HomeA la uneJOURNEE NATIONALE DE LA LIBERTE DE LA PRESSE : La coexistence médias et réseaux sociaux en débat

JOURNEE NATIONALE DE LA LIBERTE DE LA PRESSE : La coexistence médias et réseaux sociaux en débat


 

Chaque 20 octobre et ce depuis 1993, est commémorée la Journée nationale de la liberté de la presse. L’année 2017 n’a pas dérogé à la règle. Elle a eu lieu le 20 octobre à Ouagadougou. Présidée par le ministre de la Communication et des relations avec le Parlement représenté par Hortenze Zida, SG du MCRP, cette journée a servi de prétexte au Centre national de presse Norbert Zongo (CNP/NZ) pour inviter les acteurs à réfléchir sur le thème « Médias et réseaux sociaux au Burkina : Quels champs d’application ? », autour d’un panel. Outre ce plat de résistance, d’autres activités sont au programme de cette 19e journée de la liberté de la presse.

 C’est par une minute de silence en la mémoire de Justin Coulibaly, journaliste décédé le 29 septembre dernier, que la commémoration de la 19e Journée nationale de la presse a débuté. Cette Journée a une histoire que le président de la Société des éditeurs de la presse privée (SEP), Boureima Ouédraogo, s’exprimant au nom du Comité de pilotage du CNPNZ, a tenu à rappeler. C’est une journée symbolique, dira-t-il,   pour marquer la pétition qui avait été lancée le 20 octobre 1993 par le Mouvement burkinabè des droits de l’Homme et des peuples (MBDHP) pour accompagner les organisations professionnelles des médias que sont la SEP, le SYNATIC et l’AJB en vue de la relecture du Code de l’information d’alors, qui était jugé liberticide. Au-delà de cette valeur historique, c’est une journée, a poursuivi Boureima Ouédraogo, qui donne d’abord l’occasion « de nous interpeller au niveau de la profession, par rapport à ce que nous avons fait de la liberté que nous avons conquise ». Enfin,  cette commémoration interpelle les pouvoirs politiques sur la nécessité de renforcer le dispositif institutionnel et juridique en matière de presse. La secrétaire générale du ministère de la Communication, Hortenze Zida, a salué la commémoration d’une telle journée.

Le thème au cœur des débats de la Journée s’intitule :« Médias et réseaux sociaux au Burkina : Quels champs d’application ? ». Pour Boureima Ouédraogo, un tel thème est dicté par le fait que les médias traditionnels se retrouvent face à d’autres types de médias appelés réseaux sociaux. Ces réseaux sociaux offrent d’autres opportunités d’informations aux citoyens. Mieux, des citoyens se voient jouer le rôle de journalistes sans toutefois l’être, mais qui, de par leur activisme sur les réseaux sociaux, diffusent des informations. Cette nouvelle donne suscite un certain nombre de questionnements. Est-ce qu’aujourd’hui, l’activiste des réseaux sociaux peut être considéré comme un journaliste et vice-versa ? Ensuite, qu’elle est la réglementation qui doit régir les réseaux sociaux ? Est-ce que ce sont les règles qui régissent les réseaux conventionnels qui doivent régir les réseaux sociaux, ou des lois spéciales ?

Pour répondre à ces interrogations, trois panélistes étaient face au public. Il s’agit du Dr Emile Bazémo, du Dr Abdoul Karim Sango et du Dr Cyriaque Paré.

Le premier panéliste, le Dr Bazémo, a d’emblée relevé la difficulté qu’il y a à donner un contenu précis aux notions de médias et réseaux sociaux. « Les médias et les réseaux sociaux sont des réalités difficiles à définir ». Le social média, selon lui, c’est le fait de communiquer en utilisant tous les moyens proposés par internet. Les médias sociaux numériques sont des outils, des plateformes de diffusion d’informations sur un réseau ouvert ou fermé. Ces médias doivent leur existence et leur développement au web 2.0 qui permet l’interactivité, absente dans les médias dit traditionnels.

Lorsqu’on parle de réseau social, poursuit-il, on entend réseau social virtuel, facebook, etc. Toutefois, il faut distinguer les réseaux sociaux des médias sociaux. Le média est un trait d’union qui relie les citoyens. Le média social est un moyen de communication qui relie les citoyens par des informations. Pour lui, ce sont les insuffisances des médias traditionnels de collecte, de traitement et de diffusion de l’information qui ont été à l’origine de la naissance et du développement prodigieux des nouveaux médias. La grande question que pose le développement de ces réseaux sociaux, se trouve être celle de la répression des délits commis par ses utilisateurs.

« Il ne faut pas confondre journalisme et militantisme sur les réseaux sociaux »

C’est à Abdoul Karim Sango qu’est revenue la tâche de poser la problématique de la réglementation des réseaux sociaux. Les réseaux sociaux, à en croire le juriste spécialiste des médias, font malheureusement l’objet d’une très faible réglementation. En plus de cela, il a relevé que la législation burkinabè n’est pas pour le moment favorable au cyber espace. Le droit applicable en matière de circulation des pensées a été élaboré pour s’appliquer aux médias traditionnels. Dans les pays avancés, dira-t-il, les juges ont fait preuve d’audace pour étendre le régime juridique des médias traditionnels à des situations nées au niveau des réseaux sociaux. De façon générale, lorsque se pose devant le juge un délit de diffamation ou d’injure, il se réfère à la fois aux règles du droit commun et des règles dérogatoires du droit commun. Au Burkina Faso, il faut savoir distinguer, poursuit Dr Sango, une infraction commise par un citoyen de celle commise par un journaliste s’exprimant en qualité de citoyen. Lorsqu’un citoyen n’ayant pas la qualité de journaliste s’exprime sur les réseaux sociaux, il peut engager sa responsabilité pour des propos diffamatoires ou injurieux. Dans ce cas, le juge applique les articles 361 et suivants du Code pénal de 1996.  Les règles dérogatoires en matière de diffamation ne peuvent profiter qu’aux journalistes s’exprimant dans le cadre de l’exercice de leur métier, comme le veut la loi 058 portant régime juridique de la presse en ligne. Cette loi exclut les outils relevant de la catégorie des réseaux sociaux. « Ne peuvent prétendre au statut de la presse en ligne les sites internet personnels et les blogs édités à titre non professionnel », article 4, a précisé M. Sango. Faut-il dépénaliser les délits commis sur les réseaux sociaux ? « J’y ai pensé, mais je n’ai pas le courage de faire une telle demande », dixit Abdoul Karim Sango.

Le Dr Cyriaque Paré a donné des clés permettant de vérifier la fiabilité des informations véhiculées sur les réseaux sociaux. Pour lui, il ne faut pas confondre journalisme et militantisme sur les réseaux sociaux. Pour trier le bon grain de l’ivraie sur les réseaux sociaux, il faut souvent faire attention à la date de l’information, à la pertinence du contenu, à la qualité de l’expression, au contact du site, etc.

Ousmane TIENDREBEOGO

 

 

 

 

 

 

 

 

 


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