HomeA la uneINSURRECTION POPULAIRE : « Je refuse l’hypocrisie de certains hommes politiques», dixit  Sam’S K Le Jah  

INSURRECTION POPULAIRE : « Je refuse l’hypocrisie de certains hommes politiques», dixit  Sam’S K Le Jah  


 

Le 31 octobre 2014, l’ancien président,  Blaise Jubal Compaoré, sous la pression de la rue,  rendait officielle  sa démission du pouvoir.  Le Burkina Faso venait de connaître ainsi sa 2e insurrection populaire qui a abouti à la démission du président de la République.  Il  est vrai que ce combat qui a abouti à la chute du Blaise Compaoré au pouvoir depuis 27 ans, est politique, mais plusieurs couches sociales ont contribué à la réussite de cette lutte que le monde entier a qualifiée d’héroïque. Parmi ces couches sociales, on note les Organisations de la société civile.  Nous avons rencontré un des responsables de l’une des ces OSC, Sam’S K Le Jah du Balai Citoyen. C’est sans langue de bois qu’il est revenu sur  ces évènements. Ils nous a aussi donné son point de vue sur la situation nationale. Lisez plutôt !

Deux ans après l’insurrection populaire, quel bilan succinct faites-vous ?

Aujourd’hui, ce sont les 30 et 31 octobre 2014 qui restent dans les mémoires mais il faut  savoir que la mobilisation a commencé  il y a longtemps.  Le temps de travailler à la contagion dans les esprits, dans  les villes, dans les campagnes et un peu partout pour appeler à la mobilisation, a mis du temps. Il faut prier que ce genre d’événements  n’arrivent plus dans ce pays.   Ça m’attriste de voir que les politiciens se sentent  toujours obligés  d’inviter le peuple à la confrontation pour  trouver des solutions. Des gens  meurent là où on pouvait l’éviter.  C’est vraiment douloureux de voir que  pour  des histoires d’articles, des histoires  de pouvoir, on  est obligé d’envoyer le peuple à l’abattoir,  tuer des gens et  s’asseoir après pour parler.  L’autre aspect des choses, c’est l’engagement de la société  civile dans ce qu’on appelle aujourd’hui insurrection populaire qui a vu la chute de Blaise Compaoré.  Au départ,  on est sorti pour appuyer le combat des politiciens,  parce que c’était une histoire de politiciens. Mais vers la fin, certains d’entre eux ont déserté les rangs. Ils nous ont mis dans des situations auxquelles on n’était pas préparé  et qu’on a dû gérer comme on pouvait.  Il y en  a qui ont trouvé que ce n’était pas comme cela que l’on devait s’y prendre. J’entends souvent dire qu’on a vendu la lutte. Ceux qui   étaient sur le terrain les 30 et 31 octobre 2014, devaient trouver des réponses rapides  à un certain nombre de situations.    Alors que nous n’avions pas le monopole de toutes les connaissances pour savoir comment  gérer telle ou telle situation. Nous, en tant que leaders de  la jeunesse, qui étions dans la rue avec la jeunesse, nous voulions accompagner la lutte  dont le principal  responsable  était le CFOP. Lorsqu’on parle des 30 et 31 octobre 2014, il y a plusieurs témoins et acteurs  qui sont toujours là.

