HomeA la uneLIMOGEAGE DU PATRON DES CASQUES BLEUS AU SOUDAN DU SUD : S’attaquer aux causes et non aux effets !

LIMOGEAGE DU PATRON DES CASQUES BLEUS AU SOUDAN DU SUD : S’attaquer aux causes et non aux effets !


 

A quoi servent finalement les Casques bleus ? Cette question, on peut se la poser, au regard de l’attitude de cet organe des Nations unies pendant les tragiques événements dont Juba, la capitale du Soudan du Sud, a été le théâtre entre le 8 et le 25 juillet dernier. Tenez-vous bien, pour ne pas tomber en syncope. Les partisans du président Salva Kiir et de son rival Riek Machar, se sont violemment affrontés dans la capitale. Lors de ces chaudes journées, des actes qui heurtent la conscience humaine, ont été posés par la soldatesque gouvernementale. Celle-ci, en effet, s’en était prise notamment, à cette occasion, à des sites de protection de civils situés à quelques encablures d’un camp de l’ONU. Sur les lieux, les soldats ont laissé libre cours à leur instinct, en pillant et en violant les femmes qui y avaient trouvé refuge. Le comble est que malgré les cris de détresse des suppliciés, les Casques bleus n’ont pas daigné voler à leur secours, tel que l’exigeait la situation. En plus des sites de protection des civils, les soudards se sont attaqués à un hôtel abritant des humanitaires et des personnels onusiens. Quel culot, peut-on s’exclamer, en guise d’indignation ! Le bilan donne tout simplement le tournis : vingt civils avaient trouvé la mort et deux Casques bleus tués.

La mission de l’ONU a perdu tout crédit au Soudan du Sud

C’est cet ensemble de manquements que le Général à la retraite, Patrick Cammaert, a consignés dans un rapport destiné à l’ONU. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il est accablant pour les Casques bleus. Le Général y souligne, en effet, un manque de préparation, une « réponse inefficace et chaotique », des ordres contradictoires et des bataillons qui ont abandonné leur poste, laissant les civils affronter seuls leurs bourreaux. Dès réception de ce document au vitriol, le Secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-Moon, n’a pas tardé à sévir. Ainsi, le patron des Casques bleus au Soudan du Sud, a été limogé. Dans le même rapport, Patrick Cammaert pointe aussi la responsabilité du Conseil de sécurité. Le péché de cet organe consiste, selon une experte, à donner « des mandats impossibles à réaliser et pas de moyens ». La mission de l’ONU a donc perdu tout crédit au Soudan du Sud. D’ailleurs, il faut rappeler qu’elle n’a jamais été la bienvenue dans ce pays. De manière générale, l’on peut faire le constat que les Casques bleus sont l’objet de bien des critiques. En amont, ces critiques sont liées au fait que pour se donner toutes les chances de figurer dans un contingent onusien, tous les moyens sont bons. L’un de ces moyens est la corruption. De ce fait, l’aptitude physique, le profil moral et la compétence professionnelle, sont souvent mis en berne. Seul compte, peut-on se risquer à le dire, l’aptitude du postulant à mouiller la barbe de ceux qui décident. Ces genres de deals ne peuvent qu’accoucher de personnels au profil de mercenaires. Pour ceux-ci, la protection des populations civiles dans les pays en crise, est le cadet de leurs soucis. Ce sont de telles personnes qui, une fois sur le théâtre des opérations, se laissent aller à des excès libidinaux, dont les victimes sont parfois des mineurs. Le comportement de ces brebis galeuses, déteint négativement sur l’ensemble de l’institution. Un autre grief que l’on formule contre l’ONU, c’est le fait que les mandats qu’elle assigne aux Casques bleus ne permettent pas à ces derniers de faire face, comme il sied, à la réalité du terrain.

Les Casques bleus sont à l’image de la structure qui les a enfantés

A ces manquements, l’on peut ajouter l’insuffisance des moyens, en termes de logistique et d’armement qu’elle met à la disposition des soldats de la paix. Toute chose qui contribue à faire des Casques bleus, une force molle que les adeptes du mal n’hésitent pas à tourner en dérision, quand ils veulent et comme ils veulent. C’est pourquoi il urge pour la Communauté internationale, de repenser les Casques bleus de sorte à leur donner tous les moyens juridiques, humains et matériels à la hauteur de la délicatesse et de la noblesse de leur mission. Que l’on n’aille surtout pas avancer le sempiternel argument selon lequel l’ONU ne peut pas mieux faire, en raison du manque de ressources. Car, ce qui manque le plus de la part de ses Etats membres, c’est la volonté politique. L’enjeu ici, c’est la paix dans le monde et cela n’a pas de prix. Tant qu’une prise de conscience individuelle et collective ne sera pas faite à ce niveau, l’on peut parier que des situations regrettables comme celle que vient de vivre le Soudan du Sud, se reproduiront. Ce n’est donc pas le limogeage des patrons des Casques bleus par-ci et par-là qui suffiront à faire désormais des soldats de la paix, un instrument opérationnel et efficace. Car, cela revient à s’attaquer aux effets tout en oubliant les causes. Et celles-ci, loin d’être conjoncturelles, sont structurelles. La vérité est que les Casques bleus sont à l’image de la structure qui les a enfantés, c’est-à-dire l’ONU. Tant que cette lourde machine ne va pas se décider à opérer sa mue de manière à se positionner véritablement comme un outil de la conscience universelle au service de la paix et du développement réel des Etats-membres, les Casques bleus risquent de perpétuer leur renommée de touristes en mal d’exotisme qui assistent impuissants aux drames que vivent les populations, du fait de la mégalomanie de leurs dirigeants et de l’hypocrisie des grands de ce monde. Sans cette nécessaire renaissance, l’ONU ne parviendra pas à déconstruire l’image de mythe voire de gadget que bien des gens avertis ont d’elle. Et « quand la biche clopine, nul ne doit être étonné que son  petit l’imite ». Les comportements déviants des Casques bleus peuvent se comprendre à l’aune de cet adage.

« Le Pays »


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