HomeOmbre et lumièreGRAND OUEST DU BURKINA : Des ressortissants expriment leur « frustration » au Président du Faso

GRAND OUEST DU BURKINA : Des ressortissants expriment leur « frustration » au Président du Faso


 

 

Ceci est une lettre ouverte de ressortissants de l’Ouest du Burkina Faso au Président du Faso. Objet de la correspondance: « frustration des populations de l’Ouest du Burkina Faso ». Lisez plutôt !

 

« Excellence Monsieur le Président du Faso,

Nous, ressortissants de l’Ouest du Burkina Faso,  sommes extrêmement frustrés par une série d’évènements dont :

 

1) l’entêtement des « Koglweogo » à vouloir s’installer de force à l’Ouest du Burkina Faso ;

2) l’implantation à Ouagadougou d’une nouvelle usine de transformation du coton ;

3) la formation du gouvernement Paul Kaba Thiéba III. 

Notre lettre plaide pour une prise en compte de l’unité nationale, du respect de nos valeurs morales, traditionnelles et coutumières :

– elle vise à relever la bonne réputation de la cohésion sociale, de l’hospitalité et du cosmopolitisme de la région Ouest du pays;

 – elle prône la valorisation des zones de production des matières premières du Burkina Faso, source de développement économique  rationnel;

– elle insiste sur la géopolitique, l’élan de décentralisation et de valorisation des compétences des filles et fils du Burkina Faso sur toute l’étendue du pays.

 

1) De l’entêtement des  « Koglweogo » à vouloir s’installer de force  dans L’Ouest du Burkina Faso

Nous ! Ressortissants de l’Ouest du Burkina Faso, exprimons notre indignation à propos de l’implantation forcée et forcenée des  « Koglweogo » dans la région Ouest de notre pays.

En rappel, une première tentative, en novembre 2016, avait été condamnée par le ministre en charge de l’administration territoriale, de la décentralisation et de la sécurité intérieure.

Cette tentative avait été jugée inopportune du fait de la présence des « Dozos », structures similaires autochtones dans toute la région Ouest du Burkina Faso.

L’insistance et la persistance des « Koglweogo » à s’installer et à opérer sur cet espace ayant sa propre culture, ses propres structures et ses organisations d’auto-défense constituent une véritable insulte des populations de cette région et de ses structures d’auto-défense.

Notre vive désapprobation de cet acte d’endo-colonisation des « Koglweogo » ne doit nullement être considérée comme un repli régionaliste.

Nous affirmons pour dire que nous sommes résolument engagés pour l’unité et la solidarité nationale ; et que cette unité et cette solidarité nationale passent d’abord par le respect des différentes cultures.

C’est bien ce que le ministre en charge de l’administration, de la décentralisation et de la sécurité intérieure disait en 2016, à savoir que « chaque région a ses spécificités et ce n’est pas à l’Etat de créer des Dozos ou des  Koglweogo ».

Il est de notoriété publique que la région de l’Ouest du Burkina Faso jouit d’une bonne réputation d’hospitalité et de cosmopolitisme :

– elle entend conserver et renforcer cette réputation ;

– elle la défendra bec et ongles, contre les forces centrifuges et belliqueuses des « Koglweogo ».

Donc halte à cette entreprise néocolonialiste !

2) De L’implantation à Ouagadougou d’une nouvelle usine de transformation du coton

Le vendredi 2 février 2018, un communiqué gouvernemental annonçait la création d’une société ayant pour objet, l’implantation d’une usine de textile à Ouagadougou. Certainement conscient des protestations que soulèverait une telle initiative au sein des populations des régions déjà impliquées dans cette activité, notamment celles de Koudougou abritant Faso-Fani et de Bobo-Dioulasso abritant la SOFITEX et faisant partie des quatre régions les plus productrices de coton au Burkina Faso, le gouvernement, bien que détenteur de 45% des actions dans cette Société, a rejeté le choix de la localité d’implantation de l’usine, c’est-à-dire Ouagadougou, sur l’investisseur et sur le climat des affaires.