Des signes  très forts

Quand on a appris que Blaise Compaoré avait   démissionné,  il y avait des gens qu’on ne pouvait plus joindre. On  ne savait pas  non plus où se trouvaient certains hommes politiques. Du coup,  le pays était en train d’aller dans tous les sens. Que fallait-il faire pour arrêter tout  cela ?  Le Balai citoyen s’est  retrouvé à gérer des situations qu’il n’était pas censé gérer.  Etant conscient du rôle que nous  pouvions et devions jouer,  nous nous sommes  assumés et  par la grâce de Dieu, toutes les rumeurs de violences et de pillages qui avaient d’ailleurs commencé, ont  cessé.  Avec la collaboration des forces de défense et de sécurité, l’ordre a été très vite rétabli.   Nous n’étions pas  sortis  pour piller mais pour défendre la démocratie.  J’ai une pensée pour tous ceux qui sont tombés ou qui ont été blessés.  Des gens sont sortis donner leur vie pour sauver la démocratie au Burkina Faso. Mais en retour,  on a  l’impression qu’il n’y a que de l’ingratitude, un manque de reconnaissance vis-à-vis de ces gens-là.  C’est bien de déposer un drapeau sur  des cercueils,  de dire qu’un tel ou un tel est un martyr. Mais après,  qu’est-ce qui est fait pour les ayants droit ?  Il faut qu’il y ait des signes  très forts pour continuer à encourager tout citoyen à être  prêt à donner sa vie pour sa Nation, pour sa patrie. Quand tu offres ta  poitrine pour sauver ta patrie et que cela n’est  pas reconnu, il ne  faut pas s’étonner que  des jeunes ne soient plus  prêts à mouiller le maillot pour leur patrie.

 Quels hommes politiques étaient injoignables le 31 octobre 2014 ?                                  

 

 Ce n’est pas la peine de les citer. Ils se reconnaissent.   Il n’y avait pas  dix mille politiciens au CFOP à   l’époque.

 Quel est votre avis sur les libérations  provisoires de certains présumés putschistes ?

Nous avons quelques connaissances sur un certain nombre de dossiers,  en matière judiciaire, parce que nous avons en notre sein  des avocats  comme Guy Hervé Kam et d’autres personnes qui connaissent le droit et  qui nous  donnent leur avis. A côté de cela, nous écoutons les gars du ghetto,  leur façon de voir les choses. Mais de façon globale, à situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles.  Le droit oui, mais le droit  n’est pas fait pour le droit seulement.  Le droit est fait pour les peuples.  Ceux  qui sont censés être les garants  du droit, c’est le peuple.  Il y a des institutions, mais ces institutions  sont là par le fait du peuple.  Pour revenir au coup d’Etat,  des Burkinabè ont pris des armes, en collaboration avec d’autres personnes à l’interne comme à l’externe.  Il y a des éléments là-dessus.  Je veux parler de l’affaire du mandat d’arrêt contre Guillaume Soro que certains  ont réglée  pour emprunter l’expression au président, « de façon  mouta mouta ». Il faut que    nos autorités  aient du respect pour la vie des Burkinabè.  Avec ce que nous avons vu, n’importe qui peut venir tuer des Burkinabè et aller faire des arrangements après. Mais vous n’allez pas tuer un Américain ou un Français et vous en sortir comme cela !   Il n’y a que nous qu’on peut venir tuer et repartir boire le champagne.  Je trouve cela dommage.  Il faut que nos autorités  apprennent à faire respecter la vie des Burkinabè.  Le deuxième point concerne les libérations. On dit que la justice suit son cours.  Nous sommes des  républicains. On ne peut pas s’opposer à la démarche judiciaire. Si les juges  pensent qu’untel ou untel

doit  être libéré,  pour telle ou telle raison et que cela n’empêche pas l’évolution du dossier,  c’est le travail de la justice. Mais en amont, ne faut-il pas communiquer  pour expliquer au peuple ? Ce qu’on oublie,  c’est que ce sont des libérations qui sont en train de réunir les conditions de nouvelles frustrations.  Quand un peuple, à un moment donné,  ne croit plus en la justice pénale, il va finir  par trouver une autre option qui est celle de se rendre justice.  Et si nous tombons dans ce cas de figure, on se retrouve dans une jungle. J’ai peur que ces libérations ne poussent le peuple à chercher une autre voie de justice.

 Le Balai citoyen était jugé à tort ou à raison d’être proche de Zida. Avez-vous aujourd’hui de ses nouvelles ?

