HomeA la uneMe GUY HERVE KAM, PORTE-PAROLE DE « LE BALAI CITOYEN » : « On ne peut pas critiquer le système Compaoré et dupliquer des pratiques qui l’ont caractérisé »

Me GUY HERVE KAM, PORTE-PAROLE DE « LE BALAI CITOYEN » : « On ne peut pas critiquer le système Compaoré et dupliquer des pratiques qui l’ont caractérisé »


Porte-parole du mouvement Le « Balai citoyen » et homme de loi, Me Guy Hervé Kam est assurément un acteur majeur de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014. Pourtant, dans la mise en place des organes de la transition, Guy Hervé Kam et le mouvement dont il est le porte-voix, brillent par leur absence, aussi bien dans le gouvernement de transition que dans le Conseil national de transition (CNT). Dans l’interview qu’il nous a accordée, Me Kam explique les raisons de leur absence, et se prononce également sur la nomination contestée de Adama Sagnon comme ministre de la Culture. Lisez plutôt !

« Le Pays » : « Le Balai citoyen » est-il représenté au sein du gouvernement de la transition ? Si non, pourquoi ?

Me Kam : Le « Balai citoyen » n’est représenté ni dans le gouvernement de transition ni dans le Conseil national de transition (CNT). La raison est simple, nous avons tout simplement décidé de ne faire partie d’aucun organe délibérant. Ce, parce que nous pensons que le rôle primordial du « Balai citoyen » est d’être une force de proposition, de veille et non une force de décision. Nous pensons d’ailleurs que la société civile joue mieux son rôle quand elle ne participe pas à la prise de décision. Nous sommes ouverts aux organes consultatifs, si nous pensons pouvoir apporter une contribution en termes de propositions, mais pas pour les organes délibérants.

Pourquoi la société civile s’est-elle difficilement accordée sur les noms de ses futurs représentants au CNT ?

Au niveau des OSC, on a assisté à un spectacle tout à fait déshonorant. Beaucoup de combines, de magouilles, bref, de mauvaises pratiques indignes des organisations de la société civile et du Burkina Faso post-insurrectionnel où le peuple burkinabè a affirmé son statut d’homme intègre. Quand je regarde la liste des membres devant siéger au titre des organisations spécifiques dont j’ai présidé la désignation, je note que des noms ont été ajoutés sur la liste des personnes désignées en lieu et place de ceux que le caucus a désignés, sans que l’on ne sache comment. C’est vraiment déplorable. On ne peut pas critiquer le système Compaoré et dupliquer les pratiques qui l’ont caractérisé. Il est important que des mesures soient prises pour corriger cette situation.

En réalité, je pense que toute cette cacophonie s’explique par le fait que plusieurs organisations de la société civile ont estimé que le CNT était une occasion inespérée de se positionner pour 2015, ou de faire le jeu de certains partis politiques qui voulaient entrer au CNT par la porte réservée à la société civile. Nous avons vu une très mauvaise image de la société civile qui tranche avec celle qui a été donnée à l’occasion de l’insurrection, et cela n’augure rien de bon pour le fonctionnement du CNT.

Etes-vous satisfait de l’équipe gouvernementale actuelle ?

Rien sur cette terre n’est parfait. Dans sa première version, il y avait le cas de Adama Sagnon qui posait problème ; ce problème étant réglé, je pense que nous pouvons accorder un état de grâce à ce gouvernement pour le juger au pied du mur. C’est au pied du mur qu’on reconnaît le vrai maçon, dit-on. La nouvelle équipe gouvernementale sera jugée à la tâche. Si elle est à la hauteur, elle continuera à avoir la confiance nécessaire pour travailler ; dans le cas contraire, nous serons là pour tirer la sonnette d’alarme.

Pensez-vous que la nomination de M. Adama Sagnon a été une erreur de casting au regard de la clameur qu’elle a suscitée ?

Au regard de la clameur que cela a suscitée, on peut parvenir à cette conclusion. Nous disons tout simplement qu’au regard du fait que le nom de Adama Sagnon soit fortement associé à une des grosses affaires du pays, ne créait pas les conditions de sérénité et de confiance nécessaires à l’action d’un gouvernement de transition. La transition dure juste un an et il n’était pas indiqué de passer le temps à discuter sur les qualités personnelles d’un ministre au lieu de se donner à la tâche. Il était donc important d’avoir des ministres au-dessus de tout soupçon moyennement raisonnable. De ce point de vue, nous nous réjouissons que l’intéressé ait été visité par la sagesse, en démissionnant.

Adama Sagnon dit que vous ne connaissez rien du dossier Norbert Zongo qu’on l’accuse d’avoir saboté. Que répondez-vous à cela ?

