HomeA la uneINONDATIONS DU 1er SEPTEMBRE 2009 :Ce que sont devenus les sinistrés, cinq ans après

INONDATIONS DU 1er SEPTEMBRE 2009 :Ce que sont devenus les sinistrés, cinq ans après


1er septembre 2009-1er septembre 2014 : cela fait 5 ans que le drame des inondations provoquées par des pluies diluviennes est survenu dans la capitale burkinabè. Suite à ce drame qui restera gravé de façon, négative dans la mémoire des Burkinabè, de multiples pertes en vies humaines et des dégâts matériels importants ont été enregistrés. De même, des milliers de personnes s’étaient retrouvées démunies, sans abris ni logements. Face à cette situation, des initiatives ont été entreprises pour secourir les victimes dont leur relogement dans des sites d’accueil définitifs aménagés. Yagma est l’un des sites où a été relogée une frange majoritaire des victimes du sinistre. Le mercredi 27 août 2014, soit presque 5 ans après leur installation sur ce site, nous nous sommes rendus sur ce lieu. Objectif : constater de visu, les réalités que vivent les habitants au quotidien. Se sont-ils maintenant adaptés aux réalités de leur nouvel environnement de vie ? Quelles sont les difficultés auxquelles sont confrontées les populations sur-place ? Eléments de réponses.

 

Yagma, village situé à une dizaine de kilomètres au Nord de Ouagadougou au secteur 37 dans l’arrondissement 9. C’est cette localité qui abrite le plus grand site d’accueil des populations victimes des inondations du 1er septembre 2009. Près de 24 271 ménages vivent sur ce site d’accueil qui a une superficie de 900 hectares. Le 27 août dernier, soit environ 5 ans après la tragédie, nous voici sur la route menant tout droit à Yagma. 48 minutes sont passées après 9h mais il faisait toujours beau temps. Quoi de plus normal : une pluie bienfaisante venait d’arroser la capitale dans la matinée. Du reste, c’était sous les gouttes de cette pluie que nous empruntions le chemin. Le facteur climatique favorable facilite notre traversée, de même que le bon état de la route qui était bitumée. C’était précisément le 8 août 2011. Nous nous rappelons particulièrement la « vieille Kouka », le « vieux» Lassané Tondé. De 2011 à 2014, beaucoup d’années se sont écoulées et nous espérons retrouver des connaissances dont nous n’avions plus de nouvelles, il y a 3 ans.

A 10h 35, nous arrivons sur la « colline de Yagma », du nom de l’église de Yagma érigée récemment en basilique mineure. Ce lieu spirituel sert de pèlerinage pour les fidèles catholiques. Le nom de Yagma est beaucoup reconnu à cause de ce lieu spirituel où les croyants viennent régulièrement faire des prières. En cette matinée du 26 août, des fidèles étaient venus pour cette cause. Des véhicules et engins à deux roues stationnés dans un parking sur les lieux sont perceptibles à notre passage. Notre lieu de destination (le site d’accueil) est situé derrière la basilique de Yagma. D’ailleurs, il ne reste plus que quelques kilomètres pour y arriver. Mais le reste du trajet devait être parcouru sur une piste sans bitume, la route goudronnée ayant pris fin au niveau de l’église. Les gouttes de pluie qui nous tombaient dessus commencent également à s’estomper. Ce qui nous permet d’admirer convenablement, en cette période-là, le beau paysage et les plants de mil dressés, verdoyants dans les champs le long de la suite du trajet.

11h 18 : nous arrivons à l’entrée du site d’accueil. Un constat saute rapidement à l’œil : le changement est remarquable. Les nombreuses tentes qui étaient toujours dressées en 2011 ont laissé la place à des maisons d’habitations construites ou qui sont en train de l’être. Plus près, notre regard croise une femme en train de cultiver son champ d’arachide, de maïs et de sésame.Fatimata Nacoulma, c’est son nom, notre première interlocutrice du jour, nous souhaite la bienvenue. Elle accepte sans conditions de répondre à nos questions, comme si elle n’attendait que cela. Son souvenir du drame des pluies diluviennes du 1er septembre 2009 reste intact. « Je me souviens, comme si c’était hier, de cet évènement douloureux. On ne peut jamais oublier car c’était difficile pour nous. On avait tout perdu. Nous prions Dieu pour que ce drame ne se reproduise plus dans notre pays » a-t-elle. Sur les conditions de vie durant les 5 ans après le drame, elle affirme que des difficultés restent d’actualité. « Jusqu’à présent, nous sommes dans la souffrance mais on n’a pas le choix. On n’a pas autre lieu pour aller », relève-t-elle. Le travail quotidien de Fatimata Nacoulma, à l’heure qu’il est, c’est ce que nous sommes venus la trouver en train de faire : cultiver son champs. Outre son propre champ qu’elle cultive, elle pratique la même activité au profit d’autres personnes moyennant une rémunération non substantielle : « Nous cultivons aussi dans les champs des gens pour avoir 1 000 F ou 1 500 F. Si la rentrée scolaire arrive et tu n’as rien pour donner à tes enfants, ce sont des pleurs. Tout cela nous préoccupe énormément », déclare Mme Nacoulma, mère de 5 enfants.

