HomeFocusMISE EN GARDE DE KABILA PAR LA CONFERENCE EPISCOPALE :L’Eglise sera-t-elle entendue ?

MISE EN GARDE DE KABILA PAR LA CONFERENCE EPISCOPALE :L’Eglise sera-t-elle entendue ?


S’il y a un mot qui déplait aux princes du Gondwana, c’est bien l’alternance. Un mot qui mobilise les peuples en quête de liberté et de démocratie réelle et qui, en même temps, ne cesse de troubler le sommeil de ces chefs d’Etat qui, hier seulement, juraient la main sur le coeur de respecter jusqu’au bout le jeu de la démocratie. En République démocratique du Congo, le président Kabila semble décidé à son tour, malgré les mises en garde de ses alliés comme les États-Unis, à modifier la Constitution de son pays afin de briguer un troisième mandat.

 

Pour l’Eglise,  2016 doit être l’occasion d’une transition véritablement démocratique

 

Dans ce pays à la longue tradition de guerres civiles et de violences de toutes sortes, une telle décision ne peut que susciter l’inquiétude générale. Du reste, la rue congolaise a déjà commencé à gronder, et l’Opposition promet de ne pas céder et d’utiliser tous les moyens pour contraindre le président à renoncer à tripatouiller la Constitution du pays. Dans ce climat social délétère, fait de lendemains incertains, la Conférence épiscopale des évêques du Congo a fait entendre sa voix, en appelant le président Kabila au strict respect de la Constitution et de ses engagements à ne rien faire qui mette en danger la paix et la sécurité du peuple congolais. Le message des évêques est, on ne peut plus clair : « il n’est pas question de toucher à l’article 220 et aux autres articles verrouillés par la Constitution ». Pour l’Eglise,  l’élection présidentielle de 2016 doit être l’occasion d’une transition véritablement démocratique. Le président Kabila est donc invité à « s’effacer du pouvoir » et à donner la chance à d’autres fils du pays d’apporter leur contribution à l’édification d’un pays prospère et socialement viable. Un message qui se veut en même temps une mise en garde car les évêques préviennent qu’ils utiliseront “tous les moyens appropriés pour sensibiliser la population afin que le peuple congolais ne soit pas pris en otage par des pratiques politiciennes qui sacrifient l’intérêt supérieur de la nation”. Il faut dire d’ailleurs que l’Eglise en RD Congo n’est pas à sa première sortie. En effet, en 2011, la même conférence épiscopale s’était élevée courageusement pour dénoncer le mode de scrutin qui avait permis à Joseph Kabila d’être réélu à la tête du pays. Reste maintenant à voir si cette voix qui est l’une des autorités morales les plus écoutées, sera entendue par le prince Kabila.

 

La boulimie du pouvoir empêche nos princes d’imaginer une autre vie hors des palais

 

Tout nous porte à croire qu’en bon dictateur, Kabila ne prêtera aucune oreille attentive à l’Eglise catholique, pas plus qu’aux ambassadeurs des pays d’Europe et des Etats-Unis qu’il a déjà menacés en des termes à peine voilés, de renvoyer chez eux.

On est bien loin de l’espoir suscité par l’avènement du jeune Kabila, en qui beaucoup voyaient un homme de parole et qui romprait avec les pratiques du passé, qui ont longtemps fait le malheur de ce pays. Personne, en son temps, n’avait osé penser à cette sagesse africaine qui dit que : « la nuit, tous les loups sont roux ». Dans tous les cas, l’Eglise est entièrement dans son rôle, et on ne dira pas un jour que ses bergers n’ont pas sonné l’alerte au moment où le danger menaçait « leurs brebis. » Que Kabila ne tienne pas compte de leur voix, cela ne surprendra personne car, on le sait, la boulimie du pouvoir empêche en général nos princes d’imaginer une autre vie hors des palais faits de verre et de marbre. Ce faisant, ils s’accrochent donc à leur fauteuil, quel que soit le prix à payer par le peuple. Au-delà de l’appel au respect de la Constitution, ce qui est pathétique dans la sortie de l’Eglise catholique, c’est l’invitation faite à tous les Congolais de toutes les catégories sociales à « protéger la Nation congolaise ». La logique « pouvoiriste » des dirigeants congolais appréciera.

 

Dieudonné MAKIENI


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