HomeBaromètreLETTRE OUVERTE AU PRESIDENT MICHEL KAFANDO : « Les Burkinabè voudraient désormais choisir librement leurs dirigeants »

LETTRE OUVERTE AU PRESIDENT MICHEL KAFANDO : « Les Burkinabè voudraient désormais choisir librement leurs dirigeants »


l’auteur du point de vue ci-dessous se félicite de la récente révolution burkinabè qui a emporté le régime de Blaise Compaoré. Le vent de la démocratisation ayant soufflé, il souhaite que plus rien ne soit comme avant et que ce faisant, les Burkinabè puissent désormais choisir librement leurs dirigeants. Lisez plutôt !

 

Le compte à rebours a commencé avec l’insurrection populaire qui a conduit à la chute de plus de deux décennies d’une dictature. Après plus de 20 ans de démocratie militarisée marquée par le règne de la terreur, les attentes des compatriotes sont aussi variées que nombreuses sur cette nouvelle ère qui s’ouvre. Cette ère s’annonce comme celle de tous les défis après plus de vingt ans de discours de campagne pleins de promesses ; elle doit nous permettre enfin d’effectuer un grand saut vers la modernité entendue, comme une meilleure prise en compte de nos atouts et nos tares dans cette terrible bataille pour le développement de notre patrie bien aimée, pour porter enfin un regard plus vrai sur nous-mêmes, car nous avons besoin de nous dire à nous-mêmes quelques vérités. Il suffit d’observer l’évolution politique récente de notre pays pour remarquer avec stupeur l’absence quasi chronique d’un leadership digne de ce nom, capable de mesurer la nécessité d’un retour à la base,

d’une meilleure prise en compte du point de vue des populations et d’une plus grande valorisation du bon sens des citoyens et du capital humain. En effet, construits sur le modèle occidental, les textes majeurs de notre pays sont restés longtemps la copie pâle des textes occidentaux. Le vent de démocratisation qui a enfin soufflé sur notre pays à la faveur de l’insurrection populaire, doit permettre à de nombreux citoyens vivant dans l’anonymat total de goûter aux délices de la démocratie et de l’Etat de droit après plusieurs années de privations et de disette dûes à la prise en otage des aspirations légitimes par un groupe d’individus venus d’une autre planète et d’une autre époque. Certains des messieurs ayant flirté d’ailleurs avec l’ancien système et ayant noué des amitiés approximatives dans les couloirs de Kosyam et dans certains ministères se doivent impérativement de rendre compte à la nation! Mais au lieu de tirer les leçons de leur échec, ils préfèrent se cacher derrière les petits réseaux sociaux, micros des radios de proximité pour proclamer leur impuissance.

Ce cas précis illustre malheureusement l’échec d’une certaine forme de leadership dont les Burkinabè ne veulent plus entendre parler. Les Burkinabè voudraient choisir librement désormais les dirigeants probes, intègres sans la moindre influence, encore moins sous la pression des ploutocrates qui distribuent tout, jusqu’aux dessous (cuillères, stylo, pagnes, casquette, robes de marié, etc.). Cette requête peut paraître être banale mais on sait que ce pays est pratiquement l’un des pays d’Afrique où la population est tenue à l’écart des lieux où s’opèrent les choix des dirigeants et de ceux qui, à la tête de partis politiques, croient parler en son nom. Les orientations, les décisions politiques et économiques sont prises sans une véritable consultation des populations concernées. Et ce, malgré les attributs progressistes pompeux du CDP qui se disait populaire et démocratique. Aujourd’hui le constat est clair, accablant ; la réalité implacable, la sentence irrévocable: dans nos hôpitaux, l’horreur dépasse les mots car les morts sont devenus des chiffres, des statistiques à raconter ; l’agriculture et l’économie restent extraverties et rentières, le fossé ne cesse de s’élargir entre la population dépossédée et la petite race de commis formée par une école élitiste et déconnectée, conséquence de réformes aventuristes sans lendemains, des gouvernements successifs. Dans la quasi-totalité, les Burkinabè souhaitent qu’à l’issue des élections à venir, l’Assemblée des enfants du peuple cesse d’être à la botte, à la solde et aux ordres pour être enfin non pas une simple caisse de résonnance pour jouer son rôle moteur et aider à changer la nature même des relations avec les pays du Nord ayant transformé notre pays en réservoir de matières premières et d’entreprises publiques privatisables à souhait que de simples vendeurs à la sauvette en Occident viennent acheter au franc symbolique, où une petite caste de gens haut placés profitent de cette manne pendant que plus de 17 millions de Burkinabè se noient dans une misère sans nom et dont on a du mal à délimiter les contours. Une telle situation ne saurait s’éterniser car la patience des pauvres a aussi des limites objectives, et quand le pauvre décide de mettre fin à ses souffrances, on court vers le chaos. Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à observer ce qui s’est passé récemment ou les injustices endurées par des populations ont conduit à la chute du capitaine Compaoré. Evidemment, chaque élu conscient de l’ampleur et de l’urgence des besoins réels doit s’employer à ce que ce ne soit pas de simples vœux pieux. Sinon!!!

 

Bachirou SAWADOGO, Prof. au LOC

 

 


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