HomeA la uneMAUVAIS ELEVES DE LA DEMOCRATIE : Blâmés en Occident, acclamés en Afrique

MAUVAIS ELEVES DE LA DEMOCRATIE : Blâmés en Occident, acclamés en Afrique


 

Le sommet des pays les plus industrialisés du monde, qui s’est tenu en Allemagne, l’a été sans la Russie. En effet, le pays de Vladimir Poutine,  accusé par les Occidentaux  de jouer un jeu trouble en Ukraine, n’a pas été invité aux travaux. La Russie, faut-il le rappeler, est suspendue de ce club depuis l’annexion de la Crimée par ses forces militaires. Ainsi, le G8 n’a pas hésité à se transformer en G7, en se délestant d’un membre jugé infréquentable. Certainement que la Russie pourra réintégrer la classe si elle parvient à satisfaire les desiderata des Occidentaux qui estiment qu’elle ne respecte pas les règles de la démocratie. C’est la condition posée pour faire partie de ce groupe de pays dont les décisions pèsent sur la planète terre.

Les Occidentaux ont le mérite et l’élégance d’être cohérents avec eux-mêmes

C’est dire que les Occidentaux tiennent au respect des règles du groupe, des valeurs qu’il incarne. Cette situation contraste avec ce qui a cours sur le continent africain. Comme on a pu le constater récemment au dernier sommet en date de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), ce sont trop souvent les dictateurs qui parviennent à imposer leurs vues aux autres chefs d’Etat. Yaya Jammeh et Faure Gnassingbé n’ont pas voulu de l’harmonisation du principe de la limitation du nombre de mandats présidentiels à deux au maximum, dans l’espace communautaire CEDEAO. Les présidents du Togo et de la Gambie ont ainsi exigé et obtenu l’abandon de cette idée sur laquelle les ministres des Affaires étrangères de l’organisation ouest-africaine avaient trouvé un consensus.

Une limitation du nombre de mandats présidentiels à deux en Afrique, n’aurait pu que constituer un motif de satisfaction si elle avait été consacrée, étant donné que le refus de l’alternance est l’un des motifs essentiels des guerres et autres troubles politiques qui secouent le continent africain. Comment comprendre que le Togo et la Gambie, deux cancres démocratiques en Afrique, aient pesé plus lourd dans la balance, que le reste des 15 Etats membres de la CEDEAO ?

En ce qui concerne la non- invitation de la Russie au sommet des pays les plus industrialisés, les Occidentaux l’assument. Toute communauté humaine  doit avoir des règles de vie. Tout membre doit se plier à ses règles. Certaines règles sont particulièrement importantes pour la survie même de la communauté et de ses idéaux. La violation de ces règles met le fautif au banc de la communauté, pour une durée déterminée ou non. C’est cette règle que les Occidentaux appliquent aujourd’hui à la Russie, dans le cadre de ce sommet des pays les plus industrialisés. Sans qu’il soit besoin   d’entrer dans le débat de fond en ce qui concerne les tensions entre la Russie et l’Occident, on peut dire que les Occidentaux ont au moins le mérite et l’élégance d’être cohérents avec eux-mêmes. Ils refusent de partager leur table avec un membre du groupe qu’ils estiment  être en porte-à-faux avec ses règles.

Hélas, on peut noter que le discours de ces Occidentaux change quand ce n’est pas leur communauté qui souffre de la violation de ses valeurs. C’est ce que laissent croire certaines prises de position sur les crises qui secouent le continent africain et sur lesquelles ils se prononcent.

Le véritable problème réside dans le manque de vertus dans la gouvernance des institutions africaines

Ainsi, alors qu’ils ne tolèrent pas qu’un membre de leur communauté se permette une quelconque liberté vis-à-vis de l’éthique du groupe, ils tiennent un autre discours aux Africains. Par exemple, au Burkina, la suspension de la participation aux prochaines élections de politiciens qui se sont rendus coupables d’atteinte aux valeurs intrinsèques  de la démocratie et du pays, a été critiquée par bon nombre de chancelleries occidentales.   Certains de ces appels à l’inclusion d’anciens dirigeants de pays qui ont pourtant commis des actes portant gravement atteinte aux valeurs et principes de la démocratie, témoignent  d’un certain manque de    considération pour les Africains qui, il faut l’avouer, passent pour être de grands enfants à qui il faut indiquer constamment la voie à suivre.  Mais, le véritable problème réside beaucoup plus dans le manque de vertus dans la gouvernance des institutions africaines. Bien plus que cette hypocrisie des Occidentaux, c’est le manque de cohérence même et de sérieux de bien des organisations africaines  qui pose problème. Contrairement à l’Union européenne par exemple où n’entre pas qui veut, l’Union africaine est ouverte à tous les Etats africains, sans condition d’efforts de bonne gouvernance. Tout le monde y adhère, même les cancres de la démocratie. Et rien n’est fait contre eux, pour les pousser à mieux se comporter. Pire, les mauvais élèves en termes de gouvernance sur le continent africain parviennent à imposer leurs vues à ces  organisations continentales, comme on vient de le constater avec le Togo et la Gambie. Pas question donc de suspendre, encore moins d’exclure quelque chef d’Etat que ce soit, pour non-respect de principes et de valeurs démocratiques.

Les standards démocratiques ne sont aucunement une préoccupation dans ces organisations. C’est dire si pendant que les mauvais élèves de la démocratie sont blâmés en Occident, ils sont chouchoutés voire acclamés en Afrique. Même quand l’UA et ses entités sous-régionales parviennent à adopter des textes juridiques pour promouvoir la gouvernance et sanctionner tous les groupes ou individus qui poseraient des actes de nature à nuire au bien des populations, ces règles restent dans les tiroirs. Comment   peut-il en être autrement si les mauvais élèves en matière de gouvernance s’érigent en chefs de classe et de réfectoire ? Il ne faut pas compter sur des dictateurs pour encourager la bonne gouvernance. Pour eux, ce serait se tirer une balle dans le pied. Par contre, avec eux, les mauvais exemples sont sûrs d’être célébrés. C’est bien là le nœud du problème de la démocratie en Afrique.

« Le Pays »


Comments
  • Si vous n’êtes pas un taré, vous n’irez jamais vous faire évaluer par un ennemi ou mieux celui qui par tous les moyens cherche à vous maintenir dans un état de domination qui lui est favorable.
    Aussi, les peuples africains ont tout compris du cynique jeu que l’occident joue avec ses marionnettes appelés chefs d’état en Afrique.
    Ces marionnettes ne représentent pas les peuples africains, ni de près ni de loin.
    Ils ne sont que des endogènes au service d’exogènes; mais les temps sont à présent révolu et les peuples ont vite compris qui sont leurs dignes représentants, leurs défenseurs contre toutes les agressions extérieures qui depuis la nuit des temps assaillent, accablent cette Afrique qui est maintenant si meurtrie dans sa chaire et dans sa peau.

    9 juin 2015

Leave A Comment