HomeA la uneMUSEVENI REÇU A L’ELYSEE : Une prime à la dictature

MUSEVENI REÇU A L’ELYSEE : Une prime à la dictature


 

Depuis hier, 19 septembre, le président ougandais, Yoweri Museveni, est l’hôte du président français, François Hollande. Et ce, pour deux jours. Cela, dans le cadre du développement de la coopération entre leurs deux pays, qui ne cesse de prendre du galon. Notamment, en matière de relations commerciales. En témoigne le nombre d’entreprises françaises présentes dans ce pays, qui a pratiquement triplé au cours des deux dernières années, avec la prééminence de grands groupes comme Total. Sur le plan militaire, outre l’expansion de la langue française qui est apprise aux quelque 4 500 militaires ougandais annuellement formés par l’Hexagone, la France a pu apprécier positivement la contribution de l’Ouganda dans la lutte contre les islamistes Shebabs en Somalie voisine, dont Dieu seul sait combien ils donnent du fil à retordre aux Occidentaux dans cette partie du continent, en s’attaquant à leurs intérêts. Sans oublier l’entente cordiale qui caractérise les relations diplomatiques entre les deux pays et la question des énergies renouvelables où Kampala bénéficie du soutien de Paris en termes de fonds et de conseils. Pour toutes ces raisons et bien d’autres, le déplacement de la capitale française valait bien le déroulement du tapis rouge pour le satrape ougandais. Mais, dans une Afrique en pleine mutation démocratique, cette marque de considération du pays des droits de l’Homme à un chef d’Etat comme Yoweri Museveni,  n’est ni plus ni moins qu’une prime à la dictature. En effet, nul n’ignore que l’homme est arrivé à la tête de son pays par un coup d’Etat en 1986. Et depuis lors, il dirige son peuple d’une main de fer, dans un pays où l’opposition traquée et opprimée, a du mal à exister. Ce n’est pas Kizza Besigye, son principal rival, qui dira le contraire. Et pour parachever ce sombre portrait du dictateur ougandais, le septuagénaire bouvier de Kampala s’est fait réélire pour un… cinquième mandat en février dernier, au terme d’un processus électoral jugé « frauduleux » par l’opposition, et au cours duquel l’impartialité de la Commission électorale a été mise en cause par les observateurs de l’Union européenne et du Commonwealth. Comment pouvait-il en être autrement, quand on sait que le maître de Kampala ne s’est pas gêné outre mesure pour dire que  l’Ouganda est « sa bananeraie » qu’il ne saurait quitter au moment où celle-ci commence à porter des fruits ? Qu’un pays comme la France, censée défendre les valeurs universelles des droits de l’homme et de la démocratie, accueille donc sur son sol, ce satrape hors-pair qui ne s’en cache d’ailleurs pas, paraît pour le moins choquant !

Pendant longtemps encore, les démocrates africains auront du mal à comprendre l’attitude de la France, dans ses rapports avec les pays du Sud

C’est véritablement la preuve, pour ceux qui en doutaient encore,  que la France, comme le disait De Gaulle, n’a pas d’amis, mais des intérêts. L’on pourrait même aller plus loin en disant que la France n’a pas d’ennemis, elle n’a que des intérêts. Peu importe la couleur de l’interlocuteur. Les quelques rares triomphes de la démocratie sur la dictature et l’oppression, sur le continent, salués par François Hollande et son appel à en tirer des leçons, n’étaient donc que de la poudre aux yeux ! La triste réalité est que la France ne cessera jamais de s’afficher et de s’accoquiner avec les dictateurs africains qui comptent ! De toute évidence, ce n’est pas demain la veille que la patrie des droits de l’Homme cessera de fricoter avec des fossoyeurs reconnus comme tels, de la démocratie en Afrique, pour peu que leurs intérêts soient préservés par ces derniers. L’on peut donc comprendre pourquoi, malgré les bourrasques et le tollé général, bien des satrapes du continent s’accrochent à tout prix, comme c’est le cas encore aujourd’hui en RD Congo, à leur fauteuil, au-delà de leur mandats constitutionnels, faussant le jeu de la démocratie. Ils savent qu’une fois la tempête passée, ils auront encore grâce aux yeux du grand maître blanc. Finalement, ce sont les peuples africains qui apparaissent comme les dindons de la farce. D’autant plus que nul n’ignore le poids et la portée des visites de cette race de têtes couronnées, à l’Elysée. Ils en repartent ragaillardis, assurés d’être en parfaite phase avec le grand maître blanc.

C’est pourquoi, il y a lieu de croire que pendant longtemps encore, les démocrates africains auront du mal à comprendre l’attitude de la France, dans ses rapports avec les pays du Sud. Elle qui souffle le chaud et le froid avec des dictateurs qui s’amusent pourtant à jouer des tours pendables à la démocratie.

Outélé KEITA


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