Nous ignorons les vrais motifs du choix de la capitale Ouagadougou par cet investisseur turc (AYKA Textile Investment), mais nous ne comprenons pas du tout les motifs de l’acceptation de ce choix par le gouvernement, une acceptation qui serait liée à un souci de délocalisation des investissements.

Aussi, nous  invitons nos plus hautes autorités à revenir sur leur décision d’installer cette usine à Ouagadougou.

Des raisons véritablement objectives et stratégiques militent plus pour l’implantation de cette usine dans l’une des régions de l’Ouest. Il s’agit, entre autres, du fait que cette zone est la plus grande productrice de la matière première qu’est le coton.

Cette nouvelle usine de transformation du coton, si elle était implantée à l’Ouest du pays, constituerait une véritable opportunité de soulager la souffrance de nos producteurs de coton, et redonnerait un nouveau souffle économique à tout l’Ouest du Burkina Faso.

Mais hélas ! Mille fois hélas ! Curieusement, le gouvernement penche pour l’implantation de cette nouvelle usine à Ouagadougou, ville très loin de la source de la matière première qu’est le coton, également loin de la ressource en eau, outre tous les surcoûts.

La raison avancée par nos décideurs est que c’est l’investisseur qui a choisi Ouagadougou. Cet argument est bien faible de notre point de vue car, dans les faits, l’Etat burkinabè, détenteur de 45% des actions, doit être souverain dans le choix des investissements et leur localisation rationnelle selon un programme socioéconomique de bonne gouvernance.

Il y a aussi la prise en compte des pôles de croissance dont la logique est d’orienter les investissements en fonction des potentialités des zones choisies.

Vu que l’usine de délitage du coton est à  l’Ouest, d’une part, d’autre part, vu que l’usine de filature du coton est également à l’Ouest, vu enfin que l’Ouest est la zone où 90% de la production de coton est réalisée, il nous paraît dès lors évident, pour une cohérence des investissements et d’intégration des usines de même nature, que l’Ouest est la zone la mieux indiquée pour l’implantation de la nouvelle usine dont il est question.

Dans le cas contraire, si la nouvelle usine était implantée à Ouagadougou, les balles de coton de la SOFITEX en provenance de l’Ouest vont parcourir de longues distances avant d’atteindre l’usine de transformation.

Au vu de ces constats, nous, ressortissants de l’Ouest du pays, affirmons que les usines de l’Ouest sont depuis fort longtemps délocalisées ou enterrées et recréées dans la région du Centre. C’est le cas de :

– la SAVANA avec son équivalent d’usine de tomate de Loumbila à environ 20 kilomètres de Ouagadougou ;

– la tentative de délocalisation de la Société DAFANI, productrice de jus de fruits, actuellement sous administration provisoire de l’Etat ;

– le Projet à Bobo-Dioulasso d’un hôpital de cardiologie, initié par le professeur André Ouezzin Coulibaly qui n’a tout simplement pas eu l’autorisation de l’Etat pour le réaliser à Bobo-Dioulasso, mais qui a refusé, sous la pression du politique, sa réalisation à Ouagadougou ;

– le Projet d’aménagement de l’aéroport de Bobo-Dioulasso en une unité de maintenance des avions pour toute la région Ouest de l’Afrique et qui, jusqu’à présent, a du mal à prendre forme du fait de la position ambigüe de nos plus hautes autorités.

Nous avons encore en mémoire le vif souvenir de l’entreprise Médicament du Faso (MEDIFA) qui était initialement prévu pour être installée à Bobo-Dioulasso et l’Etat a préféré l’installer à Ouagadougou. La nécessité de retraiter l’eau, matière première essentielle de l’entreprise, a entraîné la disparition de cette unité. Son installation à Bobo-Dioulasso ne nécessitait pas ce retraitement de l’eau. Cette entreprise à donc disparu à cause des surcoûts.

