoindre le processus, leur absence à ce forum aura, dans le meilleur des cas, l’inconvénient de ralentir la sortie de crise, en retardant l’adoption d’une feuille de route. De plus, la bonne foi n’est pas la chose la mieux partagée au sein des deux groupes armés qui se combattent.

 

Ce sont Bozizé et Djotodia qui connaissent le mieux les monstres qu’ils ont créés

 

En effet, Séléka et anti-balaka sont très peu crédibles par rapport à des engagements qu’ils pourraient prendre. Il n’y a aucune garantie qu’ils fassent taire effectivement et définitivement les armes et apprennent à se réaccepter mutuellement. De même, la multiplicité des leaders n’est pas de nature à faciliter le respect d’un tel accord. En effet, beaucoup de combattants des deux camps n’obéissant plus qu’à eux-mêmes ou à des chefs dont l’adhésion aux décisions n’est pas garantie, on imagine bien combien il peut être difficile de faire respecter un accord de cessation des hostilités.

Pourtant, il faudra insister pour que l’accord entre les anti-balaka et la Séléka, qui devra être signé, ne soit pas un accord mort-né. Ces dispositions devront être appliquées. Cela dit, les différents protagonistes de la crise devront jouer leur partition à fond et face à la gravité de la situation, tous les acteurs devraient être mis à contribution. Et c’est en cela qu’on se pose à nouveau la question de savoir s’il n’aurait pas été plus judicieux de ne pas écarter complètement les parrains des deux monstres centrafricains qui se combattent. Peut-on parvenir à la paix en Centrafrique sans la contribution des parrains de la Séléka et des anti-balaka que sont respectivement Michel Djotodia et François Bozizé ? Quand on sait que ces parrains bénéficient d’une obéissance religieuse de la part de leurs partisans et que tous les efforts ont jusque-là échoué, continuer à les écarter alors qu’on ne dispose visiblement pas d’autre solution, s’apparente à un manque de réalisme. En effet, ce sont eux qui connaissent le mieux les monstres qu’ils ont créés. Et même s’il est certain que ces monstres échappent en partie maintenant à leur contrôle, Bozizé et Djotodia détiennent toujours des leviers qui pourraient contribuer à réduire un tant soit peu la capacité de nuisance des deux milices.

 

« Le Pays »


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