 Je ne sais pas ce que les gens appellent  proche de Zida. Les gens peuvent dire ce qu’ils  veulent.  Chacun a sa façon de voir les choses.  Mais nous  pensons que nous avons participé à un combat. Ce combat était d’éviter que l’article 37 de la Constitution soit modifié.  Nous avons participé à un combat pour que les politiciens  respectent les textes.  Ce qui nous  a conduits à l’insurrection qui a vu la chute de Blaise Compaoré.  Quand Blaise Compaoré a signé sa démission et que l’information nous est parvenue,   nous  avons  été encercler l’état-major des armées.  Je me souviens encore du cri : « l’armée avec le peuple ». C’est le peuple qui a demandé  à l’armée de se joindre à la lutte du peuple.   Nous avons fait  le tour de l’état-major en chantant l’hymne national, le Dytanié et en demandant à l’armée de se joindre au combat du peuple.  C’est là où  les tractations  ont commencé.  Certains leaders politiques  qui étaient censés récupérer la situation et la gérer,  avaient  déserté. Ils étaient injoignables et introuvables.  Il y a eu des concertations   au niveau de l’armée. Il y a eu un moment où on a appris que  la hiérarchie militaire était à l’état-major des armées.    Nous nous sommes dit qu’il fallait la prendre en otage afin qu’elle trouve des  réponses à un certain nombre de questions.  C’est là qu’il y a eu des tractations  en leur sein, pour savoir quelle était la conduite à tenir face à la vacance du pouvoir.  Ils se sont  concertés une première, une deuxième et même plusieurs fois. C’est à l’issue de l’avant-dernière concertation que l’armée  est sortie avec un message à lire devant le peuple.  Et ce message a été lu par un militaire. Nous sommes montés avec lui  sur le char pour juste tenir le mégaphone pour qu’il puisse s’exprimer.  Après, nous avons dit que c’était une partie du peuple qui était devant l’état-major des armées. La grande partie de la population se trouvait à la Place de la révolution. Il fallait que le même message fût transmis là-bas.  Les militaires  nous ont demandé, vu que la situation était très tendue et   que la jeunesse n’était pas prête pour eux, d’assurer  leur sécurité. Et c’était ma première fois de voir des  civils assurer la sécurité de militaires pour qu’ils aillent lire  une déclaration à la Place de la révolution. C’est pour vous dire à quel point la situation était tendue.  Nous avons accompagné les militaires pour qu’ils aillent lire un message que l’armée avait rédigé pour le peuple. C’est après cela que j’ai su, avec tout le monde, le nom de celui qui a lu le message de l’armée.   Et ce militaire  s’appellait  Yacouba Isaac Zida.   On a aussi appris, par la suite, qu’il était du Régiment de sécurité présidentielle (RSP). Certains ont dit que nous étions naïfs. Peut-être que c’est la naïveté qui nous a permis de faire ce que nous avons fait.  Nous le faisions sans calcul. Notre objectif était  de ramener le calme pour ne pas que le pays sombre dans le chaos.  L’armée a déclaré qu’elle rejoignait la lutte du peuple. Après, ils sont repartis pour voir comment s’organiser entre militaires  pour la suite des événements. Maintenant, comment ils se sont organisés pour la suite des événements,  je n’étais pas dans les différents camps. Mais je sais une chose. Je refuse l’hypocrisie de certains hommes politiques. Je refuse la lâcheté  de certains  politiciens. Quand nous étions à la Place de la révolution, j’ai été approché  par certains politiciens. Chaque camp avait son militaire qu’il voulait placer au pouvoir. Certains m’ont demandé de scander  « Kouamé Lougué au pouvoir ».  On a même envoyé un véhicule militaire chez moi, à la Patte d’oie, pour que je vienne au Mess des officiers   lire une déclaration comme quoi, c’est Kouamé  Lougué qui serait président.  D’autres  voulaient qu’on fasse la même chose pour le Général Honoré Traoré. Chaque  politicien avait son candidat militaire.   A un moment donné, nous ne comprenions pas ce qui se passait, mais nous nous sommes dit que l’armée était très bien organisée. C’est à elle de designer la personne qui doit gérer.  Maintenant, comment les choses se sont passées pour que ce  soit Zida ? Ce sont les militaires qui peuvent vous  le dire. Nous avons donné le pouvoir à l’armée.    Le lendemain,  certains  sont encore ressortis pour dire qu’on ne veut pas de l’armée au pouvoir. Pourtant, les mêmes personnes,  la veille, nous demandaient de dire que tel militaire ou tel militaire devait conduire la Transition.  A un moment, chacun d’entre nous s’est retiré pour méditer parce que nous avions affaire à des gens qui étaient dans des calculs politiques. Mais comme frangin aime à le dire, c’est notre naïveté qui nous a protégés.    Quand certains disent que nous collaborions avec Zida, bien sûr que nous avons collaboré avec la Transition.  La Transition, ce n’était pas Zida seul. Pourquoi ne dit-on pas que nous avons collaboré avec Cherif Sy ou encore le président Kafando ?  Nous avions le devoir de défendre la Transition et c’est ce que nous avons fait. Quand il y a eu le coup d’Etat, nous sommes encore descendus dans la rue. Ce n’était pas pour sauver la tête d’un individu,  mais pour sauver la Transition.   Mais  certains veulent prendre les choses en pièces détachées, c’est ce qui  me dérange.    C’est comme ceux qui disent que le Balai citoyen était aux avant-postes. Mais ce sont les gens qui nous ont mis devant.  Sinon, nous avons toujours dit  que nous étions avec d’autres organisations de la société civile et même avec d’autres acteurs.  Sam’S K Le Jah et Smockey sont des artistes. Evidemment, il y a des gens qui nous connaissent et cela produit un effet lorsque nous sommes dans la rue. Malgré cela, nous avons l’humilité de dire que le combat a été mené par le peuple.  Je pense que c’est la seule fois sur le continent, qu’une Transition politique a pu se tenir en un an et aboutir à des élections transparentes.  Quand on prend le Mali, la Centrafrique et d’autres pays,  la Transition a duré bien plus longtemps.  Nous avions pour mission de préserver les acquis de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014. Nous  avions aussi pour mission de protéger les élections afin qu’elles se tiennent sans heurts. La preuve, les élections présidentielle et législatives se sont déroulées avec beaucoup d’enthousiasme.

