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LEVEE DE SANCTIONS ONUSIENNES CONTRE ASMARA


 L’Erythrée reverra-t-elle sa gouvernance ? 

Les diplomates l’avaient annoncé. Et c’est désormais chose faite. Le Conseil de sécurité de l’ONU a voté, hier, 14 novembre 2018, la levée des sanctions contre l’Erythrée. Cela fait suite à la signature, il y a quelques mois, d’un accord de paix entre Asmara et Addis-Abeba mais aussi au rapprochement opéré par les autorités érythréennes avec Djibouti. Pour rappel, l’Erythrée, depuis 2009, était sous le coup de sanctions onusiennes pour son soutien présumé aux djihadistes en Somalie, plus précisément les Shebabs.

Les observateurs de l’ONU n’ayant pas pu trouver de « preuves formelles », la Grande Bretagne avait appelé à la levée de l’embargo (armes, interdictions de voyages, gels d’avoirs et autres sanctions), qui, il faut le reconnaître, « a provoqué des dommages considérables sur l’économie et la population » érythréennes. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’Erythrée revient de loin. Car depuis qu’elle a déclaré son indépendance en 1993, elle était en froid avec l’Ethiopie dont elle était au départ une province. La suite, on la connaît. Entre 1998 et 2000, les deux pays s’étaient livré une guerre fratricide qui, au bas mot, aura laissé près de 80 000 morts sur le carreau. Mais comme le disait Denis Diderot, « la guerre, même avec ses victoires les plus éclatantes, constitue une plaie purulente qu’il faut panser », les deux voisins ennemis ont fini par faire la paix ; ce qui a permis à l’Erythrée de rejoindre le concert des nations. Mieux vaut tard que jamais, est-on tenté de dire. Mais cette décrispation de l’atmosphère dans la Corne de l’Afrique, la communauté internationale la doit à la politique d’ouverture de l’actuel Premier ministre éthiopien, Aby Ahmed qui, dès son arrivée aux affaires, n’avait pas fait mystère de sa volonté de rapprocher l’Ethiopie à l’Erythrée et partant, à Djibouti.

Une véritable bouffée d’oxygène

C’est tout à son honneur. Car, d’autres avant lui, ne l’ont pas fait quand ils n’ont tout simplement pas contribué à envenimer la situation ; en témoignent les bruits de bottes constamment enregistrés à la frontière entre les deux pays durant les cinq années écoulées. Cela dit, Asmara doit aussi une fière chandelle à la France qui, tous les six mois, présentait un rapport au Conseil de sécurité sur les efforts consentis par le pays pour se rapprocher de ses voisins. Et là, on ne le sait que trop bien. Le pays d’Emmanuel Macron ne le faisait pas pour les beaux yeux de l’Erythrée mais tout simplement parce qu’à l’instar des Etats-Unis et de la Chine, elle y dispose d’une base militaire.

Cela étant dit, on attend à présent de voir ce que cette levée de sanctions, véritable bouffée d’oxygène s’il en est, produira comme effets sur la gouvernance calamiteuse qui a toujours caractérisé le pouvoir d’Asmara. Reverra-t-il sa gouvernance ? On le sait, les autorités de ce pays se sont toujours abritées derrière l’argument fallacieux de ces sanctions pour se disculper, fuir leurs responsabilités face au profond drame vécu par le peuple opprimé d’Erythrée. Dictature féroce sur fond de graves et massives violations des droits de l’Homme, voilà, hélas, le quotidien de ce malheureux peuple qui, fuyant la misère et l’oppression, continue de braver les eaux meurtrières de l’océan, espérant trouver le salut loin de ce pandémonium à ciel ouvert. A présent que ces sanctions ont été levées, le pouvoir érythréen n’a plus d’argument.  Le destin lui offre une chance de se construire une image moins calamiteuse et plus respectable et il faudra qu’il s’assume. A moins que la médiocrité soit, pour lui, comme un fil à la patte dont il est incapable ou n’est pas prêt de se défaire.

B.O


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