 

A côté de son champ, se trouve un bâtiment rénové. En 2011, lorsque nous étions venus, ce bâtiment était en construction et devait servir de commissariat. Mais à notre grand étonnement, l’infrastructure a été érigée en un centre de santé, un dispensaire et cela est bien indiqué sur une plaque : « Quatar charity-Burkina Faso. Dispensaire de donateur pour le repos ». En revanche, ce dispensaire n’est pas fonctionnel, constatons-nous en visitant le bâtiment. Cela a été d’ailleurs confirmé par Mme Nakoulma. Nous n’oublions pas de demander à la première interlocutrice du jour, la « vieille Kouka » que nous n’avons plus revue depuis 3 ans. Sa cour est située dans les parages mais difficile pour nous de reconnaître le lieu. De nombreuses maisons d’habitations sont sorties de terre, ce qui n’était pas le cas lors de notre dernière visite. Mme Nacoulma nous indique la maison de « Yaaba » (on l’appelle ainsi en langue mooré au vu de son âge avancé) comme elle l’a appelée affectueusement. Mais ses arrière-petites-filles indiquent que Kouka Compaoré (le vrai nom de la vieille) est absente. Elle s’est rendue à son champ et l’on nous indique le lieu. Nous partons rapidement à sa rencontre. La chance aidant, pas besoin de faire un parcours de combattant pour retrouver la « vieille Kouka ». Nous la croisons aussitôt, un seau de sable sur la tête. « J’étais allée au champ pour ramasser du sable », a laissé entendre « Yaaba » qui, malgré nos longues explications concernant nos échanges en 2011, avait du mal à se rappeler. Cela est compréhensible car elle est aujourd’hui âgée de 80 ans et à ce point, il lui est difficile d’avoir la mémoire encore fraîche. Qu’à cela ne tienne, elle nous invite à repartir à son domicile situé non loin. Après quelques pas de marches, nous y sommes. Juste devant la cour, un tas de sable. C’est le lieu de stockage du sable ramassé par la « vieille Kouka » pour pouvoir vendre et subvenir à ses besoins. « Le ramassage du sable, c’est l’activité que je mène pour avoir à manger. Un voyage de charrette, c’est 1 000 F et là aussi, il faut plusieurs jours pour obtenir cette quantité. Une fois vendue, je pars acheter rapidement du maïs blanc pour pouvoir me nourrir », confie-t-elle. Et Kouka Compaoré de révéler : « 5 ans après notre relogement sur ces lieux, c’est toujours la souffrance, mon fils » (sourire). Malgré tout, elle évite de dramatiser la situation. Elle est en bonne santé et c’est cela qui constitue, pour elle, l’essentiel : « Nous ne pouvons pas dire que nous ne nous sentons pas bien ici. Nous sommes en bonne santé, si nous arrivons à vendre le sable que nous ramassons, nous partons payer des céréales pour vivre ». La vieille se dit toutefois préoccupée par le mauvais état du toit et de la clôture de sa maison : « Mon fils bien-aimé, ma maison n’est pas bonne. Quand il pleut, je ne peux pas dormir car le toit de la maison est défaillant. Comme tu le vois bien aussi, les murs de clôture de ma maison ne sont pas aussi élevés». Malgré l’âge, « Yaaba » se souvient du drame de 2009. Elle se souvient notamment des périodes passées à la belle étoile et sous les tentes après les inondations ainsi que des secours apportés par les acteurs intervenant dans le domaine de l’humanitaire. Elle nous montre, à juste titre, l’étiquette de l’ONG Help Burkina toujours affichée sur la porte de sa maison. Les échanges avec « Yaaba » devenaient davantage intéressants, surtout qu’elle nous a accueilli comme son fils. Mais nous n’avons le choix que de poursuivre la tournée. La « vieille Kouka » ne trouve pas d’inconvénient tout en nous invitant à revenir une prochaine fois lui rendre visite, mais sans les « mains vides ». En attendant de revenir un jour tenir notre promesse à Kouka Compaoré suite à sa requête, nous continuons notre petit bonhomme de chemin en traversant un chantier en construction. Les ouvriers étaient au four et au moulin, certains le regard tourné vers nous lors du passage. Que veulent-ils ? Ont-ils quelque chose à nous dire ? Difficile pour nous d’avoir les réponses à ces questions à travers leur regard. Quoi qu’il en soit, chacun de nous fait son travail et doit se concentrer sur sa mission. C’est cette préoccupation qui nous galvanisait le plus jusqu’à notre arrivée à 11h 46 mn chez Lassané Tondé. C’était, du reste des retrouvailles puisque nous l’avions rencontré, tout comme la « vieille Kouka », en 2011. Aujourd’hui, âgé de 64 ans et père de 10 enfants, le « vieux Tondé » se sent bien sur le site de relogement. En dépit de son inactivité, il garde toujours le moral haut : « Il n’y a pas trop de problèmes. C’est le manque de travail qui pose problème. Mais ça aussi, ce n’est pas la faute à quelqu’un ». Comment fait-il alors pour subvenir à ses besoins ainsi qu’à ceux de sa famille alors qu’il ne travaille pas ? C’est sa femme Rasmata Nikièma qui détient les clés de la solution vitale. « C’est ma femme qui ramasse le sable et vend pour que nous puissions nourrir la famille. Elle se bat pour pouvoir assurer les besoins au quotidien concernant les charges de la famille. Sinon, on ne fait rien », avoue Lassané Tondé. En 2011, il nous avait confié qu’il concassait des cailloux pour vendre. « Les cailloux sont finis et je n’ai plus de force », précise-t-il en saluant l’élan de générosité et de solidarité dont font montre ses voisins. Où se trouve sa femme « battante » ? Elle est partie comme d’habitude, répond le « vieux Tondé », pour ramasser du sable. A l’instar de son épouse, de nombreuses femmes exercent quotidiennement cette activité (le ramassage du sable pour survivre). Nous les avons trouvées le long des caniveaux en train de collectionner du gravillon ou du sable. Par contre, certaines ménagères se sont reconverties dans l’exercice de métiers.