Lors de votre dernière conférence de presse, vous avez demandé un toilettage du système sécuritaire en demandant de mettre l’homme qu’il faut à la place qu’il faut. Donc, pour vous, Simon Compaoré n’est pas l’homme qu’il faut ?

J’ai écouté le « vieux père » Simon Compaoré qui répondait à notre conférence de presse.  Il a dit qu’il n’a pas été nommé par une organisation de la société civile. Il n’a pas besoin de dire cela parce que tout le monde sait que ce n’est pas une organisation de la société civile qui nomme un ministre.  Tout ce qu’on leur dit est que le peuple est inquiet.  L’insécurité est devenue une chose banale.  On ne pouvait pas s’imaginer, il y a quelques années de cela, qu’il y aurait des braquages en plein midi, et même toutes les violences auxquelles nous assistons aujourd’hui.  A l’époque, je disais que c’était un plan de gouvernance de Blaise Compaoré, c’est-à-dire semer la terreur et  le chaos pour pouvoir régner.   Je me souviens de  ce que Norbert Zongo disait, c’est-à-dire qu’il viendra un moment au Burkina, où même si on construisait un commissariat de police devant chaque cour, on ne pourrait pas arrêter la violence.  Nous n’indexons pas un individu. Mais nous sommes devant des faits.  Et aucun Burkinabè ne peut dire qu’il est serein.  Depuis le début de l’année, le Burkina a connu plusieurs  attaques.  Aucun ministre ne doit être fier de déposer un drapeau sur le cercueil d’un policier, d’un gendarme ou d’un militaire.  On attend toujours qu’il y ait des mesures fortes.   Quand un individu tue un policier dans la rue avec son engin et qu’on nous dit qu’on a l’identité du criminel, sans nous le présenter, on fait quoi ? Le véhicule qui a été volé à Ouahigouya qui s’est trouvé au parc urbain Bangr-wéogo, les attaques du Capuccino, de Splendid Hôtel montrent qu’il y a problème. Nous ne pouvons pas rester là, à regarder sans rien dire. Il faut attirer l’attention des uns et des autres. Si, après, il y a des personnes qui se sentent indexées, qu’elles montrent le contraire de ce que les gens pensent.  C’est cela la bonne gouvernance. Tu es jugé en fonction d’un bilan.   Je veux  dire  qu’on ne peut pas se développer dans cette psychose.  Parce que les investisseurs ne viendront pas, tant qu’ils ne sont pas sûrs qu’il y a la sécurité dans le pays.  Nous perdons beaucoup d’argent aujourd’hui du fait de l’insécurité.  Nous disons qu’il est bien de parler de relance économique, mais cette relance économique a une base.  Cette base est une vraie démocratie, qui se déroule dans un Etat sécurisé. Et pour cela, je dis et je le répète, il faut des gens capables de prendre  des mesures fortes pour rassurer le peuple, les bailleurs de fonds, et même le président du Faso et tous les autres. Quand on parle de coup d’Etat aujourd’hui, cela veut  dire que même le gouvernement n’est pas en sécurité.

