HomeA la uneLUTTE CONTRE BOKO HARAM Que peut le Tchad ?

LUTTE CONTRE BOKO HARAM Que peut le Tchad ?


La coalition internationale contre la secte Boko Haram vient d’enregistrer un nouvel adhérent, et pas des moindres. Il s’agit du Tchad de Idriss Déby, qui vient d’annoncer son engagement dans la lutte aux côtés des autres voisins du Nigeria, contre cette secte islamique qui sévit dans le Nord du Nigeria. La participation du Tchad à cette lutte va dans un premier  temps se traduire par la fermeture de sa frontière d’entrée au Cameroun.

 

L’entrée en scène du Tchad est un signal fort dans ce combat

 

En réalité cette mesure que le Tchad vient d’annoncer est en application  depuis un certain temps et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle produit déjà des résultats encourageants. Des sources proches de la police tchadienne annoncent en effet que « depuis l’instauration de cette mesure, des munitions  dissimulées dans des sacs ont été saisies ». Dans la même lancée, « plusieurs personnes suspectées d’appartenir à Boko Haram ont été interpellées ». Cette entrée en scène du Tchad pour le moins  remarquable, est sans doute un signal fort dans ce combat que la communauté internationale  a déclaré à cette bande de mafieux en mal d’inspiration qui se cachent derrière la religion musulmane pour commettre des actes ignobles, dignes d’un autre âge. Il y a quelques jours de cela, l’armée camerounaise avait porté un coup significatif à cette même secte en lui infligeant de lourdes pertes, lors d’affrontements qui se sont produits à sa frontière Nord avec le Nigeria. Les résultats  obtenus par ces deux pays voisins du Nigeria viennent donner tout son sens à l’adage selon lequel « l’union fait la force. » Une preuve d’efficacité dont l’armée nigériane gagnerait à s’inspirer, pour retrouver les malheureuses jeunes filles enlevées et mettre Boko Haram hors d’état de nuire.

Cela dit, il convient néanmoins de nuancer cet enthousiasme suscité par l’engagement de l’armée tchadienne dans la lutte contre ces forces du mal. En effet, au regard  de la nature même des combattants de la secte et de la forme de guerre qu’ils pratiquent, on peut légitimement  se demander si on ne place pas trop d’espoir dans cet engagement des hommes de Idriss Déby. Que peut vraiment le Tchad dans ce type de lutte où l’armée nigériane même, qui aurait dû être à la pointe dans ce combat, semble ne plus savoir où donner de la tête ?

 

Idriss Déby  sait se saisir de toutes les opportunités pour redorer son blason

 

Il faut dire que malgré les résultats obtenus par les hommes de Idriss Déby, la portée de leur contribution est relativement limitée, dans la mesure où jusque-là, il ne s’agit pas de franchir la frontière pour combattre Boko Haram dans son fief du Nord Nigeria. Certes, en contrôlant avec beaucoup plus de rigueur les mouvements à sa frontière avec le Nigeria, N’djamena prive Boko Haram  d’une possible source d’approvisionnement et surtout d’un éventuel point de repli en cas d’attaque par l’armée nigériane. Mais il faut bien reconnaître qu’il en faut bien plus pour décourager ces illuminés qui ont d’ailleurs déjà montré leur capacité de nuisance, en allant frapper au cœur même de la capitale nigériane. Par ailleurs, même si les soldats tchadiens devaient passer de l’autre côté de la frontière, ils ne se trouveraient pas dans une guerre classique comme au Mali contre les islamistes, car avec Boko Haram, il ne s’agit pas d’une guerre conventionnelle mais plutôt d’une guerre dans laquelle l’ennemi est pour ainsi dire, invisible.

Mais au-delà de ces questions purement militaires, il faut même s’interroger sur le niveau véritable de l’engagement du président Déby dans cette campagne anti Boko Haram.

En effet, Idriss Déby, en dictateur avisé, sait se saisir de toutes les opportunités pour redorer son blason. Ainsi, son engagement peut n’être qu’une stratégie pour imposer le silence à Paris au cas où celle-ci voudrait s’intéresser de près à sa gouvernance qui, on le sait, n’est pas   des plus vertueuses, en termes de démocratie sur le continent africain.

Comme on le voit donc, la lutte contre Boko Haram se passe certes sur le terrain militaire, mais elle passe aussi par les voies insondables de la politique. Pour vaincre Boko Haram, il faut une bonne dose de volonté et d’engagement politiques et surtout un engagement à sortir les populations de la misère et du dénuement dans lesquels elles végètent. Car c’est justement les conditions de vie misérables qui constituent le terreau sur lequel  prospèrent les thèses de Boko Haram.

 

Dieudonné MAKIENI


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