Fati Malgoubri fait le tissage qu’elle a appris sur le site auprès d’une voisine avant de bénéficier d’une formation approfondie grâce à l’ONG  Help Burkina. Combien coûtent ses pagnes visiblement très jolis ? 6 000 et 15 000 F CFA l’unité. A l’en croire, elle parvient à aider son mari, souvent en déplacement pour une longue durée, dans la gestion des charges familiales. « Nous avons 4 enfants et nous arrivons à subvenir à nos besoins et à nous soigner en cas de maladie. Depuis les 2 ans que j’exerce ce métier, j’ai pu avoir au moins 200 000 F CFA», confie Mme Malgoubri qui dit s’en frotter les mains. En revanche, elle est confrontée à des difficultés pour inscrire son enfant au collège pour cette rentrée scolaire.  Cette préoccupation qui « l’empêche de dormir » la replonge subitement dans la tristesse. « Les gens nous ont beaucoup aidés. Mais toute aide a une fin. On ne peut pas dire que l’on ne nous a pas aidés. J’ai eu un enfant qui a eu le CEP mais pas l’entrée en 6e. Pour avoir une place au collège, c’est compliqué. Mon mari n’est pas à la maison. C’est ça qui me préoccupe le plus», avoue-t-elle, les larmes aux yeux, se couchant sur sa machine pour contenir son émotion à laquelle il était difficile de rester insensible.