D’aucuns reprochent aux membres du Balai citoyen de s’être enrichis sous la Transition.  Quelle est votre réaction ?

 

Nous attendons que ceux qui le disent, nous apportent des preuves.  Les preuves  de ma V8 et les immeubles qu’on aurait achetés aux Etats-Unis d’Amérique.  Personne d’entre nous ne vivait dans la misère avant de mener ce combat.  C’est avec  ma Toyota Prado que nous avons mené une bonne partie du combat sur le terrain.  Elle est au garage actuellement à cause de la lutte.

Un président « androïd » en 2020

Nous avons fait tous les voyages à l’intérieur du pays  avec cette voiture pour la campagne de la désobéissance civile.  Nous faisions les meetings dans les marchés et les lieux publics avec ma voiture.  Il  fallait monter sur la voiture pour se faire entendre.  Qu’on arrête de se foutre des gens.

D’aucuns estiment que près d’un an après l’avènement du MPP au pouvoir, tous les signaux sont au rouge. Partagez-vous cet avis ?

C’est trop exagéré de dire que  tous les signaux sont au rouge. Certes, cela est vrai sur les plans de l’économie et de la sécurité. Ce n’est pas pour dire qu’ils ne font rien, mais nous attendons toujours.   On ne  veut pas comparer tout le monde à Thomas Sankara mais nous avons eu l’avantage de  l’avoir connu.   Ils ont pris le pouvoir le 4 août 1983 et le 2 octobre de la même année, il y a eu le Discours d’orientation politique.  Dès que ce discours est fini,  le travail  a commencé.  Tout le monde était au travail. Mais aujourd’hui,  le pouvoir a passé un an à accuser la Transition. Aujourd’hui, ce sont des audits sur le foncier et les  mines. Tout cela est bien. Mais nous disons qu’il y a eu trop d’audits au Burkina, mais quelles suites ?   Il ne s’agit pas de dire qu’untel a détourné cinq cents parcelles,  François Compaoré a reçu 5 milliards de F CFA pour passer des deals, mais plutôt de se demander qu’est-ce qu’on fait  pour récupérer cet argent? Quand on va chercher 15 mille milliards auprès des bailleurs de fonds et que les téléphonies  mobiles doivent à l’Etat burkinabè, (NDLR : arrangement entre l’ONATEL et la douane), il faut d’abord penser à récupérer cet argent.  Le Burkina croule sous le poids des audits.  Le pouvoir en place, à la limite, se cherche.  Il faut entreprendre  un certain nombre de choses pour  montrer au peuple qu’on travaille.  Le plus important pour nous, est ce qu’on fait des rapports et des audits.

Selon vous, est-il nécessaire de passer à une 5e République ?

