HomeBaromètreISSOUF SAWADOGO, PRESIDENT DU CONSEIL CONSULTATIF DU PAREN : « La tragédie grecque du fils tuant le père n’aura pas lieu»

ISSOUF SAWADOGO, PRESIDENT DU CONSEIL CONSULTATIF DU PAREN : « La tragédie grecque du fils tuant le père n’aura pas lieu»


Ceci est une opinion de Issouf Sawadogo, président du Conseil consultatif du Parti pour la renaissance nationale (PAREN), à propos de la crise au sein dudit parti. Lisez plutôt !

 

Tous les livres saints et les traditions africaines nous l’enseignent, jamais le mensonge n’a triomphé de la vérité ! Dans le débat actuellement en cours sur la crise au sein du PAREN, en notre qualité de membre quasi fondateur du parti et ayant la qualité d’ancien, nous sommes dans l’obligation d’intervenir afin de rétablir la vérité historique. Cette démarche s’impose dans un contexte où une partie de l’opinion, même si elle semble être minoritaire, a pris parti pour Tahirou Barry, ancien président du PAREN,  exclu par le dernier congrès. Ainsi, ceux qui lui sont favorables avancent l’argument, de bonne ou de mauvaise foi, qu’une motion n’a aucune valeur juridique. A ces personnes et à tous les honnêtes gens épris de justice et de vérité, il nous plaît d’indiquer que la notion de motion est bel et bien une notion juridique qui est assimilable  à la notion de résolution. Selon le Vocabulaire juridique de Gérard Cornu, « une motion est un texte proposé ou adopté au cours de la réunion ou du congrès d’un groupement tel qu’un parti ». Et ce texte a la même valeur juridique que les statuts et règlement intérieur du parti. A la différence des statuts, la motion a aussi une portée morale. C’est un engagement fort qui lie les membres de l’organisation qui l’adoptent. C’est en raison de cela que les dispositions contenues dans la motion, ne peuvent pas figurer dans le dispositif des statuts. Les juristes savent par exemple que la Déclaration universelle des droits de l’Homme n’a aucune valeur juridique contraignante, mais ce texte est respecté par toutes les démocraties modernes, et certains pays sont allés jusqu’à l’insérer dans leur constitution. En droit constitutionnel par exemple, on a débattu de la valeur juridique du « Préambule » de la Constitution ; les juges ont fini par trancher en indiquant que le préambule avait la même valeur juridique  que le dispositif de la Constitution.

La motion de 2006 est donc un acte juridique dont le fondateur, Laurent Bado, peut et doit se prévaloir. S’il lui a été donné des pouvoirs qui peuvent paraître exorbitants aux yeux de certains citoyens, c’est en raison du fait que la politique, en Afrique et au Burkina, ne repose sur aucun fondement   moral et éthique. Avec ces insuffisances, le PAREN, dans son manifeste, fait de l’éthique et de la morale deux valeurs fondamentales de l’engagement politique.

Tahirou Barry  est mal venu aujourd’hui à  contester la légalité de cette motion, pour les raisons suivantes. En effet, c’est  sur la base de cette motion qu’il a été proposé comme président en remplacement de Mme Jeanne Traoré en 2010 qui, elle-même, avait remplacé Omar Djiguimdé quelques années plus tôt, sur la base du même principe. Si donc c’est le fondateur qui l’avait proposé aux membres du congrès en 2010, d’où vient-il qu’il s’auto-investisse en 2014 sans l’avis préalable de celui-ci ? Les juristes savent ce qu’est le parallélisme des formes en droit. En réalité, Tahirou Barry a usé de manœuvres frauduleuses non seulement à l’égard du fondateur, mais aussi à l’égard des autres membres du parti. Selon toute vraisemblance, le congrès de 2014 n’avait qu’un seul objet : celui d’apporter un soutien à un frère du parti du nom de Bakary Sanogo  qui avait du mal à se faire accepter par la base. Selon monsieur Gaoussou Sory, facilitateur des discussions au cours du congrès de 2014 à Bobo, il n’a nullement été question ni d’abréger, ni de donner un nouveau mandat à Tahirou Barry.  Le mandat de Tahirou Barry  a été renouvelé par cette horde de « garibous » transportés pour la circonstance  afin de remplir la salle où s’est tenu le Congrès. Il faut quand même s’interroger sur les motivations qui l’ont poussé à abréger en 2014 son mandat qui prenait fin en 2015. Pourquoi n’avoir pas attendu la fin de son mandat normal, car les congrès extraordinaires se font très souvent en temps de crise ? Est-il admissible que la question de faire abréger son mandat et de le renouveler ne fasse pas l’objet d’une discussion préalable avec le père fondateur du parti et des autres responsables du parti, notamment le Conseil consultatif (des Sages) que les statuts de 2010 rédigés sous le magistère de Tahirou Barry avaient créé ? Les membres de ce Conseil (composé des anciens Présidents, vice-présidents, Secrétaires généraux et tous les autres hauts cadres ayant rendu d’énormes services au parti) sont toujours en vie et ils étaient encore tous membres du parti  à la date du congrès. Ont-ils été mis au courant du renouvèlement du mandat de Tahirou Barry  en 2014 ? Ils n’ont même pas été invités à ce fameux congrès. Le président du  Conseil consultatif que je suis, a été invité à assister uniquement à la cérémonie de clôture. Cela frise le mépris et je n’y suis pas allé.   Le manège était si bien monté  qu’aucun membre du parti, y compris le fondateur, ne savait que Tahirou  Barry avait bénéficié d’un nouveau mandat. Les statuts et règlement intérieur de 2014 n’étant connus que d’un groupe d’initiés proches de Tahirou Barry. Les organisateurs du dernier congrès des 29 et 30 juillet 2017   ont dû s’adresser au MATDS pour obtenir copie des statuts tels que modifiés en 2014.