C’est tout à fait normal que Me Kam, n’étant ni le juge d’instruction ni le procureur chargé du dossier, ne connaisse pas le dossier Norbert Zongo de fond en comble. Mais une chose est certaine, c’est que tout Burkinabè moyennement doué de raison, a une connaissance suffisante de ce dossier pour considérer que ceux qui l’ont traité sont disqualifiés pour jouer un rôle quelconque dans la transition post- insurrectionnelle, dans la mesure où cette affaire a aussi créé les conditions de cette insurrection. Pour ma part, à supposer même que je ne connaisse pas le dossier Norbert Zongo, je sais au moins que la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples a jugé que justice n’a pas été rendue dans cette affaire et que tout n’a pas été mis en œuvre pour parvenir à la vérité. Je sais aussi, que M. Sagnon, alors Procureur du Faso, avait refusé la réouverture du dossier qui était de sa seule compétence, au motif qu’il lui fallait des preuves scientifiques. Et cela me suffit.

Dans sa défense, Adama Sagnon ajoute qu’en tant que procureur, lui ne faisait que des réquisitions. Qu’en pensez-vous ?

C’est un plaidoyer en irresponsabilité. Dans cette affaire, M. Sagnon ne comparaissait pas au procès de la Justice burkinabè ou du parquet. C’était son procès personnel. Il faut retenir tout simplement qu’en raison de son implication dans le dossier Norbert Zongo, Adama Sagnon ne présentait pas les apparences de quelqu’un qui est suffisamment crédible aux yeux de la population pour faire partie du gouvernement de transition. Après, on dira que le procureur avait reçu des instructions, que c’est le système Blaise Compaoré qui était comme ci et comme cela, et que sais-je encore. Maintenant, je pense qu’avec cette affaire, l’ensemble du peuple burkinabè, à commencer par ses juges, aura pris conscience que nos actes nous rattrapent toujours.

Un mot à l’endroit du peuple burkinabè en cette période transitionnelle ?

Ce qui s’est passé les 30 et 31 octobre ne doit pas être seulement un changement politique, mais doit aussi être un changement de mentalité. Or, ce que l’on constate, c’est le retour à la défense des intérêts personnels, notamment lorsqu’on regarde comment se déroule la désignation des membres au CNT, alors que l’intérêt général du peuple burkinabè devrait prévaloir. Je lance donc un appel à tous les citoyens burkinabè à mettre l’intérêt du peuple burkinabè au centre de la transition. L’insurrection burkinabè a été considérée partout dans le monde comme un exemple ; il faut que cela reste un exemple positif !

Propos recueillis et retranscrits par Thierry Sami SOU


Comments
  • Merci Me KAM,
    Restons vigilant on a gagné une bataille mais pas la guerre.
    Le système compaoré est toujours là et il faut en finir avec!
    Nan lara an sara!
    La Patrie ou la mort, Nous vaincrons!

    27 novembre 2014
  • Voilà qui est bien dit!

    27 novembre 2014
  • Parfait, sans ambages, merci Me Kam

    27 novembre 2014
  • Toujours limpide dans ses interviews.

    28 novembre 2014
  • Les responsables de services qui ont la charge de gérer des biens publics ont un devoir de rendre compte aux citoyens de l’usage qu’ils font du patrimoine public. Il y va de la transparence et de la bonne gouvernance. On a constaté que plusieurs opérations de souscriptions pour des dons en espèces et en nature ont été menées par le passé au Burkina sans qu’il s’en suive des bilans précis. En prenant l’initiative le 25 novembre 2014 de dresser le bilan des dons reçus pour la prise en charge des blessés de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre dernier, la direction générale de l’hôpital Yalgado a ainsi donné un bel exemple d’une culture de bilans dans la gestion des biens publics. Un exemple à encourager et à suivre par d’autres. Cependant, dès qu’il est ressorti que l’hôpital a reçu environ 64 millions de FCFA de dons en espèces dont 21 millions ont déjà été utilisés pour la prise en charge gratuite des frais médicaux des blessés et qu’il reste un reliquat de 42 millions, des gens ont commencé à s’agiter pour demander la distribution gratuite de ces fonds aux blessés comme s’il s’agissait de petits gâteaux à partager. Paradoxalement, personne ne dit de partager les dons en natures comprenant des médicaments et autres dont la valeur est évaluée à 6 millions de FCFA. Le choix du CHU Yalgado de rembourser les frais d’ordonnances et d’examens médicaux de tous les 196 blessés enregistrés sur sa liste et qui avaient supporté ces frais en dehors des soins gratuits administrés à l’hôpital, constitue déjà un acte de solidarité à saluer. Par ailleurs, l’hôpital a assisté des familles de blessés défunts pour des frais mortuaires. Après les derniers soins des blessés, il est tout à fait normal que l’hôpital utilise le reliquat de l’argent pour l’achat de produits médicaux d’urgence au profit d’autres malades. Ce n’est pas aux citoyens de dicter leurs lois de façon anarchique aux responsables administratifs et au gouvernement avec des esprits de règlements de comptes. Ces mentalités, si on y prend garde risquent d’entrainer le Burkina dans les dérives de la révolution du 4 Août où de simples dénonciations non fondées ont provoqué des licenciements abusifs et d’autres exactions.
    Félicitations et remerciements à tous les donateurs pour les aides aux blessés. Encouragements à la direction générale de l’hôpital Yalgado et au personnel médical qui se sont mobilisés de jour comme de nuit pour assister les blessés.