C’est encore un débat de politiciens.  On peut passer à la Ve ou  VIe République, au régime présidentiel, semi-présidentiel et  tout ce qu’on veut, mais ce n’est pas parce qu’on va casser le thermomètre qu’on fera baisser la température.  Tous ces schémas sont tracés par les démocraties occidentales.  Mais est-ce que les démocraties occidentales ont toujours raison ?  Je crois  que non. Nous avons un peuple avec ses particularités. On peut prendre chez les autres et les améliorer en fonction de notre contexte.  Mais, si nous faisons toujours des couper- coller, nous aurons toujours des soucis.  Nous espérons que de cette nouvelle Constitution, sortiront des textes qui vont  nous éviter de nous retrouver dans la rue.  Sachons que les Constitutions sont ce qu’elles sont, les peuples sont  ce qu’ils sont.  Ve République, VIe République, Xe république, les peuples ont toujours des besoins fondamentaux.  Quel que soit le système qui est là, si nous avons des dirigeants à l’image de Thomas Sankara,  le peuple sera à l’aise.  Aujourd’hui, il faut qu’on arrive à avoir des dirigeants « androïd » en lieu et place de dirigeant Nokia 3210 qui ne prennent pas d’applications, qui ne peuvent pas faire de mises à jour.  Je souhaite qu’en 2020, on ait un président « androïd »  qui, ouvert aux mises à jours, peut prendre des  applications nouvelles pour s’adapter à la réalité du terrain.  Aujourd’hui, on a des « vieux pères » dont l’expérience de la gestion du pourvoir, ne sert à rien.  Des dirigeants qui sont là depuis la révolution avec Sankara et les  27 ans avec Blaise Compaoré ; mais on a l’impression qu’ils n’ont jamais exercé le pouvoir.  Il faut que la jeunesse se mobilise en 2020 pour trouver des dirigeants capables de comprendre leurs aspirations.

La justice a fait savoir qu’on ne pouvait pas poursuivre Blaise Compaoré pour haute trahison et attentat à la Constitution. Quelle est votre réaction ?

 

C’est encore la justice.  Nous observons. On a l’impression que les gens font exprès  pour réunir  les éléments pour pousser à d’autres énervements.  On dit qu’il peut être poursuivi en tant que ministre de la Défense. Mais qu’il soit poursuivi !

 

Au lendemain du complot déjoué au Burkina, le président par intérim du MPP, Salifou Diallo, a pointé un doigt accusateur sur l’ancien régime. Quel commentaire en faites-vous ?

A propos de ces rumeurs de coup d’Etat, fondées ou infondées, nous disons simplement qu’ils se connaissent.  Ils étaient tous dans la même forêt sacrée. Si le président par intérim du MPP, Salifou Diallo, peut tenir ce type de discours,  c’est  parce qu’il a des éléments en sa disposition.  Nous attendons de voir où tout cela va nous mener.  Il ne faut pas s’étonner que des gens qui étaient impliqués dans le coup d’Etat de septembre 2015,  tentent de se réorganiser.

Le CDP fera tout pour revenir au pouvoir et le MPP fera tout pour y rester

On libère  ceux qui étaient détenus,  certains qui étaient soupçonnées n’ont jamais été entendus. Ceux qui ont perdu le pouvoir en 2014 n’ont pas encore dit leur dernier mot.  Au-delà des rumeurs de coup d’Etat, j’ai une grosse crainte pour 2020.   Ceux qui ont perdu le pouvoir en 2014 ont travaillé et continuent de travailler, estimant que l’insurrection populaire de 2014 était un coup d’Etat.  Les anciens camarades qui se sont séparés en 2014, trouvent que les autres sont des traîtres. En 2020, le CDP fera tout pour revenir au pouvoir et le MPP fera tout pour y rester.   On risque de se retrouver dans une situation difficile.

Comment avez-vous accueilli le rapport de l’enquête parlementaire sur le foncier urbain ?