Au-delà donc de la motion elle-même, une autre notion de droit s’invite au débat, la coutume. Le principe qui veut que les présidents soient proposés au congrès par le père fondateur est devenu une règle coutumière au sein du PAREN. Selon toujours Gérard Cornu (op. cit), la coutume se définit comme une norme de droit objectif fondée sur une tradition populaire (consensus utentium) qui prête à une pratique constante, à un caractère juridiquement contraignant. La coutume est une véritable règle de droit mais d’origine non étatique, que la collectivité a fait sienne par habitude (diuturnus usus) dans la conviction de son caractère obligatoire (opinion necessitatis).

Faire croire qu’il y a un conflit de génération au sein du PAREN est l’astuce que Tahirou  Barry  a utilisée pour mieux se placer dans la position d’une victime  pour gagner la sympathie d’une frange de l’opinion, la jeunesse. Mais la jeunesse doit garder à l’esprit que l’arrogance et l’opportunisme sont des défauts dont elle devrait se prémunir. Abdoul Karim Sango qui n’en pouvait plus de supporter la gestion autocratique du parti par Tahirou Barry n’est-il pas de la même génération que lui ? Du reste, le fondateur doit se mordre aujourd’hui les doigts, pour n’avoir pas écouté  les frères Sango, Issouf et Omar qui avaient attiré plusieurs fois son attention sur les dérives autocratiques de Tahirou Barry. Les membres du parti qui le contestent sur l’ensemble du territoire et qui ont adressé plusieurs lettres  de protestation au fondateur sont-ils oui non de la même génération que Tahirou Barry ? En réalité, les contestataires du PAREN d’aujourd’hui  se résument principalement à Tahirou Barry et à Carlos Toé. Sous la gouvernance de Barry, tous les anciens membres du parti qui ont démissionné de droit ou de fait, ne l’ont jamais fait de gaieté de cœur. Ils en ont eu marre de l’arrogance et de l’opportunisme  de Tahirou et de Carlos.  Et cette arrogance à suffisance, Carlos l’a confirmée lors de son passage à Radio Oméga, le dimanche passé (06/08/2017) ; il a traité les anciens de « feuilles mortes ». Ce n’est pas avec ce type de jeunes qui méprisent les aînés que le Burkina de demain se construira !

Le comportement de Tahirou Barry  est aux antipodes des valeurs promues dans le manifeste du PAREN. Il a introduit la division et le sectarisme dans un parti créé autour de l’idée de fraternité. Ce n’est pas par hasard qu’au PAREN, tous s’appellent frères et sœurs. Le tercérisme qui est la doctrine politique du PAREN et le programme politique qui en découle, sont des idées propres au professeur. En 1999, un groupe de cadres est allé voir le professeur pour lui demander d’accepter de créer un parti autour du tercérisme ; c’est comme cela que ce parti est né. C’est un parti atypique dans son idéologie, son projet de société et dans la personne de son fondateur. Le PAREN est le seul parti au Burkina créé autour d’une  doctrine politique élaborée par un individu qui en est en même temps le fondateur. Il est assez rare de rencontrer ces cas dans la science politique. Ceux qui ont élaboré  des doctrines politiques, se sont très rarement engagés en politique.  Le professeur Laurent Bado  a un droit de propriété qui s’exerce sur ses idées. C’est dans ce sens que le congrès de 2006 lui avait conféré un statut spécial dans la vie du parti. Tahirou Barry a trahi de façon grave l’éthique et l’idéal de ce parti dont les fondements reposent sur les valeurs positives africaines. Si Tahirou  Barry veut s’émanciper de façon opportuniste du fondateur du PAREN, c’est son droit. Mais lui et ses supporters devraient plutôt songer à élaborer leur propre doctrine, leur propre projet de société et leur propre programme de gouvernement. Chers petits frères, créez alors votre propre parti, si vous voulez rester aux commandes à vie. Ce n’est pas plus compliqué que cela ! La tragédie grecque du fils tuant le père n’aura pas lieu !   

 

Le Président du Conseil Consultatif du PAREN

 

Issouf SAWADOGO


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