    28 novembre 2014
  • UN POEME A DEDIER A LA JEUNESSE
    POUR BARBARA
    J’aurai voulu ma fille, Barbara, ma fille têtue et douce déjà, tu as faim, tu veux ta part de vie, tu réclames le lait et tu t’endors paisible, j’aurais voulu, ma fille Barbara t’offrir un monde de paix, le monde où tu viens ressemble encore trop à celui que j’ai connu. Tu le découvriras en suivant des doigts ces cicatrices, mes livres. Pour toi, je suis heureux qu’ils existent. Ils seront quoi qu’il advienne de moi un peu de ma vie. Je voudrais que tu regardes droit, sans détourner les yeux ces violences et ces injustices, cette cruauté dont l’homme est capable. Et il ressemble alors à un animal qui aurait placé sur son visage un masque humain. Regarde mais ne crains pas. Voir clair c’est le premier acte de courage. Je voudrais que tu apprennes cela et que tu choisisses toujours d’être du côté des hommes. Ils sont faibles souvent. Ils sont vaincus souvent. Tu leur parleras et ils ne t’écouteront pas.
    Tu leur expliqueras ce qui est la vérité et ils ne t’entendront pas. Ils se mettront en rang, ils frapperont du pied en cadence, ils hurleront quand les animaux à visage d’homme le leur commanderont. Ils te décevront. Ils seront lâches parfois. Mais il suffira d’un moment pour que dans un de leur regard tu découvres qu’ils sont hommes. Sois avec eux. Souvent tu croiras qu’ils t’abandonnent. Les autres ont tout, le pouvoir et la gloire. Tu désespères toi aussi. Mail il suffira d’un moment pour que dans un de leur regard tu découvres qu’ils sont hommes. Et d’être avec eux te donnera force de vivre. Je voudrais que tu apprennes cela.
    Choisis de rêver avec eux Le rêve est ce qui les distingue de la pierre.
    Ils croient, même s’ils ne savent pas qu’ils croient, que l’avenir pour eux ou pour ceux qu’ils aiment sera meilleur. Cela n’a l’air de rien. Ce n’est qu’une chanson banale. Mais ceux qui la fredonnent sont hommes et les autres ne sont rien. Choisis de rêver avec eux. Ils imaginent qu’il y’aura pour tous suffisamment de fruits comme il y’avait pour toi, chaque fois que tu lançais un cri, le lait. Ils imaginent ; mesure combien ils sont fous de rêver, que la mort aura cessé d’entrainer ceux qu’ils aiment. Choisis de rêver avec eux. Ils sont raisonnables ces fous, tu l’apprendras avec le temps, seul l’homme-pierre, l’homme-matière peut croire qu’il suffit du présent pour faire la vie d’un homme.
    La force de vie, demain seul la donne. Car demain c’est l’autre homme, celui à venir. Et si tu ne paries pas que lui sera meilleur, à quoi sert donc de vivre? Choisis de croire, il n’est pas de plus folle raison, Barbara, de plus sage aventure.
    Et si tu doutes parce que des mûrs t’oppressent un jour, imagine encore plus haut, plus loin.
    Choisis le plus impossible des rêves et laisse toi porter par lui.

    Martin GRAY (la vie renaîtra de la nuit)

    28 novembre 2014
  • Il faut encourager le premier ministre ZIDA et le régime de la transition démocratique au Burkina. Ce sont des gens qui ont un langage de vérité et qui ont pris des engagements. Il faut un peu de patience pour leur permettre d’accomplir leurs missions dans l’intérêt général. Encore un peu de patience. Les procès d’intentions que d’aucuns distillent à travers des médias surtout à travers les forums d’internautes sont beaucoup plus subjectifs que réels pour forcer de caricaturer la transition qui est sur de bons rails.

    30 novembre 2014

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