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MAIRIE CENTRALE DE OUAGADOUGOU : Une session qui a failli virer au pugilat


Les conseillers municipaux de la ville de Ouagadougou,   élus sous la bannière du Congrès pour la démocratie et  le progrès (CDP) et celle  de l’Union pour le progrès et le changement (UPC) ont empêché, hier 18 janvier 2018, la tenue de la première session du Conseil municipal  au titre de l’année 2018.  Ils ont exigé le retrait pur et simple de 3 des 8 projets  de délibération  inscrits  à l’ordre du jour. Il s’agit du projet de délibération qui  consacre l’augmentation du seuil  des marchés qui peuvent  être attribués   gré à gré, qui  passe  de 50 millions de F CFA à  500 millions de F CFA,  de   celui des marchés  par consultation d’appel d’offres restreint,  qui passe  de 50 millions de F CFA  à 500 millions de F CFA  et  de celui  de  l’approbation des marchés de la commission des marchés qui étaient limités à 100 millions de CFA et  va passer à un milliard de F CFA.   Pour eux, cela est contraire  à la loi  069  et son décret d’application en son article 76   qui limite   le seuil d’approbation pour les collectivités à  250 millions de F CFA.  Faux, a rétorqué le maire qui estime  que  ces conseillers municipaux font l’amalgame. D’ailleurs, dit-il, les projets de délibération incriminés  ont suivi tout le circuit administratif normal.  

La première session du Conseil municipal de la ville de Ouagadougou au titre de l’année 2018  a  failli virer au pugilat, le 18 janvier dernier, à la mairie centrale.  C’est le spectacle que les conseillers municipaux ont donné à voir. En effet, alors que la session était convoquée pour 9h 30mn, c’est finalement autour de 10h que le maire de Ouagadougou, Armand Pierre Béouindé, est entré dans la salle où devait se tenir la rencontre.  Avant d’entrer dans le vif du sujet,  il a invité les secrétaires du jour  à faire l’appel nominatif des conseillers municipaux présents à cet effet. C’est alors que  ceux du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) et ceux de l’Union pour le progrès et le changement (UPC),  jusque-là regroupés hors de la salle, y  ont fait irruption munis  de sifflets.  Ce fut alors une cacophonie générale. Personne n’entendait personne !  Empêchant du coup le maire de se faire entendre. Malgré ses multiples  appels à l’ordre, rien n’y fit ! Peine perdue !  C’était trop tard pour arrêter des conseillers  déchaînés, visiblement   bien préparés pour la circonstance. Le  maire Armand Pierre Béouindé appelle alors  de côté, les présidents du groupe municipal du CDP et celui de l’UPC pour consultation. A leur retour, rien   n’a changé. « Annuler, annuler, annuler »,  scandaient les conseillers frondeurs. Après une pause de quelques  minutes, le maire fut obligé de reconvoquer  les responsables des conseillers en colère. Comme il n’y a pas eu de points d’accord, il a décidé de renvoyer la session   pour le lendemain. « La nuit porte conseil », a-t-il indiqué.   « Le maire de Ouagadougou a introduit un projet de délibération qui  consacre l’augmentation des seuils  en ce qui concerne la commande publique.  Les  marchés qui doivent être attribués   gré à gré passent  de 50 millions de F CFA à 500 millions de F CFA.  Les  marchés  par consultation d’appel d’offres restreint,  passent  de 50  millions de F CFA à 500 millions de CFA.

 