Sanata Ouédraogo que nous avons rencontrée plus loin a, quant à elle, l’air décontractée et plus épanouie. Elle exerce un petit commerce et visiblement cela marche bien pour elle. « Les condiments que je vends s’achètent un peu, un peu. Il n’y a pas beaucoup du monde sur le site. Mais l’on peut avoir 5 000 F CFA comme recette quotidienne. C’est grâce à cela que nous subvenons aux charges familiales et aux frais de scolarité de nos enfants. Le manque de marché nous préoccupe énormément ». Sur le site, le commerce est de plus en plus développé. Des boutiques, des kiosques, des ateliers de couture, de mécanique, de soudure, des mini-boulangeries, des restaurants, etc. sont visibles à de nombreux endroits. Ces établissements et services sont le plus gérés par des hommes. Rachid Yaméogo est boutiquier depuis 2009 sur le site. Il vend du riz, de l’huile et autres produits alimentaires, des cartes de recharges et charge des batteries grâce à une plaque solaire. « Ça marche un peu un peu », affirme-t-il peu bavard et quelque peu timide. Abdoulaye Soudré fait la couture mixte. Il ne semble pas se plaindre de ce qu’il gagne avec ce métier même si les clients se comptent du bout des doigts. « Cela fait 4 ans que je fais ce travail sur le site. Il n’y a pas trop de clients. Mais on se débrouille et on remercie Dieu pour ce que l’on gagne ». Contrairement à Abdoulaye, le groupe de jeunes assis au kiosque plus loin est au chômage. « Sincèrement dit, nous sommes au chômage. On n’a rien à faire », confie un membre du groupe avant de prendre son thé qui vient de lui être servi au moment même où nous arrivions. Toujours dans ce kiosque où l’on vend des liqueurs, d’autres étaient en train de boire du Nescafé. Il était 13h 33 mn ; l’heure de la prière avançait pour les fidèles musulmans, en témoigne l’appel à la prière du muezzin qui se faisait entendre dans une mosquée située non loin de là. Occasion pour nous d’avoir une idée sur les lieux de culte existant sur le site. En plus de la mosquée, on y trouve des églises. Moumouni Ouédraogo qui nous a renseigné, cite également beaucoup d’autres infrastructures sur le site que nous aurons l’occasion de découvrir. Celui-ci qui se présente comme le responsable des populations vivant sur le site dresse le bilan de leur séjour quinquennal sur les lieux. « On ne peut pas dire que le bilan est négatif. On remercie Dieu ; on a eu nos parcelles, on est arrivé à construire un peu. Donc chacun dort chez lui, il n’y a pas de problèmes », répond-il. Cependant, il déplore le fait que certaines promesses faites par les autorités n’ont pas été tenues. Toute chose qui n’a pas favorisé, selon lui, une amélioration conséquente de leurs conditions de vie. « On n’a pas une voie principale pour accéder à la ville. C’est tout à fait compliqué. On n’a pas de CSPS. Si l’on a un problème de santé, on va jusqu’au CMA Paul VI. Le seul CSPS qu’ils avaient construit il y a 3 ans est fin prêt. Son ouverture était prévue pour le 1er septembre. Mais les autorités nous ont fait savoir que cette infrastructure servira de centre d’isolement de malades en cas d’Ebola ». Cette décision du gouvernement n’a pas été favorablement accueillie par les locataires du site, selon Moumouni Ouédraogo.

Qu’en est-il alors de l’adaptation au nouvel environnement ? Les gens se sont maintenant habitués par la force des choses à leur nouveau cadre de vie, déclare le sieur Ouédraogo. « On a une nouvelle vie. Là où tu as vécu pendant 5 ans, forcément, tu vas t’y habituer. Mais il faut reconnaître que c’est toujours difficile. Toute la population qui vit ici n’est pas contente. On a été abandonné brusquement. On nous a carrément oubliés. Certaines nouvelles autorités municipales auprès desquelles nous sommes allés pour exposer des problèmes préoccupants disent de rester tranquilles. Elles disent que nous, on a eu nos parcelles alors qu’il y a beaucoup de gens à Ouaga qui n’en ont pas toujours. Donc, de rester tranquilles chez nous et de cesser de poser d’autres préoccupations ».

Ne pensez-vous pas justement que vous devez maintenant vous assumer en vous prenant en charge au lieu de continuer d’attendre qu’une aide vous tombe du ciel ? A cette question, Moumouni Ouédraogo n’en disconvient pas. « Mais il y a beaucoup de choses ; c’est le gouvernement qui doit forcément le faire pour nous, sinon nous ne pouvons pas. C’est le cas notamment des voies, de l’électricité, de l’eau potable, du centre de santé, de l’ambulance », se justifie-t-il. Se sentent-ils en sécurité au niveau du site ? Pas trop de souci à ce niveau, rétorque le sieur Ouédraogo qui remercie vivement les éléments de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS) dont les patrouilles nocturnes régulières rassurent quelque peu les locataires du site. Et le problème du commissariat érigé en dispensaire ? « Le bâtiment était construit ; on avait dit que c’était pour servir de locaux à un commissariat de police. Les policiers venaient,   de temps en temps, visiter le chantier. Mais quand le chantier est achevé, on a mis une plaque d’indication pour dire que c’est un dispensaire. Jusqu’à présent, on ne comprend rien. Les portes du bâtiment sont fermées depuis lors. On ne sait pas ce que ça devient », déplore-t-il.