D’où il résulte de tout ce qui précède, que toute l’économie de l’Ouest se rétrécit comme peau de chagrin et conséquemment, la misère de son peuple ne peut que s’accroître ; dès lors, tout l’Ouest ne peut que se mourir au vu et au su de nos gouvernants.

 

3) De la formation du gouvernement Paul Kaba Thiéba III

Nous, ressortissants de l’Ouest du Burkina Faso, constatons de plus en plus, l’écartement de nos cadres des grandes sphères de décisions.

Cet état de fait qui était déjà présent, s’est accentué ces derniers temps avec le gouvernement Paul Kaba Thiéba III et a engendré une grande frustration au sein des populations de l’Ouest. Dans le souci d’œuvrer au respect de l’équilibre entre les filles et les fils du Burkina Faso, il est grand temps que cette grande partie de l’Ouest sente la présence de ses cadres dans les cercles des décisions du Burkina Faso.

En effet, la géopolitique, élan de décentralisation et de valorisation des compétences des filles et fils du Burkina Faso, longtemps prônée, n’a jamais été aussi mise à rude épreuve, si on en juge par la formation du gouvernement Paul Kaba Thiéba III.

Considérant tout ce qui précède, nous, ressortissants de l’Ouest, lançons un vibrant appel  à vous, Excellence Monsieur Roch Marc Christian Kaboré, Président du Faso, pour :

– l’interdiction d’implantation forcée des « Koglweogo » dans l’Ouest du pays ;

– l’implantation rationnelle et opportune de la nouvelle usine de transformation du coton dans une des régions de l’Ouest en tant que première région cotonnière du Burkina Faso ;

– la prise en compte de la géopolitique dans le choix des cadres au niveau des sphères décisionnelles (Présidents d’institutions, Ministres, Secrétaires généraux, Directeurs généraux…).

Si rien n’est fait, tous les nuages qui s’amoncellent à l’Ouest sont des signes avant-coureurs de lendemains qui déchantent.

Vive l’union et l’équité entre les filles et fils du Burkina Faso !

Ouagadougou, le 19 mars 2018

 

Pour les ressortissants de l’Ouest du Burkina Faso,

  Mamadou SANOU

Chevalier de l’Ordre de Mérite


Comments
  • Je suis sidéré. Une telle lettre dans un pays…. L’entêtement des Kolweogo passe. Puisque ce n’est ni sur concours ni par vote démocratique qu’ils ont été installés comme du reste dans toutes les régions du Burkina. Mais c’est un problème national. Je ne connais pas leur fonctionnement dans l’ouest mais s’ils ont été libres de s’organiser selon les desiderata du milieu et non une imposition du plateau centrral, vous avez raison.
    Maintenant des autres points “Implantation d’usine de textile à Ouagadougou”, çà fait honte et triste et dépeint notre niveau lamentable de compréhension du monde. Une usine à Ouaga embauchera que des ouagalais (et comme on se comprend que des mossis?). Une usine à Ouaga cesse d’être nationale? Ailleurs les gens luttent que les usines ne soient pas installées chew eux : ils préfèrent que ce soit ailleurs et qu’ils profitent seulement des retombées. Le gouvernement Thiéba, encore une tare dangereuse et teintée d’un complexe et d’un niveau lamentable; VIVEMENT le jour où le Burkina aura un gouvernement RATIONNEL, un gouvernement sur la base du capable que l’origione; que tous soient de Ouaga ou tous de Bobo, tous mossis ou tous bobos, qu’importe, pourvu que ce soient les meilleurs. Nos gouvernements sont plombés déjà par le genre, comment pouvez-vous sérieusement gouverner en gérant dans un système organisationnel sérieux le genre, l’ethnie et la région au risque de mettre au boisseau la compétence. Avec çà, vaut mieux jeter l’éponge et laisser le pays à la dérive. Vous êtes frustrés, moi je suis ébahi.

    21 mars 2018
    • malheureusement on ne peut pas corriger son écrit : lire … s’ils n’ont pas été libres de s’organiser… et ont été imposé par des maîtres du plateau central vous avez raison;

      21 mars 2018

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