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LIBYE Haftar entre dans la vraie guerre


Seize tués dont cinq civils, une quarantaine de blessés, tel est le bilan des combats violents enregistrés le 2 juin dernier à Benghazi (Libye). Deux camps bien distincts semblent émerger des forces qui se disputent l’héritage de Kadhafi : les islamistes et les partisans du général Haftar qui tend à devenir l’homme fort de Libye.

Après de durs combats, le général Haftar affirmait contrôler 80 % de la ville de Benghazi qui s’était retrouvée paralysée. Il disait même être en mesure d’en chasser son principal ennemi, la brigade d’Ansar al-Charia.

 

L’appel d’Al Qaïda contre le général suscite des inquiétudes

 

Ce groupe d’islamistes s’était attaqué à une unité de soldats d’élite de Benghazi, récemment ralliée au général Haftar. C’était en réponse à la campagne anti-islamiste lancée le 16 mai dernier par ce général rentré des Etats-Unis après un séjour de plus de vingt ans. L’attaque du camp de l’armée libyenne par Ansar al-Charia, a donc donné le ton à ce qui se profile comme étant l’un des épisodes les plus terrifiants de l’après-Kadhafi. Lequel des deux camps sortira gagnant de ces combats ?

Après l’offensive qu’il a lancée contre eux, le général Haftar semble devenu la cible principale des islamistes de toutes les régions. En cela, l’appel d’Al Qaïda contre le général suscite des inquiétudes. Effet, son quartier général vient d’essuyer un attentat meurtrier qui aurait pu mettre en danger les jours du général. En tout cas, la volonté des djihadistes de nuire au général Haftar et à tous ceux qui le soutiennent n’est plus un secret. Certes, celui-ci peut compter sur l’armée dont il est issu pour résister aux assauts de ses ennemis. Des milices et des chefs de tribus pourraient aussi lui donner leur appui. Mais, qu’en est-il du gouvernement dont le bicéphalisme est exaspérant ? Très certainement, il lui faudra batailler fort, avant de pouvoir obtenir le soutien d’acteurs politiques, eux-mêmes ne sachant où donner de la tête. Si le général obtient un soutien politique massif, sans doute parviendra-t-il à soustraire la Libye des mains des « djihadistes ». Quid des Occidentaux ? Ils sortiront difficilement de l’ombre pour s’impliquer ouvertement aux côtés de l’ancien dissident militaire libyen. Car, autant la bataille fait rage entre les successeurs potentiels du Guide, autant la situation nationale tend à se complexifier. L’imbroglio qui règne au sommet fait qu’on a du mal à prendre la juste mesure des choses. De sorte que le pays, actuellement plongé dans la guerre civile, semble peu intéresser les Occidentaux. Du reste, ceux-ci ont-ils vraiment le choix ?

Ils devront prendre leur mal en patience, attendre de voir comme le dit l’adage. Ils savent que tout combat contre les islamistes ne peut laisser indifférent. C’est une lutte de longue haleine qui nécessite plus de ressources, la conjugaison de forces complémentaires à travers des stratégies bien coordonnées. Mais, s’engager tout de suite derrière Haftar voudrait dire que l’homme a été longtemps préparé par eux pour venir défendre leurs intérêts. Il s’agit ici d’une guerre asymétrique, dans un pays où de nombreux groupuscules font la loi.

 

L’Occident finira bien par entrer dans la danse

 

L’occident a une amère expérience de ce genre de situation. D’où sa prudence. Mais tôt ou tard, il lui faudra bien se déterminer. Et il le fera pour plusieurs raisons. L’Occident s’intéresse à la Libye à cause d’abord de son pétrole, de loin l’un des meilleurs au monde. De plus, le pays a une belle position géostratégique au plan de la sécurité. Outre ses hydrocarbures, il constitue un lieu de passage privilégié pour ceux qui cherchent à se rendre en Europe pour y gagner leur pain quotidien. Ne pas assister le général Haftar expose ce pays à ouvrir les vannes de l’immigration clandestine aux dépens de l’Occident. Par ailleurs, la Libye de l’après- Kadhafi est devenue un sanctuaire « djihadiste ». Or, la chute du leader a mis à la disposition des milices, des dépôts bien fournis en armements divers et sophistiqués. A travers l’Afrique sub-saharienne, circule ainsi depuis ces dernières années, une quantité phénoménale d’armes et de munitions de tous ordres, qui échappent à tout contrôle. Le Sahel en particulier, est en danger. La crise du Nord-Mali, montre jusqu’à quel point la détermination des groupuscules « djihadistes » peut les conduire.

Sans doute des forces spéciales occidentales sont-elles déjà  à l’œuvre ! L’Occident restera difficilement impassible pendant longtemps devant ceux qui se disputent la dépouille de l’infortunée Libye de l’après-Kadhafi.

Reste la bonne formule pour donner un sérieux coup de pouce au général Haftar et à ses partisans, l’international du « djihadisme » s’étant lui-même officiellement rangé dans le camp opposé à celui du général. « Les ennemis de nos amis étant nos ennemis », l’Occident finira bien par entrer dans la danse. S’il tient à éviter que la Libye ne s’embourbe au profit des seuls « djihadistes », il lui faudra bien travailler aux côtés du général et de ses troupes. A la longue, cela pourra s’avérer payant. Au fur et à mesure que le terrorisme international tisse sa toile, il est en effet de bon ton que les nations fortes se mobilisent. Pour vaincre ceux qui se  positionnent de plus en plus comme des forces obscurantistes, des promoteurs d’un islam décadent et ravageur, seule la conjugaison des efforts est salutaire.

En attendant un éventuel coup de pouce des Occidentaux, le général Haftar, à la fois si loin et sa proche de la victoire, a un vrai combat à mener pour venir à bout de l’hydre « djihadiste ».

 

« Le Pays »


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