J’espère seulement  que ce n’est pas une comédie de plus.  Les  enquêtes sur le foncier ne datent pas d’aujourd’hui. Je dis et je le répète,   le  problème n’est pas les audits  ou les rapports, mais ce qu’on en fait.  Des gens sont épinglés. S’il y a suffisamment de preuves pour les condamner, on doit les condamner et les contraindre à rembourser.

Des voix s’élèvent de plus en plus pour mettre en doute la crédibilité de ce rapport. On estime qu’il y a un acharnement contre certains dignitaires de l’ancien régime. Qu’en dites-vous ?

 

Je ne  veux  pas entrer dans ce débat. Nous faisons confiance aux dirigeants. Ils ont été élus démocratiquement. Ils font leur travail et nous devons leur faire confiance jusqu’à ce qu’ils  trahissent notre confiance.  Maintenant, est-ce que ces rapports sont fait dans l’esprit d’une chasse aux sorcières  afin de  nuire à d’anciens camarades, je n’en sais rien. Comme le dit l’autre, si les éléphants se battent et que tu es un lièvre, grouille t’éloigner le plus rapidement possible.  Tout ce que nous savons, c’est que chaque Burkinabè a droit à un toit. Malheureusement, un fonctionnaire normal ne peut plus s’acheter une parcelle au Burkina.

Quelle appréciation faites-vous du rapport de l’enquête parlementaire sur les titres miniers ?

Depuis  toujours, des voix se sont élevées pour dire que  le Burkina Faso a signé de faux deals avec les miniers. Des OSC et des ONG ont travaillé là-dessus.  Avec tout le bruit qu’on a entendu, on a rangé les dossiers et on est passé à autre chose.  Et les gens continuent de voler l’or de notre pays.  Combien de fois  arrête-t-on des gens qui tentent de sortir du pays avec des kilogrammes d’or ?  Tout le monde sait que l’or du Burkina est géré par un groupe de personnes. L’or, les restaurants et toutes les activités et autres business autour de l’or, on sait qui gérait cela au Burkina.  Et ce, au mépris des lois de la République parce qu’il y a des cahiers de charges qui n’ont jamais été respectés.

 Issa SIGUIRE


Comments
  • Ce garcon- la me semble exceptionnellement intelligent. Interview limpide et d’ un courgae propre et probe.

    29 octobre 2016
  • Merci pour ces explications.
    SANKARA doit être fier la où il se trouve en ce moment.
    Encore Merci

    31 octobre 2016
  • Tu es un fils. Jusqu’à demain nous ré croyons et te suivrons. Que dieu te bénisse.

    31 octobre 2016
  • Commentaire…tu es vraiment un garçon, que Dieu te benisse

    2 novembre 2016
  • Interview propre,clair,on se rappelle que ta voiture a ete brulee,tu etais menace ms ta determination etais au dessus,mais on ne peut etre nokia310 et etre androide apres,si nous nous ecartons des idees de sankara,point de developpement,point de progres,si nous comptons sur les ONG,bailleur de fond,donateurs..point de developpment ,poin de progres…seule notre force(physique,intellectuelle..)peut faire la difference.il ya des relations qui arrangent coe la Taiwan,ms celle avec la france,vieille de 100 ans n’arrange plus.si quelqu’un veut donner quelquechose a quelqu’un,le donnateur rejoint le beneficiare chez lui,il ya trop de missions a l’exterieur,trop de conference de presse,trop de programmes,de projets qui ne laissent aucune trace

    3 novembre 2016
  • Ya des passages de l’interview qui s’emblent se contredire un peu. Sams k affirme les politiciens etaient injoignables et avaient disparu et par suite que les politiciens l’ont contacte parce que chaqu’un avait son militaire a place. Un peu flou quand meme

    3 novembre 2016
  • VRAIMENT ON N’EST FATIGUE DES DIRRIGENT NNKIA SANS MEMOIRE INTERNE ET SANS CARTE SD MAIS DES DIRRIGENT ANDROÏD WIFI INTEGRÉ CAPABLE DE CRÉER SES PROPRE APPLICATION QUI AIMÉ…

    4 juillet 2017

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