HomeA la uneKABILA ET LE PROJET DE MODIFICATION CONSTITUTIONNELLE EN RDC : Un silence évocateur

KABILA ET LE PROJET DE MODIFICATION CONSTITUTIONNELLE EN RDC : Un silence évocateur


 

Le président de la République démocratique du Congo (RDC) a convoqué, loin des yeux de ses concitoyens, les 315 députés et 47 sénateurs de sa famille politique dans sa ferme présidentielle située à la périphérie de la capitale Kinshasa. Que vaut bien et que signifie une telle « entrevue» discrète à laquelle, effectivement, ont été conviées les « brebis» fidèles? La question mérite bien d’être posée, quand on sait que Kabila est de plus en plus « lâché » par certains compagnons de lutte pour la simple raison que dans son fort intérieur, le président veut charcuter la Constitution pour s’octroyer un 3e mandat. En tout cas, de ce pique-nique « présidentiel-parlementaire », l’on peut retenir des informations à multiples interprétations. Premièrement: le président Kabila dit n’avoir jamais demandé la révision de la Constitution pour rester au pouvoir, accusant au passage ses contempteurs de lui faire un procès d’intention. Deuxièmement : les parlementaires sont allés témoigner leur loyauté et leur fidélité au chef de l’Etat et se sont dit prêts à affronter les frondeurs de la majorité. Troisièmement : Joseph Kabila a demandé à ses « lieutenants » de préparer le dialogue en réponse à ceux qui l’accusent de vouloir réviser la Constitution. Quatrièmement : Lambert Mendé, le griot du chef, annonce que son président respectera la Constitution en vigueur. Ailleurs, la lecture de ses quatre points aurait permis de tirer la conclusion selon laquelle, Kabila ne va pas suivre les contre-exemples des satrapes africains qui tripatouillent la Constitution pour s’accrocher au pouvoir.

La tromperie et la couardise n’ont jamais été des solutions politiques

Malheureusement, nous sommes en Afrique, précisément en Afrique centrale et surtout face à un personnage qui, s’il est vrai qu’il n’a jamais dit qu’il réviserait la Constitution, n’a pas eu non plus le courage de dire qu’il ne le fera pas. Le silence méthodique étant le fort des « kamikazes » des Constitutions, il faut craindre que Kabila ne prépare, dans la clandestinité, son coup fourré. Dans bien des cas en Afrique, le silence est une méthode éculée pour parvenir aux révisions constitutionnelles. Le vrai bénéficiaire laisse généralement à ses courtisans le soin de vendre le projet de coup d’Etat constitutionnel au « peuple », se claquemurant ainsi dans un silence qui parle haut et fort. Si, comme on le dit, les « affaires n’aiment pas le bruit », il en est de même pour la nouvelle approche opératoire contre les Constitutions. Celui qui a vraiment tracé les sillons et qui s’est logiquement brûlé les ailes, étant Blaise Compaoré au Burkina. Pendant des années, il a laissé le champ libre à ses partisans de ventiler l’idée de révision constitutionnelle et de convaincre le peuple de son opportunité et de sa  pertinence, en prenant le risque de créer une confrontation entre pro et anti-révision, avec les conséquences que l’on sait. Rendu hésitant par le sort de Blaise Compaoré et conforté par les cas Pierre Nkurunziza, Dénis Sassou N’Guesso et même Paul Kagamé, Kabila-fils avance masqué. Seulement, dans les entreprises du genre, le masque finit par tomber. Ce que Kabila oublie, c’est que plus il se tait sur ses intentions, plus sa volonté de charcutage constitutionnel se précise. Et son silence éloquent n’est plus ni moins qu’un manque de considération vis-à-vis du peuple congolais. Or, lorsque le peuple se sent trompé ou tourné en bourrique par des gens qui se croient toujours plus intelligents que lui, sa réaction, à l’instar de ce que l’on a constaté au Burkina Faso en octobre 2014 et septembre 2015, est immédiate. C’est dire si Kabila doit prendre ses responsabilités et faire face à son peuple. Cet apprenti-sorcier des tours de passe-passe politiques, peut continuer de se chatouiller pour rire, mais il doit savoir que le peuple congolais n’est pas un ramassis d’idiots. Au lieu de tourner autour du pot, de trahir les intentions en faisant dans le dilatoire, Kabila a intérêt à « quitter dans ça » car la tromperie et la couardise n’ont jamais été des solutions politiques.  Kabila oublie qu’il est arrivé au pouvoir par le lien du sang ; ce qui est déjà un parjure démocratique. En   conséquence, il ne devrait pas en rajouter. Refusant de voir la réalité en face, il a opté d’ériger, avec leur consentement, ses courtisans à un niveau jamais égalé de cécité morale, intellectuelle et politique. Et contre tous ceux qui refusent d’être conduits comme des troupeaux, il jette les monstres de la répression à leurs trousses. Tant que tu es avec le « roi », tu es un ange. Si tu veux t’en éloigner ou contrarier ses projets les plus funestes, ta vie sur terre est menacée.

Michel NANA


No Comments

Leave A Comment