HomeA la uneNOBEL DE LA PAIX AU QUARTET TUNISIEN : Un prix qui fera rougir les yeux des dictateurs africains

NOBEL DE LA PAIX AU QUARTET TUNISIEN : Un prix qui fera rougir les yeux des dictateurs africains


 

« Vive la Tunisie, vive la Révolution et vive la démocratie ! », s’est exclamé le quotidien arabophone ‘‘Le Maghreb’’, à la suite de l’attribution, le samedi passé, du Prix Nobel de la paix au quartet du ‘‘dialogue national tunisien’’. Ce bout de phrase traduit la joie partagée en Tunisie. La fierté est légitime dans la mesure où le pays a été celui qui, en 2011, a enclenché le processus de combat contre la dictature et qui a eu pour nom de baptême « La Révolution de jasmin ». La nouvelle de cette distinction, qui fait la fierté du continent africain à travers sa société civile, produit l’effet d’un baume au cœur de tous les démocrates africains sincères. En effet, c’est une première que ce prestigieux prix soit décerné à une société civile – de surcroît africaine –récompensée « pour sa contribution  décisive à la construction d’une démocratie pluraliste à la suite de la Révolution de jasmin de 2011 », selon le comité Nobel. En agissant ainsi, le comité Nobel offre une prime à la démocratie tout en galvanisant tous les combattants de la démocratie qui, au prix de leur vie, et contre vents et marées, se démènent comme de beaux diables pour offrir à leur pays et à l’Afrique, une démocratie qui ne soit pas de façade. Ainsi, on peut croire que de Dakar à Ouagadougou, en passant par Kinshasa, le crépuscule des dictateurs africains a été amorcé, et ce, de façon irréversible. Cela dit, avec ce Nobel décerné au quartet tunisien – composé de syndicats, d’avocats, du patronat et de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme – , l’Afrique en sort grandie en termes d’image. En effet, après Mandela, Hélène Johnson Sirleaf et Desmond Tutu – autres Africains récipiendaires dudit Prix – le continent africain fait à nouveau un pied de nez à ses contempteurs et autres afro pessimistes. Alors, ces derniers comprendront que le continent qu’ils dépeignent comme un océan de désespoir, reste pourtant celui qui regorge d’éminences grises qui travaillent à épurer son visage flétri du fait de clichés dont certains l’ont, à tort, affublé. Il faut cependant déplorer le fait que la Tunisie elle-même se considère comme appartenant plus aux pays du bassin méditerranéen qu’au continent africain.

Il faudra encourager, à l’échelle mondiale, l’institution d’un tel prix

En tout état de cause, avec l’activisme de la société civile burkinabè, qui a occasionné la chute de Blaise Compaoré et permis de faire échouer le récent coup d’Etat du 16 septembre dernier, l’on est en droit de rêver qu’à moyen terme, le Nobel soit décerné à la société civile burkinabè qui le mérite si bien aussi. En effet, celle-ci a mené le même combat que sa consœur tunisienne et son action vient d’être remarquablement saluée par John Kerry, le secrétaire d’Etat américain. Mais comme les faits d’armes de la société civile burkinabè sont encore récents par rapport à ceux du quartet tunisien, on comprend le choix du comité Nobel. Si cette distinction du quartet a suscité un concert d’enthousiasme en Afrique, il faut cependant noter que dans des pays comme les deux Congo, le Burundi, le Rwanda etc… c’est la grise mine  dans les palais présidentiels. Ce Nobel va troubler indubitablement le sommeil des dictateurs africains. Il fera rougir les yeux des satrapes du continent, eux qui mettent plutôt tout en œuvre pour avoir une société civile amorphe, malléable, taillable et corvéable à merci. Et la répression des sociétés civiles burkinabè et sénégalaise en RDC cette année même, achève de convaincre que Joseph Kabila et Sassou Nguesso de Brazzaville, qui échafaudent actuellement un projet de tripatouillage de leur Constitution, ont grincé des dents en apprenant que le Nobel a été empoigné par des chevaliers africains de la démocratie. Le rôle de la société civile étant immense dans la construction démocratique, il faudra encourager, à l’échelle mondiale, l’institution d’un prix qui sera régulièrement décerné aux sociétés civiles qui bataillent pour la démocratie et font tomber des dictateurs indécrottables et impénitents  qui infestent le continent. Car, comme le dit un proverbe africain, « quand les poules de la basse-cour deviennent trop nombreuses autour du mortier et harcèlent les pileuses, celles-ci ne peuvent plus avancer dans leur travail».

Adama KABORE


No Comments

Leave A Comment