Sur les relations entre autochtones et locataires du site d’accueil, le chef coutumier de Yagma, Naaba Siguiri, nous avait confié en 2011 que les gens du site sont les bienvenus dans son village : « Nous avons accueilli les sinistrés à bras ouverts et nous avons compati à leur douleur. Nous les considérons comme des frères et sœurs d’une même famille ». Même assurance donnée à la même époque, par le Lalwéoghin Naaba. « Nous collaborons avec les gens du site et quand elles ont des difficultés, on essaie de les aider au mieux. Lorsqu’on entreprend des initiatives, on les informe, on les y associe. A un moment donné, nous avons même estimé que les appeler sinistrés étaient péjoratif si bien qu’on a préféré leur donner le nom de Badnoogo qui signifie en langue mooré : soyez dans le bonheur», avait-il expliqué. Cette initiative vise, selon le Lalwéoghin Naaba, à les amener à oublier le sinistre qui reste, pour tous, un mauvais souvenir. Aussi s’agissait-il de leur témoigner, a-t-il précisé, de la compassion et de la solidarité des autochtones afin qu’ils ne se sentent pas comme étant en brousse, orphelins et isolés, mais dans un village où habitaient déjà des gens avec lesquels ils peuvent compter. De nos jours, Moumouni Ouédraogo se réjouit des bonnes relations de cohabitation qu’ils entretiennent avec les autochtones. « Les relations avec les autochtones se sont nettement améliorées. Actuellement, on se comprend très bien. Il n’y a même pas de problème. On s’entend, on fait des réunions ensemble. On a marié les enfants des autochtones et vice versa ». Que dire de la cohabitation entre les populations vivant sur le site ? « Jusqu’à présent, il y a une cohésion ».  Toutefois, constate le sieur Ouédraogo, les traces des répartitions qui avaient prévalu au moment de la distribution de l’aide pour la construction (ciment, tôles et 50 000 F CFA) par zone entre les sinistrés venus des anciens arrondissements de Boulmiougou, Sig-Noghin, Bogodogo, Baskuy, Nongre- Masson ont laissé des traces dans les rapports de tous les jours entre les populations. C’est pourquoi celui-ci apprécie de façon positive, l’initiative du chef coutumier de Yagma, de rebaptiser le site d’accueil « Badnoogo ». Cette appellation convient aux populations, soutient-il. « Nous voulons que l’on nous appelle les gens de Yagma Badnoogo. Le mot sinistré, on aimerait que ça s’efface car on est là depuis 5 ans », recommande-t-il. Aussi invite-t-il les locataires du site à se battre car le temps de l’aide et de l’assistanat humanitaire est bel et bien révolu. En signe de commémoration du 5e triste anniversaire ce lundi 1er septembre 2014, une petite fête sous forme de rassemblement sera organisée pour des échanges entre les habitants du site, se rappeler le mauvais souvenir du drame, selon Moumouni Ouédraogo. Cela en vaut la peine car ils ont renoué avec l’espoir de vivre, reconnaît-il, au moment où nous nous séparions de lui. Il ne restait donc plus que le temps de visiter les infrastructures dont il parlait : la Maison des jeunes, le CSPS, le lycée municipal, l’école de la Trame d’accueil, le Centre municipal de formation et d’animation sociale culturelle de Yagma, etc. A l’entrée de ce dernier joyau (le Centre de formation professionnelle), un bulldozer est stationné. Ce bulldozer était utilisé, avons-nous compris, à travers ses traces, pour aménager une piste que nous empruntons et qui conduisait directement sur une colline au-dessus de laquelle, une vue d’ensemble de la Trame d’accueil était quasi impressionnante. Le site de Yagma est en pleine construction. Certaines maisons d’habitation, des établissements de commerce et d’enseignement, des lieux de culte ont déjà poussé de terre. La zone est toujours en attente de viabilisation, mais elle commence à se « développer » comparativement à ce qui nous avait été donné de voir en 2011. A la descente de la colline, nous croisons un camion semi-remorque déchargeant des sacs de ciment chez un revendeur sur le site. C’est le signe que la demande des matériaux de construction ne manque pas. Le site semble donc en plein chantier et nous ne pouvions manquer l’occasion d’admirer les infrastructures déjà achevées tout en regagnant le bercail aux environs de 17h.

 

Saïdou ZOROME

 

 


No Comments

Leave A Comment