L’approbation des marchés de la commission des marchés qui étaient limités à  100 millions de CFA, va passer à un milliard de F  CFA.  Cela veut dire que jusqu’à un milliard de F CFA, il n’a pas besoin de consulter le Conseil municipal.  Il peut signer et attribuer le marché tout seul. Nous pensons que c’est une  forme de gabegie, c’est une forme de népotisme pour pouvoir  donner des marchés à ses amis.  Ces  genres  de trafics ont conduit actuellement la commune de Ouagadougou  à  devoir une vingtaine de millions de F CFA à des structures.  Des  marchés  qui ont été placés sans aucun contrat. Nous devons dénoncer cela.  Nous avons demandé que  ces délibérations soient retirées parce qu’elles sont  contraires  à la loi, notamment  la  loi 069  et son décret d’application en son article 76   qui dit  que  les seuils d’approbation pour les collectivités ne  doivent pas dépasser 250 millions de F CFA.   C’est à ce titre que nous avons demandé le retrait de ces 3 délibérations », a déploré  Jean Léonard Bouda, président  du Groupe municipal  UPC.   Son avis est partagé par Constant Ouédraogo, président du groupe municipal CDP. Pour lui,  il n’est pas question de permettre au maire d’octroyer des marchés à ses amis en acceptant ces projets de délibérations.    A son avis, l’argument selon lequel la lourdeur administrative est la cause de la non-exécution des marchés publics au profit des populations est un faux débat puisqu’il faut seulement 6 jours pour  convoquer une session de  Conseil municipal.  C’est-à-dire,  3 jours pour  la réunion de commission et 3 jours pour convoquer la session. « Ce n’est pas en 6 jours qu’on va retarder le bonheur des populations », a-t-il indiqué.

 Ces arguments  et agissements ont été déplorés par le bourgmestre de la  ville  de Ouagadougou qui  a estimé  que le conseil qu’il dirige est victime d’une conspiration pour l’empêcher de dérouler son programme comme il se doit.  A l’en croire,    toutes les décisions  qui sont prises par la commune de Ouagadougou, sont discutées  en Conseil municipal  qui  est composé des conseillers de l’opposition et ceux  de la majorité.  Pour lui,   dans une commune comme celle de Ouagadougou, on doit laisser la politique politicienne de côté pour parler développement.   C’est pourquoi  le conseil qu’il dirige, se battra pour  des initiatives  qui permettront  d’améliorer la qualité de vie des populations de la ville de Ouagadougou. Et permettre de lancer, d’exécuter des travaux, en font partie.

 A l’en croire,  pour qu’un marché soit attribué, exécuté et payé, il suit à la lettre,  tous les circuits  de l’Administration publique. D’ailleurs, a-t-il souligné,  la commune de Ouagadougou est soumise au contrôle de l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et lutte contre la corruption (ASCE-LC).

Issa SIGUIRE

ENCADRE : Le maire Armand Béouindé à propos des agissements des conseillers municipaux

«Les marchés de la mairie sont des marchés publics qui sont lancés  selon les textes réglementaires  nationaux.   Quand la commission d’attribution finit son travail,  c’est au tour de l’ordonnateur que je suis, d’approuver.  C’est-à-dire signer le marché après qu’il ait été visé par tout le circuit administratif et financier. J’engage, à ce  moment,  la commune en tant qu’élu pour dire que  ce  marché approuvé peut être exécuté.  Aujourd’hui, ce seuil est  de  100 millions de F CFA.  Les marchés  en  dessous de 100 millions de F CFA, on n’a pas besoin d’aller  au  Conseil municipal pour les approuver.  Les 100  millions de F CFA  sont un seuil qui a été décidé depuis 2003, soit  il y a plus de 15 ans de cela.  A ce moment, le budget de la commune était à 6 milliards de F CFA.  15 ans après, le budget de la commune est à  55 milliards de F CFA.  Les marchés ont évolué et on ne peut pas convoquer les  sessions  du Conseil municipal  tous les jours.  Du coup, vu la densité de la demande des investissements  et l’argent que la commune a  réussi à mobiliser   pour faire les investissements, nous avons demandé que ce seuil soit revu à hauteur  de  500 millions  de F CFA au lieu de 100 millions de F CFA.  Au niveau de l’Etat central, avant, à plus d’un milliard de F CFA, on était obligé d’aller en Conseil des ministres.  Le budget de l’Etat ayant évolué, l’Etat a pris des dispositions. Il faut atteindre 3 milliards de F CFA pour aller en Conseil des ministres.   Je vous donne  un exemple. On a  lancé un appel d’offres depuis 2014, pour construire des écoles. Nous sommes venus trouver cet appel d’offres.  Le marché a été attribué à une entreprise.  L’entreprise a été défaillante. On  a relancé un nouvel appel d’offres.   Mais jusqu’à la date où je vous parle,   c’est maintenant qu’on doit introduire ce marché qui est composé de plusieurs lots,   en conseil pour être approuvé. »

Propos recueillis par Issa SIGUIRE 


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